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Liv. IV.
CHAP. I.

LIVRE

QUATRIE ME,

Dans lequel on explique plus en détail la Difcipline des Orientaux touchant la Pénitence.

On n'a au

moire de

tentielle

au-delà du

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De la difcipline particuliere des Orientaux touchant la Pénitence, & des changements qui y sont arrivés.

Comme

Omme la féparation des Neftoriens eft la plus ancienne de celles cune me qui fubfiftent encore en Orient, on ne trouve dans les livres eccléfiaftila difcipli- ques rien de plus ancien fur la difcipline de la Pénitence que le temps ne péni de Nectarius, qui précéda d'environ trente ans Neftorius dans le Siege parmi les de Conftantinople. Ainfi la premiere idée qu'on peut fe former de leur Orientaux plus ancienne difcipline, eft conforme à ce que les plus habiles Auteurs temps de du dernier fiecle ont écrit touchant la forme qu'elle eut, après que NectaNeftorius. rius eut fait le changement fur lequel il y a eu tant de difputes. Ceux qui ont prétendu qu'il avoit aboli la Confeffion & la Pénitence. font réfutés par les Grecs & par tous les Orientaux, puifqu'ils ont confervé l'une & l'autre ; & on ne peut douter que lorfque les Neftoriens fe font féparés de l'Eglife, ils n'aient confervé la difcipline qui étoit alors en ufage, dont la plus grande partie fubfifte encore préfentement.

Ils n'ont aucune

connoif

Il est vrai qu'ils n'ont aucune connoiffance de ce qui a précédé le temps de Nectarius, ni même de cette partie de fon histoire qui a rapport fance du au changement qu'il introduifit fur la Pénitence. Sévere n'en parle pas, changem. traitant particuliérement ce qui regarde les Patriarches d'Alexandrie, Abulfous Nec farage & les autres Hiftoriens n'en font aucune mention, & il ne paroit pas que les plus habiles Théologiens aient fu ce que fignifioient les anciens Canons par rapport aux différents degrés de la Pénitence.

introduit

tarius.

Pénitence

en quoi

Ainfi en remontant à la plus haute, antiquité des Eglifes Neftoriennes des Grecs; & Jacobites, on ne voit point que la Pénitence ait eu une autre forme confiftoit. que celle dont l'Eglife Grecque fe fert depuis ce temps-là, particuliéreDe Poenit. ment depuis Jean le Jeûneur. Le favant P. Morin a marqué qu'elle con1.6. c. 23. fiftoit dans une confeffion exacte de tous les péchés faite en fecret; après

laquelle le Prêtre interrogeoit le pénitent fur toutes les circonftances des péchés; puis il impofoit des pénitences prefcrites pour chaque péché,

foit par les anciens Canons, foit par les livres Pénitentiaux approuvés Liv. IV. dans l'Eglife, qui dans les premiers temps n'avoient guere moins de févé- CHAP. I. rité que les anciens Canons. Enfuite le Prêtre donnoit l'abfolution au pénitent, mais fans l'admettre à la participation de l'Euchariftie, jusqu'à l'accomplissement entier de la pénitence, qui néanmoins pouvoit être abrégée & diminuée fuivant la prudence du Confeffeur. Il peut y avoir eu quelques légeres diverfités dans cette difcipline, mais elles fe rapportent toutes à cette forme générale.

Orientaux

Grecs.

