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tés de Dieu. Le diable eft toujours affez fubtil pour former des engagemens ou l'on foit obligé de bleffer fes interêts ou fa confcience. Qui eft libre de defirs, de deffeins & de paffions, prend le parti de la confcience: mais ceux qui font atta chés à leurs commodités, à leurs interêts, à leurs aifes; qui fe font des idées affreuses de la vie obfcure; qui ne fe fauroient paffer de l'éclat, de la confideration & des douceurs de la vie; qui fe font des néceffités de mille bagatelles aufquelles ils s'attachent, fe laiflent enveloper dans ces fcandales publics & dans ces mauvailes pratiques établies par la coutume, qui font comme des piéges que les démons forment pour faire périr un grand nom bre d'ames.

X I. Enfin l'Evangile ajoûte que nous devons prier, afin que notre fuite n'arrive v. 157 pas en hiver, ou le jour du Jabbat. Et pour comprendre la néceffité de cet avertiffement, il faut fuppofer un principe trèsimportant dans la vie fpirituelle. C'est que les ames ne font pas toujours dans un égal degré de force & de vigueur fpirimelle. Il y a des tems de langueur & de maladie, anffi-bien que des tems de fanté, des tems d'hiver, auffi bien que de printems & d'été, des tems de ftérilité, com

me des tems d'abondance : des tems d'inaction & d'une espece de parelle spirituelle, auffi-bien que d'ardeur & d'activité.Dieu éprouve les ames par ces viciffi tudes, & il leur fait connoître la dépendance qu'elles ont de lui, & l'impuiflance qui leur eft propre, & par cette variété de difpofitions il leur ôte la confiance en elles mêmes.

Mais outre ces féchereffes paffageres que Dieu permet pour humilier les ames; il y en a d'autres qui font des effets de notre lâcheté & de notre tiédeur,& de juftes puncions de nos fautes volontaires.

Ces maladies, quoique non mortelles par ur nature, le peuvent devenir trèsfacilement, i Dieu permettoit que le demon nous attaquât fortement dans ce tems de foiblefle: car il épie avec foin ces occafions, & il ne manqueroit pas de nous accabler, fi Deune l'empêchoit de nous tenter dans ces mauvais tems.

C'est cette grace & cette protection particuliere de Dieu que Jefus Chrift nous avertit de demander avec inftance: car fi Dien permet que le démon nous attaque dans ces tems de foibleffe, nous fommes perdus, & nous fuccomberons infailliblement. Ceft auffi le fens de cette P70. 9. parole de David: Cùm defecerit virtus mes

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ne derelinquas ne : QUAND la force me manquera, Seigneur, ne m abandonnez point. Ainfi le don de perfeverance, fans lequel perfonne n'eft fauvé, confifte non feulement dans la grace en elle-même, mais dans cette proportion de la grace avec les tentations, & c'est ce don que l'Apôtre promet aux Chrétiens, lorfqu'il leur dit, que Dieu eft fidelle, & qu'il ne 1.Cor. permettra point qu'ils foient tentés au delà de 13· leurs forces.

XII. Non-feulement nous ne sommes pas toujours dans le même degré de force fpirituelle; mais toutes les actions de la vie Chrétienne n'ont pas befoin de la même force. Il y a des occafions où l'état commun fuffit: mais il y en a aufsi dit faint Auguftin, où il eft befoin de grandes forces, pour ne pas dire de toutes les forces de la volonté : Ad quadam vincen◄ da magnis aliquando & totis opus eft viribus voluntatis. Quand il s'agit de nous féparer de ce qui nous étoit le plus cher dans le monde (ce qui eft marqué par cette fuite dont parle l'Evangile) les vertus communes ne fuffifent pas. Nous avons donc un interêt très grand de nous fortifier

pour ces occafions qui arrivent affez souvent, & de demander à Dieu qu'il ne permette pas qu'elles nous furprennent

380 Sur l'Ev. du der. Dim. d'après la Pent. H faut faire tout ce que l'on peut pour ne fe trouver pas dans la langueur forfqu'il s'agit d'entrer dans de grans combats: & ceux qui auront été vigilans à fuivre l'avis de Jefus-Chrift, font ceux qui en fortent victorieux. Il faut beaucoup d'humilité pour n'être pas fenverse par les grandes humiliations, beaucoup de détachement lorfqu'il s'agit de renoncer à de grans interêts; enfin beaucoup de folidité, de vertu lorsqu'il eft befoin de foutenir de graus ébranlemens:& ainfi c'eft une priere bien néceflaire pour notre falut, que de demander à Dieu que notre fuite n'arrivé pas en hiver, ni au jour du fabbat.

PENSÉES MORALES

SUR

LES MYSTERES

DE

JESUS-CHRIST

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