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armes. Pendant trois jours, les bourgeois ne firent autre AN. 1547. chofe que de les porter dans la citadelle. Le lendemain, vingt-quatre députés & élus de la ville allérent trouver le viceroi & lui promettre obéiffance : quoiqu'il ne les aimât pas, il ne il ne laiffa pas de les recevoir avec beaucoup d'honneur, jufqu'à leur promettre qu'il ne manqueroit pas de faire fçavoir à l'empereur le zèle du peuple à rentrer dans fon devoir. Cent perfonnes furent d'abord exceptées de l'amniftie; enfuite on réduifit ce nombre à vingt-quatre, qui furent même quelque tems après remis en poffeffion de leurs biens à l'exception de Caraccioli, de Mormille & de Seffa. L'amende de cent mille écus, à laquelle la ville avoit été condamnée, lui fut auffi remife par l'empereur, qui cependant maintint toujours le viceroi dans fa dignité.

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Le deuxième de Juin, on tint la dixiéme feffion du concile avec les cérémonies ordinaires : la meffe fut célébrée par Olaus Magnus, archevêque d'Upfal. On y compta, outre les deux légats, fix archevêques, trente-fix évêques, un abbé de la fainte Trinité de Gayette, & deux généraux d'ordre des Cordeliers & des Servites. Deux peres n'y pouvant affifter, parce qu'ils étoient malades, y envoyérent leurs fuffrages. Tout ce qu'on fit dans cette feffion, fut de la prolonger par un décret femblable à celui de la précédente. Voici les termes dans lefquels étoit conçu ce décret.

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Quoique le faint concile œcuménique & général aitor » donné, que la feffion qui fe devoit tenir en cette célèbre » ville de Boulogne le vingt-un d'Avril dernier, fur les » matiéres des facremens, & de la réformation, felon le décret prononcé en la ville de Trente dans une feffion publique l'onziéme de Mars, feroit remife & différée au préfent jour, pour certaines raifons particuliéres, & finguliérement à caufe de l'abfence de quelques peres qu'on efpéroit devoir bientôt arriver; néanmoins, voulant en ufer » encore avec bonté à l'égard de ceux qui ne font pas ve»nus, le même concile légitimement affemblé fous la con» duite du Saint- Efprit, les mêmes légats du faint fiége » apoftolique, cardinaux de la fainte églife Romaine : y pré» fidant, ordonne & déclare: Que la même feffion qui de» voit fe tenir ceoujrd'hui deuxiém ejour de Juin de la pré» fente année 1547, fera remife & différée, comme il la Tome XX.

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LII. Dixième feffion du concile à Bou

logne.
Labbe collect.conc.
tom. 14. pag. 789.
Pallav.ubi fup.
cap. 2. n. 5.
Spond.hoc ann.n.5;

AN. 1547. remet & différe, au jeudi d'après la fête de la Nativité » de la sainte Vierge, qui fera le quinziéme de Septem»bre prochain, pour y traiter les matiéres fufdites & au» tres; à condition néanmoins qu'on ne laiffera pas pen»dant ce tems-là de poursuivre l'examen & la difcuffion tant » des chofes qui regardent les dogmes, que de celles qui regardent la réformation; & que le faint concile pourra » en toute liberté ou abréger où étendre ce terme felon » fon bon plaifir & volonté, même dans une congrégation >> particuliére. »

LIII.

Ordre de traduire

les ouvrages des peres en langue vulgaire. Fontanini della

eloquenza Italiana,

in-4. p. 114,

LIV.

Arrivée de quel ques perfonnes à Boulogne. Pallavicin ubi fu

prà, lib. 10. cap.2. Tha 6.

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Quoiqu'on n'eût point traité des matiéres de doctrine dans cette feffion ni dans la précédente, qui furent les deux feules qu'on tint à Boulogne, il y fut cependant résolu de faire traduire en langue vulgaire les fermons des peres de l'église & des anciens docteurs ; & comme cette entreprise parut devoir être très-utile, on en chargea Galéas Florimonte, évêque de Seffa, qui en conféquence fit imprimer à Venife, en 1556 & en 1564, les fermons de faint Auguftin, de faint Jean Chryfoftôme, de faint Bafile & d'autres peres de l'églife, traduits par lui en Italien, en deux volumes in-4°. On lit, à la tête du premier de ces volumes, une épître adreffée par Florimonte au cardinal Marcel Cervin; & c'eft-là qu'on apprend cette particularité dont tous les hiftoriens du concile de Trente n'ont fait aucune mention. Le travail de Galéas Florimonte fut continué par Raphaël Caftrucci & Séraphin, tous deux religieux Bénédictins de Florence, qui traduifirent en Italien d'autres fermons des peres de l'églife, qu'on imprima dans la même ville de Florence dans l'année 1572, en deux volumes in- quarto.