Les Orientaux, autant qu'on en peut juger par les monuments d'An- Celle des tiquité qui nous reftent, avoient de pareilles regles. On ne voit dans femblable leurs Hiftoires ni dans leurs Canons aucun veftige de Confeffion faite en à celle des public, mais il paroît qu'elle a toujours été faite en fecret: que toutes les inftructions faites pour les Prêtres leur recommandent expreffément, & même fous peine de dépofition, de ne révéler pas les péchés qui leur ont été dits en Confeffion, & que c'eft un des cas pour lefquels on impofe de plus rudes pénitences à ceux qui, par haine ou par légéreté, manqueroient au fecret qu'ils doivent aux pénitents. Il ne paroît pas que la déclaration qu'ils font de tous leurs péchés aux Confeffeurs, foit une action diftinguée des interrogations que ceux-ci doivent leur faire, puifque cela fe fait conjointement; & même le Pénitentiel de Barfalibi & quelques autres plus anciens, parlant de l'acte de la Confeffion, qu'ils appellent comme les Grecs Ealexia, marquent fimplement que le Confeffeur interrogera le pénitent; ce qu'on voit prefcrit non feulement dans les Pénitentiaux Grecs, mais dans les Latins & dans les formules que Reginon, Burchard & d'autres Canoniftes ont dreffées pour l'ufage de leurs fiecles.

peines ca

L'impofition de la pénitence canonique fuit immédiatement la Con- Impofifeffion dans les Pénitentiaux des Eglifes d'Orient; mais on ne peut dire tion des certainement que leur ufage ait été de donner l'absolution auffi-tôt ; car coniques on pourroit même douter qu'elle ait été donnée auffi-tôt parmi les Grecs. On trouve diverses oraifons que le Prêtre prononce fur les pénitents avant la Confeffion, d'autres après qu'elle a été faite, & d'autres après l'impofition de la pénitence. Elles conviennent toutes dans le même sens, qui eft de demander à Dieu miféricorde & la rémiffion des péchés pour le pénitent; & pendant le cours de la pénitence, le Prêtre en dit de pa- Barf. Poen. reilles lorfque celui y qui eft foumis travaille à s'en acquitter. La confor- Tripoli. mité de ces prieres avec celles qui fe difent lorfqu'on réconcilie entiérement le pénitent, peut faire croire que les premieres contiennent une forte d'abfolution. Cependant elle n'eft pas affez marquée pour le pouvoir affurer, & elles ont beaucoup plus de conformité avec celles qui fe difoient autrefois dans l'Eglife Grecque & dans l'Eglife Latine fur les pénitents,

Liv. IV. lorsqu'ils fe préfentoient pour recevoir l'impofition des mains des Evêques CHAP. I. ou des Prêtres, dont il eft parlé dans les anciens Conciles, & dont il reste encore quelques veftiges dans nos Offices de la Semaine fainte. Mais il y a beaucoup plus de vraisemblance à croire que l'absolution n'a propre ment été donnée qu'en même temps que les pénitents étoient admis à la participation de l'Euchariftie; & il ne paroît pas qu'on puiffe prendre dans un autre sens ce qui eft marqué fur ce fujet dans les Pénitentiaux de Barfalibi, & d'autres plus anciens.

elles font

Canon.

Pourquoi A l'égard des pénitences, les Orientaux auffi-bien que les Grecs, les appellées appellent Canon, parce qu'elles ont été d'abord réglées fur les anciens Canons des Conciles & des Peres Grecs qui fe trouvent dans les Collections arabes & fyriaques. C'est pourquoi Echmimi, Ebnatfal & divers Canoniftes, non feulement les ont confervés dans les Recueils entiers de ceux des Conciles, comme des monuments d'Antiquité respectables, mais ils les ont inférés dans les abrégés qu'ils en ont fait par lieux communs. Cela ne prouve pas qu'ils foient en ufage; mais quelques-uns de ces Canoniftes difent qu'ils les rapportent, afin que les Prêtres, en étant instruits, s'en fervent pour faire comprendre aux pénitents combien la difcipline de l'Eglife eft mitigée à leur égard, & que ce motif ferve à leur faire recevoir & accomplir avec plus de foumiffion les pénitences qu'on leur prescrit.

Elle eft réglée fur lesCanons

moder

nes.

