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fort inutile de les propofer comme des regles felon lefquelles on doive Liv. VI. examiner la créance des Grecs & des Orientaux; puifqu'en fe bornant à CH. VI. ce qui eft de foi, on reconnoîtra qu'ils font fort éloignés de toutes les nouveautés des Proteftants, & qu'ils croient ce que croit l'Eglife Romaine, fi on excepte l'article de la féparation pour caufe d'adultere, dont nous parlerons dans la fuite.

que toute

confifte en

On formera fans doute une objection, fur ce qu'il paroît qu'ils font Si on peut confifter l'effentiel du Sacrement dans la bénédiction & dans les prieres, objecter par lesquelles il eft célébré, felon Syrigus, qui en cela s'accorde avec tous la béné les Théologiens de fa Communion, & c'eft ce que difent auffi les Théo- diction logiens Orientaux: & parce que d'autres, comme Grégoire Protofyncelle, prieres. difent que la forme de ce Sacrement eft la grace. Dans la premiere ex- p. 157. preffion quelques-uns croiront, par des préjugés peu conformes à l'ancienne Théologie, que des prieres ne fuffifent pas pour être la forme du Sacrement: mais d'autres les ont suffisamment réfutés, fans que nous ayions besoin d'entrer dans cette queftion. Car l'Eglife n'a point déterminé en quoi confiftoit la forme du Sacrement de Mariage, & celle dont on fe fert préfentement ne la contient pas, felon S. Thomas, ni felon plufieurs Théologiens de ces derniers temps. Mais indépendamment de cette raifon, qui étoit fuffifante néanmoins pour engager les Miffionnaires de Levant à ne pas changer entiérement les Rituels, pour fubftituer le Romain à leur place, comme fit Alexis de Menefès, il y a encore une raison particuliere Synod. de qui justifie les Orientaux. C'est qu'ils ne font pas affez fubtils pour avoir Diamper. découvert que les Sacrements ne puiffent être validement célébrés, finon par des formules impératives ou indicatives, & qu'ils croient que les prieres operent efficacement, & par conféquent qu'elles peuvent être les formes des Sacrements. En cela ils font dans le fentiment de plufieurs Théologiens de notre fiecle, & de l'ancienne Eglife, qui a long-temps adminiftré plufieurs Sacrements par des prieres, & dans le langage de laquelle, prier fur l'eau du Baptême, fur l'Euchariftie, fur rouile, fur les pénitents, eft la même chofe que de célébrer & adminiftrer les Sacrements de Baptême, de l'Euchariftie, de la Confirmation & de la Pénitence.

commeSa

ge.

De cette maniere ils regardent comme une conjonction purement na- Ce qu'ils turelle celle de l'homme avec la femme, qui eft légitime lorfqu'elle eft regardent faite felon les loix: le confentement des parties, les paroles & les autres ment dans actes, comme des conditions néceffaires : & la bénédiction de l'Eglife le Mariacomme le Sacrement. Ainfi, felon eux, tout Mariage qui n'a pas cette bénédiction n'est point Sacrement, parce qu'il n'eft pas béni, ni approuvé par l'Eglife, dépofitaire des Sacrements: & c'eft fur ce principe qu'ils terminent toutes les questions qui ont rapport au Mariage. Ccc

Perpétuité de la Foi. Tome V.

