Imágenes de páginas
PDF
EPUB

de faire connoître aux hommes fes volontési Cependant fi nous ne pouvons difcerner le Miracle des effets naturels, il nous fera abfolument impoffible d'être informés & affurés des volontés de Dieu, dont le Miracle eft en quelque forte le feul langage, pour nous apprendre ce que nous ne pouvons naturellement connoître.

Enfin, fi les Déiftes veulent que nous les regardions comme des perfonnes fenfées & raifonnables, ils doivent nous faire voir dans l'antiquité quelques faits mieux prouvés que ceux de Moïfe ou de J. C. fans cela on a droit de leur demander, pourquoi ils croient les uns & ne croient pas les autres? Mais il s'en faut bien que ces faits puiffent être mis en parallèle: les faits anciens les plus inconteftables n'ont point les marques certaines de vérité qu'ont les faits de l'Ecriture. Au refte, on défie les Déiftes de faire mention d'aucune impofture, qui ait jamais eu ces marques fenfibles.

Si vous me croyez, Monfieur, vous ne propoferez jamais d'autre argument aux Déiftes que celui-là, qui feul fuffit pour les confondre. Laiffez-les citer Apollone de Tyane, dont la Vie a été écrite en Anglois par l'impie Charles Blount, qui a ofé comparer dans cet Ouvr ge les prétendus Miracles de ce Philofophe avec ceux de notre

i

Sauveur. Laiffez-les citer encore certains Miracles de la Légende, & les opposer à ceux de l'Evangile, comme s'il n'y avoit aucune perfonne, un peu éclairée dans la Religion Romaine, qui en ignorât la différence. Enfin, laiffez-les choisir parmi les fables du Paganifme, celles qu'ils jugeront à propos de vous oppofer. Que leur ferviront ces exemples, lorfque vous leur demanderez fi les faits chimériques qu'ils alléguent, ont les quatre fignes infaillibles de vérité que j'ai marqués ci-deffus ?

C'eft en vain qu'ils voudroient citer ce qui fe pafla autrefois à Rome, au fujet du Serpent d'Epidaure. Selon quelques anciens Auteurs, la Ville de Rome étant affligée de la pefte, on envoya des Députés à Epidaure, pour faire venir à Rome la Statue d'Escula pe. Un Serpent s'étant gliffé dans le vaisseau, on crut que c'étoit le Dieu qui avoit pris cette forme, & on le tranfporta à Rome : mais étant arrivé, il s'échapa, & fe fauva dans une Ifle du Tybre, & depuis ce tems-là on ne le vit plus. Les Romains jugerent à propos de bâtir dans cette Ifle un Temple à Efculape, & auffi-tôt la contagion ceffa.

Je demande, par rapport à ce fait, quel eft le premier Auteur qui l'a écrit, & d'où il l'a appris? L'a-t-il écrit fur la foi de quel ques témoins oculaires? Ne l'a-t-il pas plu

tôt imaginé lui-même, ou au moins n'a-t-il pas fuivien cela quelque mauvaise tradition populaire, fource méprisable & toujours corrompue? Peut-on dire que cette fable ait les quatre marques de vérité que j'ai exigées pour la certitude d'un fait ? Mais fuppofons que celui-ci foit véritable, qu'en peut-on conclure? Ce Serpent a-t-il prêché quelque Doctrine s'eft-il dit l'Envoyé de Dieu ? a-til confirmé la Doctrine de quelque homme qui eût pris cette qualité ?

On cite encore pour exemple, ces deux jeunes gens inconnus, qui dans une Bataille des Romains contre les Latins, combattirent à la tête de la Cavalerie Romaine, & qui dans la même nuit que cette action fe paffa, parurent à Rome, & y apporterent la nouvelle de la défaite des Latins. Les Romains perfuadés que c'étoit Caftor & Pollux, leur bâtirent un Temple, & ordonnerent qu'il se feroit une Proceffion tous les ans, pour conferver le fouvenir de ce fait merveilleux.

Mais ce fait n'eft attefté par aucun Auteur contemporain: il n'a point été écrit par des témoins oculaires. Les Romains ont pu s'imaginer que ces deux jeunes hommes étoient Caftor & Pollux; mais on ne marque point qu'ils fe foient eux-mêmes donnés pour tels: enfin ils n'ont rien enfeigné & n'ont prétendu autorifer aucune Doctrine:

ainfi il n'en résulte rien. Si l'on dit que ce fait merveilleux autorifoit la Religion Païenne; je répons que quand même il feroit vrai, il ne devoit pas plus produire cet effet par lui-même, que les Miracles des Magi ciens d'Egypte, dont il eft parlé dans l'Ecri ture. Les Miracles. ne font le langage de Dieu, qu'autant qu'ils font opérés formelle ment pour attefter une Doctrine.

!

On objecte encore le Sommonocodom adoré dans le Royaume de Siam, & on compare fa nailfance & fa vie, avec la naif fance & la vie de Jésus-Chrift. Ce qu'on dit de Sommonocodom, qu'il nâquit d'une Vierge, que la perfécution d'un Roi qui le vouloit faire mourir, le contraignit de s'enfuir dans un autre pays, &c. Ces circonftances, & plufieurs autres pareilles, paroif. fent avoir été empruntées de l'Hiftoire de Jésus-Chrift. Peut-être que les Siamois ont autrefois entendu parler de l'Evangile, & que la Religion Chrétienne qui y avoit été prêchée, s'y est éteinte comme en quelques autres endroits. D'ailleurs, on ne nous dit point, quand le Livre qui contient la Vie de Sommonocodom a été écrit ; fi c'est par lui-même, ou par des témoins oculaires de Les actions.

Un Auteur Anglois, dont j'ai extrait ces objections frivoles contenues dans fon Li

vre intitulé la Découverte, en propose en core plufieurs autres, tirées de certains Miracles de la Légende, qu'il ofe comparer à ceux de Jéfus-Chrift & de Moife. Selon lui, la fainte Chandellé d'Arras, qui brule fans fe confumer, eft comparable au Buiffon ardent de Moïfe. Mais quelle comparaison! Le fait du Buiffon ardent ne peut être une fable, parce qu'il eft démontré que Moïfe n'étoit point un impofteur, comme on a vu ci-deffus. Au contraire, il fuffit à un hom.me un peu éclairé, de fe tranfporter à Arras, pour y découvrir ce que c'eft que cette Chandelle, qu'on n'a garde de voir fe confumer, étant compofée & allumée comme elle l'eft: il faut dire la même chofe de toutes les autres comparaifons de cette efpécem

Eft-il poffible qu'il y ait des hommes fur la Terre affez peu touchés de leur propre intérêt, pour employer tout leur efprit à combattre, par de vaines fubtilités, les vérités les plus falutaires & les plus confolantes, telles que l'avénement d'un Meffie, pour inftruire les hommes, les faire marcher dans les voies de la Juftice, & les racheter de la mort. Si les Dogmes Chrétiens étoient chimériques, ou qu'au moins il y eût quelque fujet de douter fenfément des faits fur lef quels la révélation de ces Dogmes eft ap-puyée, la conduite des Incrédules ne ferait

point

« AnteriorContinuar »