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De ces trois chofes les deux premieres, je veux dire, les facrés Textes des Evangi les fidellement rendus & expliqués, font: celles en quoi confifte tout le fonds de nôtre Ouvrage. Mais il eft bon de remarquer que pour comprendre le fens de la divine Parole, il ne fuffit pas d'en confiderer fimplement la Lettre, qui trompe fouvent ceux qui s'y attachent.Car ce qui d'abord paroît le plus vrai-femblable,n'eft pas toûjours le plus vrai. Il faut rechercher l'origine, & pefer la force de chaque mot; il en faut favoir les diverfes fignifications,& prendre garde fur tout à ne préferer jamais fes propres lumieres à celles de Dieu & de l'Eglife..

Suivant cette régle, on a eu foin de conferer la Vulgate & avec le Texte Grec, dont elle eft la plus fidelle Traduction, & avec la Verfion Siriaque que les Eglifes de Sirie,. par une Tradition ancienne, ont attribuée à Saint Marc, Evangelifte, leur grand Patriarche,& qu'on a divifée depuis par Chapitres, avec des titres à la tête, où il s'eft gliffé plufieurs mots empruntés du Grec.

Cen'eft pas que cette Tradition foit fort. feure, mais elle a du moins quelque fondeiment: & quand elle feroit évidemment fauffe, il eft toûjours vrai que la Version Syriaque eft eftimée des Sçavans, foit pour fon antiquité, foit parce que le Sauveur,. ainfi que les autres juifs de fon tems, par

loit Syriaque, & que c'eft la langue en laquelle on croit que le premier des Evange liftes a écrit fon Evangile.

A l'égard des regles de Chronologie,& du plan de Géographie, dont nous avons creu nous devoir fervir en cette Hiftoire, nous ne ferons pas de longues Differta tions pour les justifier. C'est un travail qui nous convient moins qu'à ceux qui par pro feffion, traitent ces fujets de controverfe. Nous n'en dirons donc précisément que ce qui eft néceffaire pour nôtre deffein. Nous pouvons toûjours affûrer en general qu'en ce qui concerne l'ordre des tems, nous nous fommes attachés le plus que nous avons pû à la doctrine d'un des meilleurs maîtres, qui ayent jamais été en cette matiere. Pour ce qui eft des lieux fanctifiés par la prefence de Nôtre-Seigneur,& arrofés de fes fueurs & de fon fang, nous avons fuivi prefque par tout la Géographie commune.

Ceux donc qui voudront accompagner leur Sauveur dans fes voyages, & qui ont befoin d'un guide pour ne fe pas égarer dans des Regions inconnues, doivent fçavoir avant toutes chofes, que la Terre Sainte, où Jesus eft né, où il a vécu, & où il est mort, eft cette Terre fi fameufe que le Seigneur avoit promife à fon peuple, & qu'il lui fit acheter par un penible voyage de quarante

années.

gueres

C'eft un païs affés petit, qui n'a plus de foixante lieues de longueur, & en a fix fois moins de largeur. Dans fa longueur, elle s'étend du Nord au Midi, depuis Dan jufqu'à Berfabée. Du côté da Nord fes bornes font le Liban, & du côté du Midi, l'Arabie. Sa largeur fe prend de l'Orient à l'Occident, depuis le Jourdain & quelques grands Lacs, aufquels on donnoit le nom de Mers, jufques à la grande. Mer des Tyriens & des Sidoniens..

