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Y-chi-fie.

puiffance depuis la défertion de Hoen-fie-vam, que les Peuples Occidentaux recherchoient avec empreffement Avant J. C. tout ce qui venoit de la Chine, qu'en conféquence, en faifant des préfens aux Ou-fiun, on pourroit les engager à quitter leur pays pour passer dans celui de Hoenfie-vam vers Kan-tcheou & So-tcheou. Il prétendoit qu'ils accepteroient d'autant plus volontiers ce parti, qu'ils étoient fort incommodés des courfes que les Peuples du Khorafan faifoient chez eux. Une fois établis fur les frontieres Occidentales de la Chine,les Ou-fiun devoient nécessairement être toujours attachés au parti des Chinois, c'étoit le projet de Tcham-kiao, & les Huns ainfi féparésde la Chine,ne pouvoient plus faire d'incurfions de ce côté,fans trouver cette Nation puiffante & être obligés de la combattre. L'Empereur de la Chine ayant adopté ce projet, chargea Tchang-kiao lui-même de l'exécuter, & lui donna à cet effet un grand nombre de bœufs, de moutons, & plufieurs milliers d'habits à la Chinoise pour préfenter au Roi & aux Chefs des Ou-fiun. Le Prince de cette Nation fçachant que Tcham-kiao venoit dans fes Etats en qualité d'Ambassadéur, voulut exiger que les Chinois lui rendiffent les mêmes honneurs qu'ils rendoient au Tanjou & refusa les falutations ordinaires. Tchang-kiao ne put fouffrir tranquillement qu'on reçût avec tant de hauteur les préfens d'un Empereur de la Chine: il parla de les remporter, auffi - tôt le Prince des Ou-fiun lui donna satisfaction, & Tchang-kiao expofa le fujet de fon Ambassade.

Le Royaume des Ou- fiun étoit alors divifé en trois factions, dont les enfans du Kuen-mo étoient les chefs. L'aîné qui étoit le Prince héritier, étant à l'article de la mort, avoit engagé fon pere à nommer pour lui fuccéder fon fils Yn-tçiu & à exclure fes freres de la Couronne le fecond fils du Kuen-mo appellé Ta-lou, qui campoit ailleurs avec dix mille hommes, ne fut pas plutôt informé de cette nouvelle, qu'il rassembla fes freres & fes parents, se mit à leur tête & se revolta. Le Kuen-mo craignant que fon petit fils Yn-tçiu ne perît dans cette guerre lui donna dix mille hommes & l'enyoya habiter dans Tome I.

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une autre contrée pendant que lui avec un pareil nombre de Avant J. C. troupes, fe mit en état de fe défendre contre les entrepriY-chi-fie. fes de Ta-lou.

Sfu ki.

Kam-mo.

L'an 114.

Telle étoit la fituation du Royaume des Ou-fiun, lorfque Tcham-kiao arriva chez eux: ces troubles furent cause que le Kuen-mo n'ofa traiter avec lui. Envain l'Ambaffadeur lui propofa de faire alliance avec les Chinois contre les Huns, lui promettant une fille de l'Empereur: on ne put déterminer la Nation qui n'avoit point une si haute idée de la puissance de la Chine. Les Ou-fiun aimerent mieux refter dans leur pays & vivre même sous la domination des Huns, que d'aller chercher vers le Chenfy de nouvelles demeures, & le Kuen-mo, qui d'ailleurs étoit vieux, ne pouvant se faire obéir, fe contenta de renvoyer Tchang-kiao avec des préfens pour l'Empereur. Il fit partir en même-tems des Ambassadeurs, moins pour remercier le Monarque Chinois, que pour s'informer fecrettement de la fituation, des forces, & des richeffes de la Chine.

