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temps de leur féparation, puifqu'il ne refte aucune Collection de Canons Liv. IV. Pénitentiaux dont l'autorité foit certaine ; & ce qu'on en peut dire de CHAP. I. plus vraisemblable eft, que ces premieres, dont la févérité marque en même temps l'antiquité, nous en peuvent donner quelque idée. Car depuis que ces Eglises, séparées déja par l'héréfie & par le fchifme, cefferent à caufe de la domination des Barbares, d'avoir aucun commerce avec celles d'Orient & d'Occident foumifes aux Empereurs Chrétiens, il ne s'y est tenu aucun Concile qui pût établir des regles de difcipline commune à toutes celles que la même créance uniffoit ensemble, comme celles d'Alexandrie & d'Antioche Jacobites. Quand il y auroit eu quelque Synode ou réglement général, approuvé & reçu dans l'un des deux Patriarchats, il ne pouvoit être confidéré comme ayant force de loi dans l'autre, chaque Patriarche se regardant comme indépendant, & n'ayant point de Supérieur Eccléfiaftique. Les Melchites ou Orthodoxes reconnoiffoient le Patriarche de Conftantinople; mais l'éloignement & le défaut d'autorité dans des pays foumis aux Infideles, rendoient cette fubordination inutile. Les Nestoriens ne reconnoiffoient d'autre Supérieur Eccléfiaftique que leur Catholique ou Patriarche. Le Patriarche Jacobite d'Alexandrie étoit dans la même indépendance; parce que fi avant le Concile de Calcédoine fes prédéceffeurs avoient reconnu la fupériorité du Siege de Conftantinople, conformément au Droit nouveau, ils cefferent de la reconnoître après la dépofition de Diofcore, & cette féparation dure encore préfentement. Il en étoit de même du Patriarche d'Antioche Jacobite, que fa communion avec celui d'Alexandrie n'empêchoit pas de gouverner fon Eglife & le Diocese d'Orient avec une autorité abfolue.

ne com

Il n'y eut donc pas apparemment de regles générales pour les péni- Il n'y a pas tences canoniques, mais chaque Eglife conferva quelque chofe des anciens eu d'autre regle géCanons; ce qui fe peut prouver par la conformité entiere qui fe trouve nérale que entre ceux que nous avons, quoiqu'ils aient été recueillis par des Au- la difcipliteurs de différentes fectes, à caufe qu'ils étoient tirés de la fource com- mune de mune de l'ancienne Tradition. Les Collections faites par les Grecs qui l'Eglife. n'avoient aucune communion avec les Neftoriens ou les Jacobites, qui font des Nomocanons, ne font guere différentes en fubftance, puifqu'on y voit les Canons anciens, quoiqu'ils foient hors d'ufage, rapportés comme le fondement de la difcipline des temps fuivants. Mais dans des temps d'ignorance & de licence, qui étoit fouvent fort augmentée par la protection que ceux qui avoient intérêt de l'introduire ou de la maintenir trouvoient auprès des Infideles, il y fallut apporter plufieurs tempéraments. En diverfes rencontres la difcipline ancienne n'étoit pas praticable; & même les Grecs, quoiqu'ils ne fuffent pas dans la même fervitude

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Liv. IV. l'avoient modérée confidérablement. Suivant le Droit commun, les Evê CHAP. I ques & même les Confeffeurs, à plus forte raifon les Patriarches, pouvoient abréger la pénitence pour le temps & en modérer la rigueur, ayant égard aux forces ou à l'infirmité du pénitent, à fon zele, à fes facultés; de forte qu'ils pouvoient ordonner des aumônes à celui qui ne pouvoit pas foutenir les jeûnes & les abftinences par infirmité, ou qui n'étoit pas en état de faire les profternements & les oraifons qu'on prefcrivoit ordinairement comme des jeûnes & des prieres extraordinaires étoient impofés à celui qui ne pouvoit pas faire l'aumône.

Les Pa

triarches abuferent

tences.

