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Mo-kan

khan.

mais fes principaux Officiers lui ayant repréfenté la néAprès J. C. ceffité de la défendre, les Tcy raffemblerent à la hâte tout ce qu'ils purent de troupes, & fe rangerent en bataille au pied des murailles de Tcin-yam dans le Chansi, l'Empereur regardoit du haut des murs; toute fon armée L'an 564. paroiffoit en bon ordre. Les Turcs étonnés de voir tant de troupes, reprocherent aux Généraux des Tcheou de leur en avoir impofé en leur faifant accroire que les Tcy ne pourroient leur réfifter. Cette méfintelligence entre les deux armées, fut la caufe de la défaite des Tcheou. Lorfque les Tcy commencerent l'action, les Turcs prirent la fuite du côté de la montagne, refuserent de combattre, & fe retirerent en faifant un ravage épouvantable dans tous les lieux par où ils pafferent, pendant que les Tcheou, qui s'étoient trop engagés, furent entierement défaits, & pourfuivis par les Tcy, qui firent fur eux un grand butin.

Lie-tai-ki

fu.
Ven bien-
tum kao.

Depuis les grandes conquêtes que Mo-kan-khan avoit faites du côté de l'occident, les pays les plus éloignés étoient en rélation avec la Tartarie & même avec la Chine, & paroiffoient prendre quelque intérêt à toutes les divifions qui agitoient ces extrêmités de l'Afie. Alliés des Turcs, ils cherchoient encore à l'être de leurs amis; c'eft dans cette vûe que les peuples appellés Teli ou Li-te envoyerent des ambaffadeurs vers l'Empereur des Tcheou: ils habitoient par de-là le Volga & fur les frontiéres de l'Empire Romain. Leur pays avoit porté quelquefois le nom d'Alanna, à caufe que les Alains s'y étoient établis. Celui de Te-li fous lequel on l'indique ici, eft le même que Thali, nom d'un peuple, véritablement établi au nord de la Géorgie dans le pays des Alains : il est encore connu fous le nom des pays des Souanes. Sans doute que ces peuples qui s'étoient révoltés quelques années auparavant ; c'eft-à-dire, l'an 557 & qui avoient été vaincus par les Romains, chercherent à s'appuyer de la protection des plus puiffans Princes de l'Órient, & furtout de ceux qui étoient liés avec les Turcs, tels que l'étoient les Tcheou.

Mo-kan-,

En fe retirant vers les frontiéres de la Chine les Turcs n'avoient pas deffein d'abandonner les Tcheou à la mer- Après J. C. ci de leurs ennemis, ils ne fongeoient qu'à faire de nou- khans velles levées d'hommes pour rentrer fur les terres_des Tcy. Lorfque toutes les troupes qu'ils attendoient du Turkeftan furent arrivées, & que l'armée fut en état de fe mettre en campagne, ils en donnerent avis aux Tcheou. Mais l'Empereur Vou-ti étoit mécontent de la lâcheté avec laquelle ils l'avoient quitté dans la derniére occafion; de plus les Tcy avoient renvoyé généreusement la mere du Général des Tcheou qui avoit été faite prifonniére, & cet Officier ne vouloit pas par reconnoiffance marcher contre eux. Cependant les traités faits avec les Turcs & plus encore les défordres que ceux-ci commettoient fur les frontiéres, fi on n'alloit pas au rendez-vous, obligerent l'Empereur à ne pas refufer leur fecours, & le Général à oublier les raifons qui lui étoient perfonnelles pour prendre la défense de l'Etat. Les deux armées combinées attaquerent les Tcy & pénétrerent jufqu'à Lo-yam capitale de la province de Honan. L'année fuivante la divifion fe mit de nouveau entre les Tcheou & les Turcs. Vou-ti Empereur des Tcheou renvoya dans la Tartarie l'Impératrice fille du Grand Khan avec toutes les Lie-tai-kiautres femmes Turques, & le Khan piqué de cet affront, u. rechercha l'alliance des Tcy, fit la paix avec eux & leur envoya pendant plufieurs années de fuite des ambaffadeurs; c'eft tout ce que rapporte l'hiftoire Chinoife des affaires qui fe pafferent alors du côté de l'orient.

