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mais on l'assura de la part du Pape, qu'à l'avenir Sa Sainteté se rendroit facile à accorder toutes les permiffions particulieres qu'il jugeroit à propos de luy demander; il s'en tint à cette réponse, & depuis Sa Sainteté luy fut toujours favorable, & ne luy refusa aucune des difpenses dont il eut besoin dans plusieurs occasions dont on pourra parler dans la fuite de cette Histoire.

CHAPITRE XII.

L'Abbé de la Trappe acheve d'établir la Reforme dans son Monastere : Il y fait revivre l'ancienne penitence des Moines de Citeaux.

L parler

A liaison des sujets dont on a eu à , a obligé d'anticiper le recit de bien des choses qui font arrivées depuis celles qu'on va raconter. Il est temps maintenant de dire de quelle maniere l'Abbé de la Trappe établit dans fon Monaftere cette Reforme si édifiante qui a mis tant de Saints dans le Ciel & qui a fait depuis tant d'honneur à l'Eglife.

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L'Abbé de la Trappe ayant reçu tous les secours dont on a parlé, & n'ayant plus dans son Monastere que des Religieux fervens qui ne respiroient que la penitence & la pratique exacte de la Regle de faint Benoist & des anciens usages de Citeaux ; il crut qu'il ne devoit pas differer davantage à executer le grand dessein de Reforme dont on a parlé.

Il commença par inspirer à ses Freres un grand mépris du monde & de tout ce qui y fait l'objet des paffions & de la cupidité des hommes. Il y réüssit si bien que, quoi qu'il n'eût pas coutume de

flater ses Religieux, il ne fait pas diffi Devoirs culté de leur dire: Vous êtes à l'égard monasti» du monde comme s'il n'étoit plus, il

de la vie

que.

Ch. 7.

>> est effacé de vôtre memoire comme >> vous l'êtes dans la sienne. Vous ignorez tout ce qui s'y paffe, ses évene» mens & ses revolutions les plus im>> portantes ne viennent point jusques à vous. Vous n'y pensez jamais que lorf>> que vous gemissez devant Dieu de ses miseres, & les noms mêmes de ceux >> qui le gouvernent vous feroient in>> connus si vous ne les appreniez par >> les prieres que vous adressez à Dieu >> pour la conservation de leurs perfon>>>nes. Enfin, vous avez renoncé en le

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quittant à ses plaisirs, à ses affaires, « à ses vanitez, & vous avez mis tout a d'un coup dessous vos pieds ce que e ceux qui l'aiment & qui le servent e ont placé dans le fonds de leur cœur. «

A ce mépris, à cet oubli du monde & de tout ce qui peut flatter ou nourrir l'amour propre, ce grand homme fit fucceder un ardent amour pour Dicu & pour JESUS-CHRIST. Illeur parloit sans ceffe des marques qu'il nous a données de sa bonté, de ce qu'il a fait pour nous dans le temps, & de ce qu'il nous pro met dans l'éternité. Par ces motifs d'a mour & de reconnoissance il sanctifioit toutes leurs pratiques exterieures, il les élevoit au dessus d'eux-mêmes, il les attachoit à Dieu, il en faisoit l'unique objet de leurs pensées & de leurs defirs.

Que rien ne vous empêche, leur « Ibid disoit-il, de donner vôtre cœur à Je- c SUS-CHRIST, d'une maniere qui soit ce digne des obligations que vous luy c avez. Répondez à l'excès de sa bonté « par la plenitude de vôtre amour. Que vôtre ame soupire sans cesse après luy, se qu'elle aille à luy par de continuels ef- ce forts, & qu'elle reffente, s'il est possible, cette bienheureuse défaillance

S

>> dont parle le Prophete, quand il dit: Pfal.83. » Mon ame defire ardemment d'être dans D. Ι. » la Maison du Seigneur, elle languit, » elle se consume, & elle est presque dans >> la défaillance par l'ardeur de ce dofir. >>> En un mot, rendez toutes vos actions >> si pures & fi faintes dans l'usage que » vous ferez de vôtre pauvreté, de vôtre >>> folitude, de vôtre filence, de vôtre >> austerité, & de tant d'autres dons que » vous avez reçus de JESUS-CHRIST, >>> qu'elles foient à ses yeux comme au >> tant de sacrifices d'une loiange im. mortelle pour toutes les mifericordes >> qu'il vous a faites.

L'amour du prochain est trop étroi. tement uni à l'amour de Dieu pour en pouvoir être separé, & l'Abbé de la Trappe sçavoit trop combien la charité fraternelle est effentielle à toutes les Societez Religieuses, pour ne pas donner tous ses soins à l'établir dans sa płus haute perfection. Tous ceux qui en ont été les témoins demeurent d'accord que depuis les Apôtres on n'a jamais vû dans aucune Communauté une charité plus animée, plus vive, plus pure & plus fincere. Chacun avoit plus d'égard à fon Frere qu'à soy-même; il préferoit fes pensées & ses sentimens aux fiens, tour jours prêt à s'incommoder, & à fe charger des penitences & des travaux les plus penibles pour foulager ses Freres. Au moindre signe qu'ils se faisoient les uns aux autres, ils accouroient pour se rendre tous les services dont ils pouvoient avoir besoin. Les malades même n'étoient touchez que de ce que souffroient leurs Freres, & paroiffoient insensibles à leurs propres maux. S'il arrivoit qu'ils parlassent de leurs Freres au Pere Abbé ou à leurs autres Superieurs, c'étoit avec une estime, un respect & une tendresse que rien ne pouvoit égaler; ils n'avoient les yeux ouverts que fur leurs propres défauts, ils n'en connoissoient point dans leurs Freres, ils n'en parloient que pour les loüer & les admirer; en un mot, on n'exagerera rien quand on dira qu'ils étoient prêts de donner leur vie les uns pour les autres. La difcipline du Monastere contribuoit beaucoup à maintenir les choses dans l'état qu'on vient de representer; les moindres contradictions, les fautes les plus legeres contre la charité étoient regardées comme de grands crimes, & on les punissoit toujours avec une severité qui en augmentoit l'horreur. L'amour fraternel étoit regardé comme la

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