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teau, tous les Valets de Dona Théodora accoururent bientôt, armez de fourches & de bâtons. Cependant deux hommes des plus robuftes de la troupe mafqués, après avoir pris entre leurs bras la Maîtreffe & la fuivante, les emportoient vers la chaloupe, malgré leur réfiftance; pendant que les autres faifoient tête aux gens du Château, qui commencérent à les preffer vivement.. Le combat fut long: mais enfin, les hommes mafquez exécutérent heureusement leur entreprife, & regagnérent leur chaloupe en fe battant en retraite. Il étoit tems qu'ils fe retiraffent; car ils n'étoient pas encore tous embarquez, qu'ils virent paroître du côté de Valence quatre où cinq Cavaliers qui piquoient à outrance, & fembloient vouloir venir au fecours de Théodora. A cette vûë, les Raviffeurs fe hâterent fi bien de prendre le large, que l'empreffement des Cavaliers fut inutile.

Ces Cavaliers étoient Don Fadrique & Don Juan. Le premier avoit reçu ce jourlà une lettre, par laquelle on lui mandoit, que l'on avoit apris de bonne part, qu'Alvaro Ponce étoit dans l'Ifle de Majorque,qu'il avoit équipé une efpéce de Tar tane, & qu'avec une vingtaine de gens

qui

qui n'avoient rien à perdre, il fe propofoient d'enlever la Veuve de Cifuentes, la premiere fois qu'elle feroit dans fon Château. Sur cet avis, le Toledan & lui, avec leurs Valets de chambre, étoient partis de Valence fur le champ, pour venir aprendre cet attentat à Dona Théodora. Ils avoient découvert de loin, fur le bord de la mer, un affez grand nombre de perfonnes qui paroiffoient combattre les uns contre les autres, & foupçonnant que ce pouvoit être ce qu'ils craignoient, ils pouffoient leurs chevaux à toute bride, pour 's opofer au projet de Don Alvar. Mais quelque diligence qu'ils puffent faire, ils n'arriverent que pour être témoins de l'enlevement qu'ils vouloient pré

venir.

Pendant ce tems-là, Alvaro Ponce, fier du fuccès de fon audace, s'éloignoit de la côte avec fa proye, & fa chaloupe alloit joindre un petit vaiffeau armé qui l'attendoit en pleine mer. Il n'eft pas poffible de fentir une plus vive douleur, que celle qu'eurent Mendoce & Don Juan. Ils firent mille imprécations contre Don Alvar, & remplirent Fair de plaintes auffi pitoyables que vaines. Tous les Domestiques de Théo

dora,

dora, animez par un fi bel exemple n'épargnérent point les lamentations. Tout le rivage retentiffoit de cris. La fureur, le defefpoir, la défolation regnoient fur ces triftes bords. Le raviffement d'Hélene ne caufa point, dans la Cour de Sparte, une fi grande confter

nation.

CHAPITRE III.

Du Démêlé d'un Poëte Tragique, avec un Auteur Comique.

L'Ecolier ne put s'empêcher d'interrompre le Diable en cet endroit e' Seigneur Afimodée, lui dit-il, il n'y a pas moyen de réfifter à la curiofité que j'ai de fçavoir ce que fignifie une chofe qui attire mon attention, malgré le plaifir que je prens à vous écouter. Je remarque dans une chambre, deux hommes en chemife qui fe tiennent à la gorge & aux cheveux, & plufieurs perfonnes en robe de chambre, qui s'empreffent à les féparer. Aprenez-moi, je vous prie, ce que tout cela veut dire. Le Démon, qui ne cherchoit qu'à le con

tenter

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