L'an 565:

Kam-mo.

C'eft dans l'efpace vuide qu'elle nous laiffe qu'il faut Menandre. placer les démêlés que le Grand Khan eut avec les Perfesce Prince qui avoit foumis les peuples de la Sogdiane, & les Huns Euthalites ou Abtelites avoit accordé aux Sogdiens, qui l'en avoient prié, la permission d'envoyer des ambaffadeurs vers Khofrou Anousfchirouan, alors Roi de Perfe, afin d'établir entre ce royaume & & les peuples plus orientaux le commerce de la foye, & Maniak avoit été chargé de cette négociation. Arrivé à la Cour de Perfe, l'ambaffadeur Turc qui avoit ap

Mo-kan

khan

porté avec lui une grande quantité de foye, demanda à Après J. C. Anoufchirouan la liberté de ce commerce entre fes fujets & les peuples du Turkeftan. Ce Prince dont les états étoient fort étendus & qui avoit plufieurs ports, foit fur la Mer rouge, foit fur le Golphe Perfique, foit enfin fur la mer des Indes, & qui pouvoit par-là recevoir plus directement de la Chine la foye par les vaiffeaux que fes fujets équipoient pour faire ce voyage, devoit plutôt favorifer leur commerce, qui par l'étendue de fes branches apportoit de grands avantages à la Perfe. Il est vrai qu'en recevant des Sogdiens la foye, le chemin étoit plus court; mais il falloit qu'elle passât par les mains de différens peuples, qui de tout tems s'étoient oppofés à ce que les Perfans & les Occidentaux en général fissent par eux-mêmes ce commerce par terre ; par-là le bénéfice étoit moins grand, & c'eft apparemment dans la vûe d'augmenter ou de conferver celui que fes fujets faifoient par mer, qu'Anouchirouan refusa de répondre à l'ambassadeur des Sogdiens. Dans le confeil qu'il tint à ce sujet, un Euthalite nommé Catulph, qui étoit ennemi des Sogdiens, propofa d'acheter toute la foye & de la faire bruler en préfence de l'ambaffadeur, pour lui faire connoître le peu de cas que l'on faifoit du commerce qu'il demandoit, ce qui fut exécuté.

que

Les Auteurs Perfans dans lefquels on retrouve quelques traces de ces événemens, nous apprennent que le principal motif qui porta les Huns Euthalites à traverser l'alliance que le Khan vouloit faire, étoit la crainte qu'ils avoient le Roi de Perfe dont la puiffance augmentoit tous les jours, ne s'emparât par la fuite de tout leur pays. Ils redoutoient également les Turcs & n'efperoient fe maintenir libres qu'en mettant la difcorde entre les deux Rois. Le Grand Khan informé de la maniére dont on avoit reçu les Sogdiens, renvoya de nouveaux ambaffadeurs pour engager le Roi de Perfe à prendre des fentimens plus pacifiques. Anouschirouan qui regardoit les Turcs comme une Nation inconftante & perfide, ne voulut faire aucun traité avec eux, & pour les dégouter de

revenir

revenir, il fit empoifonner les ambassadeurs, & courir le Après J. C. bruit que leur mort étoit caufée par la trop grande fechereffe Mo-kandu climat de Perfe que ces Turcs, qui étoient accoutu- khan. més à vivre dans un pays froid & toujours rempli de neiges, n'avoient pû fupporter. Trois ou quatre Turcs_qui avoient réfifté à la force du poifon retournerent en Tartarie & inftruifirent le Khan de tout ce qui s'étoit passé; alors la guerre fut déclarée entre les deux Nations, & le Roi de Perfe, voyant que fon pays alloit être expofé aux incurfions des Turcs, eut recours aux Chinois & envoya des ambaffadeurs à Vou-ti Empereur des Tcheou qu'il fçavoit être l'ennemi du Grand Khan. C'étoit pro- L'an 567. bablement dans le deffein d'engager ce Prince à faire Le-tai-k une diverfion dans l'Orient.

