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de fes troupes y fit paffer le fleuve Alphée, & leur redonna leur ancienne fertilité : de là la Fable des Etables d'Augias. Ce Prince, comme le dit Diodore de Sicile (1), n'ayant pas (1) Liv. 4. voulu lui payer ce qu'il lui avoit promis, Hercule chercha l'occafion de s'en venger ; & ayant trouvé Euryte que fon pere envoyoit à Corinthe pour célebrer les Jeux Ifthmiques, il le tua. Étant entré enfuite dans l'Elide, il fit mourir Augias, & mit à fa place Philée fon fils, qui ayant été pris pour Arbitre, avoit confeillé à fon pere de récompenfer Alcide pour un service si important. Ce fut pendant cet ouvrage, qu'il fit avec les troupes qui l'accompagnoient, comme nous l'apprenons de Paufanias (2), qu'aidé par Minerve, il fut obligé (2) In Eliac. de fe battre contre Pluton, piqué contre lui de ce qu'il avoit emmené des enfers le chien Cerbere, & qu'il bleffa ce Dieu. Les Eléens, pour le prouver, citoient les vers d'Homere, où ce Poëte dit en effet que le Dieu des enfers reçut dans cette occafion un coup de fléche qui lui fit fouffrir de grandes douleurs. Que fi on ne veut point recourir à l'allegorie, on pourra penfer que le Roi de Thefprotie, Aidonée, vint au fecours des Pyliens, pour les défendre contre l'armée d'Hercule, qui dans le deffein de fe venger de la perfidie d'Augias, leur avoit déclaré la guerre.

L'Ifle de Crete nourriffoit des Taureaux d'une grande beauté, & Euryfthée qui vouloit en avoir de la race, ordonna à notre Heros de lui en emmener le plus beau, ce qu'il fit. On publia dans la fuite que c'étoit le même que celui de Pasiphé.

Le Taureau

de Pafiphać.

Diomede ayant de très-belles cavalles, Euryfthée ordonna Les Cavales à Hercule d'en aller enlever quelques-unes. Diomede vou- de Diomede. lant lui refifter, fut tué dans le combat; & comme ce Prince s'étoit ruiné à nourrir des chevaux, & qu'il avoit vendu pour cela jufqu'à fes efclaves, on publia que les Jumens de ce Prince étoient nourries de chair humaine, comme le dit Palephate (3), & peut-être même que ce qui contribua à la Fable, c'eft qu'elles avoient dévoré un jeune homme. Quelques Auteurs expliquent cette Fable, des filles de Diomede qui s'engraiffoient aux dépens des victimes que leur lubricité

(3) Liv. 4.

(1) Erasme attiroit à la Cour de leur pere (1), qui les proftituoit aux in Adagiis. étrangers.

La défaite de Geryon.

4. Denys

&c.

En allant en Espagne, Hercule faccagea l'Ifle de Cos; enfuite il défit le fameux Geryon qui avoit trois corps, & dont il emmena les troupeaux; c'est-à-dire, qu'il défit avec fon armée, car il étoit fort bien accompagné dans cette expedi tion, ainfi que dans les autres, comme le remarquent les bons (2) Diod. 1. Auteurs) ou un Prince qui regnoit fur trois Ifles, Majorque, Halic. 1.1. Minorque & Ebufe, ou felon d'autres, fur Tartefe, Cadix & Eurithie; ou bien fur trois Princes alliés, & qui étoient regardés comme une même perfonne, tant ils étoient bien unis; ce qui revient à l'explication de M. le Clerc (a), qui prétend qu'Hercule défit trois petites armées des habitans de ce pays. Heliode dit que ce Geryon étoit fils de Chryfaor, forti du fang de Medufe,comme nous l'avons rappoté ailleurs. Si nous en croyons le fçavant Bochart (b,Geryon n'a pas regné en Efpagne, mais en Epire, & c'eft-là qu'Hercule le défit, &emmena fes bœufs: car outre, dit cet Auteur, que ce fameux Grec n'a jamais été en Espagne, on ne la connoiffoit pas même de fon temps. Ce fut Coléus de Samos, qui vivoit près de 600. après, qui y voyagea le premier, ou plutôt qui y fur jetté par la tempête; & même les pâturages d'Eurithie n'étoient pas propres à nourrir des bœufs. En effet, Strabon parlant de cette Ifle, n'en fait aucune mention; ainfi tout ce que les Grecs difent des voyages de leur Hercule en Espagne & à Cadix, eft fabuleux.