Ces Patriarches ayant une autorité abfolue en abuferent, accordant très-facilement des relaxations de pénitences, parce que comme toute de leur au- l'action de la pénitence canonique ceffoit ordinairement par la Commutorité en nion, dès qu'ils l'accordoient tout étoit fini; & c'étoit ce qu'ils faifoient abrégeant des péni- très-fouvent, tant par foibleffe & par déréglement, que par des vues humaines, fous prétexte de crainte que les pénitents ne fe portaffent au défefpoir, & ne fe fiffent Mahométans. La difcipline fe trouva donc en peu de temps fort relâchée, & les Prêtres abufant de leur miniftere accordoient fouvent l'abfolution fans pénitence. Enfuite les abus vinrent à un fi grand excès, que la difficulté de trouver des Confeffeurs qui euffent les qualités requifes pour s'acquitter dignement de leur miniftere, fut un des prétextes duquel fe fervirent les Jacobites d'Egypte pour abolir la Confeffion.

Nouvelles
Collec-

tions de

tiaux dans

Enfin dans le douzieme fiecle, on fit quelques nouveaux recueils de Canons pénitentiaux proportionnés à la calamité des temps, & à la foiCanons bleffe des hommes, & tel fut le deffein de la Collection de Denys Barfapéniten- libi, dont il eft à propos de donner quelques exemples. Celui, dit-il, le douzie- qui a commis un homicide volontaire dans la perfonne d'un Chrétien, jeuner a me fiecle. quarante jours au pain & à l'eau, fans vin & fans buile: il jeûnera de la même maniere le jeune de Noël & celui des Apôtres ; & pendant le Caréme il le rompra feulement le Jeudi & Samedi Saint & le jour de Pâques & de Noël, ufant de vin & d'huile, & mangeant du poisson. Il passera deux années: de cette maniere, jeunant ainsi les jeunes ordinaires excepté les jours marqués. La premiere année il n'entrera point dans l'Eglife, mais il demeurera: à l'entrée profterné à terre pleurant fes péchés. Enfin il jeunera les mercredis vendredis tout le refte de fa vie; & nous défendons, dit le même Canon an Prêtre de diminuer cette pénitence. L'homicide fait par vengeance de Exemples la mort de quelques amis ou parents, eft puni d'un jeûne de quarante de péni jours au pain & à l'eau, & de fept ans de pénitence, que le Prêtre réglera comme il jugera à propos..

tences

pour plu

ficurs péchés.

Le parricide jeûnera toute fa vie fans boire de vin, & ne mangeant

qu'une fois par jour, exceptés les famedis & les Dimanches. Durant un Liv. IV. an il n'entrera point dans l'Eglife, mais il demeurera à la porte. la porte. Après CHAP. I. cela il pourra y entrer, mais par la porte de derriere, & quand il aura terminé fa pénitence, il ne communiera qu'une fois par an. Celui qui tue fa femme surprise en adultere eft foumis à fix ans de pénitence. Si quelqu'un tue fa mere en pareil état, après quarante jours continus d'une très-rude pénitence, il eft condamné à faire trois fois le pélerinage de Jerufalem, & à jeûner toute fa vie les mercredis & les vendredis, même après les onze années auxquelles eft déterminé le temps de fa pénitence. Une femme qui étant groffe fe défait de fon fruit, eft foumise à une pénitence de quatorze ans ; & d'abord elle doit jeûner quarante jours dans la derniere rigueur, & les mercredis & vendredis au pain & à l'eau toute fa vie. Celle qui tue fon enfant eft encore punie plus févérement; car il lui eft ordonné de jeûner douze ans de la même maniere; c'est-à-dire, au pain & à l'eau.

