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Drammatiques dont on ne nous a confervé que les titres & tout au plus quelques lambeaux de peu fyllabes qui ne fuffifent pas pour faire juger de leur beauté.

de

La Tragedie Romaine eft reduite au recueil qui contient les piéces de divers auteurs à qui le nom de Seneque étoit commun. Nous n'en avons point d'autre traduction que je fache que celle de l'Abbé de Maroles; à dire vrai, le dommage n'eft pas grand; ce font des pièces de fort mauvais goût; les acteurs ne viennent fur la fcene que pour y reciter des fentences à perte de vûe, entremêlées de defcriptions où le poéte ne finit point; tout y eft d'une boufiffure très-éloignée du veritable fublime. C'eft ce que Defpréaux appelle la foibleffe Latine qu'il opofe à la force divine où Sophocle avoit porté la Tragedie chez les Grecs.

III. Du

III. DU THEATRE FRANCOIS.

I. De la Tragedie.

N me permettra de ne pas compter pour des pièces de Théatre les farces devotes dont parlent Defpréaux & Mr. Broffete son commentateur.On a l'obligation des premiers commencemens de la Tragedie Françoife à Etienne Jodelle qui floriffoit fous les Regnes de Henri II. de François II. & de Charles IX. Sa Cléopâtre jouée à la Cour de Henri II. lui acquit une grande reputation. C'étoit cependant un poéte dur qui n'avoit rien de recommandable qu'une extrême facilité qui lui faifoit compofer jufqu'à cinq çens vers en une nuit. Cela feul fuffit pour prouver qu'il n'étoit pas fort difficile à contenter. pour fucceffeur la Perufe qui écrivoit avec plus de foin. A près cela N 2

O compter pour

Il eut

vint

vint Robert Garnier qui prit les Seneques pour modeles, c'eft à dire qu'il en copia tous les defauts, l'air de declamation, & le refte. On ne laiffa pas de l'admirer, faute de mieux. Hardi & quelques autres qui occuperent la fcene après lui, firent beaucoup plus mal. Garnier avoit travaillé d'après de mauvais modeles; Hardi n'en fuivit aucun & s'abbandonna à toutes les extravagances dont fon genie étoit capable.

Sous le Regne de Louis XIII. le Miniftére de Richelieu changea entierement l'état du Théatre. Il aimoit ce fpectacle jufqu'à lui facrifier de groffes fommes, tant pour l'encouragement des Auteurs, que pour les frais des reprefentations. L'Academie naiffante lui fournit des poètes, il aimoit à leur voir tracer des plans d'ouvrages: outre les piéces qu'il leur faifoit faire en commun, chacun produifoit de fon côté,

côté, & s'efforçoit de meriter les faveurs que ce Miniftre prodiguoit à ceux qui le fervoient à fon gré. Les cinq Auteurs qui faifoient chacun un acte des pièces dont il avoit approuvé le fujet & la difpofition, étoient Boifrobert, Corneille, Colletet, de l'Etoile, & Rotrou; ce dernier n'étoit pas de l'Academie, & s'étoit diftingué entre fes Confreres. Son Venceflas fe foutient encore après environ un fiécle, tandis que quantité de piecés contemporaines font oubliées.

On peut juger aifément que ces piéces des cinqAuteurs ne devoient pas être fort égales, pour les Sentimens, & pour les Vers. Cela ne valoit qu'autant que lui donnoit de merite la fantaifie du Cardinal qu'il falloit contenter. Des-Marets travailloit feul & fit entre autres piéces fa Comedie des Vifionnaires qui eft, je penfe, la premiere où l'on ait fonN 3

gé à mettre des caracteres. Elle eut beaucoup d'applaudiffement: Tristan par fa Mariamne, Scuderi par la mort de Cefar, Didon, l'Amour Tyranique, &c; Du Rier par fon Themistocle, fon Scevole, &c. dégroffirent un peu le goût François pour la Tragedie; mais ils avoient entre eux un concurrent deftiné à les éffacer.

Corneille auteur de quelques Comedies où il avoit fi peu obfervé de regles que, de fon aveu, il ne favoit pas alors qu'il y eût des regles; Corneille, dis-je, après des effais informes qui n'annonçoient pas à beaucoup près tout le merite de leur auteur hazarda le Cid, où la force & la vivacité des paffions agirent puiffamment fur le cœur du Spectateur & ne lui laifferent pas affez de fens froid pour en appercevoir les defauts. Les poètes en furent allarmez & Richelieu eut la

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