On ne peut dou

ter qu'ils ne le re

connoif

Liv. VI. Il y a donc tout fujet de croire que les Grecs & les Orientaux ne fe CH. IV. trompent pas, quand ils affurent qu'ils confervent de Tradition Apostolique le Mariage comme un Sacrement inftitué par Jefus Chrift, & par lequel eft produite la grace néceffaire à ceux qui entrent dans l'état conjugal. Auffi le P. Goar, Arcudius même & la plupart de ceux qui ont écrit fur cette matiere, ne doutent pas que le Mariage adminiftré suivant fent pour Sacrem. le Rite Grec ne foit un véritable Sacrement: ce qui doit s'entendre pareillement de celui des Syriens, des Cophtes & de toutes les autres Nations Chrétiennes d'Orient. C'est auffi le jugement qu'ont fait les Continuateurs de Bollandus dans leur Differtation fur les Cophtes. On prouve manifeftement que le Mariage eft un Sacrement, quand on n'en auroit pas d'autres preaves, de ce que le Prêtre qui eft préfent & qui prononce les prieres ordinaires fur ceux qui fe marient, répete de temps en temps que la grace leur eft conférée quand ils reçoivent ce Sacrement. Tout s'y fait avec ordre; d'abord on fait les fiançailles, on évite les empêchements: le confentement mutuel & l'acceptation font expreflément déclarés: & enfuite on célebre la Mejje, à la fin de laquelle l'époux & l'épouse, s'étant auparavant confeffés, reçoivent la fainte Euchariftie, & ils s'en vont en paix. Je ne puis comprendre qu'est-ce que les Critiques peuvent dire qu'il manque ici pour faire un véritable Sacrement. Si les Cophtes manquent en d'autres choses par ignorance, il eft clair que cela ne peut faire aucun préjudice ni à ce Sacrement ni aux autres (a).

Remarque

L'Auteur de cette Differtation finit cet article par une note contre fur un paf- Vanflebe, fur ce qu'il dit que le même jour les parties fe confeffent & fage de Vanflebe. communient, & que par conféquent la pénitence ne s'étend pas jusqu'à douze jours, comme il avoit dit ailleurs. Mais il n'y a fur cela aucune difficulté. La Confeffion de ceux qui reçoivent la bénédiction nuptiale, eft femblable à celle que depuis plufieurs fiecles les Chrétiens qui vivent dans l'innocence, exempts de tous les péchés capitaux, font fouvent ou au moins tous les ans, pour obéir au précepte de l'Eglife, & que nous trouvons ordonnée de même par les Canons des Jacobites, & par ceux de Denys Barfalibi, dont il a été parlé dans la Differtation fur la Pénitence. Si quelqu'un fe préfentoit au Mariage ayant la confcience

(a) Inter Sacramenta (matrimonium) verum & proprium habere locum ut cætera omittam, ex eo apertè conficitur, quod Sacerdos nubentibus affiftens, & confuetas preces recitans, identidem repetat gratiam contrahentibus ex ea fufceptione conferri. Omnia ordinatè procedunt, præmittuntur fponfalia, caventur impedimenta, mutuus confenfus & acceptatio expreffè declarantur; iifque ritè peractis celebratur Miffa, fub cujus finem, fponfus uterque præviè confeffus facram Euchariftiam recipit & in pace dimittitur. Quid hic ad Sacramenti rationem deeffe velint Critici, haud equidem affequor. Si quid aliunde peccet Coptorum ignorantia, id neque huic, neque aliis Sacramentis detrimentum afferre poffe perfpicuum eft. Tom. 5. Jun. §. 224.

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Bib. R.