Outre ces anciens Canons, il y en a plufieurs autres qui ne font pas de la même antiquité, mais qui ne font guere plus récents que le huitieanciens & me & le neuvieme fiecle, dans lefquels la face de l'Eglife d'Orient fut entiérement changée par la conquête que les Mahométans firent de la plus grande partie de l'Afie & de l'Afrique. Ces Canons font tirés de la discipline de ces temps-là; & une marque certaine de leur antiquité est, qu'ils font ordinairement plus féveres que ceux fuivant lefquels la pénitence a été réglée depuis plus de fix cents ans. Ceux-là fe trouvent dans la Collection de Barfalibi, & il y en a d'autres qui ly font affez conformes, mais de l'âge defquels il eft difficile de juger, parce qu'ordinairement on les trouve fans nom d'Auteur. Ce font-là les regles fur lesquelles toute la difcipline des Eglifes Orientales a été fondée, & on trouve encore un affez grand nombre de ces Canons pour en faire un ample recueil.

Abfolu

Après l'accompliffement de la pénitence, ou entiere ou en partie, car tion don- le Confeffeur a toujours eu pouvoir de la modérer, de l'abréger, ou de née après l'accom- la changer, le pénitent recevoit l'abfolution & étoit admis à la Commupliffement nion, ce qui étoit le fceau de fa parfaite & entiere réconciliation. Il y a dans les Manufcrits un grand nombre de prieres pour abfoudre les pénitents; & comme la plupart de celles qui font dans les Pénitentiaux Grecs

de la Pénitence.

& Latins,

& Latins, elles font en forme déprécatoire, & c'est par cette raison que Liv. IV. quelques Miffionnaires les ont eues pour fufpectes, ou même les ont con- CHAP. I. damnées. Mais on fait affez que ce jugement n'a pas été fuivi par plufieurs grands Théologiens, & que l'Eglife durant tant de fiecles d'une parfaite communion entre l'Orient & l'Occident, n'a été troublée par aucune conteftation fur ce point de difcipline. Telle est celle qui a été observée dans les Eglifes Orientales, & il faut préfentement l'expliquer plus en détail felon fes parties.

lon la dif

Les témoignages qui ont été rapportés prouvent fuffifamment que les De la Con Eglifes Orientales ont cru la Confeffion néceffaire; & voici comme elle feffion fey a été pratiquée. Tout homme coupable de quelque péché grief devoit cipline s'adresser à un Prêtre, qui avoit reçu le pouvoir de fon Evêque ou du orientale. Patriarche pour entendre les Confeffions. Les Grecs l'appellent Пveuμaτixos, le Pere fpirituel, & les Arabes Mohalem, c'est-à-dire, le Maître ou le Docteur. Voici comme en parlent les Pénitentiaux.

Le Confeffeur & le pénitent vont à l'Eglife, & le Confeffeur s'affied à la porte. Le pénitent met le genou droit à terre & ayant la tête décou- Poen. Barf. verte, les mains jointes & les yeux baiffés, il confeffe tous les péchés fans en celer aucun. Les Grecs prefcrivent que le Prêtre interroge en la maniere qu'il est marqué dans le Canon de Jean le Jeûneur, & en divers autres. On trouve la même chofe en divers Offices fyriaques & arabes. Après cela le Confeffeur fait une courte exhortation à fon pénitent, pour lui dire que s'il a une ferme réfolution de ne plus commettre les péchés qu'il vient de confeffer, il en obtiendra de Dieu la rémiffion par le ministere facerdotal, & que tels péchés ne feront pas révélés à sa confusion au jour du Jugement, ni punis comme ils auroient dû l'être. Le pénitent demeure cependant à genoux, & les mains jointes. L'Evêque ou le Prêtre difent quelques Hymnes, des Pleaumes & d'autres prieres marquées dans les Offices; puis ils en difent de particulieres fur le pénitent pour chaque péché. Il y en a de cette forte plufieurs recueillies par Denys Barfalibi; & lorfque le Prêtre les prononce, il impofe fa main droite fur la tête du pénitent; en quoi on peut remarquer un refte de l'ancienne difcipline, fuivant laquelle les pénitents devoient recevoir fouvent l'impofition des mains des Prêtres.

