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LIV. VII. même créance qui leur a fait prendre les mêmes précautions, quoique CH. VI. d'une maniere différente, & non pas ces précautions qui ont introduit

Différence

monies

une nouvelle créance. Quand le fchifme des Proteftants dureroit auffi longtemps qu'il y a que l'Eglife Catholique fubfifte, il n'arrivera jamais qu'ils aient la même attention fur le pain & le vin de leur Cene, & ils ne s'embarrafferont pas plus qu'ils font préfentement de ce qui en reftera. Ainfi ce qu'il y a d'effentiel & de commun aux Eglifes d'Orient & à celle d'Occident, étoit la créance que les parties de ce qui avoit été confacré, étoient véritablement le corps & le fang de Jefus Chrift: que par conféquent lorfqu'on donnoit ces particules aux malades & aux moribonds, même fans célébrer la Liturgie, ils recevoient le corps & le fang de Jefus Christ. Sur ce principe, les Latins qui n'ont pas donné l'Euchariftie par intinction, finon en quelques Eglifes particulieres, n'ont réfervé que les especes du pain: les Grecs qui l'adminiftroient de cette maniere ont confervé les particules trempées dans le calice, & pour empêcher qu'elles. ne fe corrompiffent par l'humidité, ils les ont defféchées. Ceux qui ont confervé l'Euchariftie de cette maniere, & ceux qui fe font contentés de la conferver fous une feule efpece, ont également cru le changement réel du pain & du vin au corps & au fang de Jefus Chrift; puifque fans cette créance ni l'une ni l'autre maniere ne pouvoit avoir lieu, comme elle n'eft venue dans l'imagination à aucun de ceux qui ne le croient pas.

Dans la primitive Eglife, un peu avant la Communion, les Diacres de céré- difoient à haute voix, que les chofes faintes font pour les Saints : cette n'eft d'au- coutume s'eft confervée dans toutes les Liturgies Orientales, & les Pecune con- res Grecs en font fouvent mention. Il ne paroît pas néanmoins qu'elle féquence. ait été en ufage dans les Eglifes d'Occident; & cette variété de difcipline ne prouve pas que les Latins aient eu moins de refpect & d'attention dans l'adminiftration de l'Euchariftie que les Orientaux. De même on trouve dans les Offices de l'Eglife Latine que l'Euchariftie étoit élevée & montrée aux fideles peu après la confécration, au lieu que fuivant le Rite Oriental elle ne fe faifoit qu'un peu avant la Communion, comme les Grecs, les Cophtes, les Syriens & tous les autres le pratiquent encore. Cette différence de cérémonies fur laquelle quelques Proteftants ont tant raisonné, ne peut avoir aucune conféquence contre l'uniformité de la foi de la préfence réelle, puifqu'il n'est pas néceffaire que l'Eucharistie foit exposée à l'adoration des fideles dès que la confécration est suppofée faite, pourvu qu'avant la Communion cet acte de Religion soit pratiqué.

Les

Les Grecs ont ap

cérémo

Les Grecs modernes, quoiqu'ils foient presque toujours prévenus con- Liv. VII. tre les Latins, en forte qu'ils trouvent des défauts effentiels dans pref- CH. VI. que toutes nos cérémonies, & que le jugement qu'ils en forment foit à peu près comme celui que nos Théologiens formoient autrefois fur tout prouvé ce qui n'étoit pas exactement conforme au Rite latin, font néanmoins quelques affez équitables pour ne pas condamner des pratiques pieufes qui fe font nies latiintroduites parmi nous, quoiqu'elles leur foient inconnues, & qu'elles ne nes, quoiqu'ils ne foient pas fondées fur l'ancienne difcipline. Ainfi un Luthérien ayant de- les aient mandé à Melece Piga Patriarche d'Alexandrie ce qu'il penfoit touchant pas. les Proceffions folemnelles, dans lesquelles le Saint Sacrement eft porté parmi nous, il répondit que quoiqu'elles ne fuffent pas en ufage dans l'Eglife Grecque, on ne pouvoit néanmoins les blâmer.

