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M. Eckard promet une Vie plus complete de M. Leibniz; c'est aux Memoires qu'il a eu la borné de me fournir qu'on en doit déja cette ébauche. Il raffemblera en un Volume toutes les Piéces imprimées de ce grand Homme éparfes en une infinité d'endroits, de quelque efpece qu'elles foient. Ce fera là, pour ainfi dire, une Refurrection d'un Corps dont les membres étoient extrêmement difperfés, & le tout prendra une nouvelle vie par cette réunion. De plus M. Eckard donnera toutes les Oeuvres pofthumes qui font achevées, & des Leibnitiana qui ne feront pas la partie du Recueil la moins curieufe. Enfin il continuera l'Hiftoire de Brunfvic, dont M. Leibniz n'a fait que ce qui eft depuis le commencement du Regne de Charlemagne jufqu'à l'an 1004. C'eft prolonger la vie des grands Hommes, que de poursuivre dignement leurs entreprifes.

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DAINININI? 3:292

ELOGE

DE MONSIEUR

OZANA M.

JAC

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ACQUES OZANAM nâquit en 1640. cars la Souveraineté de Dombes d'un Pere riche, & qui avoit plufieurs Terres. Sa famille étoit d'origine Juive, ce que mar que affés le nom, qui a tout-à-fait l'air Hebreu, mais il y avoit long-temps que cette tache, peut-être moins réelle qu'on ne penfe, étoit effacée par la profeffion du Chriftianifme, & de la Religion Catholique. Cette famille étoit illuftrée par plufieurs Charges qu'elle avoit poffedées dans des Parlemens de Provinces.

M. Ozanam étoit cadet, & par la Loi de fon Païs tous les biens devoient appar tenir à l'aîné. Son Pere, qui étoit un homme vertueux, voulut réparer ce defavantage par une excellente éducation. Il le deftinoit à l'Eglife pour lui faire tomber quelques petits Benefices qui dépendoient de la famille. Les mœurs du jeune Homme étoient bien éloignées de s'oppofer à

cette

cette destination, elles fe portoient naturellement à tout ce qui feroit à defirer dans qu un Ecclefiaftique, & une Mere très-pieuse les fortifioit encore & par fon exemple & par fes foins, d'autant plus puiffans qu'elte étoit tendrement aimée de ce fils. Cependant il ne fe tournoit pas volontiers du côté de l'Eglife, il avoit fort 'bien rétiffi dans. fes Humanités, mais il avoit pris beaucoup de dégoût pour la Philofophie Scholaftique, la Theologie reffembloit trop à cette Philofophie, & enfin il avoit, vů par malheur des Livres de Mathematiques, qui lui avoient appris à quoi il étoit definé.

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Il n'eut point de Maître & on n'avoit garde de lui en donner mais la Nature feule fait de bons Ecoliers. A 10. ou 12. ans il paffoit quelquefois de belles nuits dans le Jardin de fon Pere, couché fur le dos pour contempler la beauté d'un Ciel bien étoilé; fpectacle en effet auquel il est éton-. nant que la force même de l'habitude puiffe nous rendre fi peu fenfibles. L'admiration des mouvemens celeftes allumoit déja en lui le defir de les connoître, & il en déméloit par lui-même ce qui étoit à la portée de fa Raifon naiffante.. A l'âge de 15. ans il avoit compofé un Ouvrage de Mathematique qui n'a été que manufcrit mais où il a trouvé dans la fuite des chofes dignes de paffer dans des Ouvrages imprimés. Il n'eut jamais de fecours que de fon Profeffeur en Théologie, qui étoit auffi Mathematicien, mais un fecours leger, don

né à regret, & toûjours accompagné d'exhortations à n'en guere profiter.

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Après 4. ans de Theologie faits comme ils peuvent l'être par obéïflance, fon Pere étant mort, il quitta la Clericature, & par pieté & par amour pour les Mathemati ques. Elles ne pouvoient pas lui rendre ce qu'il perdoit mais enfin elles devenoient fa feule reffource, & il étoit jufte qu'elles le fuffent. Il alla à Lion où il fe mit à les enfeigner. L'éducation qu'il avoit eue lui donnoit beaucoup de répugnance à recevoir le prix de fes Leçons, il eût été affés payé par le plaifir de faire des Mathematiciens & de ne parler. que de ce qu'il aimoit, & il rougiffoit de l'être d'une autre maniere..

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Il avoit encore une paffion, c'étoit le Jeu. Il joüoit bien & heureufement. L'efprit de combinaifons peut y fervir beauGoup. Si la fortune du Jeu. pouvoit être durable, il eût été affés à propos qu'elle eût fuppléé au revenu leger des Mathematiques.

H fit imprimer à Lyon en 1670. des Tables des Sinus, Tangentes & Secantes, & des Logarithmes plus correctes que celles de Ulacq, de Pitifcus, & de Henri Briggs. Comme ces Tables font d'un ufage fort frequent, c'eft un grand repos que d'en avoir de fûres.

Deux Etrangers à qui il enfeignoit à Lyon lui ayant parlé du chagrin où ils étoient de n'avoir point reçû des Lettres de Change. qu'ils attendoient de chez eux pour aller à C. 7

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Paris, il leur demanda ce qu'il faudroit & fur ce qu'ils répondirent 50. Piftoles, il Les leur prêta fur le champ fans vouloir de Billet. Ces Meffieurs arrivés à Paris en fisent le recit à feu M. Dagueffeau, Pere de M. le Chancelier. Touché d'une action fi noble en toutes fes circonftances, il les engagea à faire venir ici M. Ozanam fur l'af furance qu'il leur donnoit de le faire connoître & de l'aider de tout fon pouvoir. Peu de gens auffi fenfibles au merite font à portée de le favorifer ou peu de gens à portée de le favorifer y font auffi fenfibles.

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M. Ozanam fe détermina donc à quitter Lyon. Sur la route un inconnu fui dit que s'il pouvoit renoncer au Jeu il feroit fortune à Paris, qu'il y acquerroit beaucoup de reputation, qu'il s'y marieroit à 35. ans, & quelques autres chofes parculieres que l'évenement à juftifiées. Il y auroit dans cet Inconnu de quoi faire un Devin, fi l'on vouloit, ou un Rofe-croix qui couroit le monde.

A peine M. Ozanam étoit-il arrivé à Pa-ris qu'il apprit que fa Mere étoit à l'extremité, & vouloit le voir avant que de mourir. Comme à l'aimoit avec tendreffe il y vola, mais il eût la douleur de la trouver morte. Elle avoit eu deffein de le faire fon heritier, mais le Frere aîné l'empêcha par des artifices, dont il fe punit enfuite lui-même, en conduifant très-mal & en diffipant ce bien qu'il avoit tant aimé.

M.. Ozanam revint à Paris, & n'eut plus

au

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