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en un acte, assez bien intriguée, gaiement dialoguée, reçue en 1708, et jouée seulement en 1732, joint aux railleries qu'il s'est permises dans tous ses écrits, sur les comédiens, sembleroient annoncer qu'il eût à s'en plaindre. Il peut fort bien être arrivé que quelques hauteurs, quelques décisions hasardées du Sanhedrin comique l'aient dégoûté de la scène. Ceux qui courent cette carriere sont assez exposés à ces sortes de désagrémens, suite ordinaire d'un combat de deux vanités intraitables; car

la modestie n'est ni le foible des acteurs, ni le fort des au

teurs.

Quoi qu'il en soit, Le Sage revint aux romans. Gilblas de Santillane mit le sceau à sa réputation. C'est un charmant ouvrage, fait pour plaire aux ignorans, aux érudits, aux gens du monde, et aux hommes de tout étage. La narration pure,

pure, facile, saillante, entremêlée d'historiettes * bien contées, et d'un ton très di

* Celle du Mariage de Vengeance a fourni à M. Saurin le sujet de sa tragédie de Blanche et Guiscard.

vers, attacha les premiers; de fréquentes imitations des anciens, telles que l'aventure de la caverne, prise de l'âne d'or d'Apulée, la fable du cochon de Phedre, etc. des traits peu communs, cités à propos, en rendirent la lecture précieuse aux seconds; les troisiemes y rencontrerent une galerie de portraits au bas desquels ils étoient enchantés de mettre le nom. Tout Paris savoit que le docteur Sangrado n'étoit autre que le fameux Helvétius. Les poëtes, les comédiens, les comédiennes, les hommes, les femmes célebres s'y trouvoient

peints avec le costume espagnol, et plus d'une anecdote française y est racontée sous des noms castillans; enfin Gilblas, après avoir reçu une bonne éducation, tombant entre les mains d'une troupe de voleurs qu'il abandonne, pour passer successivement au service d'un chanoine, d'un médecin, d'un philosophe, d'un petit - maître, d'une actrice, d'une jeune fille de qualité, d'un vieux seigneur, d'une grande dame qui tient un bureau d'esprit ; devenant intendant d'un grand d'Espagne, secrétaire de l'archevêque de

Grenade, puis d'un marquis portugais, puis factotum d'un comte sicilien; Gilblas commis et favori du premier ministre, le duc de Lerme prisonnier d'état, et finissant par se retirer à la campagne, essayant ainsi de toutes les conditions, et en décrivant les mœurs d'une maniere vraie, ingénieuse, pittoresque, dut amuser, intéresser l'universalité des lecteurs à la portée desquels il se met sans cesse et qui, maîtres ou valets, font tour à tour une connoissance particuliere avec lui. Aussi outre un nombre infini d'édi

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