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An.1546.

de la con

garderoient. Les Proteftans demanderent du tems pour en deliberer; & répondirent le lendemain, qu'ils ne refufoient pas ce troifiéme prefident pourvû qu'il fût agréé de leurs princes: qu'ils requeroient qu'on leur permit d'achever leurs réponfes, qu'on prît acte de ce qui s'étoit paffé à Ratisbonne, que Jean Piftorius demeurât no- LV. taire, & qu'on ne broüillât point les queftions Rupture enfemble: mais qu'ils ne pouvoient promettre ference. de tenir les chofes fecrettes, parce qu'ils avoient Cochlæns ordre de faire fçavoir à leurs princes l'état de la fupra conference. Les prefidens voïant que les Prote-p. 314. ftans refufoient de fe foûmettre aux ordres de l'empereur, lui écrivirent pour fçavoir fes volontez mais avant que la réponfe fût venue l'électeur de Saxe revoqua fes theologiens; & Bucer partit auffi le vingtiéme de Mars pour aller rendre compte au Lantgrave de la maniere dont tout s'étoit paffé. Ce qui chagrina beaucoup les prefidens qui ne purent arrêter les autres.

ther.

cap. 10.

Pendant qu'on tenoit ces conferences, le LVI. parti Proteftant perdit fon chef dans la perfonne Mort de de Luther, qui mourut à Ilebe fa patrie le dix- Martin Lu buitiéme de Fevrier. On varie beaucoup fur les circonftances de fa mort, mais ce qu'il y a de Sleidan bi Supra lib. x6. vrai, cft qu'étant à Wittemberg où il achevoit 563. fes commentaires fur la Genese, les comtes de Pallavicin. Mansfeld lui écrivirent pour le prier de fe rendre bit conc. à Iflebe fa patrie, afin d'y appaifer quelques dif-lib. 6.Trid. ferends qui étoient entr'eux au fujet du partage Cochleus in de leur fucceffion. Luther n'aïant pas voulu feat. fcript. refufer à la priere de ces feigneurs, fe mit en Lutheri has chemin fur la fin de Janvier, quoiqu'il fut incommodé. Il avoit pris avec lui fes trois fils Jean, Martin & Paul, & quelques amis l'accompagnerent, entr'autres Jufte Jonas miniftre de F'églife de Hall. Les comtes envoïerent au-devant de lui cent treize cavaliers pour l'efcorter. Etant arrivé à Iflebe, il y prêcha plufieurs fois, & y

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Auno.

fit plufieurs autres fonctions. Mais le dix-feptiéme AN.1546. de Fevrier étant attaqué d'un violent mal d'eftó

mac, il prit par le confeil de fes amis quelques poudres dans du vin, & alla fe repofer, en exhortant ceux qui étoient prefens, à prier Dieu que la doctrine de l'évangile fût maintenuë, parce que le Pape & le concile de Trente machinoient, felon lui, des chofes terribles.

:

Il dormit un peu, & s'étant reveillé fur le minuit, il fe plaignit beaucoup de fes douleurs, & fentit que la fin de fa vie étoit proche. Il fit fa priere à fa façon, plein d'affûrance qu'il alloit jouir de la vûë de Dieu pour toute l'éternité, & que perfonne ne pourroit le ravir d'entre fes mains: il lui recommanda fon ame, & mourut affez tranquillement, felon le rapport de ceux qui étoient prefens. Il avoit environ foixante & trois ans, étant né le dixiéme de Novembre 1483. Les comtes de Mansfeld vouloient qu'il fût enterré à Islebe, parce que cette ville étoit fa patrie mais par l'ordre du prince électeur de Saxe, il fut honorablement transporté à Wittemberg, & cinq jours après enterré. Peu de jours avant fa mort il avoit fait connoître fes fentimens fur les Zuingliens, dans cette fameufe lettre qu'il écrivit le vingt-cinquiéme de Janvier, fur ce que ceux de ce parti, qu'il regardoit comme très-éloignez de Dieu, Pavoient appellé malheureux.,, Ils m'ont fait plaifir, dit-il: moi donc le plus malheureux de tous les hom,. mes, je m'eftime heureux d'une feule chose ,,& ne veux que cette beatitude du pfalmifte: Heureux l'homme qui n'a point été dans le confeil des Sacramentaires, & qui n'a jamais ,marché dans la voie des Zuingliens, ni ne s'eft affis dans la chaire de ceux de Zurich.,, Jamais les hiftoriens n'ont plus varié que fur les qualitez de cet herefiarque & les circonstances de fa mort, fuivant le parti dans lequel ils étoient

