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AN. 1390.

LV.

bénéfices.

dans la Romagne, d'informer fommairement contre ces impofteurs, leur faire rendre compte, & mettre en prison ceux qui fe trouveroient coupables. La lettre est du dix-neuviéme d'Octobre. Le pape donna un ordre pareil à Beltranieu, évêque de Come; à Gérard, évêque de Ratzebourg; à Nicolas de Messieu, à Gérard de Hildesheim & à d'autres.

pays

en

Dès le commencement de fon pontificat, Boniface Diftribution de fit publier par tout le de fon obedience, qu'il acFroiff. 4. c. 10. corderoit des graces à tous les clercs qui viendroient Rome, ce qui fit que plufieurs fe mirent en chemin : mais quand ils s'approcherent de la Marche d'Ancone & de la Romagne, ils fe trouverent en grand péril; car Bernard de la Sale qui gardoit cette frontiere pour le pape Clement, les fit gueter par les chemins, forte que plufieurs furent pris & plufieurs tués. Ceux qui arrivoient à Rome étoient examinés, mais on commençoit par en tirer de Pargent: enfuite quand on fit la diftribution des graces à tous les impétrans, les pauvres clercs furent mis les derniers fur les rôles, en forte que leurs graces devenoient presque inutiles; car la feconde & la troifiéme année le pape signa plusieurs rôles fous la date de la premiere, en forte que ceux qui étoient compris dans ces rôles, portoient préjudice aux graces que les pauvres avoient obtenues la premiere

Gobel. c. 84. P. 274.

LVI.

pofteur.

Labour. liv. IX.

année.

Le pape Boniface délivra un impofteur Grec, nommé Paul Tigrin im- Paul Tigrin, qu'Urbain avoit mis en prison. Il étoit né Juv. Uf. p. 78. de pauvres parens dans une île où il s'embarqua avec c. 10. ms. f. 78. quelques autres d'intelligence avec lui, fe difant paBen, p. 305. Striarche de Conftantinople. Il vint premierement en Pîle de Chipre, dont le roi fe fit couronner de sa main,

Felib. hift.

pape

& lui donna trente mille florins d'or. On venoit de tous côtés lui demander, comme au pape, des graces qu'il accordoit facilement en les faifant bien payer, de forte qu'il amaffa beaucoup d'argent. Il vint à Rome, prétendant y faire le même perfonnage; mais le Urbain le fit examiner, & il furvint des gens qui lui foûtinrent en face, que la même année ils avoient vû en Grece le véritable patriarche de Conftantinople. Etant ainfi convaincu d'impofture, il fut mis en prifon par ordre d'Urbain VI. qui confifqua fon trésor, & laissa Paul en cet état le refte de fon pontificat.

Mais au couronnement de Boniface IX. il fut mis en liberté avec les autres prifonniers, fuivant la coûtume. Alors il vint en Savoye; & fçachant que le vrai patriarche de Conftantinople étoit parent du comte, il alla trouver ce prince, difant que c'étoit lui, & lui montrant une généalogie à laquelle il fut trompé : ainsi il reçut très-bien le prétendu patriarche, & lui donna du fien abondamment. Il le fit habiller felon fa dignité, & Penvoya avec douze chevaux à Avignon, le recommandant au pape Clement comme fon parent, & patriarche de Conftantinople. Clement y fut auffi trompé, & Paul lui raconta les maux qu'Urbain lui avoit fait fouffrir à Rome, parce que, dit-il, je prenois votre parti, & lui représentois qu'il étoit obligé en conscience à vous reconnoître pour vrai pape. Clement lui fit de grandes largeffes.

Il vint enfuite vifiter le roi de France, qui le reçut honorablement & lui fit très-bon vifage. Le faux patriarche témoignoit à l'extérieur une grande dévotion, vifitant volontiers les églises & les monafteres. Il vint entr'autres à celui de faint Denis, où il dit à Pabbé &

AN. 1390.

aux moines: Je fçai que vous avez le corps de votre AN. 1390. Saint, mais j'en ai encore de belles choses, comme fa ceinture, & plusieurs bons livres qu'on n'a pas en ces pays-ci: je vous les ferai avoir fi vous me voulez donner deux de vos religieux. On les lui donna: il les mena jufqu'à la mer où il s'embarqua à la dérobée avec ses richeffes, & les laiffa. Ils le voulurent fuivre & allerent jusqu'à Rome, où ils apprirent que ce n'étoit qu'un imposteur, & s'en revinrent.

LVII.

Exactions de Bo

niface.

n. 18.

