Imágenes de páginas
PDF
EPUB

AN. 1339.

que

donc Pon envoye du fecours en ces quartiers-là, avant que vos légats y aillent, ou du moins en mêmetemps: parce que les Grecs voyant votre secours déja venu, feront mieux difpofez à écouter vos légats; & lempereur pourra dire au patriarche & aux autres prélats : Voyez comme les Latins font bonnes gens & recherchent notre amitié, non feulement par les belles paroles, mais par les effets: nous devons donc auffi chercher à nous réunir avec eux. Secondement tant que l'empereur sera en guerre avec les Turcs, il ne pourra affembler les quatre patriarches & les autres évêques, ni assister lui-mê

me au concile.

Quant à ce que difent quelques-uns d'entre vous: Il faut que les Grecs commencent par fe réunir avec nous & alors nous marcherons contre les Turcs: Je ne puis être de leur avis pour plufieurs raisons. Premierement les Turcs n'attaquent pas feulement les Grecs, mais encore les Armeniens, les Cypriots & les Rodiens, qui nous font foûmis, & tous les infulaires : ainfi vous devriez envoyer du secours au moins pour eux. Les Turcs n'attaquent pas les Grecs comme Grecs ni comme divifez d'avec vous, mais comme Chrétiens: ainfi marchant contre les Turcs, vous n'irez pas proprement au secours des Grecs, mais de la religion. Tant que l'empire Grec fubfiftera il vous fera très-facile d'abattre les Turcs vous joignant à l'empereur Grec : parce que les Grecs connoiffent la maniere dont les Turcs font la guerre. Dans toutes les terres des Turcs & des Sarrafins il y a grand nombre de Chrétiens & de renegats fort affectionnés à la domination des Grecs. Mais s'il arrivoit, ce qu'à Dieu ne plaise, que les Turcs renverfaffent l'empire des Grecs, ils deviendroient fi forts, qu'il vous feroit très

difficile de les abattre. Agiffez donc maintenant, fans attendre le temps où vous songerez, non pas à les attaquer, mais à vous défendre d'eux.

Si les Turcs venoient vous prier de vous joindre à eux pour détruire les Tartares & les Sarrafins, vous les écouteriez : parce qu'il vous feroit plus avantageux de faire la guerre avec les Turcs, les Tartares & les Sarrafins, que de les attaquer tous trois vous feuls. Il en eft de même de vous joindre aux Grecs, plutôt que d'attaquer seuls les Grecs & les Turcs. Sachez encore & certainement, que ce n'est tant la difference des dogmes qui aliene pas les Grecs de vous, que la haine qu'ils ont conçue, à cause des grands maux que les Latins leur ont faits en divers temps & leur font encore tous les jours, & l'union ne se peut faire, si on ne commence par faire ceffer cette haine par quelque grand bienfait de votre part : fans quoi ils ne voudront pas même vous écouter. Sachez enfin que ce n'est pas le peuple des Grecs qui m'a envoyé vers vous, mais l'empereur feul & fecretement : en forte que ne lui envoye auparavant du fecours, il n'ofera declarer qu'il desire l'union avec vous.

fi.on

AN. 1339

Le pape & les cardinaux ayant vû & foigneufement examiné cette proposition de Barlaam répondirent : Il n'eft pas à propos de paroître maintenant révoquer en doute ce qui a été décidé folemnellement au concile d'Ephefe, en ceux de Tolede & de Lyon & en plufieurs autres, que le S. Efprit procede du Pere & du Fils comme d'un feul principe. Ce que les Grecs ont professé expreffément du temps du pape Hormifda, de Jean patriarche de C. P. & de l'empereur Justin; & long-temps après un autre patriarche Jean & Pempereur Michel Paleologue, par la lettre fynodique envoyée au pape Jean XXI.

n. 22. 56.

To. 5. Conc. p.

1000.

Sup. liv. xxxiv.

Il faut expliquer ces citations. Le concile d'Ephese ne AN. 1339- traita directement que du myftere de l'Incarnation contre Pheresie de Neftorius; & ce ne fut qu'incidemment Sup. liv. xxv. qu'on y parla de la proceffion du S. Efprit à Poccafion Lequien differt. du neuviéme anathême de faint Cyrille & du faux fym1. Damafe. bole dénoncé par le prêtre Charifius. On y voit toutefois affez clairement que faint Cyrille & tout le concile n. 56. liv. XLV. croioient que le S. Efprit procede du Fils. Le concile de Tolede, dont il eft ici parlé, eft le troifiéme tenu Pan 589. où fe trouve pour la premiere fois Paddition Filioque. Quant au pape Hormifda nous avons une lettre de lui écrite à l'empereur Juftin en 521. où il dit expressément : Il eft propre du S. Efprit de proceder du Pere & du Fils, fans que les Grecs fe foient plaints alors de cette expreffion. Le concile de Lyon eft celui de Pan 1274. où le fit la réunion procurée par Michel Paleologue.

n. 48.

To. 4. Conc. p. 1553. B.