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Les Huns ne furent pas plutôt inftruits des traités qui fe projettoient entre les deux Nations, qu'ils fe difpoferent à faire la guerre aux Ou-fiun; de forte que les Ambaffadeurs de ceux-ci qui étoient encore à la Chine, pour éviter de tomber entre les mains de leurs ennemis en prenant la route ordinaire, furent obligés pour s'en retourner chez eux de gagner le Tibet, enfuite la Bactriane, & de revenir vers le Nord-eft dans leur pays. D'un autre côté, les Ou-fiun, allarmés des préparatifs que les Huns faifoient, fe hâterent de conclure le traité avec la Chine : ils envoyerent des préfens confidérables à l'Empereur & le prierent de donner à leur Roi une Princeffe Chinoife; mais ce mariage ne fe fit que quelques années après ; & il ne fe paffa plus rien de remarquable dans l'Empire des Huns jufqu'à la mort du Tanjou Y-chi-fie, ou au moins la connoiffance des événemens ne nous a point été tranfmife. Ce Prince avoit regné pendant treize ans, & il eut pour fucceffeur fon fils Ou-goei.

pays

Kam-mo.

Pendant les premiéres années de ce nouveau regne, les Huns furent affez tranquilles du côté de la Chine, Avant J.C. qui étoit alors occupée à faire la guerre dans le midi Ou-goci. vers la Cochinchine. Ils fe contentoient feulement d'in- Sfu-ki. terrompre, autant qu'ils le pouvoient, le commerce que Kam mo. les Chinois s'efforçoient d'établir entre la Chine & les pays occidentaux. Mais auffi-tôt que l'Empereur eut fini la guerre qui occupoit fes troupes dans le midi, il L'anti. envoya les Généraux Kum-fun-ho & Tchao-pou-nou en Tartarie : l'un & l'autre ne firent aucune rencontre, & ne retirerent d'autre fruit de cette expédition que celui d'avoir inutilement fatigué leurs Soldats dans ces déferts. Lie-tai-kiL'Empereur Chinois, qui vouloit à tel prix que ce fût fe fu venger de toutes les infultes que les Huns avoient faites depuis-long-tems à fes Sujets, fe mit lui-même à la L'an 110. tête d'une armée de cent quatre-vingt mille hommes, prit fa route par le de Si-gan-fou & d'Yen - ganfou dans le Chenfy, paffa la grande muraille & entra dans le pays de Tço-fam ou d'Ortous. Après avoir visité le pays qui eft fitué au Nord du fleuve Hoam, vers Piljotai-hotun, il envoya un de fes Officiers au Tanjou pour lui faire fçavoir qu'il étoit entré dans la Tartarie, avec une armée nombreufe. L'Officier Chinois arrivé chez te Monarque des Huns, après s'être étendu fur la force & la multitude des troupes de fon Maître, fur l'impoffibilité de lui réfifter, fonima le Tanjou de fe rendre, repréfentant qu'il lui étoit inutile de fe refugier dans les pays qui font au Nord du defert, pays, que les grands froids rendoient inhabitables. Le Tanjou indigné de ce difcours fit arrêter & conduire l'Officier dans le fond de la Tartarie vers le Lac Pai-kal. C'est tout ce qui résulta de la marche de cette grande armée Chinoise & l'Empereur de la Chine fut obligé de reprendre la route de fes Etats. Cependant le Tanjou, qui vouloit ménager les Chinois, défendit à fes fujets de faire des courfes fur les terres de la Chine, & cet ordre fut caufe que les Huns accoutumés à trouver dans le pillage, les chofes qui leur étoient néceffaires, manquerent de tout, & furent obligés d'aller Ĥij ·

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Avant J. C.
Ou-goei.
Sfu-ki..

L'an 108.

Kam mo.

chasser dans leurs forêts. Plusieurs fois le Tanjou envoya des Ambaffadeurs à la Chine pour demander la paix. D'un autre côté les Chinois avoient donné ordre à Vang-ou & à d'autres Officiers de paffer en Tartarie pour s'informer exactement de la fituation des Huns, pendant que ceuxci faifoient la même chofe à l'égard de la Chine. Mais ce qui les inquiétoit le plus étoit ce commerce que les Chinois entretenoient avec les peuples Occidentaux, c'est-à-dire vers la Bactriane, le Khorafan & les Indes. Les Huns étoient continuellement occupés à chercher les moyens de l'interrompre, & engageoient les peuples voifins à entrer dans leurs vûes, en leur faifant entendre qu'ils y étoient également interreffés.

