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feroit délivré des Furies qui le perfécutoient, qu'après avoir trouvé un lieu qui n'étoit point éclairé du Soleil, lorsqu'il commit ce funefte parricide. Après avoir long-temps rêvé au fens de l'Oracle, il crut qu'il vouloit parler des Ifles Efchinades, nouvellement formées, & qui étoient déja affez grandes pour lui fervir de demeure. Il alla s'y établir, y forma un petit Royaume, & donna à la côte voisine le nom de fon fils (a).

Thefée pour avoir entrepris d'enlever la femme d'Aido- Thefée délinée Roi d'Epire, pour fon ami Pirithoüs, avoit été fait vré des enfers. prifonnier de ce Prince: Hercule en paffant dans ce Royaume le délivra de fa prifon; & cet Aidonnée étant, pour les raifons que nous avons dites, regardé comme le Roi des Enfers (b), on prit le voyage d'Hercule pour une defcente dans le Royaume des morts; mais deux chofes contribuerent à cette Fable: l'une, qu'il emmena d'Epire quelque dogue qu'on prit pour Cerbere, comme nous l'avons dit (c), l'autre, qu'il tua dans ce temps-là un fameux ferpent qui fe retiroit dans l'antre de Tenare, qui étoit regardé comme l'embouchure de l'Enfer. Sur quoi Palephate croit (d) que c'étoit un dogue qu'Hercule avoit enlevé à Geryon; & on ne dit qu'il avoit trois têtes, qu'à caufe de la ville Tricaffia, où il l'avoit pris. Moloffe, ajoute-t-il (c'eft Aidonée) le vola à Euryfthée, & le cacha dans l'antre de Tenare, où Hercule par ordre du Roi de Mycenes alla le chercher ; & c'eft, felon cet Auteur, ce qui a donné lien au voyage fabuleux de ce Prince aux Enfers (e). Aidonnée fut apparemment bleffé par notre Heros; & comme ce Roi d'Epire fut obligé d'aller en Theffalie pour chercher des remedes, on publia que le Dieu des Enfers avoit été obligé de fortir de fon Royaume pour aller dans l'Olympe implorer le fecours de Peon, qui étoit un fameux Medecin de Theffalie.

On ne convient pas, comme on vient de le voir, par quel endroit Hercule defcendit aux Enfers. L'hiftoire de

(a) Elle s'appella Acarnanie.
(b) Voyez l'Hiftoire de Pluton.
(c) Dans le Syftéme de l'Enfer.

''

Chap. 4. des chofes incroyables.
(e) Voyez le Syftéme de l'Enfer fur
Cerbere.

vrée.

Thefée femble prouver que ce fut dans la Thefprotie, ou dans l'Epire; d'autres Mythologues parlent de l'antre de Tenare dans la Laconie, où l'on croyoit qu'étoit la defcente du Royaume de Pluton : enfin Xenophon, dans le fixiéme Livre de la retraite des dix Mille, parlant de l'arrivée de l'armée dans la Cherfonese Acherontique, ajoute que c'étoit dans ce pays qu'on difoit qu'Hercule étoit defcendu dans le Royaume de Pluton, & qu'on y voyoit encore la Caverne, qui avoit plus de 150. pas de profondeur.

Apparemment qu'Hercule regardoit cette defcente aux Enfers, comme le plus perilleux de fes travaux, puifqu'il ne voulut pas l'entreprendre qu'il ne fe fut auparavant fait initier aux myfteres Eleufiniens. Îl alla pour cela à Athenes; mais Eumolne, ou felon d'autres Auteurs, Mufée fils d'Orphée qui y préfidoit, lui remontra qu'aucun étranger ne pouvoit être admis aux myfteres de Cerès. Cependant comme on ne vouloit pas refufer à ce Heros cette fatisfaction, on en institua d'autres à son occafion. Ce font ceux qu'on appelle les petits myfteres Eleufiens, aufquels on admit depuis ce temps-là les étrangers.

