Tept; il le fit par une indiction qui fut imprimée, & s'attacha sur tout à la faire fignifier aux Abbez de l'Etroite Obfervance. D'abord les sentimens furent fort differens sur cette convocation. L'Abbé de Prieres & quelques au tres Abbez étoient d'avis de ne se point trouver au Chapitre general, pour évirer toutes les contestations que la reception du Bref ne pouvoit pas manquer d'exciter, & pour ne pas autoriser par leur prefence tout ce qu'ils prévoyoient qu'on y feroit contre l'Etroite Obfer vance. L'Abbé de la Trappe fut d'un sentiment contraire. Il representa sur cela que si les Abbez de l'Etroite Obfervance ne faisoient pas au Chapitre general tout le bien qu'ils auroient souhaité, ils empêcheroient au moins la ruine totale de la Reforme, en choisissant de bons définiteurs selon le droit que le Bref leur en donnoit. Que c'étoit perdre la partie que de l'abandonner, & qu'on ne feroit jamais en leur prefence contre l'Etroite Observance, ce qu'on ne manqueroit pas d'entreprendre s'ils s'absentoient du Chapitre general. D'ailleurs qu'on prendroit leur absence pour une désobéiffance formelle au Pape && au 1 au Roy. Qu'on ne manqueroit pas de die dans le monde ce qu'on leur avoit déja reproché à Rome, qu'ils étoient des ambitieux, que leurs desseins n'ayant pas eu le succès qu'ils avoient prétendu, ils vouloient faire un corps à part, & introduire un schisme dans l'Ordre qu'on ne pourroit plus éteindre. Qu'ainsi, au lieu de s'absenter du Chapitre general, il croyoit que les Abbez de l'Etroite Observance devoient s'y rendre au plus grand nombre qu'il se pourroit, & que Dieu ne permettroit pas que les projets contre la Reforme de France eussent tout le succès dont on s'étoit flatté. Les raisons de l'Abbé de la Trappe suspendirent d'abord la resolution qu'on avoit prise, de ne point assister au Chapitre general; mais elles ne parurent pas affez fortes à l'Abbé de Prieres pour le déterminer à y aller. Dans certe incertitude il crut qu'il ne pouvoit rien faire de mieux que de s'en rapporter au sentiment du Premier President de Lamoignon. Son affection pour l'Etroite Observance luy étoit connue, & d'ailleurs ses lumieres ne permettoient pas qu'on hefitât sur ce qu'il auroit une fois décidé. Ce grand Magistrat dont la probité & les grandes qualitez étoient fi.. I. Partic. R generalement reconnuës, fut d'avis que la plus grande faute que l'on pouvoit faire dans la conjoncture dont il s'agiffoit, feroit de s'absenter du Chapitre general; il approuva les raisons de l'Abbé de la Trappe, il en ajouta quantité d'autres; en un mot, il détermina l'Abbé de Prieres à porter tous les Abbez de l'Etroite Observance à se trouver au Chapitre general. 1667. En execution de cette resolution, les Abbez de l'Etroite Observance se rendirent à Cîteaux. Le Chapitre general ayant été formé par la nomination des Définiteurs & des autres Officiers qui devoient agir dans cette Assemblée ; l'Abbé de Citeaux fit lire le Bref d'Alexandre VII. du dix-neuviéme d'Avril mil fix cent soixante & fix. La lecture achevée, il se mit à genoux, & declara qu'il l'acceptoit; plusieurs Abbez en firent autant, & déclarerent avec de gran. des marques de respect qu'ils acceptoient le Bref, & qu'ils en procureroient l'execution de tout leur pouvoir. L'Abbé de Citeaux s'étant relevé, l'Abbé de la Trappe representa à la Compagnie qu'il y'avoit plusieurs refle. xions à faire fur le Bref qui venoit d'ê tre lû. Que quoi qu'il portât le nom dụ Pape Alexandre VII. il étoit constant qu'il n'avoit point été fait de fon autorité, qu'il n'en avoit jamais rien sçu parce que la maladie qui a enfin cause sa mort, empêchoit deflors qu'on ne luy parlât d'aucune affaire; qu'il pouvoit même assurer que ce Bref n'avoit point été resolu dans la Congregation des Cardinaux & des Prelats qui avoient été nommez par le Pape pour y travailler. Que pour ces raisons & plusieurs autres qu'il expliqueroit en temps & lieu, il protestoit contre la reception de ce Bref, & qu'il se pourvoiroit devant Sa Sainteté, quand il plairoit au Roy de luy en donner la permiffion. Ensuite, il de manda Acte de sa protestation, & qu'elle fût inserée sur le champ dans les Regiftres du Chapitre general. Cette protestation faite avec tant de fermeté par un homme du merite & de la confideration de l'Abbé de la Trappe, fit craindre à l'Abbé de Cîteaux que plusieurs Abbez de l'Etroite Obfervance ne se joignissent à luy; pour les en empêcher il prit la chose avec beaucoup de hauteur, & dit à l'Abbé de la Trappe d'un ton où son indignation paroiffoit toute entiere, qu'il y avoit lieu de s'étonner qu'étant si jeune dans l'Ordre, il s'y donnât des libertez que personne n'avoit osé prendre, qu'il devoit se regler sur ses anciens, & ne leur pas donner l'exemple d'une revolte contre le faint Siege. En toute autre rencontre l'Abbé de La Trappe eût reçu cette correction avec tout le respect qu'il croyoit devoir à ses Superieurs; mais comme il avoit cru qu'il étoit obligé de faire sa protestation, il crut aussi qu'il devoit la soutenir; ce fut ce qui l'obligea de répondre à l'Abbé de Citeaux avec une humble fermeté, qu'il étoit vrai qu'il étoit fort jeune dans l'Ordre; mais qu'il étoit affez ancien Docteur de Sorbonne, pour pouvoir dire son avis sur une affaire où il étoit aussi interessé que personne. Qu'il n'avoit pris la parole fur ses anciens, que parce qu'il n'y en avoit aucun qui sçût auffi-bien que luy tout ce qui s'étoit passé à Rome. Que quand on sçavoit la verité, on étoit obligé de la dire; qu'après tout, s'il avoit parlé le premier, il n'avoit fait qu'expliquer le sentiment de tous les autres. A ces paroles s'étant tourné du côté des Abbez de l'Etroite Observance, ils se leverent tous, déclarerent qu'ils se joignoient à l'Abbé de la Trap |