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1. 13. c. 38.

de la coûtume, conçût enfin pour la faineantife & pour la volupté l'averfion, que nous avons naturellement pour la peine & pour la douleur. Ils ne croyoient pas trop paier du facrifice des plaifirs, la liberté d'efprit & de cœur, dont ils jouiffoient dans une vie labo rieuse & frugales mais à tel point frugale & laborieuse, qu'Alcibiade difoit je ne m'é- Elian. Var. Hiff. tonne point qu'ils l'expofent fi volontiers, & qu'ils fe precipitent dans le peril, quifemble moins leur ôter la vie que leur faire prefent de la mort. Tous naiffoient amoureux de Fordre & de la difcipline. La Loi regnoit fur lo Riche comme fur le Pauvre, & fur le Magift trat auffi-bien que fur le Particulier. Les Rois mêmes fe glorifioient d'eftre fes fujets, & ne fe diftinguoient que par une obeiffance plus exacte. Agefilas étonna les Perfes par famodeftie dans une conference, autant qu'il les avoit épouvantez par fa valeur dans les combats. Ce Roi veritablement maistre de luimême, rejette les offres les plus flateufes de la fortune, & fourd aux applaudiffemens des Polyb. l. 3.- € 6. nations qu'il avoit affranchies ; infenfible aux larmes qu'elles répandent pour le rete- Cora. Nep, & plius. nir; au milieu de fes conqueftes qui faifoient déja trembler le Grand Roy, il s'arrefte &

Quelqu'un demapourquoy il s'en

dant à Demarat,

fuyoit de Lacedemone Capitale de fon Royaume; c'eft,.

dit-il, que les loix

ont plus de pouvoir

que le Roy.

in Agefil

*Magiftrats de Lacedemone.

retourne fur fes pas. Et cela par deference aux ordres des Ephores * qui le rappellent; tant la moderation avoit pour lui de charmes, & lui paroiffoit plus glorieufe que les conqueftes; ou pour ne redonner précisément que fa pensée: tant il croyoit qu'un Roy ne devoit pas moins obeir aux Loix, que commander aux hommes. De tels Rois nourris dans des maximes fi juftes, fi pures,& comme hereditaires,ufoient moderément de la domination & ne la faifoient prefque point fentir. Ils commandoient en peres, plutost qu'en maîtres. Lycurgue avoit bien compris, que l'intelligence parfaite entre le Peuple & le Souverain eft la bafe & le fondement de leur felicité reciproque. Pour maintenir cette intelligence, il avoit établi les Ephores Lycurgue répondit ou Inspecteurs, qui n'obfervoient pas moins loüoit fort la De- la conduite du Roi que celle du Peuple, & cez par l'établirdans tenoient fi bien dans l'équilibre l'un & l'auà dire par établir, tre, que l'autorité Royale "ne penchoit jamais vers la dureté & la tyrannie, ni la liberté populaire vers la licence & la revolte. Ce mi

à un homme, qui

mocratie; Commen

voftre maison; c'est

qu'il y ait dans vô

tre maifon autant

de Maiftres que domestiques.

de

† Herod. l. 1. c. 65. Plutarque au contraire (in Lycurg.) prétend que Theopompe, pour mettre un frein aux citoyens qui s'érigeoient en Tyrans de Lacedemone, inftitua les Ephores environ 130 ans aprés Lycurgue; &comme la femme de Theopompe lui reprocha, qu'il laifferoit à fes enfans l'autorité Royale plus foible qu'il ne l'avoit reccue: Je la leur laifferai plus, durable, dit-il, & par confequent plus forte,