Cependant le pape Boniface voulant aider au roi Ladillas à foutenir la guerre contre Louis d'Anjou, Rain. n. 17. manda au cardinal de Florence Ange Acciaioli fon légat, de contraindre les eccléfiaftiques du royaume de Naples comme les laïques, à payer un florin d'or par feu durant cette guerre, fuivant Pordonnance de Ladislas. La lettre du pape eft du vingt-deuxième de Novembre 1390. Il donna auffi commiffion à deux autres cardinaux d'engager & d'aliéner plufieurs terres des églifes & des monafteres, & de plus d'engager à des nobles plufieurs villes & plufieurs châteaux appartenans à Péglise Romaine, dont la plûpart de ces nobles s'étoient déja mis en poffeffion, comme gouverneurs. Le pape leur en accorda donc la jouiffance pour un certain temps, comme de dix ou douze ans, à titre de vicariat, & à la charge d'une redevance annuelle de tant de florins d'or, & d'un certain nombre de gens de guerre entretenus à leurs dépens pour le fervice de Péglife.

LVIII.

Ordonnance

En Angleterre le roi Richard II. tint un parlement fur les bénéfices à Londres le lundi après la faint Hilaire, c'est-à-dire, d'Angleterre. le feiziéme de Janvier 1391. où entr'autres chofes il fut ordonné que déformais personne ne passeroit la mer

Valfing. p. 343.

pour

AN. 1391.

Rain. 1391..

obtenir des provifions de bénéfices, fous peine d'être arrêté & emprifonné, comme rebelle au roi. Le pape Boniface ayant appris cette ordonnance, s'en 19. plaignit par une bulle, où il dit : Quelques féditieux ont fuggéré à notre cher fils le roi Richard de renouveller Pordonnance du roi Edouard, fon ayeul, conforme à celle d'un autre Edouard, & portant ce qui fuit: Les élections des évêchés & des autres dignités seront maintenues en Angleterre, comme elles ont été accordées par nos ancêtres & par ceux des autres fondateurs. Les prélats & les autres ecclefiaftiques qui ont droit de patronage fur quelque bénéfice, en auront la collation libre, comme ont eu leurs auteurs; & en cas que la cour de Rome fît une réserve ou donnât une provifion de quelque évêché, dignité ou autre bénéfice pour empêcher les élections, collations ou préfentations, le roi d'Angleterre auroit pour cette fois la collation des évêchés ou autres dignités électives, qui feroient de fon patronage.

Après un long dénombrement de plufieurs cas où les réferves & les collations de la cour de Rome font reftraintes, le pape ajoûte: Le roi Richard ainfi circonvenu, a ordonné dans fon parlement Pexécution de cette ancienne ordonnance; & què fi quelqu'un y contrevenoit en acceptant quelque bénéfice Outre-mer, entens en cour de Rome, il demeureroit exilé & banni à perpétuité, & ses terres acquises au roi par forfaiture; & encoureroit la même peine dans les fept femaines après fon retour en Angleterre. Enfin ce ftatut portoit défense à toute perfonne & au roi même, d'envoyer en cour de Rome pour obtenir aucune grace au

contraire.

n. 17.

Le pape déclare qu'il eft fenfiblement affligé de cette AN. 1391. ordonnance, & ajoûte: Il eft plus clair que le jour que les laïques, quelques pieux qu'ils foient, n'ont aucun pouvoir de disposer des biens eccléfiaftiques; & quand même ils ordonnent quelque chose en faveur de Péglise & à fon avantage, il n'eft d'aucune valeur : une telle conftitution eft réputée par les peres, deftruction & usurpation de la jurisdiction d'autrui.

Valfing, p. 344.

Le pape Boniface eût eu peine à montrer de telles maximes dans les peres de Péglife, & les loix des empereurs Chrétiens le démentent expreffément. Il conclut en déclarant nulles les ordonnances dont il s'agit, tant celle du roi Richard que des deux Edouards, comme notoirement contraires à la liberté eccléfiaftique & à Péglise Romaine; & ordonne à tous ceux qui fe font emparés de quelques bénéfices, fous prétexte de ces ordonnances, de les quitter dans deux mois avec restitution de fruits. La bulle eft du quatrième de Février

1391.

Soit qu'elle ne fût pas encore arrivée en Angleterre, ou qu'on n'y eût point d'égard, le roi Richard fit en ce temps-là faire une proclamation à Londres, portant que tous les bénéficiers qui étoient en cour de Rome, revinffent en Angleterre vers la S. Nicolas, c'est-à-dire, au commencement de Décembre, fous peine de perdre tous leurs bénéfices; & que ceux qui n'en avoient pas encore, revinffent auffi fous peine de forfaiture. Les Rain. n. 19. Anglois frappés de cette nouvelle comme d'un tonnerre, abandonnerent la cour de Rome, & s'enfuirent chez eux. Le pape fut allarmé lui-même, & envoya en diligence un nonce en Angleterre ; fçavoir, Nicolas abbé de Nonantule, qu'il recommanda aux évêques

du

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