chargée de plufieurs péchés, non feulement il ne recevroit pas la Com- Liv. VI. munion le même jour, mais on ne l'admettroit pas à la bénédiction du Ma- Cн. IV. riage. C'est ce qui eft marqué dans une ancienne Collection de Questions & de Réponses canoniques, où on demande ce qu'on doit faire à l'égard MS. Arab. d'un homme, qui étant fouillé de plufieurs péchés, s'eft marié, & quelle doit être la pénitence qu'on lui impose: comme auffi, fi un homme qui s'eft abandonné à plufieurs débauches peut fe marier, & fi la femme doit fubir la même pénitence. La réponse eft conçue en ces termes : La pénitence confifte à obtenir la rémission du péché, à renoncer entiérement aux mauvaifes habitudes, & à faire pénitence des péchés paffés; ce qu'il faut que le pécheur faffe par une ferme résolution qu'il prend en lui-même, & en préfence de Dieu, & fuivant la conduite d'un Prêtre dont l'expérience foit éprouvée. Quand il aura accompli toutes ces chofes, & qu'il fe fera éprouvé lui-même, il fe peut marier, & la femme n'eft point obligée à cette pénitence, parce qu'elle eft purifiée & fanctifiée par le Baptême, & par le Couronnement; c'est-à-dire, par la bénédiction nuptiale. Ces paroles prouvent donc que la Confeffion ordinaire faite avant la Communion, n'est pas celle de grands péchés qui foumettent à la pénitence canonique, mais des péchés véniels; & elles nous apprennent en même temps un point de discipline qui n'eft pas marqué ailleurs, & qui eft, que les Jacobites n'accordent pas la bénédiction nuptiale à ceux qui ayant des péchés griefs fur la confcience, n'en ont pas fait auparavant pénitence felon les regles de l'Eglife. Cela marque encore qu'ils reconnoiffent cette bénédiction pour un Sacrement; & les dernieres paroles de la réponse en fourniffent une nouvelle preuve, dans la comparaifon qu'elles contiennent du Baptême avec le Couronnement, ou bénédiction nuptiale. Selon eux, il confere une grace fanctifiante ou purifiante, ce qui en arabe a le même sens, comme le Baptême. Cette grace eft donc facramentelle, & par conféquent, felon la doctrine de leur Eglife, le Mariage est un Sacrement auffibien que le Baptême.

LIV. VI.
CH. V.

Les Grecs ne bénif foient pas

les fecon

c. 27.

p. 401.

CHAPITRE V.

Des fecondes, troifiemes & quatriemes noces felon les Grecs & les Orientaux.

LA

A difcipline des Grecs touchant les fecondes noces eft expliquée fi exactement par leurs Canoniftes, particuliérement par Matthieu Blastares, autrefois & dans le Droit Oriental, qu'il n'y a qu'à les confulter pour en être pardes noces. faitement inftruit. Ce qui a précisément rapport à la matiere que nous traiBlaft.lit.r. tons eft, qu'ils ne couronnent pas les fecondes noces, & c'eft un Canon Allat. 1. 3. C. 18. §. 3. qui fe trouve marqué dans tous les Euchologes: le Bigame n'eft point Arcud. 17. couronné. Ils ont même un Office particulier pour les fecondes noces, fort différent de celui qu'ils célebrent pour bénir les premieres: il est déΔίγαμος μὴ Sava. fendu aux Prêtres d'affifter au feftin de ces noces, de peur qu'ils ne paEucholog. roiffent les approuver par leur présence; & fuivant l'ancienne discipline qui fubfifte préfentement, même dans l'Eglife Latine, les Bigames font exclus des Ordres facrés. Les Melchites, les Neftoriens & les Jacobites, de quelque langue & de quelque nation qu'ils foient, ont la même difcipline: les Grecs ne l'ont pas inventée, puifqu'elle fe trouve pratiquée dès les premiers fiecles de l'Eglife, où on a toujours entendu ces paroles de S. Paul unius uxoris virum, de celui qui n'avoit époufé qu'une femme en premieres noces, & qui étant devenu veuf, ne s'étoit pas remarié. Ceux qui ont voulu donner un autre fens à ce paffage, n'ont pas fait de réflexion fur les moeurs des anciens Chrétiens, parmi lesquels on n'auroit pas fouffert qu'un Laïque eût plufieurs femmes, puifque cela n'étoit pas même permi chez les Payens.

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cune er

reur.

