Imágenes de páginas
PDF
EPUB

1. epift. 34 Hift. Li

[ocr errors]

blent la paix des religieux par les foins & les mouvemens que les fuperieurs & ceux qui agiffent fous leurs ordres font obligez de fe donner' pour examiner les deffeins, les plans, & veitler à l'execution: mais fur tout pour fournir à la dépense n'aïant aucun fonds affuré ; & c'eft ce qui incommode les amis. Mais tant que l'ouvrage dure, la paix de toute la communauté eft troublée par l'embarras des materiaux & des ouvriers. Quant aux mauvais jugemens des hommes au fujet de ces bâtimens, Pierre des Vignes les exprime affez en difant Ces freres qui dans la naiffance de leur religion fembloient fouler aux pieds la gloire du monde,reprennent le fafte qu'ils ont méprife:n'aïant rien ils poffedent tout, & font plus riches que les riches mêmes. Enfin faint Bonaventure reproche à fes freres l'avidité des fépultures & des teftamens, qui attire, dit-il, l'indignation du clergé, & particulierement des curez; c'est aufli de quoi fe plaignoit Matthieu Paris, en difant: Ils font foigneux d'affifter à la mort des P..5.4TW grands & des riches, aux préjudice des pafteurs ordinaires, ils font avides de gain & extor quent des teftamens fecrets ; ils ne recommandent que leur ordre, & le préferent à tous les

autres.

LXXXII. n.7.

x r.

-Schifmie

Mais après faint Bonaventure le relâchement fit de grands progrès chez les freres Mineurs, par le malheureux fchifine qui divifa entre les tout l'ordre entre les freres fpirituels & ceux freres Mi

neurs.

de l'obfervance commune. Le bon pape faint Hift. liv. Celeftin dont le zele étoit plus grand que xxxix. n. la prudence, autorifa cette divifion, en éta- 3. z. 31, bliffant la congregation des pauvres Ermites fous la conduite du frere Liberat. Ce qui pouffa la divifion au dernier excès, fut la fameufe difpute fur la proprieté des chofes qui *** iij

37.

Hift. liv. fe confument par l'ufage, comme le pain & 1xxxvi.n.2. le refte de la nourriture. Saint Bonaventure Hift. liv. lui-même foutint que les freres mineurs reLXXXVII.. nonçoient à cette proprieté, & qu'elle paffoit au pape & à l'églife Romaine : ce qui fut accepté par le pape Nicolas III. Mais Jean XX. Hift. liv. rejetta cette proprieté imaginaire; & déclara 11. . que le fimple ufage de fait, auquel les prétendus fpirituels voulaient fe réduire, feroit un ufage injufte, étant dépouillé de tout droit.

14.

[ocr errors]

Il déclara que l'obéiffance eft la principale Hift. liv. vertu des religieux, & préferable à la pauvretés xc11..34. car ces freres indociles foutencient qu'on ne

<

Cap. Exit.

de verb.

doit point obéir aux fuperieurs quand ce qu'ils commandent eft contraire à la perfection. C'étoit l'effet des difputes fcolaftiques aufquelles ces freres s'exerçoient continuellement : on y traitoit tous les jours de nouvelles queftions, & on y emploïoit toutes les fubtilitez & les chicanes poffibles. On demandoit par exemple, fi la régle oblige fous peine de pefign. in 6. ché mortel, ou feulement de peché veniel. Si Clem Exiv. elle oblige aux confeils de l'évangile, comme aux préceptes. Si ce qu'elle preferit en forme d'admonition, d'exhortation ou d'inftruction oblige autant que ce qu'elle exprime en termes imperatifs. On s'accoutuma par là à rafiner fur le décalogue, & fur l'évangile.

cod.

Hift. liv. xcu. n. 53.

Les effets de ces difputes frivoles ne furent que trop férieux, le pape Jean XXII. aïant ofé condamner ces freres indociles, ils le déclarerent heretique de leur propre autorité ; &

appellerent de fes conftitutions au futur conHift. liv. cile. Enfin la révolte alla fi loin, que ces xc111. 7. freres mineurs, foutenus par l'empereur Louis de Baviere, firent dépofer Jean XXII. & mettre à fa place l'antipape Pierre de Corbiere un d'entr'eux, qui pour foutenir fa dignité, fut

46. 47.

réduit à prendre de toutes mains ; & c'est à quoi fe termina l'humilité de ces freres, & leur zele pour la pauvreté & la perfection évangelique.

XIX.1.25.

