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fans cela, on feroit obligé de traiter ; que les Allemands avoient apporté de Rome la pefte AN. 1528. dans Naples, & que les autres mouroient d'autant plus aifément qu'ils ne pouvoient s'aflujettir à éviter le commerce de ceux qui en étoient infectez.

Maladie

in lib. 19.

Mem. da

Lautrec intercepta cette lettre & fe con- XXIIL tenta de faire couper l'aqueduc qui portoit contagieufe l'eau dans la ville; mais au lieu de faire faire dans le en même tems une tranchée pour conduire camp des les eaux dans la mer, il les laissa se répandre François. dans la campagne, enforte que ne trouvant Guicciard point de pente dans un lieu tout uni, la grande ardeur du foleil les corrompit bien-tôt ; ce Bellay. 1.3. qui caufa les maladies dans l'armée, & y fit un ravage effroiable. Ces maladies fe changerent en pefte, & furent augmentées par la malice des affiegez qui vinrent dans le camp des François fous divers prétextes, & corrompirent toutes les citernes: de forte qu'à la fin de Juillet Lautrec, qui fut luimême attaqué du mal contagieux, vit fon armée qui étoit de vingt-cinq mille hommes reduite à quatre mille, & environ cent hommes d'armes, de huit cens qu'ils étoient auparavant. L'armée navale commandée par Rence de Ceri & André Doria, ayant fait une delcente dans l'ifle de Sardaigne, qui étoit sousla domination Espagnole, y trouva une fi grande abondance de vivres, que les foldats qui jeûnoient depuis long-tems, s'étant remplis avec trop d'avidité, furent auffi attaquez de maladies contagieufes, qui en mirent un grand nombre au tombeau; & comme fi le fleau de la pefte n'eût pas fuffi pour détruire un fi grand nombre de foldats François, la perfidię d'André Doria qui changea de parti, acheva de tout perdre.

ria com

tre mécon

cour de France.

Il n'eut pas plutôt accepté le generalat des AN. 1528. galeres de France, que les ennemis formeXXIV. rent le deffein de le perdre; ils donnerent par André Do- differens artifices un tour malin aux affaires frequentes, que l'exécution de fa charge faimence à ê foit naitre dans le confeil, & ils ne perditent de la rent aucune occafion de le deffervir; enforte qu'il pafla bien-tôt dans l'efprit du roi pour un homme importun, intereffé & d'une humeur incompatible. Doria conçut aisément qu'on vouloit fa ruine; il avoit ftipulé que Genes fa patrie feroit remife en pleine liberté, & qu'on reftitueroit à cette republique tous les états qu'elle avoit poffedés au commencement des derniers troubles d'Italie; & pour faciliter l'exécution du traité, il avoit difpofé ceux de Genes à promettre au roi deux cens mille écus, qui feroient payez auffi-tôt qu'on leur auroit tenu parole. Cependant en France on differoit toûjours fous divers pre, parce qu'on vouloit retenir Savonne dont le port étoit beaucoup plus commode que celui de Genes. La victoire que Philippin Doria fon neveu venoit de remporter, fournit un fujet de querelle entre fon oncle & la France. Il avoit envoyé à Doria le marquis du Guât, le connétable Colonne & les autres prifonniers de marque pour en tirer rançon fuivant le dernier traité ; cependant Lautrec vouloit qu'ils paffaffent en France. & qu'ils fuffent conduits au roi. Doria n'y voulut jamais confentir, alleguant que par leur rançon, il prétendoit fe dédommager de celle qu'il auroit retirée du prince d'Orange, fi le roi ne lui eut accordé la liberté lorsqu'il le fit prifonnier à Portofino durant le fiege de Pavie.

textes

Guillaume du Bellay feigneur du Langey

qui

qui étoit auprès de Lautrec, l'informa que Doria étoit très-mécontent de la France; AN. 1528. qu'il menageoit quelque intrigue avec les

vonne,

XXV.

Genois pour rendre à fa patrie fon ancienne Lautrec lui liberté; qu'il demandoit qu'on les remît dans envoye Lan❤ la jouiffance de l'impôt fur le fel qu'on leur gey pour avoit ôté, pour en gratifier la ville de Sa- tâcher de le & qu'on le fatisfit fur la rançon du gagner. prince d'Orange. Lautrec fur ces avis fit partir Langey fur le champ, pour aller remontrer au roi que fes affaires en Italie demandoient abfolument qu'il ne mécontentât pas Doria, & qu'il le retînt à fon fervice. Langey perfuadé que la principale difficulté confiftoit à radoucir l'efprit de Doria irrité par les miniftres de France, crut qu'il y devoit travailler avant que de fe rendre à la cour, & paffa par Genes, où Doria qui étoit fon ami, ne voulut pas permettre qu'il logeât dans une autre maifon que la fienne. Il y demeura trois jours, & appaifa fi bien Doria, qu'il le dif pofa à faire un nouveau traité avec la France, & ne le quitta point, qu'ils ne fuffent enfemble convenus des articles fous le bon plaifir du roi. Langey après cette négociation partit en pofte pour Paris, & reprefenta dans le confeil de quelle importance il étoit de ne pas chagriner un homme qu'il avoit laiffé à Genes dans les meilleures difpofitions du monde pour bien fervir la France, & parla des articles dont il étoit convenu avec lui, pourvû que le roi rendît le trafic du fel aux Genois, & qu'on le contentât fur l'article des prifonniers; mais il trouva un obstacle invincible du côté de l'interêt du maréchal de Montmorency qui étoit fort en fa

yeur.