Cet ufage Cette difcipline s'eft donc établie parmi les Orientaux comme parmi les n'eft fon- Grecs, par l'ancienne Tradition, & elle n'eft fondée fur aucune erreur, ni fur aucune opinion particuliere qu'on puiffe leur reprocher. Celle que l'Eglife a condamnée confiste à rejetter abfolument les fecondes noces, comme faifoient les Montaniftes, les Novatiens & quelques autres hérétiques, que les Grecs & les Orientaux condamnent également, fuivant le Can. Ni- huitieme Canon du Concile de Nicée, par lequel il eft ordonné que ces derniers feront reçus en abjurant leurs erreurs, & en promettant de communiquer avec les Bigames & ceux qui étoient tombés dans Idolâtrie durant la perfécution. Or les Syriens, les Cophtes & tous les autres Chrétiens ayant ce même Canon de Nicée dans leurs Collections, ainfi que divers autres qui y font conformes, il eft hors de doute qu'ils ne condam nent pas abfolument les fecondes noces.

cen. 8.

fondée fur

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tion du

Mais la grande idée qu'ils ont du Mariage Chrétien, comme figurant Liv. VI. l'union de Jefus Chrift avec l'Eglife, leur a fait confidérer les fecondes no- CH. V. ces comme n'ayant pas ce même rapport, qui fe trouve plus entier, à ce Elle eft que difent leurs Auteurs, lorfque les contractants font vierges de part & d'autre. De plus, ils ont confidéré que la plus ancienne difcipline de l'E- de vénéraglife excluoit du miniftere des Autels, tous ceux qui s'étoient mariés en Mariage fecondes noces: que même on n'y admettoit perfonne finon en lui impo- Chrétien. fant une pénitence, qu'elles portoient un caractere d'incontinence peu digne de la fainteté du Chriftianifme: enfin que les prieres pour bénir les fecondes noces fembloient n'être que pour demander à Dieu qu'il pardonnát à ceux qui, par fragilité, avoient befoin de ce remede. Tels ont été les fentiments des plus grands Saints fucceffeurs des Apôtres, qui ont établi cette discipline fur la Tradition qu'ils avoient reçue d'eux, & que les Orientaux confiderent comme Apoftolique, non feulement parce qu'elle se trouve obfervée dès le commencement dans toutes les Eglifes, mais auffi parce qu'elle eft marquée dans les Conftitutions des Apôtres, pour lefquelles, ainfi qu'il a été dit ailleurs, ils ont une finguliere vénération croyant qu'elles ont été mifes en écrit de leur temps, ou par eux-mêmes.

ciens Ca

Medi.

Ils ne difent rien fur ce fujet dans leurs Canons particuliers, ni dans Etablie leurs Traités Théologiques, qui ne foit tiré des Saints Peres, ou des Ca- fur les annons des anciens Conciles. Ils citent d'abord le dix-feptieme des Apôtres, nons. qui exclut de l'Epifcopat, du Sacerdoce & de tout miniftere eccléfiaftique ceux qui après leur Baptême ont contracté de fecondes noces : le troifieme du Concile de Néocéfarée qui marque qu'on mettoit en pénitence ceux qui fe marioient la feconde fois; & en particulier ils fe fondent fur l'autorité de Saint Bafile dans fa lettre à Amphilochius, traduite depuis plus de mille ans en fyriaque, & qui fe trouve en arabe dans toutes leurs Collections. MS. Syr. C'eft fur ce fondement & fur ce qui fe pratiquoit dans toute l'Eglise d'Orient, lorsque les Neftoriens & les Jacobites s'en font féparés, qu'ils ont établi la difcipline de ne point couronner les Bigames. Les Grecs ont une Conftitution particuliere du Patriarche Nicephore. Le Bigame n'eft point couronné, mais il eft féparé de la communion des faints Myfteres durant deux ans, le Trigame durant trois ans. Mais il y a long-temps qu'elle n'est plus en usage, comme il paroît par une Réponse de Nicetas Métropolitain d'Héraclée inférée dans le Droit Oriental, & qui marque qu'on couronnoit alors les Bigames & les Trigames, & qu'on les féparoit néanmoins de la Communion durant une ou deux années. Théodore Balzamon dans fa Réponse aux Questions de Marc Patriarche d'Alexandrie, dit que Pancienne Loi a reconnu comme légitime même le troifieme mariage, & ceux qui en étaient nés comme héritiers, qui étoient fous la puissance de leurs peres..

Jur.

Orien. 1.5

P. 383.

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