La discipline n'eft pas moins févere à l'égard des péchés de la chair. Pour ceux Pour la fimple fornication, les mêmes Canons prefcrivent un an de péni- delachair. tence, pendant lequel le pénitent fera éloigné des Sacrements, & il jenera les mercredis & les vendredis au pain & à l'eau. Celui qui a forcé une femme fera pénitence pendant fix ans, jeûnant d'abord une quarantaine au pain & à l'eau, & deux jours par semaine de même. Celui qui a commis le méme péché à l'égard d'une vierge, jeûnera ainfi durant un an: & s'il eft marié, pendant fix ans. Ceux qui ont péché avec des Mahometans, hommes ou femmes, font exclus douze ans de la Communion, ils font obligés à faire le pélerinage de Jerufalem, & pendant tout le temps de leur pénitence ils ne peuvent entrer dans l'Eglife. La pénitence eft encore plus févere à l'égard de ceux qui ont eu un commerce criminel avec des Juifs, & ils font foumis à une pénitence qu'on peut regarder comme perpétuelle, puifqu'elle eft de quarante ans. Les Sodomites font exclus de l'entrée de l'Eglife pendant un an, qu'ils doivent passer dans les veilles, dans les prieres, les profternements & les jeunes, s'abftenant de vin, d'huile & de toute chofe graffe: puis ils feront le voyage de Jerufalem, ils fe laveront dans le Jourdain, après quoi ils feront réconciliés. Le temps que doit durer la pénitence? n'eft pas prescrit. Mais elle eft de vingt-cinq ans pour l'incefte, & de quinze pour la beftialité. Il y a d'autres Canons auffi féveres pour divers. péchés dans cette premiere Collection, qui non feulement femblent donner dans l'excès, mais qui ne s'accordent pas entiérement avec la difcipline ancienne, & ne paroiffent pas avoir été pratiqués. Telles font les pénitences d'un an pour avoir eu la penfée de commettre un homicide, un péché contre la chair ou quelqu'autre, quoiqu'elle n'ait pas été exécutée:

Liv. IV. celle de douze ans pour avoir reçu l'Euchariftie fans être à jeun, même CH. II. par inadvertence: celle de deux ans, pour avoir seulement mangé avec des Juifs, & quelques semblables, qui surpassent la févérité des temps les plus anciens de l'Eglife.

Il y a fur-tout un Canon attribué par une grande ignorance à Saint Bafile, par lequel il eft ordonné que celui qui renonçant à la foi embrasfera le Mahométifme, ira dans le lieu même où il en a fait profeffion, pour renoncer de la même maniere à cette fauffe Religion. On a déja parlé de cet article.

nys Barfa

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Suite de la même matiere, & du changement qui arriva par la nouvelle
Collection de Canons pénitentiaux.

LE

Ce qui enE trop grand relâchement, & l'incertitude de plufieurs de ces Cagagea De- nons, engagea Denys Barfalibi de faire une Collection qui n'eût pas les libi à faire mêmes inconvénients, & qui pût être d'ufage. On ne peut douter qu'elle fa Collec- n'ait eu une approbation générale, puisqu'elle eft ordinairement citée par ceux qui ont écrit depuis. Nous en rapporterons quelques extraits.

tion.

difcipline.

Pour les

la chair.

Exemples A l'égard des péchés de la chair par lefquels commence ce Pénitentiel, de cette voici quelques exemples de la difcipline qui y eft prefcrite. La fimple fornication eft punie d'un an de pénitence, pendant laquelle le pécheur eft péchés de privé de l'Eucharistie, jeûnant, outre les Carêmes ordinaires, quelques jours de la femaine; faisant auffi cent génuflexions ou profternements par jour; & de plus il donnera aux pauvres deux deniers d'or, qui étoient des pieces du poids de notre ancien écu d'or. La pénitence eft doublée pour les adulteres. Pour les Sodomites, il eft ordonné quatre ans de jeûne, fans boire de vin, & fans ufer d'huile ni d'aucun aliment gras, ou de poiffon; cent cinquante génuflexions par jour, & fix deniers d'or d'aumônes. Cette même pénitence eft prefcrite pour ceux qui ont péché avec des Religieufes, & pour celles-ci lorsqu'elles fe font abandonnées à un Prêtre ou à un Religieux; & pour celles qui ont péché avec un Juif ou un Mahométan: mais fi elles font efclaves, la pénitence doit être mitigée. De même un enfant qui a été forcé par fon maître, étant fort jeune, eft foumis à la pénitence ordonnée pour la fornication: & à celle de l'adultere s'il s'eft abandonné lui-même lorfqu'il eft parvenu à l'âge de difcrétion. On ordonne mille génuflexions à celui qui a ufé du mariage durant le Carême, ou le jour qu'il a reçu la Communion,