Les Grecs & les Orientaux confervent auffi avec refpect la coutume qui eft parmi nous de la Proceffion des palmes, celle de l'adoration de la Croix le Vendredi Saint, d'autres Proceffions fuivant les fêtes en différentes Eglifes, la vifite des Saints Lieux, en un mot tout ce que les premiers Réformateurs ont reproché à l'Eglife Catholique comme des fuperftitions & des nouveautés qu'elle avoit introduites. Les Orientaux font une grande différence entre ces pieufes pratiques & ce qui regarde les Sacrements, dans la célébration defquels ils diftinguent pareillement ce qu'il y a d'effentiel, en quoi ils conviennent avec nous, & ce qui est inftitué pour rendre les Myfteres plus auguftes, & pour rappeller dans la mémoire des fideles ce qui peut exciter leur foi & leur dévotion. Il s'enfuit donc que les Chrétiens Orientaux n'ont pas regardé ces pratiques comme fuperftitieufes, & que comme ils ne les confondent pas avec les principales cérémonies des Sacrements, ils reconnoiffent que l'Eglife a toute l'autorité néceffaire pour établir ce qui peut fervir à l'édification des fideles, comme font les cérémonies, fans qu'il foit befoin de les trouver marquées dans l'Ecriture Sainte, ou pratiquées dès les premiers fiecles du Chriftianifme; ce qui est une preuve convaincante que fur cet article ils n'ont pas d'autres fentiments que les Grecs & les Catholiques.

Opufc. Gr.

p. 114.

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Perpétuité de la Foi. Tome V.

PPP

LIV. VII.
CH. VII.

CHAPITRE

VII.

Les ver

font une

partie de la Tradi

tion.

De la difcipline des Eglifes d'Orient touchant les Traductions & la lecture de l'Ecriture Sainte.

CEt

Et article a rapport à la Tradition reçue dans toutes les Eglifes, foit fions de pour la lecture publique qui fe fait dans le Service des livres de l'anEcriture cien & du nouveau Teftament, foit pour celle que les Chrétiens font en particulier. Chaque Eglife conferve une maniere de texte authentique, comme eft la Vulgate parmi nous; & quoique plufieurs favants hommes aient traité des Verfions Orientales, aucun néanmoins n'a expliqué l'ufage qu'elles avoient parmi les différentes Communions des Chrétiens d'Orient c'est pourquoi nous éclaircirons cette matiere en peu de imots, en attendant que nous la puiffions traiter ailleurs dans un plus grand détail.

Les Orien

çoivent

les Catho

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Ils reçoivent tous les livres de l'Ecriture Sainte, & ceux qui font retaux re- çus dans l'Eglife Catholique: ce qui ne fe prouve pas feulement par les les mêmes Catalogues qu'ils en ont, mais par les citations fréquentes que font leurs livres que Théologiens des livres que les Proteftants ont rejetés comme apocryphes, liques. parce qu'on ne les a pas en hébreu. Cyrille Lucar a été condamné par Syn. Hier. les Grecs fur cet article, & au Synode de Jerufalem on produifit les extraits de fes propres Sermons, dans lefquels il citoit ces mêmes livres qu'il avoit traités d'apocryphes dans fa Confeffion. Auffi on les trouve inférés dans les Bibles Grecques, & cités dans tous les livres fans aucune conteftation fur leur authenticité.

p. 103.