Pelias (a) ayant été tué par fes filles, Acafte fon fils refolut de poursuivre fes foeurs jufque dans la cour du Roi Admete fon coufin, où Alcefte s'étoit retirée (b); & parce que ce Prince qui en étoit amoureux ne voulut pas là rendre, Acafte ravagea toute la campagne. Admete ayant été pris Alcefte déli- dans une fortie, la genereufe Alceste alla s'offrir volontairement au Vainqueur, pour délivrer fon Amant de la mort dont il étoit menacé: Acafte l'accepta & renvoya Admete. Alcide arriva en ce temps-là à la cour de Theffalie, & ayant trouvé ce Prince dans la derniere défolation de la perte de fa Maitreffe, qu'il croyoit fur le point d'être immolée aux Manes de fon pere, pria ce Heros de poursuivre fon ennemi. Alcide défit Acafte, délivra Alcefte qu'il remit entre les mains d'Admete qui l'époufa. Ceux qui écrivirent cet évenement l'habillerent en Fable, ils dirent heureusement qu'Alcefte

(a) Palephate, Liv. des chofes incroyables, ch. 17. Diod. liv. 4.
(6) Elle étoit pourtant innocente, fi nous en croyons Diod. liv. 4.

étoit morte pour fauver fon Amant. Ils ajouterent qu'Hercule avoit rencontré le mort, avoit combattu contre elle, & que l'ayant vaincue, il l'avoit liée avec des chaînes de diamant, jufqu'à ce qu'enfin elle lui eût promis de rendre à la jeune Alceste la lumiere du jour qu'elle lui avoit ravie si injuftement. C'étoit, comme on le voit, une allégorie des plus raifonnables; délivrer une perfonne prête à perdre la vie, c'est l'arracher des bras de la mort: on parle ainfi tous les jours fans fiction. Mais ce qui rendoit cette Fable plus vraisemblable, c'est que lorsque ce Heros la délivra, elle avoit déja paffé le fleuve Acheron pour s'en retourner dans fon Royaume. Peut-être même que ceux qui firent un Epithalame aux noces de cette Princeffe, chanterent quelque chofe de femblable aux vers de M. Quinault.

Alcide eft vainqueur du trepas,

L'Enfer ne lui refifte pas, &c.

On faufila le miniftere d'Apollon dans cette Fable, parce que ce Dieu, comme nous l'avons expliqué dans fon Hiftoire, avoit été obligé de garder les troupeaux d'Admete.

Les Amazones étoient en grande réputation du temps d'Alcide, & leurs conquêtes fur leurs voifins les rendoient redoutables. Eurysthée ordonna à ce Prince d'aller enlever la ceinture d'Hippolite, c'est-à-dire, de leur aller faire la guerre & piller leur tréfors. Hercule s'embarqua fur le Pont - Euxin, arriva fur les bords du Thermodon ; & ayant attaqué ces Heroïnes, il les défit, en tua une partie, mit les autres en fuite, prit Hippolite, ou Antiope prifonniere, qu'il donna à Thefée, & Menalippe leur Reine fe racheta, en donnant la fameufe ceinture, c'eft-à-dire, en payant fa rançon.

Peut-être qu'il fe pourroit trouver quelques perfonnes qui demanderoient ce que c'étoit que ces Amazones dont nous venons de parler. C'étoit une Republique de femmes, qui ne fouffroient point d'hommes parmi elles, fe contentant de les aller voir tous les ans. Si elles accouchoient enfuite d'un garçon, elles l'expofoient, ou le renvoyoient aux Scythes Tome III.

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Défaite des

Amazones.

leurs maris ; fi c'étoit une fille, on l'élevoit avec beaucoup de foin, & on lui faifoit brûler la mamelle droite, pour mieux tirer de l'Arc; c'est de-là qu'eft venu leur nom d'Amazones, apa, fans mamelle. Tous les Anciens en conviennent ; cependant les Amazones qu'on trouve représentées dans les anciens monumens, ont les deux mamelles.

