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Après J.C.

L'an 304 Licou-yuen

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mille hommes, tant de Cavalerie que d'Infanterie, pour
attaquer les Tartares Sien-pi & Ou-huon. Lieou-fiuen
& plufieurs autres Officiers de fes troupes lui repréfen-
terent qu'il étoit honteux aux Huns de fe laiffer domi-
ner par des efclaves tels que les Tcin, qui s'étoient en-
tierement écartés de la Juftice & des Maximes des an-
ciens Chinois; que les divifions qui étoient aujourd'hui
dans cette famille étoient une preuve que le Ciel l'avoit
abandonnée, & qu'il accordoit la protection aux Huns en
leur fournissant cette occafion de rétablir leur Empire;
qu'ainfi il ne falloit pas porter la guerre chez les Sien-pi
& les Ou-huon qui étoient leurs amis & leurs alliés, n'y
s'oppofer par-là aux volontés du Ciel. Lieou - yuen flatté
par l'efpérance de voir une feconde fois fa Nation maî-
treffe de la Tartarie, répondit par un difcours dans le-
quel il fit connoître que fes deffeins alloient encore plus
Toin, & qu'il portoit fes vûes jufques fur la Chine même.
Vous me propofez, dit-il une entreprise, dans laquelle
» il fe préfentera de grandes difficultés ; mais ne défef-
pérons point du fuccès, & apportons tous nos foins
D pour la faire réuffir. Le grand Yu, un des plus anciens
Empereurs de la Chine, ne tiroit-il pas fon origine des
Barbares d'Occident? Ven-vam n'étoit-il pas né parmi
"ceux de l'Orient? ils n'avoient à préfenter l'un & l'autre que
leur vertu. Elle feule les a fait monter fur le Thrône. Je
» m'efforce de devenir vertueux. J'ai de plus un très-grand
nombre de foldats pour faire ceffer les troubles qui
agitent cet Empire. Les Tcin ne font pas encore af-
fermis fur le Thrône qu'ils ont nouvellement ufurpé.
Ils ne tiennent à rien, & il eft facile de les chaffer. Les
» Han au contraire ont regné pendant long-tems : leurs
⚫ vertus & leurs belles actions font encore préfentes à tous
» les Chinois. Je fuis de cette illuftre famille, puifque mes
Ancêtres avoient fait avec elle un Traité d'union, puif-
• que
les Princes des deux Nations fe regardoient com-
» me freres ; les Chinois comme les aînés, & les Huns
» comme les cadets. Aujourd'hui que les premiers font
détruits, n'eft-il pas jufte que les feconds leur fuccédent?

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Après

L'an 304.

Licou-yuen

Après ce difcours Lieou - yuen prit le titre de Roi de Han, tranfporta fa Cour à Tço-koué-tchim, où les Peu- Après J. C. ples fe rendirent en foule pour embraffer fon parti. Il créa des charges comme dans l'Empire de la Chine, il prit des noms d'années comme les Empereurs Chinois & il établit un lieu pour faire les Sacrifices. Il donna à fon époufe Hou-yen-chi, le titre de Vam-heou; & Lieoufiuen fut fait premier Miniftre.

Kam-mo.

Ce ne fut donc plus la Tartarie que les Huns eurent envie de conquérir; c'eft de la Chine même dont leur Chef ofe fe déclarer Roi. Cette démarche ne fut pas plûtôt connue que les armées des Tcin vinrent attaquer celles des Han;elles fe battirent à Ta-lim,& pendant quelque tems on ne s'occupa de part & d'autre qu'à faire des courfes. Le Roi des Han envoya un de fes Généraux nommé Tein chou. Lieou-yao, qui ravagea le pays de Ta-yuen dans le Chan- Lie-tai-kifi, & prit la ville de Hiuen-chi, qui eft proche Ye-tcheou. S. Un autre Général nommé Kiao-hi, entra dans le Si-ho (a) & prit celle de Kiai-hieou (b) près de Fuen-tcheou-fou dans le Chanfi. Ce Prince qui vouloit moins employer la force que la douceur pour foumettre les Chinois, blâma la conduite de ce dernier qui venoit de faire mourir le Commandant de cette Place, parce qu'il n'avoit point voulu fe rendre, & enfuite la femme de cet Officier qui étoit venue lui reprocher, les larmes aux yeux, la mort de fon mari. Lieou - yuen n'approuva point cette action, & ordonna fur le champ qu'on rendît à ces morts les derniers devoirs.