Ils fe fervent de même des traduc

tions fai

tes fur le grec ou fur

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Les Syriens Orthodoxes ou Jacobites, quoiqu'ils fe fervent d'une traduction faite fur l'hébreu, ont néanmoins les livres qui ne font qu'en grec, de même que les Neftoriens, ainfi qu'on voit par le Catalogue qu'en rapporte Amrou fils de Matthieu dans fon abrégé, & Hebedjelu dans le fien imprimé à Rome. Les Cophtes ayant leur ancienne verfion T'hébreu. faite fur le texte grec; ont par conféquent ces mêmes livres, ainfi que les Ethiopiens & les Arméniens. Cette conformité avec la Tradition de Eglife Catholique fe remarque encore dans les Verfions de l'Ecriture Sainte qui font en ufage parmi ces Chrétiens. Ils ont comme nous des traductions felon le texte hébreu & d'autres felon les Septante, & ils s'en fervent également en forte que ni ceux qui fuivent celles-ci, comme les Cophtes, ne reprochent pas aux Syriens qui fe fervent de l'autre, qu'ils abandonnent la tradition de l'Eglife; ni les Syriens aux

Cophtes, qu'ils aient altéré la pure parole de Dieu, en préférant la tra- Liv. VII. duction grecque aux originaux. C'eft ce qu'on connoîtra mieux lorfque CH. VII. nous aurons marqué en peu de mots ce qui regarde les Verfions.

ancienne

La plus ancienne de toutes eft la fyriaque de l'Ancien Teftament con- La plus forme à l'hébreu, qui eft en ufage parmi tous les Syriens Orthodoxes, verfion eft. Neftoriens & Jacobites, fur laquelle il s'eft fait plufieurs Verfions ara la fyria. bes. On ne peut faire aucun fond fur ce que les Syriens difent de fon que. antiquité, qu'ils portent jufqu'au temps de Salomon, qui la fit faire, difent-ils, en faveur de Hiram Roi de Tyr. Car Gabriel Sionite qui a rapporté cette érudition dans fa Préface fur le Pfeautier, ne la prouve que par l'autorité d'un Ecrivain peu ancien, qui eft Choaded, ou pour mieux dire Jechuadad, Evêque de Haditha Neftorien. Ceux de la même fecte Hift. Neft. l'attribuent à S. Thadée & à fes difciples, qui, fuivant leur témoignage, MS. Arab. dépoferent un exemplaire hébreu de l'Ancien Teftament dans l'Eglise qu'ils fonderent, fur lequel on fit leur verfion vulgaire. Cette tradition ne marque aucune époque certaine, mais feulement une fort grande antiquité; dont même il y a une preuve incontestable dans l'ufage commun que les fectes différentes ont toujours fait de cette verfion. Car ce qui refte en fyriaque des ouvrages de S. Ephrem fait voir qu'il n'en avoit pas eu d'autre : & fi dans les traductions grecques de fes livres, qui sont en plufieurs Bibliotheques, on lit les paffages cités felon la verfion des Septante, cela vient des Traducteurs qui les ont accommodés à l'ufage de leur Eglife. Les Neftoriens ont confervé la même verfion, & les Jacobites pareillement; c'est donc une preuve affurée qu'elle étoit plus ancienne que les héréfies & que les fchifmes, & par conféquent d'une trèsgrande antiquité.

d'avoir

falfifié l'E

On ne doit pas s'arrêter à ce que le Synode de Diamper fous Alexis Les Nefto riens fauf de Menefès, Thomas à Jefu, ou de pareils Auteurs qui fe font copiés fement les uns les autres, ont accufé les Neftoriens d'avoir corrompu les Saintes accufés Ecritures en divers endroits, qui ne regardent la plupart que le Nouveau Teftament. Ce que ces Cenfeurs peu capables en ont rapporté confifte criture. à des différentes leçons, ou à quelques fautes manifeftes de Copistes ; Synod. mais ils n'ont rien remarqué de confidérable fur la verfion de l'Ancien Act. 3. Teftament. De plus, les Orthodoxes & les Jacobites n'ont pas eu moins Decret. 3. de zele contre les Neftoriens que les Portugais, & néanmoins ils n'ont Om. Gent. jamais fait de pareils reproches: outre que ces différences fe trouvent fou- 1. 7. c. 2. vent dans les livres des uns & des autres, quoiqu'irréconciliables.

