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LIV. VII. ceux des Cophtes, qui ont de plus, comme les Grecs, un livre particuCH. III lier d'Oraifons à la Vierge appellé Théotokia: les Ethiopiens en ont un Ludolph. femblable, & de plus celui qu'ils appellent Organon rempli d'hymnes &

Ce n'eft pas par

de prieres à l'honneur de la Sainte Vierge. Enfin les Nettoriens, quoique felon leur héréfie ils ne la reconnoiffent pas pour Mere de Dieu, ont auffi dans leurs trois Liturgies & dans leur Horologe un grand nombre d'Oraifons adreffées à la Vierge. On y trouve tous les éloges que les Saints Peres, même ceux des derniers temps, lui donnent dans leurs Sermons; & ces expreffions qui parurent fi extraordinaires à Chytræus, y font fréquentes, outre plufieurs autres que chaque nation fuivant le génie de la langue donne à la Vierge, excepté que comme ils ne la reconnoiffent pas Mere de Dieu, ils l'appellent toujours Mere de Jefus Chrift. Mais puifque tout ce que ces prieres lui demandent eft qu'elle intercede pour nous, & que c'est la formule ordinaire à laquelle toutes les autres se rapportent, c'est une impofture groffiere que de leur attribuer un autre fens. S'il y a quelques expreffions outrées, & qui peuvent n'être pas felon lá plus exacte Théologie, on doit les interpréter favorablement, & felon la doctrine expliquée auffi clairement qu'elle l'eft par les Auteurs dont nous avons rapporté les témoignages.

On ne difconvient pas que ce culte ne foit fouvent dégénéré en fules abus perftition parmi le peuple ; & non feulement les Grecs, mais les Mofcoqu'on doit vites & d'autres Chrétiens foumis aux Patriarches de Conftantinople, ont juger de la fur ce fujet plufieurs abus que les Evêques & les Prêtres devroient corriger.'

foi.

Tellez 1.6.
C. 26.

Auffi ce n'eft pas de ces abus dont nous parlons, mais de ce qui est conforme à la doctrine & à la difcipline de l'Eglife, & à celle de toutes les Communions Orthodoxes, fchifmatiques ou hérétiques, qui condamnent également ce qui eft contraire à l'une ou à l'autre. Les Ethiopiens, comme plus barbares & féparés prefque de tout commerce avec les autres nations chrétiennes, finon avec les Jacobites Egyptiens, font tombés dans Hift. de de grands abus de l'aveu même de Ludolf, qui les excufe prefque toujours, en forte qu'ils regardoient les Portugais comme ennemis de la Sainte Vierge, ne croyant pas qu'ils l'honoraffent affez, quoique d'autres ne leur aient jamais fait ce reproche. Cela lui a donné lieu d'avancer une conjecture fi étrange, qu'on a peine à comprendre qu'elle ait pu lui échapLudolf. per, & c'est, dit-il, qu'apparemment les Portugais n'avoient pas expliqué aux Commen. Ethiopiens tout ce que l'Eglife Romaine enjeigne fur la dévotion à la Vierge, puisqu'on y fait & qu'on y adore fes ftatues. La preuve qu'il en apporte eft une ancienne peinture qu'il a vue dans un village près de Ratisbonne fur la porte d'un Boulanger, & il y joint quelques extraits de vieilles prieres de nulle autorité, & des paffages de deux ou trois Auteurs très

p. 362.

