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leur déféroit par-là, que parce qu'ils efpéroient fe voir AN. 1547• déchargés d'une affaire que la diverfité des opinions ren

doit très-difficile.

Bernard Diaz, évêque de Calahorra, opina le contraire, Pallavic, ibid. n.§. & dit entr'autres chofes que l'église de Vicense étoit tombée dans de fi grands défordres, par la non-réfidence du prélat, qu'un apôtre à peine feroit capable de la changer. Il vouloit parler du cardinal Rodulfi, qui poffédoit cet évêché avec beaucoup d'autres bénéfices; & qui n'en prenoit point d'autre foin que d'en tirer les revenus, fans y avoir jamais été. Le premier des légats avertit les peros de s'élever contre les abus en général, fans nommer perfonne, de peur que le zèle pour le bien public ne dégénérât en injures & en invectives. Il ne laiffa pas d'écrire au pape pour le prier de donner quelques avis à Rodulfi, afin qu'il ne caufât aucun fcandale par fon mauvais exemple; & en même tems il lui mandoit les difpofitions des évêques, & qu'il ne feroit pas difficile d'obtenir d'eux que l'article de la réfidence fût laiffé à fa decifion : ce qui fit plaifir au pape, qui étoit en peine de fçavoir à quoi se termineroient les projets & les entreprises des prélats. En attendant fa réponse, le concile dreffa un projet, qui portoit qu'aucun ne pourroit avoir plus d'un évêché; que ceux qui en avoient plufieurs, n'en conferveroient qu'un feul à leur choix; que ceux qui à l'avenir obtiendroient divers bénéfices inférieurs, les perdroient fans autre formalité; & que ceux qui alors en poffédoient plus d'un, montreroient leurs difpenfes à l'ordinaire, c'eft-à-dire à l'évêque, qui procéderoit contr'eux felon la décrétale d'Innocent IV.

Quand on recueillit les avis des peres, plufieurs vouloient qu'on ajoutât dans le décret, qu'il ne fe donneroit plus de difpenfes; & d'autres défapprouvérent qu'on montrât celles qui étoient déja obtenues, ni qu'on procédât felon le décret d'Innocent IV, difant que c'étoit le moyen de les faire toutes approuver, & augmenter le mal: attendu que ce pape ordonne qu'elles foient admises, fi on les trouve bonnes, ou qu'on ait recours à Rome, fi elles font douteuses. Car il eft indubitable, difoient-ils, que Rome ne manquera jamais de déclarer que ces difpenfes font bien accordées, Plufieurs étoient d'avis qu'on abolit

VII. differemment fur Plufieurs penfent les difpenfes. Fra-Paolo, hift, du

conc. de Trente, 1.3.

AN 1547. entiérement ces difpenfes d'autres s'y oppofoient, & difoient qu'il falloit feulement en retrancher les abus. L'évêque de Sinigaglia ajouta que le concile pouvoit remédier à tous ces inconvéniens, en déclarant que pour la difpenfe il faut néceffairement une caufe légitime, & que celui qui la donne fans cela, pèche, & ne fçauroit être abfous qu'en la révoquant ; que de même celui qui obtient la difpenfe, bien loin d'être en fûreté par-là, eft toujours en péché, tant qu'il garde les bénéfices qu'il a obtenus par cette voie. Quelques-uns repliquérent que véritablement celui qui accorde la difpenfe fans cause légi time, pèche; mais qu'elle vaut toujours: de forte que la confcience de celui qui l'obtient, eft à couvert, quoiqu'il fçache que la caufe n'eft pas légitime. La difpute dura plufieurs jours: les uns difant que c'étoit ôter au pape fon autorité les autres, qu'il n'étoit pas en fon pouvoir de faire que le mal ne fût pas mal. D'où l'on passa à un autre doute, fi la pluralité des bénéfices eft défendue par la loi divine. C'étoit l'opinion de ceux qui croyoient la résidence de droit divin; & ils concluoient que le pape n'en pouvoit difpenfer mais d'autres prétendoient que cette pluralité n'étoit défendue que par les canons. Les légats eurent affez de peine à affoupir la conteftation, qu'ils craignoient d'autant plus, qu'elle réveilloit la queftion de la réfidence, & ébranloit felon eux l'autorité du pape, quoiqu'il ne fût pas nommé. Dans cette variété de fentimens, l'évêque d'Af

VIII.

