Imágenes de páginas
PDF
EPUB

les lui laiffoient de momens vuides, au hazard & irrégulierement. Il dictoit à trois ou quatre Secretaires à la fois, & fouvent chaque Lettre eût mérité par fa matiere d'être faite à part, & fembloit l'avoir été. Ila quelquefois accommodé à fes propres dépens des Procès, même confiderables; & un trait rare en fait de Finances, c'eft d'avoir refufé à un renouvellement de Bail cent mille écus qui lui étoient dûs par un ufage établi il les fit porter au Tréfor Royal pour être employés au payement des Penfions les plus preffées des Officiers de guerre. Quoique les occafions de faire fa cour foient toutes fans nulle distinction infiniment cheres à ceux qui approchent les Rois, il en a rejetté un grand nombre, parce qu'il fe fût expofé au péril de nuire plus que les fautes ne méritoient. Il a fouvent épargné des évenemens defagréables à qui n'en favoit rien, & jamais le récit du fervice n'alloit mandier de la reconnoiffance. Autant que par fa severité il favoit fe rendre redoutable au peuple dont il faut être craint, autant par fes bons offices il favoit fe faire aimer de ceux que la crainte ne mene pas. Les perfonnes dont j'entens paler ici font en fi grand nombre & fi importantes, que j'affoiblirois fon Eloge en y faifant entrer la reconnoiffance que je lui dois, & que je conferverai toûjours pour fa mémoire.

Il avoit époufé Dame Marguerite le Fevre de Caumartin, dont il a laiffé deux fils, l'un Confeiller d'Etat & Intendant

de

de Maubeuge, l'autre fon fucceffeur dans la Charge de la Police, & une fille mariée à M. de Colande, Maréchal de Camp & Commandeur de l'Ordre de Saint Louis.

LLLIXXIIZZL ELOGE

DE MONSIEUR

COUPLE T.

LAUDE-ANTONIE COULET nâquit à Paris le 20. Avril 1642. d'Antoine Couplet, Bourgeois de Paris. Son Pere le deftina au Barreau, fans confulter, & apparemment fans connoître fes talens & fon goût, qui le portoient aux Mathematiques, & principalement aux Méchaniques. Elles lui cauferent beaucoup de diftraction dans fes études; cependant il fut reçû Avocat, mais il quitta bien-tôt cette profeffion forcée & fe donna entierement à celle que la Nature lui avoit choifie.

Il chercha de l'inftruction & du fecours dans le commerce de M. Buhot Cofmographe, & Ingenieur du Roi, qui, après avoir reconnu fes difpofitions, fe fit un plaifir de les clutiver: il vouloit même ferrer par une alliance la liaifon que la Science avoit

co.n.

commencé entre eux, & en 1665. il fit époufer fa Belle-fille à fon Eleve âgé alors de vingt-quatre ans.

En 1666. fut formée l'Academie des Sciences. M. Buhot fut choifi par M. Colbert pour en être, & quelque temps après M. Couplet y entra; on lui donna un logement à l'Obfervatoire, & la Garde du Čabinet des Machines. Il femble qu'un certain respect doive être attaché aux noms de ceux qui ont les premiers compofé cette Compagnie.

En 1670. M. Couplet acheta de M. Buhot la Charge de Profeffeur de Mathemati que de la grande Ecurie. Il étoit obligé d'alfer fort fouvent à Verfailles,, & dans ce temps-là le feu Roi y fit faire ces grandes conduites d'eau qui l'ont tant embelli. La Science des Eaux & des Nivellemens fut perfectionnée au point qu'elle en devint prefque toute nouvelle, & M. Couplet qui ne demandoit qu'à s'inftruire & à s'exercer, en eut des occafions à fouhait. Nous avons parlé en 1699. (pag. 112. & fuiv. de l'Ed. de Paris, & pag. 139. & fuiv. de l'Ed. Amft.) d'un Niveau qu'il s'étoit en quelque maniere rendu propre, en le rendant d'une exécution beaucoup plus facile.

Employé fouvent à des ouvrages de Particulers, il s'y conduifoit toûjours d'une maniere dont fa famille feule pouvoit fe plaindre: il ne vouloit que réuffir, & il mettoit de fon argent pour hâter, ou pour perfectionner les travaux; loin de faire valoir Les foins & peines, il en parloit avec une

mo

modeftie qui enhardiffoit à le recompenfer mal, & ce n'étoit jamais un tert avec lui que le peu de reconnoiffance.

Ce qu'il a fait de plus confiderable a été à Coulanges la Vineufe, petite Ville de Bourgogne à trois lieues d'Auxerre. Coulanges eft riche en Vins, & de-là vient fon epithete, qui lui convient d'autant mieux, qu'elle n'avoit que du vin, & point d'eau. Les Habitans étoient réduits à des Mares & comme elles étoient fouvent à fec, ils alloient fort loin chercher un Puits qui tariffoit auffi & les renvoyoit à une Fontaine éloignée de-là d'une lieuë. Afin que l'on ne manquât pas d'eau dans les Incendies, chaque Habitant étoit obligé par Ordonnance de Police à avoir à fa porte un Tonneau toûjours plein, & malgré cette précaution la Ville avoit eu trois grands incendies en trente ans & à l'un on avoit été obligé de jetter du Vin fur le Feu. Ils avoient obtenu en 1516. un Arrêt du Confeil qui leur permettoit de lever fur chaque Piéce de Vin qui fortiroit de leur Térritoire un Impôt dont le produit feroit employé à chercher de l'Eau, & à tou tes les Dépenfes néceffaires; mais tous les Ingenieurs qui avoient tenté cette entreprife, l'avoient tentée fans fuccès, quoique vivement animés, & par l'utilité, & par la gloire.

[ocr errors]

M. Dagueffeau alors Procureur General, & aujourd'hui Chancelier de France, ayant acquis le Domaine de cette Ville, voulut faire encore un effort, ne fût-ce que pour

s'af

s'affurer qu'il n'en falloit plus faire, & en 1705. il s'adreffa à M. Couplet, qui partit pour Coulanges au mois de Septembre; ce mois eft ordinairement un des plus fecs de toute l'année; 1705. fut une année fort feche; & fi l'on pouvoit alors trouver de Peau, il n'étoit pas à craindre qu'on en manquât jamais.

En une infinité d'endroits de la terre 11 court des veines d'eau, qui ont effectivement quelque rapport avec le fang qui coule dans nos veines. Si ces eaux trouvent des terres fablonneufes, elles fe filtrent au travers, & fe perdent, il faut des fonds qui les arrêtent, tels que font des lits de Glaife. Elles font en plus grande quantité selon la difpofition des terrains. Si, par exemple, une grande Plaine a une pente vers un Côteau & s'y termine, toutes les eaux que la Plaine recevra du Ciel feront déterminées à couler vers ce Côteau, qui les raffemblera encore, & elles fe trouveront en abondance au pied. Ainfi la recherche & la découverte des Eaux dépend d'un examen des terrains fort exact & affes fin, il y faut un coup d'œil jute & guidé par une longue expérience.

M. Couplet arrivé à quelque diftance de Coulanges, mais fans la voir encore & s'étant feulement fait montrer vers quel endroit elle étoit, mit toutes fes connoiffances en ufage, & enfin promit hardiment cette eau fi defirée, & qui s'étoit dérobée à tant d'autres Ingenieurs. Il marchoit fon niveau à la main, & dès qu'il put voir les maisons de la Ville, il affura que l'eau feroit plus haute.

Quel

« AnteriorContinuar »