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tous été taillés en piéces, fi les Romains n'euffent arrêté la fougue des ennemis. Au coucher du foleil les deux armées rentrerent dans leur

camp.

MAURICE. An. 593

Balarath.

17.

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Varame ayant reconnu la fupério- XLIV. rité des ennemis, partit dès le point Bataille du du jour, & alla camper entre des hau- Simocat. 1. 5. teurs inacceffibles à la cavalerie. Les c. 10. 11. Romains le fuivirent, & s'avance-224 225 Theoph. pag. rent jufqu'à la plaine de Ganzac. Va-Evag. l. 6. c. rame pour les fatiguer & ralentir leur Hist. Mifc. 1. ardeur, changea de pofte, & après 17. les avoir promenés par plufieurs dé-Zon. T. 2. pr tours, il s'arrêta enfin près d'une riviere nommée Balarath. Les Romains qui ne le perdoient pas de vûe, vinrent camper dans le voifinage, & dès le lendemain ils fe rangerent en bataille dans la plaine qui bordoit la riviere. Leur armée garda le même ordre qu'elle avoit obfervé fur les bords du Żab. Narsès encouragea fes troupes, & leur donna pour mot du guet les premieres paroles de la falutation Angélique. C'étoient des termes inconnus aux Perfes; & il les avoit choifis exprès, afin que dans

la confufion de la bataille, les Perfes MAURICE. de fon armée puffent fe diftinguer An. 593. de leurs compatriotes qui compo

foient l'armée ennemie. Varame ne pouvant éviter le combat, fit ufage de tout fon fçavoir pour difpofer avantageufement fon armée. Il fe mit à la tête du centre ; il plaça devant sa cavalerie fes éléphans comme autant de tours, & les fit monter par les plus braves de fes foldats. Il y en avoit auffi dans l'armée de Chofroës, & ce Prince escorté de cinq cens cavaliers, exhortoit les Perfes de fon parti à ne pas céder aux Romains le prix de la valeur. Aux cris des Perfes fuccede un affreux filence; on n'entend plus que le fon menaçant des trompettes ; & les deux armées s'approchent avec cette fombre fureur qui annonce le carnage. On ne s'arrêta pas long-temps à la décharge des traits, & bien-tôt on en vint à la mê-lée. Varame croyant trouver moins de réfiftance de la part des Perfes qui faifoient l'aîle gauche de l'armée Romaine, quitta le centre, & fe porta fur fon aîle gauche, à la tête de

MAURICE. An. 593.

laquelle il chargea les troupes de Mébodès. Tout plia devant lui, & les Perfes prêts à tourner le dos, alloient entraîner dans leur fuite le reste de l'armée, lorfque Narsès leur envoyant plufieurs renforts les uns fur les autres, vint à bout de les foutenir. Varame perdant l'efpérance de les enfoncer, retourne au centre & charge Narsès, mais ce général intrépide, méprisant la fureur des éléphans, perce au milieu d'eux, fond fur le centre des ennemis, rompt leurs rangs, renverfe les cavaliers fur les fantaflins; rien ne résiste à la violence de fon attaque, & toute l'armée de Varame fe diffipe comme un tourbillon de pouffiere. Les Romains poursuivent avec ardeur, & bien-tôt toute la plaine eft jonchée de cadavres. Les éléphans fe défendoient encore, & les Perfes montés fur leur dos, ne ceffoient de tirer fur les vainqueurs; on les environne; on abbat les conducteurs, & on livre les éléphans à Chofroës. Six mille Perfes qui s'étoient retirés fur une montagne, furent enveloppés & forcés de

fe rendre. Les Romains les conduiMAURICE. firent au Roi; & ce Prince inhumain An. 593 fe fit un divertiffement cruel de les voir percer à coups de fleches, ou écrafer fous les pieds des éléphans. Ayant appris qu'il y avoit des Turcs entre les prifonniers, il les fit féparer & envoyer à Maurice, comme autant de trophées qui rendoient témoignage de la valeur des Romains. On remarqua qu'ils portoient tous fur le front l'empreinte d'une croix ; Maurice leur en ayant demandé la raifon, ils répondirent que dans un temps de pefte, quelques Chrétiens avoient confeillé aux femmes Turques de marquer ainfi leurs enfans, & qu'en effet ils avoient été préservés de la contagion. Les Romains pillerent le camp de Varame, & fe rendirent maîtres de fes femmes, de fes enfans & des ornemens royaux, dont ils firent préfent à Chofroës. Le lendemain on recueillit les détabli dans fes pouilles, & l'on porta les plus précieuses dans la tente du Roi. De toute l'armée de Varame, il n'étoit échappé que dix mille hommes avec

XLV.

Chofroës ré

Etats.

Varame lui-même. On fit partir pour

détachement,

MAURICE. An. 593.

les poursuivre un gros
fous la conduite de Marin & de Bef
tame, qui revinrent quelques jours
après fans ramener aucun prifonnier.
Tous s'étoient difperfés; & foit que
Varame eût péri dans la fuite, foit qu'il
fe fut fauvé dans quelque pays bar-
bare, on n'en reçut depuis ce temps-là
aucune nouvelle. Les vainqueurs étant
demeurés trois jours campés près
du champ de bataille, l'infection des
cadavres les obligea de s'éloigner.
Ils fe retirerent à Ganzac, où le Roi,
plus enflé de fes profpérités, que s'il
les eût méritées par fa propre va
leur, fit aux officiers Romains un fu-
perbe feftin, accompagné de tous
les inftrumens de mufique en ufage
chez les Perfes, pour célébrer fa
victoire. Dix jours après il congé-
dia les troupes de l'Empire fans les
récompenfer de leurs fervices, autre-
ment que par des paroles ; & emme-
nant avec lui les foldats Perfes, il
prit le chemin de Séleucie. Narsès
en le quittant lui recommanda de ne
jamais oublier qu'il étoit redevable

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