Après cette feffion, l'on vit arriver à Boulogne le fameux théologien Ambroife Pélargue, religieux de l'ordre de faint Dominique, dont on a parlé ailleurs. Après lui vint l'évêque de Labach en Autriche, pour demander aux peres leurs avis fur fept articles, dont on étoit en contestation dans la province de Carniole; mais ce qui caufa plus de joie à ces peres, fut l'arrivée du fecrétaire du nonce Dandini en France. Comme le pape avoit envoyé dans ce royaume Jérôme Capo-di-ferro, cardinal de faint George, en qualité de légat auprès de Henri II, pour engager ce prince à reconnoître le concile de Boulogne; ce légat, con

jointement avec le nonce avoit dépêché le fecrétaire du AN. 1547,

dernier à Rome: & ce fut en paffant par Boulogne qu'il apprit aux peres, que le roi de France paroiffoit bien difpofé; qu'il avoit déja nommé treize évêques de fon royaume pour fe rendre à Boulogne, & qu'il fe déclaroit publiquement pour la tranflation du concile. Il ajouta qu'il avoit déja promis de marier fa fille naturelle Diane à Horace Farnèfe, duc de Caftro, frere d'Octave; ce que le pape fouhaitoit ardemment, pour ôter au roi de France tout foupçon de l'alliance d'Octave avec Charies V, & que celui-ci connût que Paul III lui-même ne manquoit pas d'appui, en cas qu'il arrivât quelque divifion entre lui & l'empereur.

Il y avoit alors plufieurs cardinaux à la cour de France, demeuque différens motifs y avoient attirés, ou qui y roient fans autres raifons que le defir qu'ils avoient de vivre à la cour. On en comptoit jufqu'à douze, fçavoir: Louis de Bourbon, Jean de Lorraine, Odet de Coligny de Châtillon, Claude de Givry, Jean du Bellay, Philippes de Boulogne, Jean le Veneur, Antoine Sanguin de Meudon, Robert de Lenoncourt, Jacques d'Annebaut, George d'Amboife, & George d'Armagnac. Mais comme leur préfence ne laiffoit pas affez de liberté aux nouveaux miniftres qui gouvernoient fous l'autorité du nouveau roi Henri II, qui n'avoit encore que vingt-neuf ans, ils prirent des mesures pour en écarter quelques-uns, & en peu de tems ils en firent envoyer fept à Rome. Le prétexte que l'on prit pour les éloigner, fut que le pape étant déja de foi-même affez porté pour la France, il étoit à propos qu'ils travaillaffent à l'entretenir dans ces difpofitions, & même à les augmenter, & à fortifier le parti François pour l'élection d'un pape qui fût dans les mêmes fentimens, fi Paul III, qui avoit déja près de quatre-vingts ans, venoit à mourir. Ce qui n'étoit guéres qu'un prétexte, parut au pape une marque réelle & un témoignage affuré de l'amitié du roi, & de sa bonne intelligence avec le faint fiége; &, voulant lui faire connoître à fon tour combien il en étoit reconnoiffant, il envoya le vingtiéme de Juillet le chapeau de cardinal à deux autres prélats François, fçavoir: Charles de Vendôme, prince du fang, & Charles de Guife, archevêque de Reims. Vers le même tems Henri II fit publier plufieurs édits

LV: Cardinaux Fran çois envoyés à Rome.

De Thou, lib. 3. versùs finem. Belcarius in com

ment. lib. 25. n. 4. Pag. 795

Sleidan in coma

ment. lib. 19. pag.

677

AN. 1547.

LVI.

Edits de Henri

Ilavantageux à la religion.

LVII.

Le cardinal de

faint Georgelégat

en France.

De Thou, in hift.

fib. 3. n. 3. in fine.

