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loit travailler aux préparatifs nécef-
faires pour réfifter à un fi redouta- JUSTINIEN.
ble ennemi.

An. $54.

IX.

Dans une pareille conjoncture, Maflacre de il eût été de la prudence de ménager Sotétique. les peuples de ces contrées. Mais la fierté brutale d'un officier attira aux Romains de nouveaux ennemis. Sotérique étoit parti de Conftantinople avec Zathès, pour aller diftribuer les fommes d'argent, qu'on payoit tous les ans aux Utigours, aux Alains & aux autres Barbares voifins de la Lazique. C'étoit un tribut honteux auquel l'Empire s'étoit affujetti, pour acheter le fecours de ces peuples ou du moins leur neutralité dans les guer res contre la Perfe. Les Mifimiens étoient une nation fituée au nord-est de l'Apfilie; quoique fujette au Roi des Lazes, elle avoit fa langue & fes loix particulieres. L'arrivée de Sotérique dans leur pays, leur fit croire qu'il avoit deffein de s'emparer d'une de leurs places, pour établir un > comptoir, où déformais les Barbares viendroient fe faire payer de leurs penfions, fans que les commiflaires Tome XI,

B

Romains euffent la peine d'aller les JUSTINIEN. chercher au-delà du Caucafe, Sur ce An. $54. foupçon bien ou mal fondé, ils lui envoyerent fignifier qu'il eût à s'éloigner de cette place, offrant de lui porter des vivres en tout autre lieu qu'il choifiroit pour fa réfidence. So térique offenfé de la hardieffe d'une nation qu'il méprifoit, fit charger leurs députés de coups de bâton, & les renvoya demi-morts. Enfuite auffi tranquille fur leur reffentiment, que s'il eût châtié fes propres efclaves, il demeura dans le même lieu, & s'endormit la nuit fuivante, fans foupçonner qu'il eût befoin d'aucune précaution. Au retour des députés, les Mifimiens outrés de colere, avoient pris les armes ; ils arrivent au milieu de la nuit, forcent la maifon où logeoit le Commiffaire ; égorgent les premiers domeftiques qu'ils trouvent endormis. Le bruit réveille les autres, qui cherchant en vain leurs armes, chancelant, hurlant au milieu des ténebres, fe heurtent, fe renverfent les uns fur les autres, On maffacre, on affomme, on écrase,

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X.
Les Dolo-

Sotérique eft tué avec fes deux fils. Les Mifimiens dépouillent les morts, pillent les bagages, emportent la caille de l'Empereur. Lorfqu'ils furent retournés chez eux; & que leur fureur se fût refroidie, faisant réflexion fur leur forfait, fur la vengeance qui alloit fuivre, & fur l'impuiffance où ils étoient de s'en garantir, ils réfolurent de fe donner aux Perfes. Nachoragan à la tête de foixante mille hommes, marchoit vers l'ifle mites défaits de Phase, où les généraux Romains par les Sabrs. s'étoient retranchés. Ils avoient laiffé près d'Archéopolis deux mille Sabirs, pour harceler les ennemis pendant leur marche & leur difputer les paffages. Le général Perfe envoya contre ceux-ci trois mille de ces Dolomites, dont j'ai déjà parlé à l'oc cafion du fiége d'Archéopolis; & comme il étoit vain & fanfaron: Allez, leur dit-il, nous délivrer de ces guêpes incommodes; qu'il n'en refte pas une feule pour venir nous piquer par derriere. Les Dolomites partirent à l'entrée de la nuit pour furprendre les Sabirs endormis; un heureux hazard

fit échouer leur deffein. Un Laze que JUSTINIEN. les ennemis avoient forcé de leur ferAn. 554 vir de guide, s'étant échappé à la faveur des ténebres, alla donner l'allarme aux Sabirs qui dormoient profondément. Ils courent auffi-tôt aux armes, fortent du camp, & laiffant l'entrée libre & leurs tentes dreffées, ils fe mettent en embufcade à droite & à gauche. Les Dolomites après s'étre égarés plufieurs fois, arrivent néanmoins avant le jour : ils entrent fans bruit de peur de réveiller les Sabirs, plongent leurs lances & leurs épées dans les tentes & dans les lits. Alors les Sabirs fortant de l'embufcade, fondent fur eux & les taillent en piéces. Dans cette attaque imprévûe, les Dolomites faifis d'épouvan¬ te, ne pouvant fe reconnoître dans l'obscurité, fe laiffent égorger fans réfiftance. Il en refta huit cents fur la place; les autres s'étant échappés avec peine, après avoir rodé autour du camp, trompés par les détours des chemins, revenoient eux-mêmes fe jetter entre les mains des ennemis, Enfin, le jour ayant paru, ils recon

nurent leur route, & s'enfuirent vers le camp des Perfes, les Sabirs les poursuivirent l'épée dans les reins. Babas commandant d'Archéopolis avoit entendu fur la fin de la nuit, de grands cris & un horrible tumulte ; mais comme il en ignoroit la cause, il s'étoit tenu renfermé dans la ville. Au point du jour, voyant fuir les Dolomites, il fe joignit aux Sabirs pour les malfacrer. On en fit un fi grand carnage, qu'à peine en rentrat-il le tiers dans le camp de Nacho

ragan,

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pofitions de

La perte de ces deux mille hommes affligea ce général : les Dolo- Inutiles pro mites étoient les foldats les plus dé- paix. terminés de la Perfe. Il alla camper près des Romains, & invita Martin à une entrevûe. Celui-ci s'étant rendu au camp des Perfes, Nachoragan après l'avoir exhorté à procurer la paix aux deux nations, qui éprouvoient tour à tour les malheurs de la guerre, lui propofa de fe retirer à Trébizonde dans le Pont avec fon armée, tandis que les Perfes refteroient en Lazique, d'où ils pour

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