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D. Quelles doivent être les qua- CHAP. IX. lités ou les conditions de cette réfolution, ou cette volonté de ne plus pécher ?

R. Cette réfolution ou cette volonté doit être abfoluë, ferme & éficace. Et parce qu'il eft d'une extrême conséquence de bien comprendre ceci, on l'expliquera avec quelque étenduë.

1o. Il faut que cette volonté, ou cette réfolution de ne plus pécher, foit abfolue; c'eft-à-dire qu'on foit réfolu, quoiqu'il arrive, de ne point pécher, de ne fe point laiffer aller à Ja vengeance, de ne fe point battre en duel, &c. Car fi là réfolution n'eft que conditionnelle, par exemple, fi un homme n'eft réfolu de renoncer à la vengeance, de ne fe point battre, qu'à condition que l'on ne lui fera point d'injure, qu'à condition qu'on ne viendra point lui faire un apel, il n'eft point vraiment converti; une telle réfolution n'exclud pas entierement la volonté de pécher mortellement ; au contraire, on cache alors dans le fond du cœur une volonté fecrete de pécher, fi telle

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CHAP. IX. ou telle chofe arrivoit, quoique d'ail leurs on défire qu'elle n'arrive point. Cette volonté conditionnelle de ne plus pécher, peut même fubfifter avec l'acte même du péché. C'eft ainfi que ceux qui fe parjurent en juftice pour éviter la perte d'un procès de grande conséquence, ceux qui étant apellés en duel, vont au lieu affigné pour fe battre, font véritablement fâchés de fe trouver dans ces fâcheufes ocafions de péché, & ont une véritable volonté de ne plus pécher quand ils en feront fortis: & confervent cependant dans le fond du cœur la difpofition de faire les mêmes crimes, fi les mêmes ocafions qui les portent préfentement à les commettre, revenoient encore; quoiqu'ils fouhaitent qu'elles ne reviennent jamais.

20. Il faut que cette résolution ou cette volonté de ne plus pécher à l'avenir, foit ferme & conftante. Car comme il arrive souvent qu'à l'égard de certaines vérités, il y a dans l'entendement un confentement qui est abfolu, mais qui eft foible, imparfait & chancelant; de même il arrive très - fouvent à l'égard de cer

tains devoirs qu'il faut pratiquer, ou CHAP. IX. à l'égard de certains péchés aufquels il faut renoncer, qu'il y a dans l'ame une résolution, ou une volonté qui eft abfoluë; mais qui en même tems eft extrêmément foible, imparfaite & chancelante; une volonté que faint Auguftin apelle semi - sauciam, qui n'eft ni forte ni entiere. Or cette forte de réfolution ou de volonté ne fufit pas pour changer & convertir l'ame. Car avec cette forte de volonté, un pécheur eft encore, en quelque façon, comme chancelant à l'égard du renoncement au péché, & n'eft pas censé renoncer pleinement & entierement au péché; puifqu'il n'a pas une volonté pleine & entiere de ne jamais pécher; il ne fe convertit pas à Dieu de tout fon cœur, il ne cherche pas Dieu de tout fon cœur & ainfi il ne le trouve point. Vous me chercherez, & vous me trouverez, (dit Dieu) lorfque vous me chercherez de toute l'étenduë de votre cœur. (a) Son cœur eft

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(a) Quæretis me, I corde veftro. Jerem & invenietis, cùm c. 29. v. 13. quæfieritis me in toto

CHAP. IX.a divisé & partagé, ainfi il périra (b).

C'eft ce que faint Auguftin explique fort au long dans le Liv. 8. de fes Confeffions, chap. 8. 9. 10. I I. 12. en parlant de la bonne volonté que Dieu lui avoit donnée avant fa converfion, de l'averfion qu'il fentoit dès-lors pour le péché, des défirs qu'il avoit de faire le bien, des larines qu'il répandoit fouvent dans un tems où il avoue qu'il n'étoit pas encore converti. Quelle eft la caufe d'un éfet fi prodigieux & fi étrange, dit ce S. Docteur; Mon efprit commande à mon corps, & il trouve dans le corp's une promte obéissance. Mon efprit commande à foi-même, & il trouve en foi-même une forte résistance. (c). Il ajoûte qu'il avoit éxécuté une infité de chofes qu'il ne défiroit point auffi ardenment que fa converfion', & qui ne dépendoient pas uniquement de la volonté, comme en dépendoit fa converfion. J'ai fait, continuë ce

(b) Divifum eft, tud? imperat animus cor eorum: nunc interibunt. Of. c. 10.

V. 2.

(c)Unde hoc monftrum, & quare if

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corpori
& paretur
ftatim; imperat ani-
mus fibi, & resisti-
tur? S. Aug. lib.
Conf. cap. 9.

Pere, plufieurs actions, où le vouloir CHAP. IX. &le pouvoir n'étoient pas une même chofe; & cependant je ne faifois pas alors ce que je défirois avec une paffon fans comparaison plus grande que toutes ces actions, & que j'aurois pú faire auffi-tôt que je l'aurois voulu(d). Et un peu auparavant il dit: Je me voiois dans un frémissement d'efprits

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j'étois troublé d'une violente indignation contre moi-même, de ce que je ne me foumettois pas à vos volontés & que je ne m'unissois pas à vous, mon Dieu. (e) Et au Chapitre 12. de fes mêmes Confeffions il parle ainfi; Ne pouvant plus tenir mes larmes, il en fortit de mes yeux des fleuves & des torrens... Je connoiffois bien que c'étoient mes iniquités qui me retenoient ; & c'étoit ce qui me faifoit dire avec une voix lamenta ble; Jusqu'à quand ? fusqu'à quand

(d) Tam multa | fem.S. Aug. ibid.c.8. feci, ubi non hoc (e) Ego fremebam erat velle quod pof- fpirituindignans turfe, & non faciebam, bulentiffimâ indignaquod & incompara- tione, quòd non irem bili affectu ampliùs in placitum & pacmihi placebat &tum tecum, Deus mox ut vellem pof. Imeus, Thid, 4. 8.

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