Le fentiment de Bochart n'eft pas fondé, comme la plûpart de fes autres opinions, fur de fimples conjectures, ou fur des analogies tirées des langues Orientales: il est foutenu du témoignage des Anciens. Hecatée, cité par Arrien, dit que Geryon étoit Roi d'Epire; que ce pays avoit d'excellens pâturages, & nourriffoit beaucoup de boeufs, & que c'eft de là qu'Hercule enleva ceux de Geryon. Eufthate, fur De

(a) M. le Clerc fur Hefiode, dit que la phrafe Phenicienne où fe trouvoit le mot Griona, & dont le fens étoit qu'Hércule avoit défait trois armées, avoit donné lieu

à l'exiftence de Geryon.

(b) Confultez fur cela Bochart loc. cit. & Voffius, fur Scylax.

qua

Denys Periegete dit la même chofe, & Pindare dans la
triéme Nem. parle des pâturages & des chevaux de l'Epire.
Que fi on veut après cela adopter l'ingenieuse conjecture de
Bochart, qui dit que l'Epire a pris fon nom du mot hebreu,
abiri, comme qui diroit, la terre des chevaux & des bœufs, je
ne m'y oppofe pas; mais il eft toujous vrai qu'il n'y a pas
d'aparence qu'Hercule ait été plus loin chercher les boeufs de
Geryon : l'Epire, dans un temps où le
pays étoit peu peuplé
où les voyages étoient difficiles, & la navigation dangereufe,
étoit regardée comme une region fort éloignée des Proyin-
ces Orientales de la Grece telles que la Béotie; c'étoit
les Grecs le bout du monde que l'Hefperie, le pays où le
Soleil fe couchoit, & où étoit l'enfer & fes fleuves. Voilà
des idées affez propres à rendre célebres le voyage de ce He-
ros, & à le faire regarder comme une entreprise très - péril-
leufe (a).

pour

Quoiqu'il en foit, Hercule étant allé de l'Epire en Italie (b), il y défir quelques brigands, entr'autres un certain Cacus qui fe retiroit dans les montagnes du mont Aventin, & qui eut même la hardieffe de lui voler fes boeufs. Caca découvrit fon frere à Hercule, qui le fit mourir, comme nous l'aprennent Tite-Live (1) & Servius (2). Denys d'Halicarnaffe (3) raconte (1) Liv. 1. ainfi cette avanture, Hercule étant arrivé avec les troupes huitième de (2) Sur le en Italie, & attendant fa flotte pour s'en retourner dans la l'Eneide. Grece, fit plufieurs conquêtes fur les anciens Peuples qui (3) Liv. 1. l'habitoient, & plufieurs d'entr'eux furent ravis de fe foumettre volontairement à fon empire. Ce Prince content de fes exploits, & croyant que tout éroit tranquille, étoit campé avec peu de précaution dans le deffein de fe repofer de fes fatigues, lorfque Cacus qui étoit un petit Tyran qui habitoit dans des rochers inacceffibles, le furprit la nuit, & lui enleva une partie de fon butin Hercule le pourfuivit, l'affiegea dans fon fort, & comme il fe défendoit vigoureusement il perdit la vie. Les foldats d'Hercule avec les troupes qui

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étoient venues au fecours de notre Heros fous la conduite d'Evandre, partagerent les dépouilles de Cacus. Hercule continue le même Auteur, après avoir purifié l'Italie, licentia une partie de fes troupes, & partagea les terres conquifes entre fes alliés & fes foldats, qui s'établirent dans le pays, s'unirent avec les Aborigenes, & vêcurent avec eux dans une parfaite intelligence. Voici ce qui y donna lieu.

