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puis peu des lettres du cardinal de faint Marcellin, A N. 1302. contenant les réponses du roi votre frere aux articles que ce cardinal lui a prefentés de notre part; & nous avons trouvé qu'elles contredifent des veritez certaines, qu'elles ne s'accordent ni avec la raison ni Rain.n. 34. avec l'équité; & ne font pas conformes à l'assurance que l'évêque d'Auxerre & vous nous aviés donnée quand vous quitâtes la cour de Rome pour retourner en France. C'est pourquoi nous écrivons au cardinal que nous ne fommes point contents de ces réponses; & vous devez favoir que fi le roi ne les corrige, nous procederons contre lui fpirituellement & temporellement, comme nous jugerons à propos.

XXI.

Requeftè d

pape.

L'affaire s'aigriffant de plus en plus le roi Philipe Nogaret tint une affemblée à Paris en fa maifon roïale du Lou- contre le vre, le douzième de Mars 1302. indiction premiere, Diff. p. 56. la neuviéme année du pontificat de Boniface, c'està-dire l'an 1303. avant Pâques. A cette assemblée se trouverent cinq prélats, favoir les archevêques de Sens & de Narbonne, les évêques de Meaux, de Nevers & d'Auxerre & les Seigneurs fuivans, Charles comte de Valois & Louis comte d'Evreux freres du roi, Robert duc de Bourgogne, & plufieurs autres apellés exprés, le roi y étoit prefent. Alors Guillaume de Nogaret, chevalier & profeffeur des loix, prefenta au roi une requête qu'il prononça de vive voix & la laiffa par écrit. Elle commençoit comme un fermon par un texte de l'écriture, fuivant l'ufage du temps,& contenoit une accufation formelle contre le pape Bonifae réduite à ces quatre articles: 1. Je foutiens qu'il n'eft point pape, qu'il occupe injuftenment le fiége, & qu'il y eft entré par de mauvaifes voïes. 2. Qu'il eft

Tome XIX.

F

1

AN. 1302. heretique manifeste. 3. Qu'il est simoniaque horrible jufqu'à avoir dit publiquement qu'il ne pouvoit commettre de fimonie. 4. Enfin qu'il eft chargé d'une infinité de crimes énormes, où il eft tellement endurci, qu'il eft incorrigible & ne peut plus être toleré fans le renversement de l'églife.

Diff.p.615.

XXII.

C'est pourquoi je demande avec toute l'instance poffible & je vous fuplie, fire, & vous prélats, doteurs & autres affiftans, que vous excitiez les princes & les prélats, principalement les cardinaux, à convoquer un concile general, où aprés la condamnation de ce malheureux, les cardinaux pourvoïent à l'églife d'un pasteur; & j'offre de poursuivre mon accusation devant ce concile. Cependant comme cet homme n'a point de fuperieur pour le déclarer fufpens, je demande qu'il foit mis en prifon, & que vous avec les cardinaux établiffiez un vicaire de l'églife Romaine pour ôter toute occafion de fchifme jufqu'à ce qu'il ait un pape. Vous y êtes tenu, fire, tien de la foi : de plus comme roi, dont le devoir est d'exterminer tous les méchans, par le ferment que vous avez fait de proteger les églises de votre roïaume, & par l'exemple de vos ancêtres qui vous engage à délivrer d'oppreffion l'églife Romaine.

y

,

pour

le main

Guillaume de Nogaret étoit un gentilhomme de Languedoc juge-mage deNifmes en 1294.&depuis emploïé par le roi en plufieurs affaires importantes, & cette même année 1303. il lui donna la garde de fon feau.

Cependant le pape Boniface cherchoit à fe fortiAlbert re- fier contre la puiffance du roi Philipe & commença pár fe reconcilier avec Albert d'Autriche, en le reconnoiffant roi des Romains. Nous avons vû comme

conu roi des

Romains par

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pape.

il s'étoit declaré contre fon élection deux ans aupa- AN. 1303. ravant, traitant ce prince de sujet rebelle & de meur

Rain. 1303.

ɛrier du roi Adolfe: ce qui avoit attiré une guerre n. 1. 2. c.

x. 10.

fanglante aux trois électeurs ecclefiaftiques. Mainte- fup.n. 4,
nant le pape reconnoiffoit qu'Albert avoit été élû una-
nimement roi des Romains & couronné à Aix-la-
Chapelle, & qu'il avoit exercé pendant prés de cinq
ans l'autorité roïale. Mais avant que le pape donât
fa bulle de confirmation, Albert lui envoïa des pro- Rain. n. 9.
cureurs chargés de lettres patentes, qui portoient en
fubftance ce qui fuit: Je reconnois que l'empire Ro-
main a été transferé par le faint fiége des Grecs aux
Allemans en la perfone de Charlemagne : que le droit
d'élire le roi des Romains deftiné à être empereur, a
été accordé par le faint fiége à certains princes eccle-
fiaftiques & feculiers; & que les rois & les empereurs
reçoivent du faint fiége la puiffance du glaive mate-
riel. Enfuite eft le ferment de fidelité au pape & la
confirmation de toutes les promeffes faites par Ro-
dolfe & les empereurs fes prédeceffeurs. Albert con-
firme auffi les conceffions faites par l'empereur Louis
le Debonaire & le roi Otton. Il promet de défendre
les droits du faint fiége contre tous les ennemis quels
qu'ils foient, même rois ou empereurs, ne faire avec
eux aucune alliance, au contraire leur faire la guerre
fi le pape l'ordonne. Cette claufe femble regarder
Philippe le Bel Boniface aïant reçu cette patente
d'Albert, fit expedier fa bulle en datte du trentiéme
d'Avril 1303. par laquelle en vertu de fa pleine puif-
fance apostolique il le prend pour roi des Romains,
voulant qu'il foit reconnu pour
tel & que tous les fu-
jets de l'empire lui obéïffent; & fupléant tout ce

