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faire des aumônes qui foient propor- CHAP. VIII tionnées à fes biens & à fes péchés ; ces vanités font ordinairement des. atraits de péché, & ainfi on fe rend coupable de toutes les paffions qu'on peut exciter; on ne peut avoir un fi grand atachement à toutes ces vanités fans avoir beaucoup d'orgueil, fans avoir un amour violent pour le monde, & pour les chofes du monde; & l'Ecriture nous dit, que celui qui aime le monde, la charité n'est point en lui. (a) Cet amour violent du monde & des chofes du monde ne pouvant fubfiiter dans un cœur avec l'amour de Dieu par-deffus toutes chofes, qui eft commandé à tous par le premier & le plus grand Commandement de la Loi de Dieu, & qui eft la vie de l'ame. On a montré ci-devant, que la vie inutile, la vie molle, une vie de divertiffemens, de jeu, d'amusemens, n'eft point une vie chrétienne; mais eft oposée aux maximes fondamentales de l'E-. vangile, & à la fin pour laquelle Dieu nous a créés. Cependant une

(a). Si quis diligit, ritas Patris in co. mundum,non eft cha- I. Jean. c. 2. v.. Iss

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CHAP. VIII. grande partie de gens de qualité & des perfonnes riches n'ont aucune horreur de ces déreglemens; au contraire, ils en font gloire. Le précepte de la fantification des Dimanches & des Fêtes, le précepte de s'abftenir de manger de la chair pendant le Carême & en certains jours de l'année, font prefque univerfellement méprifés ou négligés par les perfonnes de qualité, comme fi ces préceptes ne les regardoient prefque point. Le précepte du jeûne eft encore plus univerfellement violé par les perfonnes de toute forte de condition; plufieurs même ne prennent pas la peine d'éxaminer s'ils ont eu quelque. raifon. pour ne pas jeûner, & ne daignent: pas s'en acufer. Quelques-uns après. que le Carême eft paffé, s'acuferont de n'avoir pas obfervé le jeûne; mais c'est une acufation qu'ils ont faite de même tous les ans après le Carême,. fans avoir jamais été pénétrés de dou-leur,ni d'horreur pour avoir violé toute leur vie la loi du jeûne, que les ames les plus innocentes font obligés d'obferver.

D. Qu'entendez-vous quand vous dites que la douleur d'avoir ofensé

Dieu, doit être fouveraine.

R. J'entens que la douleur d'avoir ofensé Dieu doit furpaffer toute autre douleur que nous pourrions avoir; en forte que nous foions plus. fâchés d'avoir ofensé Dieu, que nous. ne le ferions de la perte de tout ce que nous avons de plus cher au monde. Car le péché étant le fouverain mal, nous privant de Dieu, qui est. le fouverain bien, & nous rendant. dignes des fuplices de l'enfer qui font infinis dans leur durée, il faut haïr, craindre, & détefter le péché fouverainement; & la volonté de celui qui haïroit & craindroit un autre: mal plus que le péché, qui feul peut nous priver de Dieu, feroit injufte, déréglée, pervertie, oposée à la loi de Dieu & à l'ordre de la justice criminelle & ennemie de Dieu.

D. Afin que cette douleur foit fouveraine est-il néceffaire que le fentiment que nous en avons, foit plus vif que le fentiment de tout autre

douleur ?

R. Cela n'eft pas néceffaire; il fufit que cette douleur, cette haine, & cette dételt tion du péché foit telle, que nous foions fincerement difpo

CHAP. VIII.

CHAP. VIII. fés à tout perdre, & à tout foufrir, plutôt que de violer mortellement la loi de Dieu en quelque point que ce foit. Cependant nous devons beaucoup gémir, & nous humilier profondément devant Dieu, lorfque la douleur de nos péchés eft fi peu vive, & fe fait fi peu fentir : car c'est Louvent une marque que notre douleur eft bien foible, que notre foi eft bien languiffante., & que l'idée que nous avons de l'énormité infinie du péché eft bien obscure.

D. S'il faut que la douleur du péché foit fouveraine, il ne fufit donc pas pour avoir une véritable Contrition, ou même une véritable. Atrition; que l'on ait quelque douleur, quelque haine, & quelque horreur pour le péché ?

R.. Non, cela ne fufit pas; il faut que cette douleur, cette haine, & cette déteftation du péché foit fou veraine pour les raifons qu'on a déja dites. Il faut que cette douleur, cette haine & cette horreur, foit affez forte pour arracher entierement du cœur l'afection & la volonté de tout péché mortel. Or toute douleur, toute haine, & toute horreur du péché n'ôte.

n'ote pas l'afection, ni la volonté de CHAP. VIII tout péché mortel. On peut avoir une véritable horreur pour le parjure pour le duel, pour l'adultere; quoiqu'on ne foit pas encore abfolument réfolu à tout faire, à tout perdre, & à tout foufrir, plutôt que de fe parjurer dans une ocafion importante plûtôt que de fe battre en duel en certaines rencontres fâcheuses, plû

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que de confentir à la paffion hon-
teufe d'un homme de qui on a beau-
coup à craindre ou à efpérer. On peut
même avoir véritablement de la dou-
leur, de la haine, & de l'horreur
pour le péché, dans le tems même
qu'on a actuellement la volonté de le
commettre, ou dans le tems même
qu'on le commet éfectivement. C'est
ce qui arrive à tous ceux qui ne pé-
chent que par complaifance pour des
perfonnes puiffantes, ou par la crain-
te de quelque mal, principalement fi
ce mal eft confidérable. Cette fille
où cette femme qui pour fortir d'une
grande mifere, ou pour obtenir la
protection d'un homme riche & puif-
fant qui la follicite fortement, tom-
be dans le crime, n'y tombe qu'a-
vec un grand regret, & a horreur
Tome I.

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