récents & très-méprifables. On peut juger de ce qu'on doit attendre fur Liv. VII. la foi des Ethiopiens, d'un homme qui repréfente auffi fauffement celle CH. III. des Catholiques, qu'il avoit tant de moyens de connoître, ayant passé quelques mois à Paris. Perfonne ne nie qu'il n'y ait eu plufieurs abus fur ce fujet comme fur plufieurs autres: mais un homme qui ofe accuser férieufement les Catholiques d'adorer les images de la Vierge, devoit favoir que les abus ont toujours été condamnés; que s'ils ont subsisté dans des temps d'ignorance, ils ont été réformés prefque par-tout, & ces prieres ridicules fupprimées : enfin que le Pfeautier de la Vierge qu'il cite comme une piece authentique, n'a jamais eu aucune approbation publique, tant s'en faut que l'Eglife Romaine l'ait adopté, puisque même eNe l'a condamné. Ces pitoyables réflexions qui nous obligent à faire cette digreffion, font indignes d'un homme de Lettres, qui ne doit pas parler de ce qu'il ne fait pas, mais chercher ce que les Canons, les Statuts Synodaux des Diocefes & les Théologiens enfeignent, non pas citer ce qui fe trouvera dans de vieilles Heures allemandes, ou fur la boutique d'un Boulanger. Que les Grecs & les Mofcovites qui leur font foumis, & tous les autres de quelque nation & langue qu'ils foient, obfervent ce qu'enseignent les Canons de leurs Eglifes, toute superstition en fera bannie.

des Saints.

Nous avons dit que les Grecs & autres Chrétiens d'Orient célébroient Fêtes à des fêtes à l'honneur de la Vierge: il n'y a qu'à ouvrir leur Calendrier l'honneur & le Menologe pour le reconnoître : & même les Ethiopiens, outre les fêtes ordinaires, en font une commémoration tous les mois. Il en eft de même des fêtes des Saints qui font marquées dans les Menées avec leurs Offices. Les Syriens ont leur Calendrier particulier qui fe trouve imprimé avec le Nouveau Teftament fyriaque de l'édition de Widmanstadius: les Orthodoxes ont les Saints communs avec toute l'Eglife & plufieurs de la Latine les Neftoriens ont leurs Saints particuliers, fur-tout les Docteurs Grecs, qui font Théodore de Mopfuefte, Diodore de Tarse & Neftorius, & les Docteurs Syriens, dont quelques uns appartiennent à l'Eglife Catholique, comme S. Ephrem, S. Jacques de Nifibe & divers autres le refte font de vrais Neftoriens, dont on trouve une lifte affez ample dans le Synode de Diamper, quoique les noms foient fort altérés. Act. Syn. Diamp. Les Cophtes ont leur Calendrier rempli pareillement de mémoires de Saints, & outre ceux qu'ils honorent communément avec les Catholi- Decr. 9. ques, on y trouve leurs Saints, comme Diofcore, Sévere d'Antioche, le Moine Barfomas, Benjamin & plufieurs de leurs Patriarches. Selden a donné un de ces Calendriers, mais peu exact, outre qu'il a mal lu la plu- De Syned. part des noms. Celui des Ethiopiens a prefque tous les mêmes Saints, à

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Act. 3.

f. 11. Ed. Lufit.

Hebr.

T

LIV. VII. caufe de la dépendance entiere dans laquelle ils font du Patriarche d'AlexanCH. IV. drie Jacobite: ils y ajoutent quelques-uns des Saints du pays. Mais il est à remarquer que le Calendrier qu'à donné M. Ludolf eft de fa compofition, l'ayant tiré du Synaxarion éthiopien, en y ajoutant ce qu'il a trouvé dans celui de Selden, ce qui fait qu'on ne le doit pas regarder comme original.

A l'égard des Eglifes, l'histoire fait mention d'un fi grand nombre de celles qui étoient dédiées à Dieu fous l'Invocation de la Vierge, qu'on en pourroit faire une grande lifte. Makrizi Mahométan en nomme plufieurs dans fa Description de l'Egypte, & on trouve un autre Auteur qui en avoit fait un ample dénombrement, ainfi que des Monafteres. On doit auffi ajouter les Images dont nous parlerons en un Chapitre à part. Telle est la difcipline des Grecs & des Orientaux, qu'ils n'ont pas apprise de l'Eglife Latine.