Les Troupes que les Tein avoient envoyées fous la conduite de plufieurs Généraux, vinrent camper à Fuentching près de Li-che dans le Chanfi. Celles du Roi des Han s'y rendirent auffi-tôt, & il fe donna quatre combats différents, dans lefquels les Tcin eurent du defsous & furent contraints de fe retirer; ce qui fut d'autant plus avantangeux pour les Han qu'il furvint dans le même tems une grande famine dans Li-che. Cette ville n'auroit pû

(a) Dans le pays de Fuen-tcheou-fou (b) Elle porte encore le même nom.

dans le Chanâ. Tome I.

V

L'an 305.

Tein-chou.

tenir long-tems un fiége. Lieou - yuen y fit transporter Après J. C. promptement des vivres que l'on diftribua aux Habitans Licou-yuen felon leurs befoins. Cette attention du Roi des Han contribua beaucoup à augmenter l'attachement que les Peuples L'an 308. avoient déja pour lui. Il envoya ensuite un de fes Généraux Tein-chou dans la Province de Pim-tcheou; mais y ayant trouvé trop de réfiftance, ce Général alla fe dédommager fur Tcinyam (a) qu'il prit. Plufieurs autres Places tomberent fous la puiffance du Roi des Han; les Sien-pi avec leurs Chefs fe foumirent: Lieou-tçung fe rendit maître de la montagne Tai-hing (6). Che-le fit la conquête des Royaumes de Tchao (c), &de Goei (d), se faifit de la perfonne de Fo-litou qui étoit devenu très-puiffant dans le canton de Lopim (e), & que le Roi de Han avoit follicité plufieurs fois inutilement de venir fe rendre; enfin Vam-mi avec une armée confidérable, après avoir battu les Tcin, s'approcha de Lo-yam (f), Capitale de l'Empire, pour en faire le fiége; mais il fut vaincu à fon tour, & obligé de fe retirer vers Pim-yam (g) dans le Chanfi. Le Roi des Han transporta en même-tems fa Cour à Chi-tchuen-hien dans le territoire de la même ville, & y prit le titre de Hoamti ou d'Empereur, comme les véritables Empereurs de la Chine. Il établit différens Officiers, diftribua des titres & des dignités aux Princes fes parens, & aux Grands qui lui étoient attachés. Il envoya Che-le & Lieou-lim à la tête. de trente mille hommes faire des courfes en différentes L'an 309. Provinces. Enfuite il mit fa Cour à Pim-yam même, efpérant fe rendre maître dans peu de Lo-yam Capitale de l'Empire. Lieou-kim avec une armée alla faire le fiége de Li-yam (1⁄2) dans le Petcheli & la prit. Il battit les trou

(a) Tai-yuen hien dépendante de Taiyuen-fou dans le Chanfi.

(b) Elle eft fituée à vingt li au Nord de la ville de Hoai-king-fou dans le Ho

nan.

(c) Ancien Royaume fitué dans le diftrict de Tchin-ting-fou dans le Petcheli.

(d) Ancien Royaume fitué dans le diftrict de Ta-mim-fou dans le Petcheli.

(e) Canton fous les Tein, dans le diftrict de Tein-tcheou d'aujourd'hui.

(f) Aujourd'hui Ho-nan-fou Capitale de la Province de Honan.

(g) Aujourd'hui elle porte encore le même nom, & eft une des villes du premier ordre de la Province de Chanfi.

(b) A préfent Sun-hien dépendante de Ta-mim-fou.

pes Chinoises, & précipita dans les eaux du Fleuve Hoam Après J. C. environ trente mille perfonnes, tant hommes que femmes. L'an 309. Le Roi des Han défapprouva hautement la conduite de ce Licou-yuen Général. Il craignoit, difoit-il, que de pareils procédés n'attirassent sur lui la vangeance du Ciel.