Diamp:

De Conv.

Mais quand les Syriens ont fait leurs traductions fur l'hébreu, ils ont La verfion fyriaque fuivi les exemplaires de leur temps, plus anciens que ceux qui font entre faite fur les mains des Juifs: de forte qu'en plufieurs endroits la verfion fyriaque des exem

plaires hé

LIV. VII. convient avec la traduction de S. Jérôme & avec les Septante, plutôt CH. VII. qu'avec le texte des Mafforetes. Ces Syriens n'ont pas cru que l'autorité breux des Juifs modernes fût affez grande pour obliger à réformer l'ancienne meilleurs verfion fur les livres qui font entre les mains de cette nation; de même des Juifs que nous ne croyons pas devoir abandonner les Septante & S. Jérôme, modernes. toutes les fois qu'ils ne s'accordent pas avec l'hébreu moderne. On dira

que ceux

Verfion arabe fur

ce texte

peut-être que c'eft par ignorance; mais on fe trompera: car on a des preuves certaines que les Syriens ont eu connoiffance des verfions littérales & mot à mot faites fur l'hébreu par des Juifs, & fur-tout de celle de Rabbi Saadia, qu'ils appellent Fiumi, parce qu'il étoit né à Fium ville d'Egypte. Ils s'en font fervis en quelques endroits pour éclaircir leurs verfions, mais cela ne leur a pas paru fuffifant pour changer quelque chofe dans l'ancienne fyriaque.

Outre cette verfion, ils en ont une en arabe faite fur celle-là, & par conféquent affez conforme à l'hébreu, à laquelle plufieurs Auteurs ont fyriaque. travaillé en différents temps; mais comme les exemplaires font rares, & n'ont ordinairement point de Préfaces, on a peine à diftinguer ces verfions d'avec les autres, & plufieurs Critiques y ont été trompés.

Verfion fyriaque fur le

grec.

Verfions Perfiennes faites

Th. Grav.

Bibl.

Les Syriens ont auffi une verfion fyriaque felon le grec, quoiqu'on n'en ait trouvé dans les Bibliotheques fameufes aucun exemplaire parfait & entier, parce qu'elle n'eft pas en ufage dans le Service public. Mais il n'y a pas lieu de douter qu'ils n'en aient une femblable, à caufe des citations qui s'en trouvent dans les Traités de Moyfe Bar Cepha, Denys Barfalibi & d'autres Théologiens Syriens. Il s'en trouve quelques parties dans les Manufcrits, & entr'autres le livre des Pleaumes, quoique la traduction ordinaire dont on fe fert dans les Eglifes foit faite felon l'hébreu, & conforme à l'édition de Paris.

C'eft fur ces verfions fyriaques telles que les ont les Neftoriens, qu'ont été faites quelques Traductions Perfiennes pour les Chrétiens de ces paysfur les fy- là; & néanmoins il ne s'en trouve en nos Bibliotheques prefque aucune, riaques. finon des Evangiles. Des Critiques ont cru que cette raifon feule futfifoit Walt. Pro- pour lui ôter toute autorité, & c'est au contraire ce qui lui en donne legem. une plus grande. Car cela fait voir qu'elle a été faite fur le texte qui eft feul authentique dans la Communion Neftorienne, où l'ufage du grec étoit ceffé entiérement avant que ces verfions fuffent faites. On trouve même plufieurs fortes de ces Traductions Perfiennes; les unes étant affez corformes à la lettre, & quelques autres avec des paraphrafes: & telle est celle d'un Lectionnaire écrit avec beaucoup d'exactitude, qui eft dans la Bibliotheque de feu M. Colbert. Il y a tout fujet de croire que toute l'Ecriture Sainte a été ainfi traduite pour les Chrétiens du pays, où l'arabe

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