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Leodatus fon frere naturel, que quelques Auteurs ont aussi
mis au nombre des Argonautes. Comme tous les Anciens con-
viennent que Meleagre étoit du nombre de ces Heros, il est
évident que
la fameufe chaffe de Sanglier de Calydon, &
la mort de ce Prince qui perit de la maniere que tout le mon-
de fçait, font des événemens pofterieurs à la conquête de la
Toifon d'or.

Le célebre Devin Mopfus eft encore mis de ce nombre par tous les Anciens, quoiqu'ils foient partagés fur le lieu de fa naiffance les uns croient qu'il étoit d'Echalie, mais la plus commune opinion le fait Theffalien, de la ville de Ti

tarene.

(1) Stace Theb. 1. 3.

Je crois qu'il ne faut pas confondre ce Mopfus avec un autre Devin de ce nom: le premier étoit fils d'Ampycus & de Chloris, ce qui lui fit donner le furnom d'Ampycides; le second avoit pour pere Tirefias : le premier fit la fonction de Devin pendant le voyage de la Colchide (1), le fecond fe rendit célebre au fiége de Thebes (2), & ils furent l'un & l'autre fort honorés après leur mort, & eurent des Oracles qui furent fouvent confultés. Celui de Mopfus fils de Tirefias 1. 14. étoit dans la Cilicie, & celui de l'Argonaute étoit dans l'Afrique, où il mourut au retour de la Colchide (3).

V. 520.
(2) Strabon

(3) Amm. L'Athenien Butès fe trouve dans tous les Auteurs qui ont Marcel. 1. 14. Apulée. parlé des Argonautes. Il fut après fa mort honoré par les Atheniens comme un Heros, & il avoit felon Paufanias (4), un (4) In Attic: Autel dans le Temple d'Erechthée.

Nauplius, fils de Neptune & d'Amymone, fille de Danaus, fe trouve auffi dans toutes les Liftes, de même que Menatius qui n'a été oublié par aucun des Anciens: il étoit fils d'Actor & d'Egine, & pere du célebre Patrocle.

Nelée frere de Pelias, qui avoit quitté la Theffalie pour aller s'établir à Pylos dans le Peloponnefe, vint avec Periclymene fon fils, pour s'embarquer avec Jafon : c'eft ce même Periclymene qui s'étant metamorphofé en Aigle, fut tué par Hercule; d'où l'on doit conclure que ce ne fut qu'après voyage des Argonautes que ce Heros fit l'incurfion dans le Peloponnefe, durant laquelle il tua tous les enfans de Nelée,

le

E e iij

(1) Liv. I. excepté Neftor, que Valerius Flaccus (1) falt aussi aller à la conquête de la Toifon d'or.

v. 380.

Nous n'avons qu'Apollodore qui nomme Palémon, fils d'Etolus, & arriere-petit fils d'Eolus par Calice fa grand mere; & Hygin eft le feul qui mette au nombre des Argonautes, Oilée de cet Ajax qui fit violence à Caffandre mais pere dans toutes les Liftes on trouve Pelée, fils d'Eacus & pere d'Achille, ainfi que Telamon fon frere.

:

Penelée, fils d'Hipalme, Staphylus, Phanus & Phalere, fils d'Alcon Athenien, font peu connus, quoique le nom de ce dernier fe trouve fur toutes les Liftes, & il n'y a qu'Apollodore qui nomme les autres.

Philammon, fils d'Apollon & de Chione, célebre dans les Metamorphofes d'Ovide, n'eft nommé parmi les Argonautes que par Hygin, qui met auffi au nombre de ces Capitaines Philoctete, fils de Pean, le compagnon d'Hercule & l'héritier de fes fléches, qui affifta dans la fuite au fiége de Troye, comme nous le dirons dans la fuite. Le même Auteur eft auffi le feul qui mette de ce nombre Phocas, fils du Lapithe Cenée de la ville de Magnesie, ainsi que fon frere Priafus, & fon cousin Polypheme, fils du Theffalien Elatus frere de Cenée. Mais que penfer d'un Therfanon fils du Soleil & de Leucothée, fille d'Orcame Roi de Perfe, qu'Hygin nomme parmi les Argonautes ? Dirons-nous qu'il y a faute dans le texte, & qu'il faut lire Philammon? mais ce nom eft joint à une généalogie qui ne permet pas de pareilles corrections. J'abandonne auffi à Muncherus le Theffalus qu'il a mis dans le Catalogue qu'il a dreffé fur cet Auteur : n'auroit-il point pris pour des Argonautes le pays où étoient nés la plupart de ces Heros? Je ne penfe pas de même de Theftor, pere du célebre Calchas, qui fuivant l'ancien Scholiafte d'Apollodore, avoit été mis par quelques Anciens au nombre des Compagnons de Jafon.