A ces guerres qui défoloient toute la Chine, fe joignit une fi grande fechereffe que les Fleuves Kiang, Han, Hoam, Lo, qui font très-confidérables, furent prefque réduits à fec; mais ces malheurs qui tomboient éga- Kam mo. Tement fur les Han, ne les empêcherent pas de ravager les foumis aux Tcin, & fur-tout de fonger à prenpays dre Lo-yam leur Capitale ;c'eft dans ce deffein que Vam-mi & Lieou-tçung Roi de Tçu & fils de Lieou- yuen allerent avec leurs troupes faire le fiége de Hou-kouan (a) dans le Chanfi. Ils étoient accompagnés de Che-le qui commandoit l'avant-garde. L'armée des Tein qui voulut fecourir cette Place fut battue, & Hou-kouan fe rendit. De- là Lieou-tçung & les autres Généraux prirent le chemin de Lo-yam. Ils auroient investi cette Place, fi l'armée des Tcin, qui avoit reçu de nouvelles troupes de Si-ganfou, ne fut venue les attaquer proche Y-yam (b), où les Han s'étoient retirés. Il s'y donna une très - grande bataille que les Tcin perdirent. Mais l'imprudence du Tein-chou; Général Lieou-tçung fit évanouir en un moment tous les fruits de cette victoire. Enflé de fes fuccès il ne fe tint point affez fur fes gardes; un Officier des Tein qui feignit de vouloir fe rendre à lui le furprit pendant`la nuit & le mit en déroute. Lieou-yuen fe hâta de reparer cette perte. Il mit fur pied prefque auffi - tôt une armée de cinquante mille hommes de Cavalerie, dont il donna le commandement à fon fils Lieou-tçung, qui fut accompagné dans cette expédition par Vam-mi, Lieou - yao & Lieou-kim. Hou-yen-hi eut ordre de les fuivre avec l'Infanterie. Ils marcherent tous vers Lo-yam. L'armée des Tein fut battue, & Lieou-tçung forma le fiége de cette

(a) Dépend de Lo-tcheou.

(b) A préfent Y-yam-hien, dépendan

te d'Ho-nan-fou dans le Honan.

Après J.C.

L'an 309.

Capitale. Tous les Généraux des Han fe placerent devant les principales portes, & commencerent les attaques; Licou-yuen mais les Tcin faifoient des forties pendant la nuit avec les plus braves foldats & renverfoient tous les retranchemens. Les Han furent obligés, après avoir perdu un de leurs Généraux & un grand nombre de foldats, de décamper. Un des Généraux de l'armée des Han conçut tant de chagrin de la levée du fiége, que ne voulant avoir aucune part à cette action, qu'il regardoit comme un crime, il alla fe précipiter dans le Fleuve. On fit entendre à Lieou - yuen que le tems de prendre Lo-yam n'étoit pas encore venu, que les Tcin étoient trop puiffans, & que fon armée couroit rifque d'être défaite fi elle n'abandonnoit pas le fiége de cette Place. En conféquence Lieou-tçung reçut l'ordre de revenir. Pendant la retraite le Général Vam-mi fut poursuivi par les troupes des Tein qui remporterent quelques avantages, & incommoderent beaucoup les Han.

L'an 310.

L'année suivante les troupes des Han firent des courfes en différents endroits de la Chine, & les fuccès furent variés; mais toutes ces expéditions furent interrompues par la mort de Lieou-yuen. Ce Prince avoit regné fix ans : en mourant il difpofa de toutes les charges du Royaume & défigna fon fils Lieou-ho pour être fon fucceffeur. Suivant l'ufage des Chinois qui donnent à leurs Empereurs après leur mort des titres pompeux, on donna à Lieou-yuen celui de Kao-tçu-kuam-ven-hoam-ti. Licou Ho... Le nouveau Roi de Han aimoit les fciences; mais la lecture des King n'avoit pû reformer fon caractère soupçonneux & diffimulé. Quelques Courtifans lui donnerent de mauvais confeils qu'il fuivit, malgré les représentations de ceux qui étoient plus fages & qui ne cherchoient qu'à maintenir la paix dans fes Etats. Il entreprit de faire périr fon frere Licou-tçung qui avoit rendu de grands fervices à l'Empire des Han, mais Lieou-tçung fe forma un parti avec lequel il ofa venir l'attaquer dans fon Palais,& lui coupa la tête. Paifible poffeffeur du Thrône des Han il nomma tous fes Officiers, & Che-le qui fonda dans la fuite une fe

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