peut déci

Il n'y a rien dans ces prieres qui puiffe nous faire connoître qu'elles On ne fignifiaffent l'absolution, quoiqu'elles foient affez femblables à celles qui der que les étoient employées lorsqu'on la donnoit: parce que leur fens principal eft prieres fur d'implorer la miféricorde de Dieu fur les pénitents, afin qu'en accom- tents conles péniplissant les regles de l'Eglife, ils fe rendiffent dignes de l'abfolution, qui tinffent Perpétuité de la Foi. Tome V. G g

l'abfolu tion.

Liv. IV. leur étoit accordée pleinement lorsqu'ils étoient admis à la Communion. CHAP. I. Si cela peut être regardé comme une absolution préparatoire, c'est une question que nous ne trouvons pas dans les Théologiens Orientaux, qui ont ignoré les fubtilités que divers Théologiens du moyen & du dernier âge ont apportées dans les Ecoles fur cette matiere. Ce que le P. Morin a dit des Grecs qu'ils donnoient l'absolution en impofant la Pénitence, peut avoir rapport à ces prieres mais comme cette conjecture peut fouffrir quelque difficulté à l'égard des Orientaux, & que nous n'avons pas dans leurs livres les fecours néceffaires pour l'éclaircir, nous en laifferons le jugement aux Savants.

Impoft

péniten

ce.

Après cette premiere action, qui eft le fondement de la Pénitence cation de la nonique, le Prêtre impofoit le Canon; c'est-à-dire, les peines prescrites par les Canons reçus dans chaque Eglife & confirmés par l'ufage, pour régler la longueur & la qualité de la pénitence felon le nombre & la griéveté des péchés. Il refte dans les livres fyriaques & arabes plufieurs Collections de ces Canons, avec cette différence, que les uns font plus féveres, ce qui fait connoître qu'ils font plus anciens, & que les autres le font moins, marque certaine qu'ils font plus récents, parce qu'il eft ordinaire qu'on fe relâche de l'ancienne févérité à mesure qu'on s'en éloigne.

Elle eft réglée fuivant les

Mais il's n'ont pas

été fuivis

ment..

Ils font tous fondés fur les anciens Canons, fi ce n'est que quelquesuns font appropriés à des péchés qu'on ne commettoit pas alors. Ainfi la plupart ordonnent à l'égard de ceux qui ont renoncé à la foi, les peines établies anciennement contre ceux qui tomboient dans l'Idolâtrie, & ainfi du refte.

Ce que les anciens Canons marquoient, que la pénitence devoit durer tant d'années, eft ordinairement réduit à retrancher de la Communion entiére- pendant ce temps-là: & les exercices laborieux font déterminés en détail par celui qui impofe la peine canonique. Il y a même fujet de conjecturer, que dans les Collections de la premiere forte, on a eu plus en vue de rappeller la mémoire de la rigueur de la difcipline des premiers fiecles, afin que les Prêtres ne fe relâchaffent pas trop, & que les pénitents fe foumiffent plus volontiers à la pénitence qui leur étoit impofée, que de prescrire des regles qui duffent être fuivies dans la pratique. Par exemple la pénitence d'un homicide volontaire eft de douze ans : celle d'une femme qui fe fait avorter, des inceftes, de la bestialité, de quinze ; ce qui a plus de rapport à l'usage ancien, qu'à tout ce qui s'obferve dans les livres qui nous reftent depuis le Mahométifme.

Les Nefto

riens & Ja

cobites ont fuivi

la difcipli

ne reque avant leur

féparation.

On ne peut même juger, finon au hafard, du véritable état de la dif cipline pratiquée parmi les Neftoriens & les Jacobites dans les premiers

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