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LA PROVIDENCE.

1

ODE,

Qui a remporté le Prix, au jugement de l Académie de Marseille, en 1741.

Q

UEL fpectacle étonnant! de ta bonté féconde
Grand Dieu, les tréfors font ouverts;

De la nuit du Cahos tu fais fortir le Monde

Ta voix enfante l'Univers.

La Terre offre à mes yeux fes richeffes naiffantes Et l'Empire des eaux, fes vagues écumantes, Des Cieux j'admire la fplendeur,

Les feux étincelans de la célefte voute.

Me retracent déja dans leur immense route
Une image de ta Grandeur.

CETTE fcene à mes yeux va bientôt difparoître,
L'abîme s'ouvre devant moi

L'Univers fe diffout: ô toi qui l'as fait naître,
Il ne peut durer que par toi !

Je le vois chancelant par fa propre foibleffe,
Si ton Bras tout-puiffant ne le foutient fans ceffe,

Et

Il perit à chaque moment:

Viens; oppofe à fa perte un falutaire obstacles
le conferver, prolonge le miracle
Que ta main fit en le formant.

pour

UN ordre merveilleux regne dans la Nature? Non, d'infenfibles élémens, N'entretiendront jamais ce bel ordre qui dure Depuis la naiffance des Tems.

La Matiere fe meut, & je vois ce Prothée
Prendre, quitter, reprendre une forme empruntée
Qui produit tant d'effets divers;

De ces combinaisons je recherche les causes,
Et mon efprit retrouve en ces métamorphofes
Le Dieu qui forma l'Univers.

L'OMBRE fuit, & déja la rive Orientale
De l'Aurore a reçu les pleurs..

La lumiere naiffante, à mes regards étale
L'éclat des plus vives couleurs;

J'adore en la voyant, la Sageffe immortelle
Qui par ce don brillant rend la terre fi belle
A fa fuite marche le bruit 3

Elle vient du fomeil bannir la douce ivreffe
Tout s'anime bientôt de leur active adreffe

Les Mortels goûteront le fruit.

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'AH! C'est toi que j'admire en te marche rapide, Globe ardent, Globe lumineux,

Tu fends les airs, dis-moi, quelle eft la main qui guide
Le cours de tes utiles feux ?

Quel compas a tracé ta çonftante carriere ?
Tu voles, tu répands une vive lumiere

Gage des céleftes faveurs.

D'un Verd, ami des yeux, la Terre se courone,
Les trésors de l'Eté, les préfens de l'Autonne,
Du Printems remplacent les fleurs.
&

MAIS quelle affreufe nuit partout répand fes ombres !
Les Vents frémiffent dans les airs;

Le Tonerre fe forme, & des nuages fombres
Sortent les foudres, les éclairs;

Tout va périr, grand Dieu! Qu'ai-je dit, téméraire ?
Tu vas faire couler une onde falutaire,

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Du fein de ces noirs tourbillons
Mille & mille ruiffeaux s'épanchent à ma vûë,
Et fortant avec bruit des prifons de la nuë,
Ils enrichiffent, nos fillons.

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ORGUEILLEUXx Océan; toi dont l'onde fi fiere,
Frappe la rive en frémiffant,

'Arrête, un peu de fable eft l'unique barriere
Que t'oppofe le Toutpuiffant.

Déja loin de nos bords une mobile maffe,
Jouet des Aquilons, fend l'humide furface,

Et parcourt cent divers climats j

Vafte Mer, Vents fougueux, fervez la Providences Par vous aux Nations fa fageffe difpenfe

{...

Les richeffes qu'elles n'ont pas.

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Tour change autour de moi, le Théâtre du Monde

Offre des plaifirs, des douleurs.

J'apperçois chaque jour une fcene féconde

En brillants fuccès, en malheurs.

Eft-ce un Deftin aveugle, ou le pouvoir des aftres,
Qui regle le bonheur, qui regle les défaftres,
Et fait naître ces changemens?

De ces effets divers la cause m'eft connue 2
Un Dieu préfide à tout, c'est son doigt qui remue
Les refforts des événemens.

IL tire l'Indigent du fein de la pouffiere,
De l'Innocent il rompt les fers;

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Sa fageffe humilie une ame trop altiere,

Et la livre à d'affreux revers:

Arbitre des Etats, qu'il enleve ou qu'il donne,
A tous les Souverains, quand il renverfe un trône
Il fait des leçons de terreur;

Et quand il veut punir des Nations perfides,
Harme les humains : leurs glaives homicides
Sont l'inftrument de fa fureur.

Du bien de tes enfans, aimable & tendre Pere Tu fais le plus doux de tes foins, Tu confultes, Seigneur, touché de leur misere,

Et ton amour & leurs befoins.

Un ennemi cruel contre moi fe déchaîne ;

Que peuvent les transports d'une impuissante haîne 2 Contre lui tu combats pour moi;

Accablé de mes maux, ta bonté me délivre; Auteur de l'Univers, c'eft toi qui me fais vivre. ne dois vivre que pour toi

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