Au refte, fi la mandicité des religieux n'a été autorisée dans l'églife que depuis le treiziéme fiecle, ce n'eft pas que l'invention en fût nouvelle. De tout temps on a vû des mandians: même fous prétexte de philofophie ou de religion. Les philofophes Cyniques man- Diog. Laert. dioient, & on trouva une fois Diogene de- Har. 8o. n. mandant à une statue, pour s'exercer, difoit- 4. 5. 6. il, à être refusé. C'eft à l'occafion des hereti- Hift. liv ques Maffaliens, que faint Epiphane marque les inconveniens de la mandicité, infiftant fur les lâches complaifances aufquelles elle engage pour les riches, même pour ceux dont les biens font mal acquis, visites actives & paflives, flatteries; converfations de nouvelles, ou d'autres matieres mondaines; & la pire de toutes les complaifances, qui eft la facilité des abfolutions, & l'affoibliffement de la théolo gie morale. Guillaume Durandi, évêque de Hift. liv. Mende, dans les avis pour le concile Vienne, cV1.1. 5·20 marque une grande eftime pour les religieux mandians: mais, ajoûte-t-il, on devroit pourvoir à leur pauvreté, enforte qu'ils cuffent en commun des revenus fuffifans, ou qu'ils fubfiftaffent du travail de leurs mains, comme les apôtres.

Les moines & les autres anciens religieux tomberent dans un grand mépris depuis l'introduction des mandians. Ils n'étoient plus venerables comme autrefois par leur amour pour leur retraite, leur frugalité, leur défintereflement: la plupart s'abandonnoient à l'oifiveté & à la moleffe, les études mêmes qu'ils prétendoient avoir fubftituées au travail des

*** iiij.

[ocr errors]

Relâchement general des religieux.

mains, étoient chez eux fort languiffantes; en un mot, ils ne paroiffoient pas être d'une grande utilité à l'églife. On voïoit au contraire les freres Mandians remplir les chaires des écoles & des églifes, & par leurs travaux infatigables, fuppléer à la negligence & à l'incapacité des prélats & des autres pafteurs. Ce mépris excità les anciens moines à relever Hift. liv. chez eux les études, comme nous avons vu " dans la fondation du college des Bernardins à Hift. lin. Paris; & le pape Benoit XII. dans fa bulle pour XCIV. n.48. la reforme des moines noirs s'étend beaucoup fur les études.

[ocr errors]

47

Mais comme on n'imaginoit pas alors qu'on pût bien étudier ailleurs que dans les Univerfitez, on y envoïoit les moines, ce qui fur une nouvelle fource de relâchement : par la diffipation des voïages, la frequentation inévitable des étudians feculiers peu reglez dans leurs mœurs pour la plûpart, la vanité du doctorat & des autres grades, & les diftinctions qu'ils donnent dans les monafteres. Or les moines en general, non-feulement de la grande regle, mais encore de Clugni & de Cifteaux étoient déja tombez dans un grand relâcheHift. liv. ment. On le voit par le concile de Cognac LXXXI. n. tenu en 1238. où il eft marqué que les moines & les chanoines reguliers recevoient en ar

12.

gent
leur nourriture & leur veftiaire: en for-
te que les places monacales étoient comme
de petits benefices. Les moines fortoient fans
permiffion, mangeoient en ville chez les fe-
culiers & s'y cachoient. Ils avoient leur pecule
en propre, empruntoient de l'argent en leur
nom & fe rendoient cautions pour d'autres.
Ils mangeoient de la viande, portoient du
linge & couchoient dans des cellules ou cham-
bres particulieres.

C'eft ici le lieu, ce me femble, d'examiner les caufes ou plûtôt les prétextes du relâchement des religieux: dont un des plus communs & des plus fpecieux eft l'affoibliffement de la nature. Les corps, dit-on, ne font plus tels qu'ils étoient il y a mille ans ou plus du temps de faint Antoine & de faint Benoît: les hommes ne vivent plus fi long temps & n'ont plus la même force. C'est un très-ancien préjugé & qui fe trouve dans Homere & dahs Virgile mais ce n'eft qu'un préjugé, non feulement fans preuve, mais détruit par des faits conftans. Du temps de Moïse, il y a plus de trois mille ans, la vie humaine étoit bornée à cent ou fix vingt ans ; & toutefois dans un pfeaume qui porte fon nom, elle eft Pf. 89. 10, réduite à foixante & dix ou quatre-vingt ans. Parcourez toutes les hiftoires vous n'y trouverez prefque perfonne qui ait plus vécu depuis trois mille ans, fi ce n'eft les anciens moines; & pour nous réduire à la France, depuis treize cens ans que dure la monarchie, aucun de nos rois n'a tant vêcu que le dernier

mort.

Il faut donc renoncer à ce préjugé populaire, qui a produit tant de relâchement non feulement chez les religieux, mais dans toute l'églife. De cette erreur eft venuë la liberté. que l'on s'eft donnée d'avancer de quatre ou cinq heures l'unique repas du carême, & d'y en ajoûter un fecond. Dès le douzième ficcle Pierre le venerable voulant excufer le relâchement de l'obfervance de Clugni, difort que la nature humaine eft affoiblie depuis le temps

de faint Benoît, & toutefois faint Bernard Hift. liv. dans le même temps, témoigne que tous les LXVII. #. fideles jeûnoient encore le carême jufques au so. foir. Cependant fur ce faux préjugé on a avancé

« AnteriorContinuar »