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avoit chargé de tant de malédictions.
Charles de Luxembourg roi de Boheme & des Ro-
mains étendoit de plus en plus fon autorité en Allema-
gne, & y établissoit la paix. Au mois de Décembre de
cette année il vint à Maïence, invité par le clergé &
le peuple qui lui demandoient fa protection contre
Henri de Virnebourg, leur ancien évêque déposé par
pape Clement VI. & Conrad de Falquenftain fon
coadjuteur. Car Henri difputoit toujours le fiége de
Maïence à Gerlac de Nassau à qui le pape l'avoit don-
né. Il accompagnoit alors le roi Charles qui commen-
çoit à s'informer de Pétat de la ville & du diocèfe,
quand Henri mourut fubitement la veille de Noël 24-
du même mois. Alors Conrad par la médiation du roi
tranfigea avec Gerlac qui demeura paifible poffeffeur de
Parchevêché; & ainsi finit le schisme de Maïence qui
avoit duré huit ans.

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p. 160.

L'année fuivante 1354. le jour de fainte Agnès vingt- lidem. Vita I. uniéme de Janvier mourut Parchevêque de Tréves Bau- Mifcell. Baluz. douin de Luxembourg, oncle du roi Charles. Il étoit' dans la foixante-huitième année de fon âge, & avoit gouverné cette église quarante-fix ans avec grande réputation. Son fucceffeur fut Boëmond d'Edersdorf, doyen de la grande églife, élu archevêque par le chapitre.

Le roi Charles fit auffi la paix avec les deux fils de Pempereur Louis de Baviere, Loüis marquis de Brandebourg, & Albert duc de Baviere. Loüis rendit au roi Charles ce que l'on appelloit les enfeignes de l'empire: fçavoir la fainte lance, les clous, une partie de la vraye croix, & quelques autres reliques. Cette lance devoit être la même que le roi Henri POifeleur avoit

Alb. Arg. p. 156.

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Rebdorf. p. 441.

Bailiet inft. paff n. 541.

Sup. liv. Lv. n. 18.

retirée des mains de Rodolfe II. roi de Bourgogne vers AN. 1354. Pan 930. & que l'on prétendoit être la lance du grand Constantin : mais alors, je dis au quatorziéme fiécle, on croyoit que c'étoit celle dont le côté du Sauveur avoit été percé. Le roi Charles avoit promis de remettre dans trois jours ces reliques à Nuremberg ou à Francfort: mais il les fit porter à Prague fa résidence, de quoi la Boheme eut une grande joye.

Rain, 1354.

18.

:

a

Charles pria même le pape Innocent d'inftituer une fête en Phonneur des inftrumens de la paffion : ce que le pape lui accorda par une bulle du treizième de Février, où il dit en fubftance: Charles roi des Romains & de Boheme nous a fait préfenter une requête portant qu'il a en fa garde la fainte lance & un des clous de la croix, comme les ont eus les empereurs fes prédéceffeurs qu'en ces quartiers-là on a grande dévotion à ces reliques, & qu'il s'y fait un grand concours de peuple; c'eft pourquoi il nous a fupplié d'ordonner une fête en leur honneur pour l'Allemagne & la Boheme. Pon célébre A quoi ayant égard nous ordonnons que folemnellement tous les ans dans ces deux Royaumes le vendredi d'après Poctave de Pâques une fête au nom de ces reliques, avec un office propre, qui fera compofé par des prélats & par d'autres docteurs au choix du roi. Et nous accordons à ceux qui le jour de la fête vifiteront Féglife où feront ces reliques, trois ans & trois quarantaines d'indulgence; & cent jours pour la messe & chacune des heures de foffice. Le pape écrivit fur ce fujet une lettre circulaire aux archevêques de Magdebourg, de Prague, de Cologne, de Tréves, de Maïence, de Salfbourg, de Breme, de Riga & à leurs fuffragans. Le roi Charles raffembla à Prague quantité d'autres reliques,

Il intercéda auprès du pape Innocent pour la reconciliation du duc de Baviere Albert, & le pape donna commiffion aux évêques de Virsbourg & de Spire d'abfoudre ce prince de toutes les cenfures qu'il avoit encourues pour avoir fuivi le parti de l'empereur Loüis fon pere. La bulle eft du dernier jour de Mars

1354.

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XXI.

Vita, c. 2.

En ce temps vivoit à Vauvert près de Bruxelles Jean Jean Rusbroc Rufbroc prêtre & chanoine régulier, auteur fameux pour la théologie myftique, & la pratique de Poraison. Il naquit en 1294. & à l'âge de onze ans il commença à étudier fous la conduite d'un chanoine fon parent: mais environ quatre ans après, c'est-à-dire, à quinze ans, ayant à peine bien appris les fondemens de la grammaire, il résolut de renoncer aux études humaines, pour se donner tout entier à celle de la fageffe divine, & à la pratique de la vertu. Il fut ordonné prêtre à l'âge de vingt-quatre ans, & continua de s'adonner à la vie intérieure, parlant fi peu, & négligeant tellement fon extérieur qu'il fe rendoit méprisable aux gens du monde.

