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On voit avec plaifir les Tableaux des grands Maitres; on fe fait un honneur de les admirer; mais pour en apprécier le mérite, il faut connoître au moins la théorie de la Peinture. Il en eft de même à proportion des autres Arts. En effet, on ne peut être affuré que l'on raisonne folidement dans ces matieres, fi on ne les a étudiées à fonds, & fi on ne s'eft nourri des principes par lefquels fe font conduits ces hommes rares qu'un génie heureux, & une application continuelle ont élevés aux pre

miers rangs de leur Art. Mais comment apprendre les régles du Théatre? Le voici. Les Anciens qui en ont traité, nous ont laiffé des loix, dont l'obfervation est indispensable, parce qu'ils les ont puifées dans la raison, & dans la nature même ; cependant, fi on y fait attention, l'obfervation de ces loix que les premiers Dramatiques ont fuivies fans les avoir apprises, fuffiroit à peine aujourd'hui pour tirer un Ouvrage de la médiocrité. Et fi d'autres Ecrivains fe font exercés depuis fur le même fujet, ils

n'ont jamais touché le but dans leurs préceptes, & par les détails frivoles dont ils fe font occupés, ils ont bien fait fentir qu'ils ne connoiffoient pas la fource des vraies beautés. Ce n'cft point par des lectures fi infructueufes que les grands Poëtes font arrivés à la perfection de l'Art Dramatiquc; c'eft en examinant les écrits de ceux qui les ont précedés, c'eft en les comparant qu'ils ont appris à difcerner les fentiers qui conduisent à cette perfection, d'avec les routes qui ne peuvent qu'égarer. Voi

là, fi je ne me trompe, le feul moïen de connoître ce qui eft fi communément ignoré; & voilà en même tems l'objet que je me fuis propofé.

Je prétens montrer dans cet Ouvrage, comment en lifant Moliere, on peut apprendre à le fuivre dans la carriere difficile qu'il a parcourue avec tant de gloire & à juger du progrès qu'y font ceux que l'on voit tous les jours s'efforcer de l'atteindre.

Je fuis bien éloigné de penfer que mes réflexions puiffent être de quelque uti

lité aux Auteurs qui ont déja travaillé pour le Théa tre. Les uns font inftruits de tout ce que je pourrois leur dire; & les autres ne montrent que trop, par le goût dans lequel ils compofent, qu'ils cherchent à s'écarter de l'ancienne maniere qui leur paroît trop fimple, & qui ne convenoit, felon eux, qu'à des Spectateurs peu intelligens. Ĉ'est donc uniquement ceux qui aiment le Théatre, qui fuivent les Piéces nouvelles, & qui veulent en juger, que j'ai en vûe. Je leur indiquerai les moïens de ne fe pas mépren

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