La pénitence ordonnée pour la réconciliation de ceux qui ont renié la Liv. IV. foi eft fort remarquable. Celui qui a commis ce crime demeurera qua- Cн. II. rante jours à la porte de l'Eglife, priant ceux qui entrent & qui fortent Pour l'apoftafie. d'intercéder pour lui auprès de Dieu; & durant l'Office il tiendra un cierge allumé. Pendant ce temps - là il jeûnera étroitement, s'abftenant de vin, de poisson, d'huile, &c. Après ces quarante jours il entrera dans l'Eglife, mais feulement pour prier & pour témoigner fa repentance par fes pleurs & par fes foupirs. Puis le Prêtre lui prefcrira les jeûnes convenables, & le féparera de la Communion pour sept ans. Il fera par jour cent génuflexions, & il donnera dix deniers d'or en aumônes, ou il rachetera un captif; & avant que de lui donner l'absolution, on dira pour lui cent oraifons, & après on célébrera cent Meffes ou Liturgies pour lui.

micide.

Celui qui eft coupable d'un homicide volontaire jeûnera pendant trois Pour l'hoans, felon Barfalibi, quoique felon d'autres, à ce qu'il témoigne, il ne jeûne qu'un an : il fera par jour cent génuflexions, & rachetera un captif. On peut connoître par ces exemples quelle étoit alors la difcipline de l'Eglife Orientale pour l'impofition des pénitences. C'étoit ces regles qu'il falloit que le Prêtre propofât d'abord à fon pénitent; & après avoir examiné les circonftances des péchés confeffés, il régloit le temps, les mortifications, les prieres & les aumônes qu'il lui prefcrivoit. Il lui faifoit promettre, même avec ferment, comme le marquent plufieurs Auteurs, qu'il ne commettroit plus de pareils péchés, enfuite qu'il accompliroit fa pénitence, autant qu'il dépendroit de lui.

nies &

Eccl Rit.

Après cette impofition des peines canoniques, le Prêtre difoit un Office Cérémo destiné pour cette fonction, qui a une entiere conformité avec plufieurs prieres qui fe trouvent dans nos anciens Sacramentaires avec ces titres. Ratio ad pour imdandam pænitentiam. Ordo ad fufcipiendum pœnitentem, ad dandam pœni- pofer la pénitententiam: & qui font assez semblables à ceux des Grecs. Voici ce qu'il con- ce. tient. Le Prêtre dit d'abord une oraison pour demander à Dieu qu'il oublie De Antiq nos péchés, qu'il nous comble de fes miféricordes, & qu'il nous faffe marcher dans fes voies. Puis il dit un Répons; le commencement du Pleaume cinquantieme, deux autres prieres au nom du pénitent, un autre Répons, & quelques oraifons que nous ne pouvons bien exprimer en notre langue; enfuite le Prêtre met de l'encens dans l'encenfoir, & après les encenfements il dit les oraifons particulieres pour les principaux péchés, qui font marquées dans un livre à part. Il lit une leçon des Actes des Apôtres, une de l'Epître de S. Jacques, où il est parlé de la confeffion des péchés, & une troifieme de l'Epître aux Ephéfiens. Quand ces leçons ont été achevées, le Prêtre impofe les mains fur la tête du pénitent, puis il récite comme à fon nom une priere en forme de confeffion à Dieu des péchés

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