Evandre, Arcadien d'origine, avoit quitté quelque temps auparavant la Grece pour venir avec une colonie s'établir dans cette partie de l'Italie qui fut depuis appellée le Pays Latin. Ce Prince qui y avoit porté l'ufage des lettres qui y étoit alors inconnu, s'étoit attiré la bienveillance des Aborigenes, qui fans le regarder comme leur Roi, lui obéiffoient comme à un homme d'une fageffe peu commune. Mais rien ne lui attiroit davantage la véneration de ces Peuples, que la reputation de fa mere Carmenta que les Grecs nommoient Themis, & qu'on regardoit comme une Divinité. Elle fut pendant fa vie l'oracle de toute cette nation, & après fa mort on lui rendit les honneurs divins. Evandre à qui Carmenta avoit appris il y avoit long-temps, qu'un Heros, fils de Jupiter, arriveroit un jour dans le pays, & qu'il mériteroit par fes belles actions d'être mis au rang des Dieux, n'eut pas plutôt entendu le nom de celui qui venoit de tuer Cacus, qu'il voulut être le premier à l'honorer, même de fon vivant, comme une Divinité. Ainsi il lui érigea un autel à la hâte; & après lui avoir fait part des prédictions de fa mere, il immola en fon honneur un jeune taureau. Après le facrifice il fut ar rêté, à la priere d'Hercule, & par le confentement de toute la nation, qu'on célebreroit à perpetuité tous les ans une pareille folemnité, felon le rit des Grecs, qu'il prit foin lui-même de leur apprendre, & on choifit pour y préfider deux des plus nobles familles du pays, celle des Poticiens & celle des Pinariens. La premiere, felon les Hiftoriens Romains, périt entierement dans la fuite pour avoir voulu fe décharger de cette cérémonie fur des efclaves publics,pendant que celle des Pinariens, fidéle à cet engagement, fubfiftoit encore du temps de Ciceron.

Je

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Je ne conçois pas au refte par quelle raifon quelques Auteurs ont regardé comme une fable l'avanture de Cacus. Car quand même elle ne feroit pas attestée par deux Anciens, tels que Tite-Live & Denys d'Halicarnaffe, & ce qui est encore plus décifif, par une fête établie pour en rappeller le fouvenir; & qu'on la prendroit à la lettre de la maniere que Virgile la raconte dans le huitiéme livre de fon Enéïde ; qu'a-telle donc de fi extraordinaire, pour qu'on ne puiffe pas la regarder comme une hiftoire véritable? Ne pouvoit-il pas y avoir en Italie, dans le temps qu'Hercule y arriva, un de ces brigands qui étoient alors fi communs, qui ayant trouvé quelques-uns des boeufs d'Hercule égarés du refte du troupeau, les ait volés & cachés dans quelque caverne ; qu'un de ces bœufs ayant répondu aux mugiffemens des autres, ait décelé le vol, & qu'Hercule, qui felon Denys d'Halicarnaffe avoit avec lui de bonnes troupes, ait attaqué & delivré l'Italie d'un petit Tyran qui y caufoit beaucoup de défordres? Que fi on a dit, comme le raconte Virgile, que ce voleur étoit fils de Vulcain, & qu'en fe défendant contre notre Heros il avoit vomi des torrens de flamme & de fumée, ce font de ces circonftances dont on avoit coutume d'embellir de pareilles avan

tures.

Quelques Anciens nous apprennent que comme notre Heros cherchoit à s'immortalifer par plus d'une maniere, il époufa la fille d'Evandre, dont il eut Palans. Il avoit amené aussi, fuivant Denys d'Halicarnaffe,une efclave qu'il fit époufer à Faunus, d'où nâquit Latinus. On ajoute encore qu'Hercule abolit en Italie la cruelle coutume d'offrir aux Dieux des victimes humaines, & qu'il établit qu'on n'y immoleroit que des animaux, ou tout au plus des représentations d'hommes; car, pour le dire en paffant, quand on n'avoit pas de quoi acheter des victimes, on fe contentoit d'immoler quelque chose qui les repréfentât.

Comme il vouloit établir une colonie en Afrique pour fa- Défaité ciliter le commerce, ( c'étoit une des fins de fon voyage) il d'Anthée. en fut repouffé d'abord par un autre Marchand qui s'étoit éta

bli dans la Libye, & qui étoit déja fi puissant, qu'il n'étoit

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