Il n'y eut jamais de terre meilleure ni plus riche. L'air y étoit doux, les Villes. peuplées, les campagnes abondantes en toutes fortes de fruits, les faifons bien plus avancées qu'en ce païs-ci. Elle furpalloit de beaucoup l'Egipte en fertilité. Le païs quam in dont vous allés prendre poffeffion, difoit Moyfe au peuple de Dieu, ne reffemble terra y pas à celui d'où vous êtés forti. Car en pri,de qua Egipte, quand on a femé, il ne faut point

Terra

n'm ad 3

grederis

Piden

dam, non eft ficut

exifti, ubi

ne, in hor

jaco femi attendre la pluye: rien ne peut humecter torum!mo- la terre,que les eaux du Nil: encore faut-il ducuntur les conduire par des canaux avec autant de fed non- peine, que le Jardinier en a à arrofer fon

rem aquæ

tuofa eft,

& campe jardin. Mais le païs, où vous allés, est ftris, de plein de côteaux, de vallons, de plaines

ex

peatas plu- graffes & fertiles, où la pluye ne manque point dans le tems que la terre en a befemper in foin, depuis le commencement de l'année

vias,quam Dominus, Deus tuus

vifit, & 0.

culis jufques à la fin. Le Seigneur vôtre Dieu

y vient, & y fait fentir fa prefence : jamais à princi il n'en détourne les yeux.

anni ufque ad finem.

12,

Voilà quelle étoit en general la fitua- Dem.c.11 tion, l'étendue, & la bonté de cette Terre .10. 11. fi heureufe, où, felon les termes de l'Ecri- Exod. .8. ture, on voyoit couler des ruiffeaux de lait & alibi & de miel. Nous avons fuivi, tant qu'il paßim. nous a été poffible, la defcription qui s'en trouve dans les Cartes les plus fidelles, excepté en deux ou trois points, que nous avons jugé à propos de marquer ici.

I. Pour ce qui regarde l'endroit, où les .P.c.16. Députés des Juifs trouverent S. Jean, lors qu'ils allerent lui demander qui il étoit, & s'il n'étoit point le Meffie; nous ne fommes pas de l'avis de ceux qui veulent que l'Auteur de la Verfion Vulgate fe foit mépris, en mettant Bethanie, pour Bethabara. Nous aimons mieux dire que ce lieu avoit deux noms, & par ce moyen nous accordons les Exemplaires, tant anciens que nouveaux, dont les uns l'apellent Bethabara, & les autres Bethanie.

II. Ce lieu même dans la Carte de la fe 18. Ferre Sainte, & dans Jofué, qui le nomme 22. Bethabara, eft au deçà du Jourdain; & · cependant l'Evangile le met au-delà. Ce feroit un crime de penfer que le S.Efprit, qui eft l'Auteur & du vieux & du nouveau Teftament, pût fe contredire lui-même. Il faut donc montrer que le témoignage de l'un ne

2.P. c.61.

détruit pas celui de l'autre. De deux opi-
nions qu'il y a là-deffus, nous avons choifi
la moins commune, mais la plus propre à
concilier les deux Teftamens. Nous difons
donc qu'à la verité Bethabara étoit en deça.
du Jourdain, à l'égard de Jerufalem; mais,
que les terres qui en dépendoient, &'entre.
autres cette Campagne où S. Jean-Baptiste:
fut quelque tems, étoient au-delà.

III. Quant au lieu, où Jesus multiplia.
miraculeusement les cinq pains & les deux
poiffons, nous n'en pouvons convenir avec
les Géographes, qui le mettent à l'opofite-
de Bethlaïde & de Tiberiade, de l'autre;
côté du grand Lac de Galilée. Car apa-.
remment ils n'euffent eu garde de le mettre
en ce quartier-là, s'ils euffent fait la même
réflexion que le Venerable Bede, qui en ex-
pliquant l'Evangile, a fagement remarqué:
que le peuple qui courut aprés le Sauveur,
le fuivit à pied; ce qu'il n'eût pas fait, s'il:
lui eût fallu traver fer un lac, qui paroiffoit
une Mer, & qui en portoit le nom, à cause:
de fon étendue,

Voyons maintenant en quel état furent les affaires des Juifs, durant tout le cours de la Vie de Nôtre Seigneur. Quand il nâquit, ils étoient fous la domination du der-nier & du plus méchant de leurs Rois.. C'étoit Herode l'Afcalonite, qui, quoique fier & barbare, fçût fi bien faire fa cour à

(

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