Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Cependant la Sicile étoit en interdit depuis la fentence prononcée contre Pierre d'Arragon par les nonces du Benoît XII. en 1339. ce qui donna occapape fion au pape Clement de réserver à fa disposition tous les principaux bénéfices électifs qui vaquoient alors, & qui vaqueroient dans cette ifle, fçavoir les évêchez, les églifes collégiales, les abbayes & les prieurez conventuels & électifs réguliers ou féculiers. Cette réserve devoit durer deux ans depuis le premier de Juin 1343où finiffoit celle qu'avoit fait Jean XXII. & ne s'étendoit point aux monafteres de filles. La bulle de Clement VI. eft du cinquiéme de Mai de la même année.

Le pape voulant faire élire un empereur d'Allemagne fans attendre la mort de Louis de Baviere, reprit les procédures de Jean XXII. & le jeudi faint dixieme d'Avril il publia une longue bulle, où il reprend tout ce qui s'étoit paffé depuis la mort de Pempereur Henri de Luxembourg, & tous les reproches contre Louis de Baviere; puis il conclut ainfi : Ne pouvant donc diffimuler plus long-temps ses crimes continués & multipliés, & nous empêcher de les punir : nous l'admoneftons de fe retirer dans trois mois de l'administration de l'Empire, de quitter le titre de roi, d'empereur ou de toute autre dignité, & de venir en perfonne se foumettre à nos ordres, pour réparer tant de crimes & tant de torts faits à l'églife; lui déclarant qu'à faute de le faire, nous procéderons contre lui fuivant l'énormité de fes actions. Le pape envoya cette bulle à tous les archevêques, accompagnée d'une lettre en date du douziéme d'Avril, par laquelle il leur ordonne d'en envoyer des copies à leurs fuffragans, afin qu'elle foir

[blocks in formation]

AN. 1343. Alb. Argent. p. 133.

XVIII. Collation du

terre.

Sup. n. 12.

publiée folemnellement dans toutes les églises.

Le pape fit afficher cette monition aux portes de l'églife d'Avignon, & pendant les trois mois de terme Louis de Baviere envoya plufieurs fois des agens au pape & au roi de France, dont il le croyoit toujours dépendant, & ne tenoit pas pour fincere l'interceffion du roi auprès du pape. Cette négociation fut fans fruit, & le terme de la monition étant échu, c'eft-à-dire au bout de trois mois, le pape tenant un consistoire, fit crier en Latin & en Allemand fi quelqu'un se présentoit pour Louis de Baviere perfonne ne comparut, & & le pape le déclara contumax. Mais Loüis ayant écrit au roi de France: Si le pape fait quelque procédure contre moi, je m'en prendrai à vous, ce prince écrivit au pape de ne point paffer outre.

:

Entre les cardinaux que le pape avoit faits l'année pape en Angle- précédente, il y en eut deux aufquels il donna des bénéfices en Angleterre; fçavoir Aimar Robert du titre de fainte Anaftafie, & Geraud de la Garde du titre de fainte, Sabine, tous deux Limousins. Ils envoyerent Th. Valfing. p. 163. leurs procureurs en Angleterre pour obtenir Peffet de ces graces : mais les officiers du roi les empêcherent d'exécuter leur commiffion, & les ayant mis en prison, leschafferent honteusement du royaume. Le pape l'ayant appris, écrivit ainfi au roi d'Angleterre Edouard III. Depuis long-temps nous avons jugé qu'après la création des nouveaux cardinaux, il étoit convenable de leur donner de quoi fubfifter avec bienféance felon leur état, puifqu'ils partagent avec nous le travail des affaires de l'églife; & tout bien confidéré, nous n'avons point trouvé de moyens moins à charge aux églifes, que de pourvoir ces cardinaux de bénéfices déja

vacans,

vacans, ou qui viendront à vaquer en divers pays, jusqu'à une certaine fomme. C'eft ainfi que nous avons pourvû les deux cardinaux, Aimard & Geraud natifs de votre duché d'Aquitaine, de bénéfices fituez dans votre royaume.

AN. 1343.

Le pape raconte ensuite la maniere dont les agens des deux cardinaux ont été traitez, & ajoûte : Il eft certain que nous avons accordé des graces femblables aux autres nouveaux cardinaux dans prefque tous les pays Catholiques, fans avoir oüi parler d'aucune rébellion; & nous croyons qu'il eft de votre honneur & de votre intérêt que les cardinaux naturellement affectionnez à votre service, poffédent des bénéfices dans vos états : & Dieu veüille que ceux qui font élevez par les bienfaits de l'église Romaine ne foient pas les auteurs de ces violences, comme on le croit vraisemblablement. Il finit en priant le roi de faire réparer ce qui a été fait contre les agens des cardinaux, & de leur accorder fa protection pour les affaires dont ils font chargez. La lettre eft datée du vingt-huitiéme d'Août Valsing. p. 191.

