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J

L'EUCHARISTIE.

1.

Efus - Chrift prêt de confommer fa vie voyagere, ayant réfervé exprès à la fin les plus grans effets de fon amour, après avoir accompli la Pâque légale pour terminer l'ancienne loi, voulut fubftituer la verité figurée aux figures par lesquelles elle avoit été reprefentée;la manducation du vrai Agneau à celle de l'agneau figuratif, & l'immolation de ce vrai Agneau au facrifice de l'agneau pafcal. Il executa ce grand deflein d'une maniere digne de Dieu. Il runoigna à fes Difciples un defir ardent d'accomplir ce principal de nos myfteres. J'ai defiré avec ardeur, leur dit- Luc: 22, il, de manger cette Pâque avec vous. Jamais 15: il ne leur parla plus hautement de cette union ineffable qu'il defiroit avoir avec eux. Mais comme c'eft le propre de Dieu de faire les plus grandes œuvres d'une maniere fimple, fans les relever par la pompe des paroles,fans en dire les raifons, fans en marquer les fuites, fans en éclaircir les difficultés; afin d'humilier l'homme, & d'élever les fideles à l'intelligence de ce mystere par le degré de la foi, il pratiqua admirablement cette conduite

dans l'inftitution de l'Euchariftie. Il voyoit tous les effets de grace qu'il devoit operer dans le cœur des fideles par ce myltere; c'est-à-dire qu'il voyoit qu'il alloit établir le principal moyen de la fanctification des ames. Il voyoit tous les facrileges & toutes les profanations que les mauvais Chrétiens en feroient; c'est-à-dire, qu'il voyoit que l'abus de ce mystere feroit un des principaux fujets de la condannation des réprouvés. Il ne dit rien de tout cela. Il voyoit toutes les herefies qui s'éleveroient,contre tous les efforts que la raifon humaine feroit pour le détruire. Il ne fe met point en peine de les prévevir. Ceft qu'il favoit bien que malgré tous ces efforts, il le feroit croire par toute la terre: & il a jugé plus digne de lui, de triompher de la raifon humaine par la fim plicité de fes paroles foutemies par la force de fa grace, que par des précautions humaines & étudiées. Faites, Seigneur, que la fimplicité de vos œuvres & de vos paroles ne les aviliffe jamais à nos yeux, & que nous reconnoiffions d'autant mieux la grandeur de vos myfteres dans ces paroles fimples par lefquelles vous les exprimez, que cette maniere de parler eft plus digne de vous,& plus éloignée de l'efprit humain qui fait toujours des efforts pour le relever dans fa bafleffe.

I I.

les lxx.

Mais il ne laiffe pas d'être permis à la foi de tâcher de pénetrer dans les fins de ce myftere, puifque Dieu veut que l'intelligence en foit la récompenfe. Si vous Ifai. 7: ne croyez, dit-il par un Prophete, vous ?. felon n'aurez point l'intelligence. Ce moyen que Jefus-Chrift a choili pour témoigner fon amour aux hommes & pour operer leur salut, est véritablement au deffus de leurs pensées, & jamais ne leur feroit venu dans l'efprit. Mais il n'a rien néanmoins que de digue de Dieu, de proportionné à fa charité infinie, & qui ne tende directement à nous faire comprendre la fin de l'Incarnation. Dieu veut être uni aux hommes d'une union ineffable & incomprehenfible, être le principe de toutes leurs penfées & de tous les mouvemens de leur cœur d'une maniere quiapproche de celle avec laquelle le Verbe s'eft uni à la nature humaine. Il veut que cette union fe fasle par Jefus-Chrift incarné, & il ne nous en à pu donner une idée plus vive, qu'en voulant que ce JESUS incarné s'unît à nos corps & à nos ames par le moyen de ce myftere, qui eft ainfi le gage & la plus vive figure de l'union éternelle que Dieu prétend avoir avec fes élus par le moyen de fon Fils.

LIL

Ceft par cette fin de l'Euchariftie qu'il faut juger du crime de ceux qui reçoi vent Jelus-Chrift dans un cœur vuide de l'amour de Dieu, & plein de celui du monde. Car ce myftere étant le facrement de la charité de Dieu envers l'homme, & de l'union qu'il veut avoir avec lui, quiconque le reçoit fans amour, déclare à Dieu qu'il ne fe foucie pas de fon amour, qu'il renonce au deffein de l'Incarnation; qu'il n'y veut point avoir de part; qu'îl met fon bonheur à s'unir par amour aux créatures & non pas à s'unir à Dieu. Ainli 1.17. il n'eft pas étrange que l'Apôtre le déclare

7. Cor.

coupable de la profanation du corps & du fang du Seigneur; c'est-à-dire, d'avoir rejetté & rendu inutile l'immolation de ce corps & de ce fang, & le don qu'il nous en a fait dans l'Euchariftie pour les unir à nous par le moyen de ce myftere. Ceft proprement là refufer que Dieu regne fur foi, & lui préferer fon ennemi; & c'est là ce qui fait l'énormité de ce crime. On vid cette difpofition dans les Juifs à l'égard de Zur. 19. Jefus-Chrift lorfqu'ils dirent: Nous ne vou lons point que celui-ci foit notre Roi.

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L'AGONIE DU JARDIN

I.

Nous ne favons que l'exterieur de ce qui fe paffa dans ce jardin. Le fond nous en eft inconnu. Nous favons que Jefus Chrift y voulut être frappé de l'image de quelque chofe de bien terrible, qu'il appelle fon calice; qu'il y pria fon Pere de l'exemter de le boire; qu'il y foumit néanmoins fa volonté à celle de fon Pere; qu'il accepta ce calice fi fon Pere ne l'en vouloit pas difpenfer; que Fimpreffion en fut fi vive & fi violente qu'il en eut une fueur de fang; qu'un Ange lui apparut pour le confoler & le fortifier; & enfin qu'il tomba dans une elpece d'agonie, c'eft-à dire, de combat interieur. Voilà, comme j'ai dit, l'exterieur de ce qui fe paffa. Mais qu'il y a de chofes que nous ignorons; Et que l'ame de Jefus Chrift y pouvoit bien avoir d'autres objets que ceux qu'on lui attribue d'ordinaire! Plufieurs Peres ne fe font arrêtés qu'à l'idée de la mort & des tourmens de la croix, & ont cru que la demande que Jefus-Chrift fit à fon Pere, qu'il éloignât de lui ce calice, n'étoit autre chofe qu'une répugnance

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