Il avoit déja 60. ans; & avoit donné au public quelques livres de fpiritualité fort eftimez, quand il se retira à Vauvert près de Bruxelles dans la forêt de Soignies, où étoit une communauté de chanoines réguliers. Rufbroc y fit profeffion, & quelques temps après il fut élu prieur. En cet état il reçut une vifite de Gerard le Grand, docteur & favant théologien qui demeuroit à Déventer, & avoit fondé la congrégation de Videsheim. La réputation de Rufbroc Pexcita à le venir voir; & Pavertit que plusieurs étoient scandalifez de ses écrits, & en prenoient occafion de le calomnier; à quoi Ruf

с.б.

c. 8,

broc répondit : Maître Gerard, foyez fur que je n'ai pas AN. 1354. mis un mot dans mes écrits que par le mouvement du Saint-Esprit, & en la présence finguliere de la fainte

6.5.

G. 11.

Trinité.

Sa maniere d'écrire étoit que quand il fe croyoit éclairé par la grace, il fe retiroit dans la forêt & s'y cachoit, & c'est ainfi qu'il compofa tous fes ouvrages. Quelquefois il étoit plufieurs femaines fans écrire : & quand il recommençoit, quoiqu'il eût oublié ce qu'il avoit écrit, son discours étoit auffi fuivi que s'il l'avoit compofé tout en un jour. Comme il fçavoit peu de latin, il écrivoit en fa langue vulgaire, c'eft-à-dire, en Flamand ou bas Allemand; mais tout fut traduit depuis en latin, & c'est ainfi que nous l'avons. Sa réputation lui attira plufieurs perfonnes nobles & puiffantes de Pun & de Pautre fexe qui venoient le confulter, même de plufieurs docteurs: il en venoit de Strasbourg, de Basle, & d'autres villes du Rhein.

Le plus célébre fut Jean Taulere de l'Ordre des freres Prêcheurs, docteur en théologie, fameux pour fa science & pour fa vertu. Il venoit voir fouvent Rusbroc; il Pavoit en grande vénération, & profita beaucoup auprès de lui pour la fcience de la vie intérieure & contemplative, comme on voit par fes écrits. Car encore que Taulere fut bien plus grand théologien que Rufbroc, il lui étoit inférieur quant à la contemplation, à laquelle Rufbroc s'adonna dès fa premiere jeunefSpond. 1355. n. fe, au lieu que Taulere ne s'y appliqua qu'à cinRain. n. 38. quante ans, & mourut peu d'années après., fçavoir en

17.

XXII.

1355.

Matthieu Can L'empereur Jean Cantacuzene ayant appris la protacuzene empe- motion d'Innocent VI. au pontificat, lui envoya un

reur.

lef

22.

Rain.

1353.8

frere Prêcheur nommé Jean, avec des lettres, par quelles il lui témoignoit fon défir pour la réunion des AN. 1354. églifes. Le pape Pexhorte par fa réponse à demeurer ferme dans cette bonne réfolution, & lui promet, s'il l'exécute, toute forte de fecours spirituels & temporels. C'étoit de ces derniers qu'il s'agiffoit principalement : car Cantacuzene étoit fort preffe par les Turcs & par le jeune empereur Paleologue. La lettre du eft du 27. d'Octobre 1353.

pape

Cantacuzene crut alors fe fortifier en faifant reconnoître empereur Matthieu fon fils aîné, il consulta sur ce point le patriarche Callifte, qui ne voulut pas s'expliquer, & fe retira du palais patriarcal au monaftere de faint Mamas qui lui appartenoit. De-là il envoya dire à l'empereur Cantacuzene auquel il avoit promis d'aller rendre réponse: Je n'irai ni à votre palais ni au mien, fi vous ne me faites ferment de ne point déclarer votre fils Matthieu. L'empereur ne laissa pas de le faire prétendant y être forcé par les grands; & fit prendre à fon fils les ornemens impériaux, fçavoir les fouliers rouges & le bonnet orné de perles & de pierreries. Mais il étoit de toute néceffité qu'il fût aufli facré selon la coûtume : c'eft pourquoi Cantacuzene fit venir autant qu'il put d'évêques de Thrace, & les ayant affemblez dans le palais impérial avec ceux qui fe trouvoient déja à Conftantinople, il leur demanda à tous enfemble ce qu'il falloit faire à l'égard du patriarche Callifte. Ils répondirent de concert qu'il falloit envoyer vers lui, & Pinviter à reprendre fon fiége, puisque perfonne ne Paccufoit de rien.

L'empereur y envoya deux évêques Daniel d'Eno & Jofeph de Tenedo, avec deux des premiers du

Cantac. liv. iv.

c. 34.35.

c. 36.

c. 37.

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