Tous ces petits Royaumes, dont la plupart confiftoient en cinq ou fix villes, étoient fouvent forcés d'obéir aux Huns, parce qu'ils n'étoient pas affez puiffants pour leur réfifter, & par la même raifon ils fe trouvoient enfuite expofés à la colere & à la vengeance des Chinois. C'est ce qui arriva particulierement aux Leou-lan, qui arrêtoient & faiHan-chou foient périr ceux que l'Empereur de la Chine envoyoit dans l'Occident. Ce Prince fut obligé de faire partir le Général Tchao-pou-nou à la tête de fept cens cavaliers pour leur faire la guerre. On prit la capitale des Leoulan fituée fur les bords du Lac de Lop: on tua leur Roi, on & de-là on paffa dans le pays des Igours dont les troupes furent défaites. Les Huns informés que les Leou - lan étoient devenus tributaires des Chinois, leverent auffi-tôt une armée & entrerent dans ce pays. Le nouveau Roi fut obligé d'envoyer un de fes enfans en ôtage chez le Tanjou, pendant qu'un autre étoit retenu chez les Chinois, dont il redoutoit également la puiffance: ces peuples venoient de foumettre toute la Corée jusqu'à la mer Orientale.

Sfu-ki.
Kam-mo.

Le Tanjou avoit fait demander plufieurs fois la paix; mais les Chinois exigeant de lui qu'il leur envoyât son fils aîné en ôtage, il ne voulut jamais y confentir. Il répondit que c'étoit agir contre les anciens traités, puifque les Chinois au contraire avoient coutume d'envoyer en

Avant J. C.

Tartarie une de leurs Princeffes avec de grands préfents, afin que les Huns ne fiffent point de courses chez eux. En agiffant ainsi, le Tanjou avoit moins envie de faire la Ou goci. paix que de tirer des Chinois des fommes & quelques préfents; & pour en impofer d'avantage, il dit à Vam-ou alors Ambaffadeur de la Chine auprès de lui, qu'il vouloit fe rendre en perfonne à la Cour de l'Empereur pour conclure le Traité. Vam-ou en donna avis à fon Maître, qui fit auffi-tôt préparer un Palais magnifique à Si-gan-fou pour y recevoir le Tanjou; mais le hazard voulut que dans le même tems, l'Ambaffadeur des Huns tomba malade & mourut, malgré les foins que les Chinois employerent pour lui conferver la vie. L'Empereur fit porter en Tartarie le corps de cet Ambaffadeur avec des préfens considérables. Le Tanjou crut ou feignit de croire qu'on avoit fait mourir fon Miniftre, retint prifonnier l'Envoyé des Chinois, & comme Vam - ou n'avoit pû jufqu'alors faire partir pour la Chine le Prince héritier de l'Empire des Huns; ceux-ci, qui n'avoient point de mefures à garder, recommencerent leurs courfes fur les frontieres des Chinois : ce qui obligea l'Empereur d'établir un camp & des troupes dans le pays d'Ortous.

fe

L'an 107.

Ces nouvelles garnifons rendirent inutiles toutes les L'an 105. tentatives des Huns du côté de la Chine. Dans l'impoffibilité d'y remporter des avantages, ces Peuples tournerent leurs armes contre les Ou-fiun, que leurs liaifons avec les Chinois faifoient regarder comme ennemis du Tanjou. Les Ou-fiun effrayés envoyerent aussitôt à la Chine pour se mettre fous la protection de l'Empereur & faire un traité, à condition que leur Roi épouferoit une Princeffe Chinoise: ce qu'ils obtinrent. Mais le traité ne fut pas plutôt conclu, que le Tanjou obligea le Prince des Ou-fiun d'époufer une de fes filles : tant les Huns étoient alors redoutables dans la Tartarie. La Princeffe Chinoise au défefpoir de fe voir dans un pays fi éloigné & fi barbare, s'occupoit quelquefois, pour diffiper fon ennui, à faire des vers, dans lefquels Han-chau. elle dépeignoit fon malheur. Voici la traduction de

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