Le pape, par fa bulle, evoque à

Rome l'affaire de

Ja réformation.

torga dit que, dans l'impoffibilité de s'accorder fur les difpenfes, il falloit défendre les commendes & les unions à vie, qui ne font que des prétextes pour pallier l'abus de la pluralité, & qu'il ne falloit pas fouffrir un scandale fi honteux & fi public. Mais cela ne faifoit pas plaifir aux évêques Italiens qui poffédoient de femblables bénéfices, & qui vouloient bien quelque réglement; mais qui fût tel, qu'on n'abolît point entiérement les difpenfes.

Sur ces entrefaites les légats reçurent, dans le mois de Février, la réponse du pape, avec une bulle d'évocation qu'ils trouvérent trop ample. Ils ne la produifirent pas d'abord, & voulurent auparavant fonder les efprits, en faifant dire aux évêques, par leurs confidens, que puisqu'il y avoit tant de difficulté à convenir fur la réformation l'on feroit beaucoup mieux de renvoyer toute l'affaire au

pape.

QUATRIÈME. pape. Mais les prélats attachés à l'empereur s'y oppofoient AN. 1547 • très-fortement, & dirent que cela blefferoit l'honneur du concile à quoi prefque tous les autres applaudirent. Ce qui fit connoître aux légats que la bulle n'étoit pas de faifon, & qu'il ne falloit pas la produire. Ils en écrivirent au pape, & lui mandérent qu'il y avoit trop d'oppofition pour lui remettre toute l'affaire de la réformation; qu'on pourroit feulement la partager, & lui laiffer ce qui concerne les cardinaux & les difpenfes; qu'on n'avoit qu'à prévenir le concile, en publiant à Rome une bulle fous le titre de Réformation de la cour, où perfonne ne trou veroit à redire, parce que c'étoit-là fa propre affaire: ajoutant qu'il ne feroit pas befoin de publier cette bulle à Trente, & que le concile pourroit être content, quand on le laifferoit maître de tout le refte. Cependant ils avertiffoient le pape, que le concile ne demanderoit pas feulement un réglement pour l'avenir, mais encore la révo cation des difpenfes, qui pour le préfent caufoient du fcandale dans l'églife. Ainfi la bulle fut fupprimée.

Au fortir de cette congrégation, les évêques Espagnols, & d'autres de leur parti, à la tête defquels étoit le cardinal Pacheco, s'étant affemblés au nombre de vingt, convinrent : que, puifqu'on ne prenoit aucune résolution & que les' bonnes raisons étoient diffimulées par les légats, ou embrouillées par les difputes, il falloit changer de méthode & donner fes demandes par écrit; ce qui feroit plutôt expédier les affaires. Ils drefférent donc un mémoire qui contenoit onze demandes. 1°. Qu'entre les qualités des évêques & des curés, on mît toutes les conditions marquées dans le dernier concile de Latran, parce que l'ordre qu'on avoit tenu jufqu'à préfent facilitoit les difpenfes qu'il étoit à propos d'abolir tout-à-fait comme fcandaleufes. 2°. Que les cardinaux fuffent obligés à réfider dans leurs évêchés, du moins fix mois de l'année, comme la feffion précédente l'ordonnoit aux autres évêques. 3°. Qu'avant toutes chofes la résidence fût déclarée de droit divin. 4°. Que la pluralité des églifes cathédrales fût condamnée, comme un très-grand abus ; & que les cardinaux, comme les autres prélats, fuffent avertis de ne retenir qu'un évêché, & de quitter les autres dans un certain tems marqué, avant la clôture du concile, 5o, Qu'on fupprimât la Tome XX.

B

IX.

Mémoire présenté
Efpagnols,
par les évêques

AN. 1547.

X.

Les légats écri

vent au pape, & lui envoient ce

mémoire,

pluralité des églifes inférieures, tant en la défendant pour l'avenir, qu'en révoquant toutes les difpenfes accordées, fans excepter ni les cardinaux ni les autres; à moins qu'il n'y eût de juftes caufes, qui feroient prouvées devant l'ordinaire. 6°. Que les unions à vie fuffent toutes révoquées, comme fervant de prétexte à la pluralité. 7°. Que tout curé, ou tout autre obligé à réfidence, fût privé de fon bénéfice, s'il y manquoit; fans qu'il pût fe prévaloir d'aucune difpenfe, finon dans les cas permis par la loi. 8°. Que tous les curés fuffent examinés par les évêques; & s'ils fe trouvoient ignorans, ou vicieux, ou inhabiles pour d'au tres causes, ils fuffent privés de leurs cures, qu'on donneroit à d'autres reconnus dignes par un févére examen, & non pas fuivant la fantailie des ordinaires. 9o. Qu'à l'avenir les cures ne fe donneroient qu'après un rigoureux examen. 10°. Qu'aucun ne feroit évêque qu'après un procès-verbal de fa vie & de fes mœurs, fait fur les lieux. 11°. Qu'aucun évêque ne donneroit les ordres dans le diccèse d'autrui, fans la permiffion de l'ordinaire, ni à d'autres perfonnes qu'à ceux de fon diocèse.

