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matiere étherée eft toute compofée de petits tourbillons qui boüillonnent fans ceffe. Or il eft clair que l'air ne peut pas nager dans cette matiere fans que ces petites parties foient continuellement déterminées à boüillonner avec elle,& à former par tout de petits tourbillons. Il faut donc avouer que les petites parties de l'air ont auffi un mouvement de tourbillon plus ou moins violent felon que la force de leur boüillonnement eft plus ou moins grande. Avec un tel mouvement ces petites parties font fans ceffe effort pour s'éloigner du centre de leur mouvement, ou ce qui eft la même chose, chaque petit tourbillon d'air tend neceffairement à fe dilater. C'eft le total des tendances à fe dilater de tous les petits tourbillons qui compofent une quantité fenfible d'air, qui eft le reffort même de cette quantité d'air, & peu importe que la définition du reffort en general convienne, ou ne convienne pas à cette explication du reffort de l'air, car on ne trouve du reffort dans l'air qu'en y trouvant une tendance à la dilatation : & c'eft toûjours expliquer ce qu'on appelle reffort dans l'air, que d'expliquer cette tendance qu'il a à fe dilater. Il faut expliquer de même le reffort de la poudre à Canon, lorfqu'elle eft fondue. Cette explication eft naturelle, & fait aifément entendre d'où vient à ce mixte

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une fi puiffante force de dilatation.

Maintenant on voit que le reffort toûjours animé des grains de cette poudre eft le reflort même de l'air renfermé dans leurs parties; car ce reffort où cette tendance à la dilatation est toûjours en action. Le reffort inanimé confifte dans la difpofition de toute la matiere de la poudre à prendre une force de dilatation très violente. Cette difpofition dépend du mélange intime des parties huileufes & falines avec les petites parties d'air qui y font par tout répandues. Car les petites parties de toutes ces fubftances étant heterogenes, elles doivent laiffer entre elles de grands intervalles, où s'enferme beaucoup de matiere étherée,& cette matiere étherée qui ne donneroit pas un grand mouvement aux parties huileufes & falines, lorfque leur union eft rompue, fi elle agiffoit immediatement fur elles,à caufe de la rareté des unes & de la pefanteur des autres, fe trouve en état de les agiter avec une grande force par le moyen des petites parties d'air, parce que ces petites parties d'air, ayant plus de corps que celles de la matière étherée, donnent plus de mouvement aux parties falines qui font dures & pefantes, & celles ci aux parties huileufes, qu'elles ne traverfent pas comme fait la matiere étherée.

Quand la matiere de la poudre à Canon

eft parvenue par les diverfes préparations qu'elle a reçûes à former de petits ballons tels que je viens de les dépeindre, il n'eft pas difficile d'apercevoir la raifon des terribles effets qu'elle produit, lorfqu'une étincelle de feu vient à y tomber deflus. Ce feu le plus puiffant de tous les fermens fecoüant & défuniffant les petites parties des grains où il est tombé,delivre l'air qu'elles renferment de la force qui le refferroit, il se dila te avec force, & faifant boüillonner avec lui les parties défunies, celles-ci fecoüent & défuniffent par leur mouvement les petites parties des grains voifins, lefquelles venant encore à bouillonner, bientôt tout l'air enfermé dans les grains, & celui qui les feparoit, ne trouvant plus rien qui le retienne, fe débande de tous côtez & pref qu'à la fois. La matiere étherée agiffant en même temps de toutes fes forces fur toutes ces parties défunies les unes par les autres, elle fait bouillonner avec elle toute cette matiere fondue, & la détermine à prendre un mouvement de tourbillon trés-véhé. ment; d'où réfulte & la lumiere de la poudre embrasée, & fa rarefaction fubite, & l'explofion de tous les corps qui s'opposent à cette rarefaction.

C'eft à peu près fur ce modele que je me figure la matiere du Tonnerre compofée de fels & de fouffres de differentes efpeces

mais de fels effentiels & volatils,de fouffres, ou d'huiles parfaitement rarefiées:Car fi ces principes tels qu'ils font dans la poudre à Canon acquierent par leur mélange & les préparations qu'ils reçoivent, la force de produire des effets fi étonnants, quelle augmentation d'activité n'auront-ils pas dans le Tonnerre, s'ils n'entrent dans fa compofition, que lorsqu'ils font parfaitement purifiez & dégagez de toute matiere étrangere. C'est par cette raifon que le feu du Tonnerre eft plus pénétrant encore & plus vif que celui de la poudre, & qu'on lui voit produire des effets, où la poudre embrasée ne íçauroit atteindre.

Il eft vrai, que la nature ne procede pas dans la compofition de la matiere du Tonnerre de la même maniere que les hommes dans la compofition de la poudre à Canon ; elle prend un autre chemin pour parvenir à faire le mélange des principes qu'elle employe; mais on peut arriver à un même terme par des routes differentes, celles de la Nature font cachées aux yeux du vulgai re,mais elles font fûres ; c'eft aux Phyficiens de les étudier & de les découvrir.

Je ne m'arrêterai pas à rechercher comment elle affemble au milieu des airs des fels & des fouffres de differentes efpeces, Tout le monde fçait que parmi les exhalai fons que la chaleur interieure de la Terre,

& la chaleur exterieure du Soleil élèvent fans ceffe, il fe trouve quantité d'exhalaifons falines & d'exhalaifons fulphureuses: Je dirai feulement ici que les exhalaisons,de même que les vapeurs, ne s'élevent que par le mouvement Turbinaire ou de Tourbillon qu'elles reçoivent de la chaleur ; que c'eft ce mouvement qui les rend plus legeres qu'un égal volume d'air, parce que la force de leur Tourbillonnement agiffant en tout fens refifte à la force qui les pouffe en embas; qu'elles ne recommencent à retomber que lorfque leur Tourbillonnement diminue à un certain point, ou perit tout-à-fait ; qu'alors même elles ne tombent pas toûjours, la moindre agitation de l'air fuffifant pour arrêter leur chûte. Qu'ainfi il faut regarder & les globules de vapeurs & les globules d'exhalaifons par tout répandus dans les airs, comme autant de très petits ballons prêts à fe dilater, mais retenus dans leur état de compreffion par la force de l'air qui les environne.

Cefont ces petits ballons d'exhalaifons falines & fulphureufes, que la Naure employe dans la compofition du Tonnerre, mêlant avec beaucoup d'habileté les fouffres & les fels dont ils font compofez, les embrâfant enfin lorfqu'elle leur a donné les préparations neceffaires; c'eft ce qu'on verra dans l'Article fuivant où je dois découvrir les caufes du Tonnerre,

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