La vénéra

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Et article a une grande connexion avec celui de la vénération des tion des Saints comme nos interceffeurs auprès de Dieu, & où celui-ci a été reçu, Reliques eft une fui l'autre l'a été pareillement. Auffi d'abord que dans la Réforme on eut te de celle établi qu'il ne falloit pas prier les Saints, & que s'adreffer à eux pour des Saints. demander leur interceffion & leurs prieres, étoit violer le premier Précepte

qui regarde le culte d'un feul Dieu, & la dignité de Jefus Chrift feul Médiateur, non feulement les Images furent renverfées, mais les Reliques des Saints & leurs Tombeaux refpectés durant tant de fiecles furent expofés au pillage & aux infultes d'une populace furieuse, animée par des Miniftres qui faifoient croire que Dieu étoit honoré par de femblables violences, auffi contraires à toutes les loix divines & humaines, qu'à la difcipline conftante de toutes les Eglifes. On a peine à croire que des Proteftants raisonnables ne condamnent les excès de nos Religionnaires, lorfqu'ils brûlerent & jeterent au vent les cendres de S. Irénée & de S. Martin, deux des plus grandes lumieres de l'Eglife de France, ce qui fe fait à peine à l'égard des criminels, finon ceux qui font condamnés pour les plus énormes crimes. Auffi lorfque les Théologiens de Wittemberg tâchoient à donner au Patriarche Jérémie une idée avantageufe de la Réforme, ils fe garderent bien de parler de ces excès, qui lui auroient fait horreur. Ils ne toucherent même que très-légérement dans leurs Ecrits ce qui

avoit rapport à cette matiere, fur laquelle il n'eft pas néceffaire de faire Lrv. VII. de grandes recherches, puifque s'il y a quelque chofe de conftant & de CH. IV. prouvé par le témoignage des Anciens, & par la pratique de toutes les Eglifes, c'est la vénération des Reliques des Saints, dont les corps ont été regardés par tous les fideles comme les temples du Saint Efprit.

dès les

504. Hom.

126.

On voit dès les premiers fiecles que les Chrétiens de l'Eglife de Smyrne Elle a été témoins du martyre de S. Polycarpe leur Evêque, n'ayant pu enlever fon pratiquée corps entier, parce que les perfécuteurs les en empêcherent, emporterent premiers ce qu'ils en purent fauver, & qu'ils les appellent fes os plus précieux que fecles. les pierres de grand prix, & plus que l'or (a). On voit la même attention marquée dans les anciens Actes de S. Ignace, & prefque dans tous ceux des autres Martyrs. Eufebe dit que nous devons refpecter les châsses des Euf. 1. 4. Martyrs, & que la coutume eft de faire les prieres auprès de leurs Reli- C. 15. Præp. Ev. ques. S. Jean Chryfoftôme parlant de celles de S. Ignace Martyr, dit 1.13.c.11. qu'elles font comme un tréfor de graces pour ceux qui en approchent, que la ville de Conftantinople étoit fortifiée de tous côtés par les Reliques Chryf.t.5. Gr. p.565. des Saints, & qu'elles chaffent les démons. Il écrit à un Prêtre qu'il lui fera avoir des Reliques. S. Bafile, S. Grégoire de Nyffe, S. Grégoire de Na- 8. ad Pop. zianze, S. Ifidore de Damiette, Théodoret, enfin tous les Peres Grecs Ant. Epift. parlent de la même maniere. Les Reliques de S. André & de S. Luc, des Ifid. Pel. Quarante Martyrs, d'Elifée, de Zacharie, de S. Etienne & de plufieurs Ep. 55. & autres, étoient en vénération à Conftantinople. Philoftorge, quoiqu'A- Theodor. rien, remarque que les Payens en haine des Chrétiens, tirerent de leurs Quæft. 83. châffes, & profanerent les offements facrés d'Elifée & de S. Jean Baptifte. Ep. 130. Les miracles de celles de S. Gervais & de S. Protais font atteftés par S., Philoft. 1. 7. Ambroise & par S. Auguftin, qui en rapporte plufieurs autres de celles de S. Etienne, comme étant connus dans tout l'Occident. Les Grecs & les Latins plus modernes ont foutenu la même doctrine, & la pratique s'en eft confervée jufqu'à nous dans toute l'Eglife. C'eft donc à ce fujet, autant qu'à aucun autre point de difcipline, qu'on peut appliquer cette regle certaine de S. Auguftin & de tous les Saints Peres, que lorsqu'une pratique religieufe fe trouve établie par toute l'Eglife dès le commencement du Chriftianifme, on ne la peut foupçonner d'erreur, mais on doit être affuré qu'elle vient de Tradition Apoftolique.

pra

189.

in Ger.

dans les fiecles fui

C'eft auffi ce qu'ont cru tous les Chrétiens dans les fiecles les plus Ainfi que floriffants de l'Eglife, ce que les Orientaux n'ont pas moins cru & tiqué que les Occidentaux: & ceux qui ont enfeigné le contraire ont été regardés comme hérétiques, particuliérenient Vigilance. Les anciens Grecs.