importans en eux-mêmes, & qui paroiffoient néceffaires alors pour réformer divers abus, ou arrêter divers défordres, dont les fuites ne pouvoient être que très-dangereufes pour l'églife & pour l'état. Par l'un il montroit fa jufte indignation contre les blafphêmateurs & les affaffins, & ordonnoit aux prévôts des maréchaux de France de connoître de leurs crimes fans aucun appel. Par un autre, il renouvelloit les anciens édits contre le luxe des habits. Par un troifiéme, il régloit la police au fujet des pauvres, ordonnant aux échevins de la ville d'employer aux ouvrages publics, les plus forts & les plus robuftes; & que les autres qui, pour quelques infirmités corporelles, n'étoient pas propres au travail, feroient entretenus aux dépens des hôpitaux, fans qu'il fût permis à aucun de mendier en public. Ce qui avoit porté le roi à rendre cet édit, c'est que les Parifiens, croyant fe délivrer de l'importunité des mendians, s'étoient taxés, chacun felon fes moyens, à une certaine fomme pour les foulager : ce qui, loin de remédier au mal dont ils fe plaignoient, attiroit tous les jours à Paris une infinité de mendians de profeffion de tous les endroits du royaume. Et parce qu'il y avoit des églifes & des monaftéres qui étoient obligés de faire à certains jours des aumônes publiques en argent ou en vivres, ce qui engageoit les pauvres artisans à quitter leur ouvrage; il fut encore ordonné que cet argent & ces vivres feroient diftribués, felon la prudence des curés & des marguilliers, aux malades & aux infirmes qui feroient les plus proches de ces lieux-là. Mais ce réglement fi fage ne fut pas exactement fuivi, & dura fort peu de tems. Enfin l'on défendit d'imprimer & de vendre les livres qui venoient d'Allemagne & autres lieux fufpects d'héréfie, avant qu'ils euffent été approuvés par la faculté de théologie de Paris.

Le roi étoit occupé en partie à faire ces réglemens, lorfqu'il reçut le cardinal de faint George, que le pape lui envoyoit. Le motif de Paul III dans cette légation, étoit de faire avec ce prince une ligue défenfive; & de le remercier en particulier de la promeffe qu'il lui avoit faite, d'accorder en mariage Diane fa fille naturelle, qui n'étoit âgée que de neuf ans, à Horace Farnèfe fon petit-fils. Le roi confirma la promeffe du mariage; mais il ne voulut rien précipiter für la ligue que le pape lui demandoit,

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ne jugeant pas à propos, dans le commencement d'un règne,
& avant que de bien connoître fes forces, de donner quel-
que fujet de mécontentement à l'empereur : ce qu'il fit tou
tefois, étant retourné à Paris. Les pouvoirs du légat & les
bulles de fa légation furent enregistrées au parlement de
Paris, fur la jussion qu'il en reçut du roi : parce qu'en France
on ne reconnoît point les légats fans cette formalité, &
ces légats y font contraints de renoncer à celles de leurs
prérogatives qui font contraires aux libertés de l'église Gal-
licane. Le parlement employa les mêmes modifications dont
il s'étoit fervi en vérifiant les pouvoirs des cardinaux,
Alexandre Farnèfe & Jacques Sadolet. Elles contenoient
plufieurs chefs, dont voici les plus importans. Qu'il ne fe-
roit permis au légat d'exercer aucune jurifdiction fur les
fujets du roi, laïques & eccléfiaftiques, quand même ils
y confentiroient. Qu'il ne lui feroit permis de légitimer
perfonne, fi ce n'eft pour recevoir les faints ordres & pof-
féder des bénéfices. Qu'il ne pourroit faire aucune union
de bénéfices ni donner aucune difpenfe, au préjudice
du droit des gradués. Qu'il ne pourroit charger aucuns bé-
néfices de penfion, pas même du confentement des pof-
feffeurs, fi ce n'eft pour l'utilité de ceux qui réfignent, ou
pour affoupir quelque procès. Qu'il ne pourroit donner
aucune abbaye ni prieuré de l'un & de l'autre fexe, ni en
titre, ni en commende, foit à vie, foit pour un certain
tems, fans la nomination du roi, fuivant le traité fait avec
Léon X. Qu'il ne pourroit conférer aucun bénéfice vacant,
au préjudice de l'indult accordé par le pape au parlement de
Paris. Qu'il n'auroit aucune jurisdiction touchant les maria-
ges, les ufures, les reftitutions & autres. Qu'il ne connoîtroit
point du crime d'héréfie, & ne pourroit abfoudre les fu-
jets du roi, fi ce n'eft dans ce qui regarde la conscience &
la pénitence. Qu'il ne dérogeroit point par fes bulles au droit
des ordinaires & des patrons. Qu'il ne pourroit déroger à la
règle de verifimili notitia, & publicandis refignationibus. Qu'il
ne lui feroit point permis d'évoquer à foi les causes ecclé-
fiaftiques, ni d'en connoître. Qu'il ne pourroit condam-
ner les laïques à aucune amende pécuniaire, pour des cri-
mes purement eccléfiaftiques. Qu'enfin il ne feroit rien qui
fût contraire aux faints décrets, aux concordats paffés en-
tre les rois & les papes, aux conciles œcuméniques; aux

AN. 1547.

LVIII. Modifications

que le parlement légat.

fait aux bulles du

De Thou, ibidem,

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