1343•

Le roi répondit un mois après par une lettre où il dit: Il eft notoire que dès la naiffance de l'églife les rois nos prédéceffeurs, & les feigneurs d'Angleterre ont fondé les églises, & leur ont donné des biens & des priviléges, y établissant de dignes miniftres pour l'inftruction des peuples & la propagation de la foi. Mais il est trifte que par les provisions qui viennent de Rome, ces biens tombent aux mains de perfonnes indignes principalement d'étrangers qui ne résident point dans leurs bénéfices, ne connoiffent point leurs troupeaux, & n'en entendent pas la langue : ne cherchant uni

Tome XX.

F

Rain. n. 99.

quement que le profit temporel. Ainfi le service divin AN. 1343. eft diminué, le foin des ames négligé, l'hospitalité ceffe, les droits des églifes fe perdent, les bâtimens tombent en ruine. Cependant les hommes doctes & vertueux du royaume qui pourroient utilement conduire les ames, & fervir dans nos conseils, abandonnent leurs études, désespérant d'obtenir des bénéfices. D'ailleurs le droit de patronage que nous & nos fujets avons fur les bénéfices, eft diminué, notre jurifdiction eft fruftrée, & les droits de notre couronne dépériffent honteufement: les richesses de notre royaume passent à des étrangers, pour ne pas dire à nos ennemis : peut-être par un deffein fecret d'affoiblir notre royaume, en abaissant son clergé, & épuifant fes richeffes. Tous ces inconvéniens ont été depuis peu exposez en notre présence dans notre parlement, auquel ils ont paru intolérables, & il nous a prié instamment, & tout d'une voix d'y apporter remede. Nous vous prions donc de permettre que les élections libres ayent lieu dans les églises cathédrales & dans les autres d'autant plus qu'autrefois nos ancêtres conféroient ces églifes par le droit de leur couronne, & depuis à la priere du faint fiege ils accorderent les élections aux chapitres fous certaines conditions, & cette conceffion fut confirmée par le faint fiége. La lettre est du vingt-fixiéme de Septembre.

Elle contient deux faits importans contraires à la vérité, ce qui étoit l'effet de fignorance du temps. Le premier que les rois d'Angleterre fuffent les fondateurs de toutes les églifes de leurs royaumes; puisqu'il est certain que fous lempire Romain la religion étoit établie dans la grande Bretagne, & les évêchez fondez,

pour la plûpart avant l'entrée des Anglois - Saxons & des autres barbares. Vous Pavez vû dans le cours de cette histoire. L'autre fait faux, eft que les rois euffent originairement le droit de conférer les évêchés, & que les elections fe fuffent introduites par leur permiffion. Vous avez vû que fous lempire Romain les évêques étoient choifis & ordonnez par le concile de la province, fans que l'empereur ni fes officiers s'en mêlaffent. Après Pétablissement des peuples Barbares, leurs rois fe rendoient quelquefois maîtres des élections, mais quant à celles des chapitres, elles s'introduifirent infenfiblement, & je les trouve établis dès le douzième fiécle, sans en avoir pû remarquer le commence

ment.

[ocr errors]

AN. 1344

Sup. liv. LXVL

n. 47.

XIX.

Nouveaux car

870.

n. 4.

Le vingt-feptiéme de Février 1344. le pape Clement fit deux cardinaux, c'étoit le famedi des dinaux. quatre-temps Bal. de carême. Le premier cardinal fut Pierre Bertrandi levit. p. 249° jeune, neveu de celui qui s'étoit fignalé en la difpute Sup. liv. xcvi. avec Pierre de Cunieres, & qui vivoit encore. Sa fœur Marguerite Bertrandi époufa Barthelemi de Colombiere au diocese de Vienne, & de leur mariage nâquit le jeune Pierre, Benoît XII. fit chanoine que le pape d'Autun: puis il fut évêque de Nevers, & enfuite d'Arras en 1339. Le pape Clement le fit cardinal prêtre du titre de fainte Sufane, il accorda fa promotion aux prieres de la reine de France Jeanne de Bourgagne. pape l'avoüa lui-même dans le difcours qu'il Bal. p. 869. fit aux cardinaux en ce confiftoire. Dieu m'eft témoin, dit-il, que jeudi je fongeois auffi peu à donner les ordres, qu'à la chofe du monde la moins vraisemblable: mais le foir fort tard il me vint des lettres de la reine de France, qui dès le commencement de ma création,

Le

« AnteriorContinuar »