long-temps les marchands seuls pour qui elles étoient faites, en profiterent. Mais comme le concours du peuple augmenta avec la ville, et que comme elle il devint immense, on imagina d'y montrer des animaux rares, ensuite des animaux instruits. La réussite y fit joindre des sauteurs, des voltigeurs, qui mêlerent aux danses et aux sauts quelques mauvaises scènes en prose, d'abord aussi mal rendues qu'elles étoient mal composées. Peu à peu les acteurs devinrent meilleurs; les auteurs furent mieux choisis, et tout Paris y courut. Les comédiens français au lieu d'user, pour retenir le monde, du privilege de se surpasser dans leur jeu, et de donner d'excellentes pieces, trouverent plus commode de faire valoir celui que leur accordoit les lettres patentes de leur établissement. Ils plaiderent; les entrepreneurs des spectacles forains obtinrent diverses sentences et arrêts qui changerent singulièrement la forme des pieces. Chaque décision faisoit éclore une variation, au moyen de laquelle on éludoit les dispositions du jugement; et le public curieux de savoir comment on s'y prendroit, se portoit en foule à la foire. Les forains condamnés, et défenses à eux faites de jouer des dialogues, ils eurent recours successivement aux monologues, au débit dans les coulisses, à la pantomime, aux marionettes, aux écriteaux. Cette derniere maniere qui offre l'opéra comique dans son berceau, mérite d'être expliquée. Les acteurs paroissant sur la scène, descendoient du ceintre deux amours qui dérouloient un cartouche sur lequel on lisoit un couplet et le nom de l'acteur qui devoit le chanter. * L'orchestre jouoit l'air, les spectateurs ayant le ton, chantoient le couplet, et l'acteur faisoit des gestes analogues. Au milieu d'un peuple chantant, on pense bien que cette invention fut parfaitement reçue. Les mémoires pour servir * On ne commença pas par-là. En premier lieu, chaque acteur se présenta avec un écriteau à la main, où son rôle se lisoit écrit en gros caracteres; d'abord ce fut en prose, ensuite en couplets. Ces cartons embarrassant sur la scène, on prit le parti de les faire descendre du ceintre. à l'histoire des spectacles de la foire, l'attribuent à MM. Chaillot et Remy, l'un officier mouleurde bois, l'autre greffier à l'hôtel de ville. « C'étoient, disent-ils, deux philosophes <<< inconnus.» Inconnus ou non, si l'idée est à eux, on leur en doit l'hommage *. Le Sage la perfectionna. Arlequin roi de Serendib, sujet tiré des contes arabes, eut un succès éton *Disons tout pourtant; l'auteur de ces mémoires , pour appuyer son sentiment, n'attribue à MM. Chaillot et Remy qu'Arlequin empereur dans la lune, joué en 1712; et dans le même ouvrage on trouve au catalo |