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JULIETTE.

Oh oui. Avoir, comme eux, bien pitié des pauvres. Je leur donne auffi de mon argent, quand j'en ai.

(Fanni embrasse la petite fille.)

LE MINISTRE, à Juliette.

Confervez toujours ces fentimens-là, ma chere enfant. Les aumônes qu'on fait font un fonds qu'on place pour le ciel.

(Puis fe tournant vers Henri qui le tient de

l'autre côté par l'habit, & le careffant auffi.) Et vous, mon petit ami, êtes-vous auffi fage que votre fœur? Oui. Eh bien, nous en ferons un petit miniftre. Votre état fera de fecourir, de confoler vos freres. En eft-il un plus noble dans le monde ? Le ciel bénit, dès cette vie même, les perfonnes bienfaifantes. Voyez, tout profpere à votre papa; c'eft parce qu'il foulage, autant qu'il peut, les miférables.

Madame SONBRIGE.

C'est la premiere loi de la nature.

FANNI

Et le devoir le plus doux à remplir. (Betzi vient prendre Henri & l'emmene dans la boutique, en faisant figne à Juliette de la fuivre. Mais la petite fille, qui a envie de demeurer,

prend

prend la main de Madame Sonbrige, & fe tient à côté d'elle.)

LE MINISTRE, à Fanni.

C'est que vous avez l'ame belle. Ah! votre cœur en a trouvé un digne de lui dans l'époux que je viens de vous donner. Il eft mon ami depuis dix ans. Ce font fes vertus, fa bonté, fon caractere humain & généreux, qui m'ont attaché à lui pour jamais... Si Sudmer...

DAVID, treffaillant de nouveau, & faifant au Miniftre des fignes qui ne font remarqués que de Fanni. Monfieur, je...

FANNI, regardant David,

Paix donc.'

LE MINISTRE.

Si Sudmer avoit été de même, il feroit plaint à préfent, & fecouru dans fon malheur.

Madame SONBRIGE, avec empressement. Quoi! que lui eft-il arrivé?

LE MINISTRE.

Il vient de faire faillite.

Madame SONBRIGE troublée.

O Ciel! Sudmer manque ?

(Fanni fixe David qui refle corfondu.)

Tome II,

E

1

LE MINISTRE.

Je me doutois bien qu'il finiroit mal. J'allai lui demander, il y a trois mois, quelques guinées. C'étoit pour fecourir des malheureux. Il me les refufa, & dès-lors je prédis fa ruine. La voilà arrivée. C'est bien fait. Tôt ou tard il faut que les gens durs & malfaifans périffent.

FANNI.

Ah! mon mari y eft fûrement intéreffé.

Madame SONBRIGE, à David.

Ces deux mille livres fterlings qu'on avoit envoyé recevoir chez lui ce matin..

LE MINISTRE.

Sudmer s'eft enfui cette nuit.

FANNI, à David.

Eh bien, David,...
David,... voilà donc...

DAVID.

Hélas, il n'eft que trop vrai. Voilà le malheur que je voulois vous cacher. Voilà pourquoi Monfieur Vilfon eft forti.

FANNI, prenant la main du Miniftre.

Ah! Monfieur, qu'il eft heureux que vous foyez ici! Employez bien vos foins, votre amitié à confoler Monfieur Vilfon.

LE MINISTRE, rêveur.

Il eft pour deux mille livres fterlings dans cette. faillite.....

(Il tire de fa poche une lettre-de-change, & la regarde attentivement, pendant que Fanni continue à lui parler.)

FANNI

Ce malheur n'eft pas fans remede. Je fuis füre qu'il y fera plus fenfible à caufe de moi. Mais diteslui bien que mon cœur s'eft montré devant vous; que je ne l'en aimerai pas moins, ne me trouverai pas moins heureufe. Aidez-le de votre amitié, de vos confeils.

LE MINISTRE, tenant toujours à fa main la lettre de

change.

Ma chere Dame... excufez-moi ; je ne puis dîner avec vous. Je viens de me rappeller une affaire indifpenfable.

Madame SONBRIGE.

Eh! Monfieur, en est-il qui ne code au devoir de confoler, de fecourir fon ami dans l'infortune?

LE MINISTRE.

Mon Dieu! c'est bien auffi pour tâcher de le fervir. Non, je ne puis refter: je retourne les prier d'avoir égard à la trifte circonftance. . . En vérité, je fuis au défefpoir de m'être chargé...

FANNI.

De quoi donc, Monfieur ? Qu'y a-t-il encore? Quel eft.....

LE MINISTRE, regardant la lettre-de-change.

Hélas! cet argent ne m'appartient pas. Une lettrede-change fur Monfieur Vilfon, de quatre cents quatre-vingt-deux livres fterlings... C'est un dépôt qu'on m'a confié... dont je fuis comptable... des gens charitables quil, fous mon nom, par mes mains, font de bonnes œuvres... Je fuis obligé en confcience d'aller les avertir. Mais j'efpere qu'à ma follicitation ils voudront bien. . . Il est que Monfieur Vilson va peut-être fe trouver ruiné que d'autres pourroient avoir des créances, les faire valoir... Si, par malheur, fans égard pour mes prieres, on proteftoit la lettre, & qu'on vînt faifir vos effets.... ne me l'imputez pas. Je ferai mon poffible.... Mais, s'ils le veulent .... Adieu, je vais...

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pourtant vrai

LE MINISTRE, s'en allant.

Ma confcience....

FANNI, le retenant.

Je vais la mettre en repos; arrêtez un inftant.

(Elle die fes boucles d'oreilles, & dès que le Mi

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