lieu entre la fujetion exceffive & l'exceffive liberté fauva Sparte des diffenfions domestiques, qui defolerent les Etats voisins. Les Ephores, dans les conjonctures importantes, faifoient agréer au Peuple tout ce qu'on avoit refolu. Les refolutions ainfi unanimes, & prifes de concert s'executoient à propos,& chacun concouroit à l'execution d'un deffein, comme s'il l'avoit lui-même formé. Le gouvernement de Lacedemone n'étoit donc pas purement Monarchique. Les Grands y avoient beaucoup de part, & le Peuple n'en étoit pas exclus. Toutes les parties de ce corps politique, à mesure qu'elles confpiroient au bien general, y trouvoient le leur.En forte,que malgré l'inquiétude & l'inconftance du coeur humain, qui foupire toûjours aprés le changement, & ne fe guerit jamais de fon degouft pour l'uniformité, Lacedemone pendant plus de fept cens ans fe maintint dans l'exacte obfervation de fes Loix. Outre cela le merite étoit de tout fexe & de tout âge. La jeuneffe n'avoit pas befoin d'attendre les leçons de l'experience. L'inftitution & lexemple y fuppléoient, & mettoient même les femmes à portée de la vertu la plus heroique. L'amour de la Patrie faifoit taire l'amour

maternel. La mere, à qui l'on annonçoit la mort de fon fils tué au fervice de la Republique, alloit vifiter le cadavre fur le champde bataille, & y regloit fa douleur felon les bleffures honteufes ou honorables, dont il fe trouvoit couvert. Cette magnanimité, univerfellement répandue dans Lacedemone, lui fit un grand nom. Au bruit d'un merite fi Herod. I. 1. & 3. rare,les Rois d'Egypte & de Phenicie penetrez d'estime & d'admiration, crurent luy devoir une espece d'hommage,& le luy rendirent par des Ambaffades folemnelles. Semblables prodiges frappoient de plus prés encore les Grecs, & leur imprimoient pour elle un jufte refpect. C'est par là, qu'elle exerça long temps fur eux, l'empire que la vertu donne, & qui ne pese point à des ames volontairement foumifes. Chacun croioit, que marcher avec elle, c'estoit fuivre la juftice & la raison, aller au bien, & courir à la gloire. La tyrannie trouvoit dans les Lacedemoniens de terribles & d'implacables ennemis 5 la liberté de vigilans & d'infatigables protecteurs. Ce zele ne fe renfermoit pas dans l'enceinte de la Grece. Les Grecs d'Afie fur le point de fe voir accablez par Cyrus, tournent les yeux vers Sparte, & la conjurent de ne

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pas permettre, que des Grecs deviennent la proïe des Barbares. Sparte reçoit favorablement l'Ambassade. Ces fiers Republiquains, eurent l'affeurance,de mander par un Heraut d'Armes à ce Conquerant, qui venoit de subjuguer l'Asie; qu'ils ne souffriroient jamais, 14. 1.1. qu'il touchât aux Colonies Grecques; que rien de ce qui portoit le nom Grec n'etoit né pour la fervitude, & que s'il penfoit à les fubjuguer, ils fçauroient bien-toft paffer la mer & les affranchir. Telle fut Sparte, tant qu'elle ne domina que par fes vertus. Reverée en mere des Peuples, en protectrice de la caufe commune, en Arbitre fuprême de tous les differends, elle n'avoit ni n'exigeoit d'autre tribut que l'eftime, l'amour, la confiance, . & l'admiration. La politique des Lacedemoniens ne laiffoit pourtant pas d'avoir fes defauts. Leur empire fe reffentoit de leur hu- Ariftot. Pol. 1.S.c.4 meur, & la dureté qu'ils avoient pour euxmêmes,ils l'avoient pour leurs Alliez. Outre que l'on ne connoiffoit ni paix nitrevefous une Republique, vouée à la profeffion des Armes, & conftituée de maniere qu'elle ne pouvoit se maintenir, que par des guerres. continuelles. C'est ce qui dégoûta de fon obeiffance, & favorifa l'ambition d'Athênes

Plat. de Rep. l. 8.

de Leg. 1. 1.
op de Repub.

Arift. Polit.!.7.c.14.

Lac.

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