J'ai réfervé pour la fin de cette Lifte Thesée & fon ami Pirithotis qui ne font nommés parmi les Argonautes que par Hygin & Apollodore, pendant qu'Apollonius de Rhodes affûre qu'ils étoient alors l'un & l'autre dans les prifons d'Aidonée Roi d'Epire dont Pirithous avoit entrepris d'en

(1) Liv. 3. (2) Liv. 6.

v. 996.

lever la fille; & que d'autres Auteurs prétendent qu'il n'étoit
pas encore forti de Trezene. Plutarque dans la vie de The-
fée, dit à la vérité que ce Heros fit le voyage avec les autres
Argonautes; mais en compilateur peu exact, il fe contredit
visiblement, puisque dans la même vie il rapporte que Thesée
à fa premiere fortie de Trezene pour aller à Athenes, où il fut
reconnu par fon pere, y trouva Medée qui y étoit déja: or Me-
dée ne revint qu'au retour des Argonautes. Le fiécle dont je **
parle eft rempli de difficultés pour la chronologie, & la vie
de Thesée en fait une des plus confiderables. Les uns le font
trop jeune au temps de la conquête des Argonautes, les au-
tres le font trop vieux. Si l'on fait même attention aux Gé-
néalogies de ces temps-là, Thefée auroit été extrémement
vieux & peut-être mort, lorfque les Argonautes s'embarque-
rent, puifque Hypfiphile étoit fille de Thoas, & Thoas fils
de cette même Ariane que Thefée avoit abandonnée dans
l'Ifle de Naxe: auffi voyons-nous dans Apollonius (1) & dans
Valerius Flaccus (2), que Jafon raconte à Medée l'hiftoire de
Thefée & d'Ariane. D'un autre côté l'arrivée de Théfée à
Athenes après être forti de Trezene eft bien marquée par
Diodore (3), dans Plutarque (4), & dans Paufanias (5), &
felon ces Auteurs il étoit alors fort jeune, & en habit de fille
pour n'être point reconnu. Ces Auteurs difent que c'étoit dans
le temps qn'Egée fon pere venoit d'époufer Medée, & par con-
fequent long-temps après l'expedition de Jafon. D'ailleurs
on fçait que ce Heros, plus jeune que fon coufin Hercule, vê-
cut jufqu'au temps de la guerre de Troye. Après les autorités
que je viens de rapporter, tout me détermine à croire qu'il ne
doit point être mis au nombre des Argonautes. Il n'y a pas moins
de difficlté fur le temps de la guerre des Centaures & de la chaf-
fe de Calydon ; car tous les Anciens conviennent que Thefée
affifta aux nôces de Pirithous & aux combat des Centaures; &
tous nous apprenent auffi qu'il affifta à la chaffe du Sanglier de
Calydon; événemens qui touchent de fort près la conquête des
Argonautes, & dont je crois même que le premier le préce-
da. Ainfi il m'eft impoffible de me tirer de ces difficultés.

A

Tels étoient les Heros qui affifterent à la Conquête de la Toison d'or, c'est-à-dire, tout ce qu'il y avoit alors dans la

v.90.

(3) Liv. 4.

(4) In Thef.

Grece de plus diftingué par la valeur & par la naiffance, & dont la plupart étoient parents de Jafon, parce que dans ce temps-là prefque toute la Grece, excepté une partie du Peloponnefe, étoit peuplée des defcendans de Deucalion, duquel il tiroit fon origine.