Ce mémoire fut remis entre les mains des légats, qui en furent très-furpris: non pas tant parce qu'il tendoit, felon eux, à reftreindre l'autorité du pape, & à donner plus d'étendue à la jurifdiction épifcopale; qu'à cause des conféquences qu'ils s'imaginoient que pouvoit avoir cette nouvelle maniére de donner fes demandes par écrit, & de s'unir plufieurs ensemble pour faire les mêmes demandes. Ils ne fe déclarérent pas toutefois, & ils prirent du tems pour penser à ce qu'ils avoient à répondre, fous prétexte que la matiére étoit importante; & ils propoférent d'autres chofes à examiner. Mais dans le moment même ils écrivirent au pape, à qui ils envoyérent une copie de ce mémoire,en lui repréfentant que les évêques, de jour en jour, prenoient plus de liberté ; qu'ils parloient des cardi naux fans aucun refpect, & fans feindre de dire publiquement qu'il falloit les réformer: qu'ils ne l'épargnoient pas lui-même, &qu'ils difoient hautement qu'il ne donnoit que des paroles, & ne tenoit le concile que pour amufer le public, fous une vaine espérance de réformation. Ils ajoutoient qu'à l'avenir il feroit difficile de les contenir, parce qu'ils s'affembloient fouvent entr'eux & faifoient des cabales ; qu'enfin il feroit à

propos de publier quelque réformation à Rome avant la fel- AN 1547. fion. Ils lui remontrérent encore les fuites que pourroit avoir la conduite des Efpagnols, qui ne feroient pas fi hardis, s'ils ne se fentoient pas appuyés par quelque grand prince.

Ils fupplioient donc le pape de leur prefcrire ce qu'ils devoient faire : Que pour eux ils étoient d'avis qu'il falloit tenir ferme, pour ne pas laiffer aux évêques l'avantage de pouvoir obtenir par la force, ce qu'on ne vouloit pas leur accorder de bon gré, par où l'on s'expoferoit à leur difcrétion. Que quelque chofe qui fe paffât dans les disputes, ils ne molliroient pas; & que fi les évêques du parti ne vouloient pas céder, il faudroit bien en venir aux voix: mais que comme les fuffrages ne fe pèfent pas, & qu'on les compte, il falloit, pour s'affurer la pluralité au jour de la feffion commander expreffément aux évêques qui étoient allés à Venife, peut-être dans l'intention de ne pas revenir, de fe rendre promptement à Trente, en leur faisant entendre que prefque tout l'effentiel de la réformation, se publieroit dans la feffion prochaine, & particuliérement ce qu'il y avoit à régler entre le pape & les évêques : car, ajoutoient-ils dans leur lettre, fuivant que la feffion fe terminera, les obftinés deviendront ou plus hardis ou plus obéiffans.

Autres abus dans

mer,

En attendant la réponse du pape, XI. les légats propoférent dans les congrégations fuivantes de réformer plufieurs les bénéfices, que abus, dont le premier concernoit ceux qui ne prenoient l'on veut réfor point l'ordre facré, requis pour pofféder leurs bénéfices : ce que chacun approuva. Mais le cardinal Pachéco remontra que tous les remèdes qu'on apporteroit à cet abus feroient inutiles, fi l'on n'aboliffoit les commendes & les unions: parce qu'il étoit évident qu'une églife cathédrale peut être donnée en commende, même à un diacre ; & que celui qui voudra jouir d'une cure, fans prendre aucun ordre facré, la fera unir à un bénéfice fimple, en vertu duquel il en jouira fans être prêtre. Les autres articles de réformation étoient en faveur des évêques; que les légats croyoient attirer, en leur reftituant les droits de vifite & d'examen, le pouvoir de juger des caufes civiles, & de revoir les comptes des adminiftrateurs des hôpitaux. Mais comme il arrive fouvent que ceux qui prétendent tout,

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