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étonnée, conçoit dans le moment & met au monde un Après J. C. fils. A la naiffance de Che-le, fondateur de la Dynastie des Tchao (a) il parut un de. ces phénoménes que l'orgueil & l'ignorance de ces peuples a mis en vogue. Les Tartares croyent qu'une lumiere extraordinaire remplit l'appartement de sa mere. Mais laiffons débiter ces fables aux Chinois & aux Tartares, & attachons-nous à préfenter la vérité de l'hiftoire.

Che-le portoit les noms de Chi-long & de Sie; il étoit Tein-chou originaire de la ville de Vou-hiang (b), dans le pays de Chang-tang (c). Ses ancêtres, Huns d'origine, n'étoient que de fimples chefs de Hordes. Son pere nommé Ho-tcheou étoit regardé comme un barbare par les barbares mêmes; fa cruauté lui avoit aliéné le cœur des peuples; aucuns ne lui étoient foumis. Son fils Che-le dès l'âge de quatorze ans fit quelques actions qui annonçoient ce qu'il devoit être un jour. Il fuivit les troupes de la Ville où il faifoit fa demeure, dans l'expédition qui fe fit alors contre la ville de Lo-yam (d) dans le Honan: on le trouva dès-lors capable de former de ces vaftes deffeins que l'on admire ordinairement, quoiqu'ils ne tendent fouvent qu'au malheur des peuples. On appercevoit déja en lui un homme qui devoit exciter de grands troubles dans l'Empire. Dans un âge plus avancé Che-le fe diftingua par fa force, par fon courage & par fon adreffe à manier les armes. Les Huns l'aimerent à caufe de ces qualités & voulurent qu'il fût à leur tête pour les gouverner. Ils avoient une confiance aveugle en lui, & il étoit devenu l'efpérance de toute la Nation; ils le regardoient comme un homme que le Ciel avoit envoyé pour les délivrer, & se

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Après J. C.

Tein-chou.

Kam-me.

plaifoient à trouver dans fes actions les plus ordinaires
beaucoup de merveilleux. On apperçut une plante de Gin-
fen dans l'endroit où il demeuroit; on en tira d'heureux
préfages en faveur de Che-le: la haute idée que
l'on con-
çut de lui à cette occasion lui devint utile, & fervit à le
faire triompher de ceux qui ne donnoient point dans les
fables qu'on débitoit fur fa perfonne. Au refte les avan-
tures de fa jeuneffe ne font point affez importantes pour
trouver place dans cette Hiftoire.

que

Che-le commença fa vie comme la plupart des Conquerans Tartares; c'est-à-dire par le brigandage. Une grande famine défoloit la Province de Pim-tcheou (a). Les Peuples fe mutinerent, & dans ces troubles Che-le fut arrêté prifonnier; on le remit enfuite en liberté, rais il n'en jouit que pour faire plus de mal aux Chinois. Un chef de Brigands nommé Kie-fang le reçut dans fes troupes, & lui donna le nom de Che-le; c'est-à-dire Che devint fon nom de famille, & Le fon nom propre. Ils firent l'un & l'autre de grands ravages dans la Chine. Toutes les Villes qu'ils attaquoient étoient mifes au pillage. ils entrerent particuliérement dans celles de Po(b) dans L'an 307. le Honan, où ils tuerent plus de dix mille hommes, firent un grand nombre de prifonniers & enleverent tout ce qu'il y avoit de précieux. De-là ils allerent faire un pareil traitement à plufieurs autres Villes, & pendant plufieurs mois ils furent continuellement aux prifes avec les Généraux qu'on envoyoit contre eux. Enfuite ils furent battus & obligés de chercher une retraite. Kie-sang fut tué & Che-le qui n'avoit plus d'afile, alla se foumettre à Lieou-yuen fondateur de la Dynastie des Han. Lieouyuen le reçut & lui donna le commandement de fes armées. Nous avons vû dans l'Histoire des Han une partie des actions de Che-le, pendant tout le tems qu'il fut au service de ces Princes. Lieou - yuen fe l'attacha étroitement & l'aima comme fon propre frere. Che le lui rendit

(a) Province fituée dans le Chanfi, dont la Capitale étoit Ta-yuen-hien pro

che Ta-yuen-fou.
(b) Proche Tchang te-fou

rendit de grands fervices à la tête des armées : il prit un grand nombre de Villes qu'il obligea de fe foumettre aux Han, & he contribua pas peu à l'élévation de cette famille, comme dans la fuite il fut un des principaux auteurs de fa ruine. Il fervit fous plufieurs regnes, pendant lefquels, profitant de la foibleffe des Princes qui étoient fur le Thrône, & à la faveur des troubles que leur fainéantise avoit occafionnés, il se forma un parti confidérable & fe ménagea des moyens qui lui mirent la Couronne fur la tête. Quoique Che - le occupât dans cette Cour les premiéres charges, & qu'il fut fujet du Roi des Han, il ne laiffoit pas d'avoir fous fa dépendance une certaine quantité de Peuples qu'il regardoit comme ses Sujets, & dont il difpofoit à fon gré comme tous les chefs des Tartares. Ces chefs étoient de grands vaffaux qui n'obéiffoient au Prince qu'autant qu'ils le jugeoient à propos.

Après J. C,

Lie-tai-ki

Su.