77. II.

2.12.

AN. 1303.
XXIII.

Sicile.

#. 2.

8.3. 4.

qui pourroit être defectueux en fon élection.

En même temps il travailloit à gagner l'amitié de Frideric re- Frideric roi de Sicile. Dés l'année précedente Charles connu roi de de Valois faifant la guerre en Sicile & fe voïant obliJord. ap. gé à revenir en France, traita conjointement avec RoRain. 1302. bert duc de Calabre, fils aîné de Charles le Boiteux roi de Naples,pour terminer les differends touchant le roïaume de Sicile. Les principales conditions du traité furent, que Frideric feroit pendant toute fa vie roi de l'ifle de Sicile, & la poffederoit en chef fans en devoir aucun fervice à perfone. Qu'il épouseroit Eleonor fille du roi Charles; & que le traité feroit ratifié & confirmé par le pape. Il étoit datté du dix-neuviéme d'Août 1302. Frideric en aïant demandé la confirmation, le pape la refusa jusqu'à ce que le traité fût corrigé, & qu'on y eût ajoûté la reconnoiffance que la Sicile relevoit de l'églife Romaine. Cependant pour at tirer Frideric à fe reconcilier, il le fit abfoudre de l'excommunication & lever l'interdit fur la Sicile; & lui accorda la difpenfe pour fon mariage avec Eleonor. La lettre eft du fixiéme de Decembre 1302.

n. 5.6.

Rain. 1303. #. 24. 2.5.

Frideric réfolu de fatisfaire le pape, lui envoïa trois ambaffadeurs avec plein pouvoir de réformer le traité & fuppléer ce qui y manquoit. Il convint donc de tenir du pape l'ifle de Sicile en qualité de vassal,& de lui païer tous les ans à la faint Pierre un tribut de trois milles onces d'or, & lui fournir cent chevaliers bien armés pour fervir trois mois toutes les fois que le pape diroit en avoir befoin. Il promit auffi de tenir pour amis & pour ennemis ceux de l'églife Romaine, & de pourfuivre ceux-cy de tout fon pouvoir, quand il en recevroit l'ordre. A ces conditions le pape confirme

le traité de l'avis de tous les cardinaux, excepté Mat- AN. 1393. . thieu Roffi des Urfins. Et comme Frideric avoit offert de prendre le nom de roi de Sicile ou de Trinacrie, felon que le roi Charles l'aimeroit mieux : ce prince voulant garder le titre de roi de Sicile, fit déclarer par ses envoïés que Frideric feroit nommé roi de Trinacrie,qui étoit un ancien nom Grec de cette ifle. Toutefois pour les mieux diftinguer je nommerai deformais Charles roi de Naples & Frideric roi de Sicile,fuivant l'usage qui a prévalu. La bulle de confirmation de ce traité eft du vingt-uniéme Mai 1303.

Incontinent aprés le pape Boniface jugea le procés touchant le roïaume de Hongrie. Les parties interef fées avoient été citées comme nous avons vû dés l'an

XXIV. Charobert

declaré roi de Hongrie. Sup. n. 10.

Rain. 1303. n.17.18. &c.

née précedente par le cardinal legat Nicolas évêque d'Oftie pour comparoître devant le pape, & Marie reine de Naples avec fon petit fils Charobert ne manquerent pas de s'y prefenter par leurs procureurs. Mais Venceslas roi de Bohême ni fon fils ne comparurent point. Ils fe contenterent de propofer leurs excufes par trois envoïés, qui déclarerent hardiment en consistoire,que le roi leur maître ne prétendoit point plaider pour le roïaume de Hongrie. Sur quoi le pape le réputa contumax, décida que ce roïaume étoit fucceffif non électif & l'adjugea à la reine Marie & à Charobert fon petit fils. La fentence eft du trentiéme de Mai 1303. mais elle ne fut pas executée, & la guerre civile continua en Hongrie comme auparavant. Le legat Nicolas de Trevife voiant qu'il n'y faifoit rien Jo. Thurocz revint en cour de Rome, laiffant la ville de Bude interdite. Les religieux & les curés garderent l'interdit: mais quelques prêtres le mépriferent, faisant l'office

c. 86.

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