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DAVID.

Oui, Monfieur, depuis plus d'une heure, & dans la femaine les nouveaux draps qu'on vous demande feront finis.

VILSON.

Eh bien, tu l'écriras à ce marchand, il les attend. N'avons-nous pas beaucoup de paiemens à faire ce matin?

DAVID.

Beaucoup trop, Monfieur; & vous-même vous vous gênez en prenant, pour le même jour, des engagemens fi confidérables. Voilà déjà trois lettsrede-change que l'on vient de me présenter.

VILSON.

J'en attends deux autres encore.

DAVID.

Il n'y a plus ici d'argent.

VILSON.

Il faut envoyer, chez Sudmer, toucher ces deux mille livres sterlings.

On y est allé.

DAVID.

VILSON.

Et tu ne fais pas fi les lettres qu'il a tirées fur Norwick y ont été acquittées. Les fommes font fortes.

DAVID.

Si elles n'avoient pas été payées, vous en auriez fûrement eu des nouvelles par la poste d'hier, car Jacob Artur eft ftrict; mais le banquier de Norwick eft exact; d'ailleurs Sudmer, fon affocié, qui vous a fourni les lettres, en répond, & il eft riche. VILSON.

Auffi n'ai-je point d'inquiétude là-deffus. Plût au Ciel que mon cœur fût auffi tranquille fur le refte! Fanni & fa mere font-elles forties hier pendant mon abfence.

DAVID.

Non; mais le lord Orfey eft venu.

VILSON.

Comment? Mylord Orfey?..... Elles ne devoient plus le voir. Elles m'avoient promis... Ah! l'on me trahit! la mere & la fille font d'intelligence pour me tromper. Quoi ! je m'abfente un feul jour, & l'on profite... Ce font elles qui l'auront fans doute fait avertir. Mon cher David, ne me déguise rien. Quand Mylord eft- il venu? A-t-il refté long-tems? Que s'eft-il paffé?

DAVID.

Il vint hier à midi, & demeura plus d'une heure dans la chambre de Madame Sonbrige.

VILSON.

Fanni y étoit-elle ?

DAVID.

On l'appella; mais elle ne resta pas long-tems, & quand elle fortit, elle me parut fort émue.

VILSON.

L'amour de ce lord l'emporte fur le mien! Son rang, fes richesses...

DAVID.

Son laquais vint encore hier, à fix heures du foir, apporter une lettre à Madame Sonbrige.

VILSON.

Ma perte eft certaine. Je vais être abandonné, facrifié. Fanni, fans doute, eft digne du rang & de la fortune que lui offre mon rival. Mais pourquoi me tromper, en m'assurant du plus tendre amour? Fanni! Fanni me tromper! Et pour elle j'oubliois tout ce que je dois à la mémoire de Clarifs... Ah, mon cher David! que cette trahison, que tout ce que je fouffre me fait bien mieux fentir encore la perte de ma femme!... Pourquoi, après fix ans de la plus tendre union, le Ciel me l'a-t-il ravie !... Hélas! c'est toi, ma chere Clarifs, qui, par amitié, avois reçu dans ma maison ces deux étrangeres; c'est toi, qui, au lit de la mort, me conjuras de me les attacher, & de donner la jeune Fanni pour mere aux deux enfans que tu me laiffois !

DAVID.

Mais, Monfieur, vous vous allarmez peut-être fans fujet. Je ne puis croire....

VILSON.

Fais venir mes enfans. Quand je les vois, le fouvenir de leur mere, dont ils m'offrent les traits, affoiblit en moi tout autre fentiment.

DAVID.

Les voici. C'est Madame Sonbrige qui vous les

amene.

SCENE I I.

VILSON, DAVID, Madame SONBRIGE, en déshabillé du matin; JULIETTE encore coëffée de nuit; HENRI, tout habillé.

Madame SON BRIGE, tenant par la main les deux enfans.

BON JOUR, Monfieur Vilfon. Voici deux enfans qui viennent embraffer leur papa.

VILSON embrassant ses enfans, fans regarder Madame

Sonbrige.

Ils lui font bien chers. Ils lui rappellent....

Madame SONBRIGE, pendant que Villon careffe fes enfans.

Nous vous avons attendu hier jusqu'à onze heures du foir. Nous comptions que vous ne reviendriez plus qu'aujourd'hui.

VILSON, la regardant avec des yeux fombres, & faifant effort pour fe retenir.

Pour ce que je devois apprendre à mon retour, j'aurois pu...

(Il embraffe de nouveau fes enfans.)

Ah, mes enfans! quelle perte nous avons faite tous trois !

Madame SONBRIGE.

Je ferai tous mes efforts pour qu'ils ne la fentent pas : &, quant à vous, j'efpere que Fanni... VILSON, en treffaillant, & fixant Madame Sonbrige.

Fanni, dites-vous ?

Madame SONBRIGE.

J'ai beaucoup de chofes à vous dire. David, emmenez ces enfans. (Elle embraffe Juliette.) Allez, Juliette, dites à votre Bonne de vous coëffer, & de vous faire belle; mais qu'elle ne vous mette point de collier,

(David, qui pendant cette fçene s'occupoit è arṛan

ger l'écritoire, à tailler les plumes, & à préparer

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