Che-le avoit remporté de grandes victoires, la ville de L'an 319. Pim-yam (a, dans le Chanfi venoit d'être brûlée; les rebel- Tein-chou. les avoient été forcés de fe foumettre à Liequ-yao qui ne faifoit que de monter fur le Thrône des Han, & qui étoit encore tout occupé de la revolte de Kin-tchun que l'on venoit d'affoupir par la mort du rebelle. Un refte de parti commandé par Kin-mim s'étoit fortifié dans Pim-yam que Chele reprit. Il annonça cette victoire au Roi des Han, qui pour récompenfer de fi grands fervices refolut 'd'abord de lui donner le titre de Roi. Mais les ennemis de Che-le représenterent au Prince que fon Général n'avoit envoyé un officier à fa Cour que pour être mieux inftruit de l'Etat & des forces des Han & fe rendre maître enfuite de l'Empire. Lieou-yao, qui écouta trop facilement la calomnie, fit mourir l'Envoyé de Che-le dans la place publique. C'étoit mal reconnoître les fervices qu'il avoit reçus de ce Général : auffi Che-le ne s'occupa-t-il plus que du foin de fe venger. Plufieurs officiers du parti des Tcin tels que Tchin-tchuen & Siu-kan qui vinrent fe rendre à lui, en augmentant confidérablement fes forces,

(a) Elle porte encore le même nom, & eft une ville du premier ordre dans le Chanfi.

Tome I.

Dd

Après J. C.
L'an 319.

Che-le.

L'an 320.
Lie-tai-ki-

fu.

Kam-mo. Tein chou.

lui fournirent les moyens d'exécuter fes deffeins. Lieouyaos'y oppofa & envoya des troupes contre Tchin-tchuen; celles de Che-le commandées par Che hou vinrent au secours; elles battirent le Général de Lieou-yao & s'emparerent de (a) Pong-kuan, d'où l'on tranfporta tous les Habitans à Siam-koue (b). Après cette vicloire fes principaux officiers vouloient qu'il prît un titre plus honorable que celui qu'il portoit, c'est-à-dire celui de Kum que le Roi des Han lui avoit conféré quelques années auparavant. Chele, par une feinte modeftie,répondit qu'il n'avoit ni affez de mérite, ni affez de vertu pour en prendre un plus élevé ; mais fon défintéreffement ne fubfifta pas long-tems, & après avoir fait des courfes dans la Province d'Yeoutcheou (c) qui fut entierement ravagée par fes troupes, il fe fit déclarer Roi des Heou-tchao, nomma des officiers, établit un lieu pour le Sacrifice de fes Ancêtres, prit un nom d'année & agit en Souverain. Il envoya des Officiers dans les Provinces pour exhorter les peuples à ne pas négliger la culture des terres & de la foye, & s'appliqua particulierement à bien gouverner fes Sujets. Tout Barbare qu'il étoit, il mérita à cet égard les éloges des Chinois.

La Province d'Yeou-tcheou avoit été prefque ruinée, le Gouverneur nommé Kia-pi-tan, qui s'y étoit attribué une certaine indépendance, quoique fous les Empereurs des Tcin, n'avoit pû réfifter aux Troupes des Tchao. La famine, qui fuccéda à ces guerres & qui réduifit les Peuples à toute extrémité, obligea le Gouverneur de fe retirer à Cham-ko (d) fur les terres des Tartares Topa. C'est ainsi que l'Empire des Tein étoit devenu la proye de ces Barbares; les Topa ne voulurent point donner un afile au Général de l'Empereur, qui fe vit contraint de fe retirer fort en défordre vers Lo-ling (e) après avoir

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Après J. C..

abandonné toute fa famille, dans l'efpérance que Chaofou, Gouverneur de la Province de Ki-tcheou (a) pour les L'an 25. Tcin, lui fourniroit des fecours pour fe rétablir. De Che-le nouveaux ennemis lui tomberent fur les bras; mais ayant réuni fes forces à celles de Chao-fou, tous les deux remporterent quelques avantages qui remirent Kia-pi-tan en état de reprendre dans le Petcheli la ville de Ki ( b ) Capitale de fa petite Principauté. Che-le faifit cette occafion que Chao-fou étoit feul, pour envoyer contre lui fes troupes, à la tête defquelles étoit le Général Chehou. Dans le tems que Chao- fou s'avançoit pour les combattre, des foldats que Che-hou avoit mis en embufcade le furprirent par derriere, il fut battu, fait prifonnier, & on le fomma de rendre fa ville. On le conduifit au pied des murailles, où loin d'engager les Habitans à fe foumettre, comme on l'exigeoit de lui, il les exhorta à fe défendre. » J'ai voulu, dit-il, conferver » cet Empire, je n'ai point réuffi, foyez affez braves pour le faire; mettez à la tête de votre parti Kia-pi-tan, com» battez sous lui, & mourez fidéles à l'Empereur. Ce fut tout ce que l'on put tirer de lui. On le fit conduire à Siamkoue, où fon courage & fa fidélité pour les Tein le firent respecter de Che-le. Lorfque l'on eut appris à la Cour des Tein que ce Général avoit été attaqué par les troupes de Che-le, on avoit représenté à l'Empereur la néceffité de lui envoyer du fecours, fi on vouloit conferver les Provinces du Nord: mais ce Prince avoit négligé cet avis important & fe contenta, lorfqu'il fut informé de fon malheur, de donner ce Gouvernement à fon fils Tsi. Kia-pi-tan fe rendit auprès de cet Officier & ils se réunirent pour défendre la Ville contre les efforts des Tchao.

Pendant que l'on continuoit à faire le fiége de cette place, plufieurs Généraux de Lieou-yao vinrent se jetter dans le parti de Che-le; mais ces renforts ne purent empêcher qu'il n'eût quelques défavantages dans les Pro

(a) Dans le Percheli.

(b) Dans le territoire de Pe king.

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