(α) Οὕτως τε ἡμεῖς ὕφερον ανελόμενοι τὰ τιμιώτερα λίθων πολυτελῶν, καὶ δοκιμώτερα ὑπὲρ χρύσιον ἀφα αὐτῇ ἀπεθέμεθα ὑπᾶ καὶ ἀκολαθὸν ἦν. Ep. Eccl. Smyrn.

vants.

LIV. VII. ne l'ont pas connu, mais les derniers, entr'autres Melece Syrigus, n'en CH. IV. ont pas parlé avec moins de zele & de force que S. Jérôme. On trouve

dans le Menologe diverfes fêtes générales pour la tranflation des Reliques de plufieurs Saints, outre les fêtes particulieres à chaque Eglife. Les Hiftoriens & autres Auteurs du bas Empire en marquent un grand nombre qui étoient honorées en divers lieux, & il n'y avoit point d'Eglife Antholog. où il n'y en eût. Les mêmes Auteurs témoignent qu'il s'y faifoit souvent Triod. des miracles, & les Grecs en font tellement perfuadés, que dans les HoMenolog. mélies de ces derniers fiecles, il y en a beaucoup qui en rapportent un

Reliques confervées en Orient,

grand nombre. Une preuve bien certaine qu'ils ne les ont pas pris de l'Eglife Latine, c'est qu'ils en attribuent de femblables à ceux qu'elle ne peut reconnoître comme des Saints, puifqu'ils ont vécu & qu'ils font morts dans le schifme. Nous n'entrons point dans le détail, ni dans l'examen de ces miracles: Dieu, comme chacun fait, n'en fait point qui fervent à confirmer dans l'erreur; mais quand ils feroient faux, ceux qui les croient véritables, croient certainement qu'il s'en peut faire par les Reliques des Saints, & font Orthodoxes fur cet article. Enfin cette opinion généralement reçue touchant les miracles qui fe font aux tombeaux des Saints & par leurs Reliques, eft une démonstration certaine de la créance ancienne, indépendamment de la vérité ou de la fauffeté des miracles.

Comme la Grece n'a été que dans les derniers temps conquise par les Mahométans, la dévotion envers les tombeaux & les Reliques des Saints s'y eft confervée plus long-temps que dans la Syrie, dans l'Egypte & en d'autres Provinces d'Orient, qui furent les premieres foumifes au joug de ces infideles. La ruine des principales Eglifes, le pillage de leurs tréfors, la néceffité de vendre le peu de châffes & de reliquaires qui en avoient été fanvés, à laquelle on fe trouvoit obligé pour racheter des captifs, ou pour secourir les Chrétiens dans leurs miferes preffantes, rendit encore les Reliques plus rares en Orient; d'autant plus qu'il y en eut une grande quantité tranfportée en Europe. Cependant on voit par l'Hiftoire de l'Eglife d'Alexandrie, que non feulement dans les premiers temps, mais que puis & fous l'Empire Mahométan les Reliques de S. Marc y étoient en vénération, & que les nouveaux Patriarches étoient obligés d'aller révérer fon chef, qui étoit confervé dans Alexandrie; quoique, comme marque un Hiftorien, quelques-uns cruffent que c'étoit celui de S. Pierre le Martyr. On lit dans les mêmes hiftoires des Jacobites, que celui-ci avant fon martyre alla faire fa derniere priere au lieu où S. Marc avoit confommé le fien:, & cette dévotion a duré plufieurs fiecles, même fous le Mahométifme, & fubfifte encore préfentement. Or cette vifite & vénération des Reliques, fe faifoit avec toutes les cérémonies que les Catho

de

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