Quelques Auteurs, parmi lefquels eft Strabon, ont cru qu'il n'y avoit jamais eu d'Amazones; que tout ce qu'on publioit fur ce fujet, n'étoit qu'une Fable; & M. le Clerc ajoute que ce qui y a donné lieu,c'eft qu'en Cappadoce les femmes alloient avec leurs maris à la guerre, comme elles avoient été autrefois à la conquête des Indes avec Bacchus, ou Ofiris; que les noms qu'on leur donne, comme Antiope, Penthefilée, & les autres, font Grecs & non pas Scythes; & que les meilleurs Hiftoriens de la vie d'Alexandre n'en difent rien. Mais de la maniere que tous les Anciens, je veux dire, Herodote, Diodore de Sicile, Velleius Paterculus, Mela, Paufanias, Trogue & plufieurs autres parlent des Amazones, on ne fçauroit revoquer en doute ce qu'ils en difent: ils les font regner en Scythie fur les bords du Thermodon, & font commencer leur Empire après la défaite de leurs maris qui ayant été chaffés de Scythie par une fédition, s'étoient emparés de la Cappadoce. On ajoute qu'une de leurs Reines, nommée Penthefilée, alla porter du fecours à Priam, & fut tuée par Achille (a).

Herodote raconte comment les Grecs vainquirent les Amazones, & la maniere dont elles fe fauverent; comme les Scythes les reconnurent après les avoir défaites, & tâcherent de les apprivoifer en leur envoyant des hommes les mieux faits de leur armée. Plutarque parle de leur irruption dans l'At(1) In Thes. tique (1), & de la victoire que Thefée remporta fur elles.Quinte-Curce nous apprend qu'une de leurs Reines alla voir Alexandre, & qu'elle demeura treize jours avec lui. Je crois qu'après ces témoignages, & plufieurs autres dont je ne me fouviens pas prefentement, on ne fçauroit gueres douter qu'il

(4) Diodore, liv. 3. parle des Amazones qui fe fignalerent dans la Libye.

n'y ait eu autrefois des Amazones. Mais fans les aller cher-
cher dans des temps fi éloignés, on nous dit (a) qu'il y en a
encore aujourd'hui dans une des Ifles Marianes. On ajoute
que
les hommes des Ifles voifines les vont voir, & rempor-
tent avec eux les enfans mâles, & n'y laiffent que les filles;
fans parler ici de ce vafte pays des Amazones qui fut décou
vert il y a quelques fiécles dans le continent de l'Amerique

méridionale.

prend la ville

Comme la conquête des Argonautes arriva du temps de Defcend dans notre Heros, il ne manqua pas d'être de la partie; cependant la Troade, & quelques Auteurs croient, comme nous l'avons dit, qu'il de Troye. n'alla pas jufqu'à Colchos, & qu'il defcendit dans la Troade pour aller chercher le jeune Hylas, qui étant allé puiser de l'eau, s'étoit égaré (b). Ce jeune Prince, dit-on, qui étoit fils de Thiodamante Roi de Myfie; ayant été envoyé avec fes Compagnons dans la Phrygie pour chercher de l'eau, fut dévoré par quelque bête féroce, ou noyé dans quelque ruiffeau. Hercule qui l'aimoit, defcendit pour le chercher, & fit retentir les rivages du nom de fon favori.

His adjungit Hylam nautæ quo fonte relictum
Clamaffent, ut littus Hyla, Hyla omne fonavit (1).

Quelque vraisemblance que foit cette explication, M. le Clerc la rejette, & croit que le mot Hyla veut dire du bois ; & que ce qui a donné lieu à la Fable, c'eft que veritablement Hercule defcendit avec Telamon & fes autres compagnons du Vaiffeau des Argonautes ; & étant allé couper du bois fur le mont Ida, ils en firent un Vaiffeau pour l'expedition de Troye. Le bruit que le bois faifoit en tombant, & dont la ⚫ forêt retentiffoit, donna lieu à la Fable que nous venons d'expliquer. Quoiqu'il en foit, il eft vrai que la ville de Troye étant alors fort endommagée par les inondations de la mer, on crut que Neptune qui en avoit bâti les murailles, se vengeoit du perfide Laomedon. L'Oracle confulté apprit que

(4) P. Gobien, fixiéme Recueil des Lettres édifiantes.

(b) Voyez ce que j'en ai dit dans la Liste des Argonautes.

(1) Virgil.

Eclog. 6.

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