Comme ce feigneur gouvernoit l'état fous
Tome XXVII

В

fir de Doria.

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F'autorité du roi, il avoit obtenu de fa majefté AN. 1528. le revenu de l'impôt du fel à Savonne, qui XXVI. lui procuroit dix à douze mille écus par an. O envoie La crainte d'en être privé l'obligea à s'entenBarbefieux dre avec le chancelier du Prat, pour examipour fe fainer devant le roi le traité que Langey avoit & de les ga- apporté, & ce chancelier qui flatoit Montmorency, lorfqu'on mit l'affaire en déliberation au confeil, rejetta les propofitions de Doria, & les traita de ridicules, comme s'il eût eu deffein de donner la loi à fon maître; il fit réfoudre enfuite qu'on lui ôteroit le generalat, & qu'on mettoit en fa place Antoine de la Roche-foucaud feigneur de Barbefieux, qui fut auffi-tôt envoyé avec le titre d'amiral de la mer du Levant, avec ordre de fe rendre à Genes, & de fe faifir d'André Doria & de toutes les galeres. Mais l'affaire ne fut pas conduite fi fecretement que Doria n'en fût informé, même jufqu'aux moindres circonftances. De Savonne où il étoit, il fe retira dans Genes, où Barbefieux l'alla trouver pour conferer avec lui. Il ne refufa pas l'entrevûe que celui-ci lui demandoit, avec les précautions neceffaires pour n'être pas furpris; il fit entendre à Barbefieux, qu'il favoit le fecret de fa commiffion, mais qu'il ne l'executeroit pas auffi aifément qu'il le croïoit, qu'il avoit ordre de fe faifir de fes galeres & de fa perfonne, qu'il ne craignoit point pour lui; que quant aux galeres, il vouloit bien rendre celles du roi, mais qu'il garderoit les fien

.

nes.

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XXVII. Après cette converfation qui ne fut pas Doria quit- longue, Doria fe retira à Portofino, & achete le parti va fon traité avec l'empereur à des condi de la Fran- tions fort avantageufes. Le marquis du Guâr avec l'em- fon prifonnier en avoit été le médiateur; il lui

c:, & traite

pereur.

offrit au non de fa majefté imperiale la chai

que

in liv. 19.

4.

Mem. as

n. to.

ge d'amiral de toutes les flotes de la maifon AN. 1528. d'Autriche, la liberté de Genes & l'affujeti Guicciard ment de Savonne à celle-ci, auffi-tôt ees deux places feroient ôtées aux François, Bellay. live outre la principauté de Melphi & foixante mille écus d'apointemens. Cette défertion Aug. Just. de Doria fauva à l'empereur la couronne de lib. 6. Naples. Barbefieux fut contraint pour s'op- Raynald poser à un ennemi fi redoutable fur la riviere ad hunc an de Genes, de s'arrêter long-tems à Savonne pour la mettre en sûreté. Il débarqua pour renfoncer la garnifon de Genes cinq cens fantaffins François, & douze cens Allemans qu'il avoit ordre de mener à Lautrec, dont l'armée périffoit de jour en jour par la contagion, outre que l'argent lui manquoit depuis long-tems. Barbefieux fut encore arrêté près de trois femaines par le pape pour lui aider à recouvrer Civita-vecchia, au lieu de porter droit à Naples le prince de Navarre, frere du roi Henri de Navarre avec le renfort qu'il conduifoit. Tous ces retardemens donnerent à Philippin Doria le tems de ravitailler Naples avec fes huit galeres, & André Doria y vint lui même conduire un convoi à la vûë de l'armée Françoife; ne faifant plus myftere de fa trahison.

XXVIII.
La peflo

continue de

Lautrec attendoit toujours avec beaucoup d'impatience le renfort qu'on lui faifoit efperer, il le reçut enfin, mais au nombre de dixhuit cens hommes feulement, aufquels il fal- l'armée

ravager

lut envoyer une escorte à Nole , parce que Françoise, la tempête avoit empêché de defcendre plus près. L'escorte fut battue par les Imperiaux, & la pefte étant devenue plus violente, l'armée Françoife fut réduite au tiers dès le commencement du mois d'Août. On conseilla à

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