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en

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engagez. Les Proteftans s'épuifent en éloges fur fon compte; ils le reprefentent comme un hom- AN.1546, me d'un grand genie, d'une grande fermeté d'efprit, d'une memoire heureufe & feconde, & d'une profonde éloquence, foit qu'il parlât, foit qu'il écrivit. Ils en parlent comme d'un homme defintereffé, mais ferme, ami de la pauvreté & ne recherchant que le bien des ames: en un mot, ils en font un faint. Mais quand on eft fans prevention, on fçait ce qu'on doit penfer de ces éloges. Les hiftoriens catholiques conviennent que cet herefiarque avoit de la force dans le genie, de la vehemence dans fes difcours, une éloquence vive & impetueufe qui entraînoit les peuples & les raviffoit, une hardieffe extraordinaire, & un air d'autorité qui faifoit trembler devant lui fes difciples: mais ils ajoûtent qu'il avoit dans l'ame un fond d'orgueil & de prefomption qui lui infpiroit le mépris de tous ceux qui n'entroient pas dans fes fentimens, & cet efprit d'infolence avec lequel il traita outrageufement tous ceux qui s'oppoferent à fon herefie, fans refpe&ter ni roi, ni empereur, ni pape, ni tout ce qu'il y a de plus facré & de plus inviolable fur la terre; incapable de retracter ce qu'il avoit une fois avancé; colere, vindicatif, imperieux, voulant être toûjours le maître, & aimant fort à se diftinguer par la nouveauté de fa doctrine, qu'il vouloit établir à quelque prix que ce fut: enflé Boffuet hift. de fon fçavoir quoique mediocre, mais grand des variat. pour le tems, & trop grand pour fon falut, & 1. art. 32. pour le repos de l'églife: il fe mettoit au-deffus de pag. 42. tous les hommes, & non-feulement de ceux de fon fiècle, mais encore des plus illuftres des fiecles paffez. Ce feroit ici la place d'un catalogue des differens ouvrages de Luther: mais nous en avons affez parlé dans le cours de cette hiftoire.

On continuoit toûjours les congrégations à Trente. Dans celle qui fe tint le dix-huitiéme

tom. I. liv.

LVII. Suite des congregade tions.

Pallav. hift. conc.

ap. 11.

3. & 2.

AN.1546. voit mettre à la tête des decrets, mais l'on ne de Fevrier, on parla encore des titres qu'on de dit rien que ce qui avoit été dit plufieurs fois. Trid. lib. 6. Le cardinal de Monté legat, vint enfuite à un autre article concernant la fuppreffion du decret qu'on avoit réfolu de faire pour joindre ensemble les dogmes de la foi & la réformation de la difcipline. Il dit que le concile n'en fouffriroit aucun préjudice fi l'on executoit en effet ce dont l'on jugeroit à propos de ne point parler; que le decret, de la maniere dont il devoit être exprimé, ne lui avoit jamais paru d'aucun prix, & qu'il n'étoit pas affez honorable pour une fi augufte affemblée d'autant plus qu'il ne diroit pas autre chofe que ce qui étoit expreffément marqué dans la bulle du pape, qui s'expliquoit affez nettement, lorsqu'il difoit que le concile étoit affemblé pour l'extirpation des herefies & le rétablissement de la difcipline. Que fon avis pourtant étoit de faire mention de ces deux articles dans le prochain decret, & de mettre, que pour en traiter avec plus de dignité, on attendroit l'arrivée des prélats abfens, afin d'en conferer avec eux, & de fçavoir leur fentiment; qu'il changeroit toutefois d'avis, fi tous ces grands hommes qui compofoient l'affemblée, avoient d'autres pensées.

Mais l'évêque d'Aftorga nommé Didace Alaba homme d'un efprit vif, & partifan de la liberté, prit la parole, & dit au legat, qu'il n'avoit pas deffein de le contredire, mais qu'il prioit feulement qu'on lui apprît de quelle autorité il vouloit faire des changemens dans un decret arrêté d'un confentement unanime des peres : ajoûta qu'il avoit souvent affifté comme juge en differens tribunaux d'Espagne, aufquels prefidoient les confeillers de l'empereur, & qu'il n'avoit jamais vû qu'aucun des préfidens fe fut attribué l'autorité de changer des édits dont on

il

étoit convenu. Le légat qui craignoit les fuites de cette remontrance, répondit qu'il étoit jufte de fatisfaire le prélat, qu'il le feroit volontiers pour répondre à la politeffe avec laquelle il en agiffoit: Qu'il n'avoit eu deffein de faire que ce qui étoit permis non-feulement à un préfident du concile, mais encore à tous évêques, puifqu'il avoit propofé ce changement avant la publication du decret, en laiffant aux peres la liberté de donner leurs voix; qu'à l'égard de l'étendue de fon autorité, & de celle des autres préfi dens, le tems ne lui pemettoit pas de la faire valoir; mais qu'il pouvoit dire en general que tous les canonistes convenoient que des legats à latere avoient droit de faire tout ce qui eft du reffort du concile & du pape dont ils ont reçû leur pouvoir. On applaudit à la moderation du préfident, & l'on penfa enfuite aux matieres qui devoient être traitées dans la feffion.

AN.1546.

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Le préfident expofa d'abord qu'après avoir LVIII. établi le fymbole comme premier fondement de Le legat la foi, il croïoit que l'ordre exigeoit qu'on s'ap-queftions propofe les pliquât à un autre article, qui étoit l'écriture qu'on doit fainte, dans laquelle il y avoit beaucoup de points examiner. concernant les dogmes controverfez entre les Ca- Pallav.ubi tholiques & les Lutheriens. Qu'il étoit à propos pra cap. d'examiner en premier lieu quels étoient les livres canoniques reçûs, ou qu'on doit recevoir, afin qu'on fçût avec quelles armes il falloit combattre les heretiques, & fur quels fondemens étoit appuïée la foi des catholiques dont plufieurs étoient dans de grandes perplexitez, voïant que les uns adoroient ce que les autres rejettoient ouvertement. On tint donc plufieurs congregations particulieres dans lefquelles on propofa trois chofes à examiner. 1. S'il falloit approuver tous les livres de l'ancien & du nouveau Teftament. 2. Si cette approbation devoit être faite par un nouvel examen. 3. S'il étoit expedient de partager

les

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