Sup. liv. LXXXVI.

n. 44.

Rain. n. 26.

Les envoyez de l'empereur Andronic ayant vû la réponse du pape dirent: Si on ne peut perfuader aux Grecs de profeffer Particle du fymbole comme les Latins, que chacun demeure dans fa créance, fans préjudice de Punion. On leur répondit : Cela ne fe peut fouffrir. L'églife catholique n'a qu'une feule créance ; & ne résistant pas à Perreur, elle fembleroit Papprouver. Toutefois le pape voulant toujours faciliter l'union, dit aux envoyez : Que votre patriarche & votre empereur assemblent en concile les prétendus patriarches d'Alexandrie, d'Antioche & de Jerufalem avec leurs évêques, leur clergé & les principaux laïques; & que fon choififfe quelques favans pour les envoyer ici en Occident avec des pouvoirs fuffifans: afin qu'ils conferent avec des commiffaires députez par le faint Siege, non par maniere de difpute, mais pour Pinftruction des Grecs. Car la convocation d'un

[ocr errors]

AN. 1339.

concile general ne paroît pas convenable, principalement en ce temps de trouble & de guerre, à caufe du long-temps, des dépenfes & des travaux que cette convocation exigeroit. Barlaam donna encore un autre mémoire où il difoit: Loin que l'examen puiffe nuire à une verité que Pon croit manifeste, il ne fert qu'à la rendre plus évidente, comme en maniant les parfums, on en fait mieux fentir la bonne odeur. Les peres de Nicée voyoient clairement que le Fils eft confubftantiel au Pere: mais parce que les Ariens en doutoient, ils voulurent Pexaminer pour procurer leur falut. Il vous fera glorieux d'en user de même à Pégard des Grecs; & ne leur pas donner prétexte de dire que vous craignez Pexamen, parce que vous vous défiez de votre caufe. Quant à ce que votre fainteté a propofé de faire venir d'Orient des députez avec plein pouvoir de l'empereur & des patriarches, il me paroît impoffible, à moins d'un miracle. L'empereur n'ofe déclarer fon deffein de se réunir ave vous, parce que plufieurs des grands, & même du peuple, craignant qu'il ne les voulût traiter comme fit Michel Paleologue, chercheroient une occafion de le faire mourir. De plus, léglise de Constantinople n'envoyeroit pas des nonces pour cette affaire fans le confentement des trois autres patriarches, qu'il feroit difficile d'assembler à cause des guerres. Il eft incertain s'ils voudroient venir : s'ils conviendroient d'envoyer leurs nonces; & quand ils en feroient d'accord, ils ne leur donneroient plein pouvoir qu'à des conditions que vous n'admettriez pas. Barlaam ajoûta de vive voix, que nonobstant toutes ces difficultez, il travailleroit fidelement à procurer Punion. C'est ainsi qu'il prit congé du pape pour retourner en Grece.

[merged small][ocr errors]

Le pape Benoît le chargea de deux lettres, en réponse AN. 1339% de celles qu'il avoit apportées du roi de Naples & du roi

Ap. Allat. de

Conf. p. 788.
Rain. n. 32. 37.

I I. Albert & Maftin

de France; la lettre au roi Robert en date du trentiéme
d'Août 1339-
n'eft qu'une promeffe de lui écrire plus
amplement. La lettre au roi Philippe eft du quatrième
de Septembre, & contient le recit de tout ce qui s'étoit
paffé en cette negociation; & le pape en envoya depuis
copie au roi Robert. En cette lettre & dans tous les actes
concernant cette affaire, le pape ne donne jamais à An-
dronic le titre d'empereur, mais feulement de modera-
teur des Grecs, pour ne pas préjudicier aux droits de
Catherine de Courtenai, qui fe difoit imperatrice de
Conftantinople, & par la même raison en parlant des
quatre patriarches d'Orient il dit : Ceux qui fe nomment
évêques de Conftantinople, d'Alexandrie, d'Antioche
& de Jerufalem; à cause des Latins aufquels il avoit don-

né ces titres.

Quelques-uns des tyrans de Lombardie pour donner de la Scale, fei- un titre coloré à leur domination, se soumirent au pape gneurs de Vero- à certaines conditions, entr'autres d'un tribut annuel, J. Vill.-XI. c. 100. & reçurent de lui la qualité de vicaires de Pempire dont

ne.

le pape prétendoit avoir Padministration pendant Pinterregne, car il tenoit l'empire pour vacant. Ainfi il confirma dans la feigneurie de Verone, Albert & Maftin de la Scale freres. La bulle en leur faveur est du premier Septembre 1339. & porte entr'autres conditions, qu'ils payeront à Péglife Romaine un tribut annuel de cinq mille florins d'or.

Le fiege de Verone étoit vacant depuis le meurtre de Pévêque Barthelemi de la Scale, qui après deux ans de pontificat, fut tué par Maftin fon cousin germain le jeudi vingt-feptiéme d'Août 1338. On avoit rapporté à Maftin

que

« AnteriorContinuar »