Comme l'art de la Navigation étoit alors fi peu connu, qu'on ne s'éloignoit gueres des côtes, & qu'on prévoyoit bien qu'on feroit peut-être obligé de les perdre fouvent de vûe, on s'adreffa à Chiron pour dreffer un nouveau Calendrier, & reformer l'ancien, parce que fuivant cet ancien Calendrier où les afcenfions & les déclinaifons du Soleil n'étoient point marquées, les Equinoxes & les Solftices arrivoient dans des temps éloignés des points où ils devoient être fixés: Chiron, difent quelques Auteurs, les rectifia & en fit un propre à diriger la navigation de ces Princes; ce que (1) Liv. II. j'ai examiné dans un Chapitre particulier (1). Ch.12.p.194. Lorfque tout fut prêt pour le voyage, Jafon, felon Apol

lonius, avant de mettre à la voile, ordonna un facrifice so

lemnel au Dieu auteur de fa race, & à toutes les Divinités qu'il crut pouvoir être favorables à fon entreprise. Chacun (2) Apoll.l.4. S'empressa à apporter des pierres pour élever l'autel (2), qu'on couvrit de branches d'olivier. Après les ablutions ordinaires, le Prêtre repandit deffus de la fleur de farine mêlée avec du miel & de l'huile, immola deux bœufs aux Dieux en l'honneur defquels fe faifoit le facrifice,& invoqua leur protection contre les dangers d'un fi long voyage. Jupiter, ajoute Apollonius après Pindare (3), promit par la voix du tonnerre fon fecours à cette troupe héroïque, qui s'embarqua après le facrifice.

(3) Pyth.

Les Argonautes étoient déja dans le Vaiffeau lorfque Chiron arriva pour prendre congé de fon cher Jafon ; & après l'avoir embraffé, ainfi que les autres Heros, il leur donna des avis pour leur voyage, & fit des voeux pour l'heureux fuccès de leur entreprise. Il tenoit le jeune Achille entre fes bras; circonftance que je remarque parce qu'elle fervira dans la fuite à prouver l'époque de cette expedition.

Enfin le vent étant favorable, le Vaiffeau fortit du Port & mit à la voile. CHAPITRE

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des

A navigation des Argonautes, qui fournit plufieurs avantures que je vais tâcher de ramener à l'histoire, fut d'abord affez heureufe; mais une tempête les obligea bientôt à relâcher dans l'Ifle de Lemnos. Les femmes de cette Isle avoient manqué de refpect à Venus, & cette Déeffe pour les en punir, les avoit rendues d'une odeur fi infuportable, que leurs maris les avoient abandonnées, pour des Efclaves qu'ils avoient prifes fur les Thraces, avec qui ils étoient en guerre. Les Lemniennes, piquées de ce mépris, firent un complot contre tous les hommes qui habitoient l'Ifle, & affaffinerent pendant leur fommeil tous ceux qui fe trouverent dans Lemnos, car le plus grand nombre n'y étoit pas alors, comme on le verra dans la fuite. La feule Hypfiphile conferva la vie à fon pere Thoas, qui étoit Roi de l'Ifle. Quelque extraordinaire que paroiffe ce fait, il eft cependant unanimement attefté par tous les Anciens; car la varieté qui se trouve entr'eux par rapport à quelques circonftances, bien loin de le détruire, prouve au contraire qu'il étoit generalement crû. Apollodore (1), & après lui Suidas, prétendent (1) Liv. 2. que le courroux de Venus étoit fondé fur ce que les Lemniennes ne lui offroient plus de facrifices, & on fçait à quel point les Dieux fe croyoient outragés par cette forte de mépris. Le Scholiafte d'Euripide (2), après Hygin (3), dit que cette Déeffe étoit piquée de ce qu'on avoit laiffé abolir une ⚫fête qu'on avoit accoutumé de célebrer en fon honneur, ce qui revient à peu près au même, & étoit également puniffable dans les principes de la Théologie de ce temps - là. D'autres enfin (a) donnent pour fondement à la haine de cette

(a) Lact. fur le Livre V. de la Thebaide de Stace. Valer, Flacc. liv. 2. &c.

Tome III.

Ff

(2) Sur la

Trag. d'Hecu

be.

(3) Ch. 15.

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