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D'un autre côtě Maniakh n'ayant pû réuffir auprès des Perfes, repréfenta au Grand Khan qu'il lui feroit plus avantageux de traiter de ce commerce avec les Romains qui faifoient un grand usage de la foye, & s'offrit de conduire fes ambaffadeurs. Après avoir reçu l'ordre du Grand Khan,Maniakh se mit en route, traversa ces vafles pays de la Tartarie où il rencontra des montagnes efcarpées & toutes couvertes de neige, des plaines, des forêts, des marais, franchit le Caucase, & arriva à Conftantinople. L'Empereur Juftin II qui regnoit alors reçut L'an 569 avec plaifir cet ambassadeur, l'interrogea fur la puiffance & l'étendue des Etats que les Turcs poffedoient, & apprit que cet Empire étoit divifé en quatre principaux gouvernemens; que Difabul, c'est ainsi qu'on appelle le Khan, & ce Prince ne peut être que ou Mo-kan-khan, ou Ti-teou-pou-li-khan, avoit vaincu & rendu tributaire la Nation des Euthalites. Il s'informa auffi des Abares ou Menandre Geou-gen, de leur puiffance, & s'il en reftoit encore un grand nombre dans la Tartarie. Les Turcs lui répondirent que la plus grande partie leur étoit foumife; mais qu'environ deux cens mille s'étoient retirés ailleurs. Ils firent enfuite l'énumération de tous les peuplesTartares que le Khan avoit fubjugués, & prierent l'Empereur de con clure un traité avec les Turcs, s'engageant de leur côté à le Tome I.

Ccc

Après J. C.
L'an 569.
Mo-kan-
khan.

Juftini
legat.

ad Perfas. Théop de Byzance

Plan Carpin

Juftini. legat.

fecourir contre fes ennemis. Ce fut fut là le premier traique les Turcs firent avec les Romains.

Pour répondre aux intentions du Grand Khan de Tartarie, Juftin chargea Zemarkh de fe préparer à reconduire les Turcs & le nomma fon ambaffadeur auprès du Khan. Zemarkh accompagné d'un grand nombre de perfonnes, partit de Conftantinople, & après un long voyage arriva dans la Sogdiane où en defcendant de cheval il vit venir à lui plufieurs Turcs qui lui préfenterent du fer; il crut que ces peuples vouloient lui faire connoître par-là que leur pays, qui ne paffoit pas pour en avoir, en produifoit. D'autres s'approcherent de lui & de toute fa fuite, & les firent paffer par le feu. Cet ufage existoit encore parmi les Mogols après Genghiz - khan & confiftoit à faire paffer entre deux feux les ambassadeurs afin de les purifier. Les Turcs prononcerent certaines paroles, firent brûler quelques odeurs au fon de plufieurs inftrumens, enfuite étant entrés dans une efpéce de fureur ils firent tourner Zemarkh autour d'un feu, prétendant éloigner par-là tous les malheurs qui pourroient lui arriver. Après que ces cérémonies furent finies, l'ambasfadeur Romain continua fa route & parvint à la montagne où le Khacan, c'est-à-dire le Grand Kan, faifoit fa réfidence ordinaire : cette montagne étoit appellée Echtag c'est-à-dire la montagne dor. C'eft le mont Altai dont le nom fignifie la même chofe, il eft fitué vers les fources de l'Irtifch, le Grand Khan y demeuroit dans une vallée. Zemarkh trouva ce Prince affis dans fa tente fur un fiége qui étoit appuyé fur deux roues, il le falua, lui offrit les préfens de l'Empereur & lui fit le difcours fuivant. » Chef de tant de Nations, qui aimezles Romains » & qui vous rejouiffez de leurs fuccès, notre Grand Empereur vous fouhaite toutes fortes de profpérités. Puiffiez» vous vaincre tous vos ennemis ! les voeux que nous adresfons pour vous au Ciel font fincéres, & nous regardons les Turcs & les peuples qui leur font foumis comme nos » amis., agiffez donc envers nous comme nous agissons à votre égard »

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