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de. Les affiégez les reçurent avec une joie qui ne fe peut exprimer, & chacun promit de prêter fon bras AN. 1456. à la défense de la ville. La défaite des Turcs ne les empêcha point de faire battre la ville par l'artillerie, afin d'y entrer par les bréches. Quand elles furent ouvertes, les Turcs drefferent des échelles en plufieurs endroits pour divifer les troupes des affiégez. Maison fit de part & d'autre une refiftance opiniâtre. Chaque genéral animoit fes troupes par ses paroles & par fon exemple, & le carnage fut grand. On recommença l'affaut le lendemain avec plus de fureur que le jour précedent. Le Sultan vit tomber à fes côtez Cazan Pacha, le plus intrépide des genéraux Ottomans : il s'étoit trop avancé pour obeïr aux ordres de fon maître, qui regretta sa perte, & qui en fut presque au desespoir. Mahomet lui-même fut bleffé à la cuiffe; mais il crut fa bleffure legere, & continua de combattre à la tête de fes troupes.

IV.

Défaite entiere de l'armée des

Un fi grand effort de courage eut pû lui donner la victoire fans la retraite précipitée des Janiffaires qui abandonnerent le combat. Mahomet s'efforca Turcs. en vain de les retenir dans leur devoir, ils n'écouterent ni fes prieres, ni fes menaces, & ce prince fut 480. obligé de lever le fiége après y avoir perdu plus de quarante mille hommes.

Ladillas roi de Hongrie qui ne s'étoit point attendu à une telle victoire, & perfuadé même que les Chrétiens ne pouvoient résister, s'étoit retiré précipitamment à Vienne en Autriche, fous le prétexte d'une partie de chaffe, & il put à peine revenir de fa furprise, quand il eut appris l'heureux fuccès du

combat.

Naucler, ibid. pa

AN. 1456.

V.

Jaloufie entre Jean

Huniade.

Aneas Sylvius loco fuprà cit. Spond. hoc ann. 1456. n. 3.

&

Jean de Capistran & Huniade s'attribuerent chacun en particulier l'honneur de cette victoire, dans les lettres qu'ils écrivirent l'un & l'autre au pape & de Capiftran & à l'empereur, pour les informer du fuccès de cette croifade: vanité baffe dans deux hommes d'ailleurs également recommandables par leurs grandes qualitez. Capistran y avoit contribué par par fes prieres fes exhortations: Huniade par fa valeur, fon courage & fa prudence, & tous deux euffent merité plus de gloire, fi chacun n'eût pris que la part qui lui Comme Mahomet leva le fiége de Belgrade le fiSolemnité de la xiéme jour d'Août, où l'on celébroit déja depuis long-tems dans quelques églifes la mémoire de la transfiguration de Jesus-Chrift fur le mont Thabor, le pape Callixte confirma cette fête,la rendit univerfelle pour toute l'église, & compofa un office qui lui fût propre, & attacha à cette fête des indulgences pareilles à celles du faint Sacrement.

VI.

fête de la transfigu

ration de N. Sei

gneur.

VII.

Mort de Jean Ho.

niade vaivode de

Tranfylvanie.

Naucler general.

49. p. 480.

étoit dûë.

Les deux chefs de cette expedition ne furvêqui rent pas long-tems à cette défaite des Turcs. Huniade accablé des travaux qu'il avoit foufferts dans cette guerre, fut attaqué d'une fiévre continuë qui l'emporta le dix de Septembre dans le bourg de Zemplen. Il ne voulut jamais permettre qu'on lui apportât dans fa chambre le faint viatique, & fe fit exprès porter à l'églife pour le recevoir, difant qu'il ne méritoit pas que le Roi des rois l'honorât ainfi, & qu'il étoit indigne que le maître vînt trouver le ferviteur. Toute l'Europe fut affligée de la perte de ce grand capitaine. Le pape Callixte verfa des larmes en apprenant la mort, & offrit le faint facrifice dans

l'églife de S. Pierre pour ce genéreux défenseur de la
religion. Jean de Capiftran qui ne l'avoit pas quitté
dans fa maladie, fit lui-même fon oraison funebre
aux obféques qu'on lui fit dans l'église qu'il avoit
fait bâtir en Tranfylvanie, dans laquelle on tranf
porta fon
corps comme il l'avoit demandé en mou-
rant. Illaissa deux fils,Ladislas & Matthias, dont on
aura fujet de parler fouvent dans la fuite. Quelques
hiftoriens ont rapporté que l'empereur des Turcs
apprenant se mort, dit, en baiffant les yeux du cha-
grin qu'il en reffentoit, que ce grand homme n'a-
voit eu perfonne avant lui qui lui fût semblable;
qu'il s'eftimoit malheureux de n'avoir plus de tête af
fez celébre dans l'univers, fur laquelle il pût venger
l'affront qu'il avoit reçu devant Belgrade.

AN. 1456.

VIII.
Mort de S. Jean

Jean de Capiftran âgé de foixante & onze ans, mourut le vingt-troifiéme Octobre,trois mois après de Capiftran. Huniade dans le couvent des cordeliers de Willach près de Sirmich en Hongrie, où il fut enterré.

IX.

Ouvrages de ca

Ce faint Religieux fils d'un gentilhomme Angevin qui s'étoit marié en Italie, étant à la fuite de saint. Louis d'Anjou roi de Naples, étoit né l'an 1385. à Capistran près d'Aquila dans l'Abruzze au royaume de Naples. Voici les ouvrages imprimez qu'on a de lui: un traité de l'autorité du pape & du concile contre l'affemblée de Bafle; un autre fous ce titre : miroir des clercs, ou difcours au clergé prononcé dans un fynode diocésain de Trente; une instruction pour les prêtres ; une apologie du tiers ordre de faint François ; le miroir de la confcience; un pénitenciel; un traité de l'excommunication; un autre de mariage, des ufures & des contrats; du jugement univer

!

fel; de l'antechrift & de la guerre fpirituelle. Enfin AN. 1456. quelques traitez du droit civil. On lui attribuë encore d'autres ouvrages qui n'ont pas été imprimez, comme, de la dignité eccléfiaftique au pape Nicolas; des peines de l'enfer & du purgatoire;des restitutions & des contrats; un commentaire fur la regle des Freres Mineurs; trois livres de la cupidité; un difcours fur la conception de la sainte Vierge; un autre fur la paffion de Notre-Seigneur; un traité contre les Huffites, & un difcours contre Rocquefane. Henri Sedulius Cordelier, a écrit l'hiftoire de la vie, Annal.minor.Giry dans laquelle on apprend beaucoup de choses qui

Sedul. Vadding.

col. 1376.

X.
Zele du pape con-
gre les infidéles.

ont rapport

à l'hiftoire du tems.

La mort de ces deux grands hommes ne rallentit pas le zele du pape contre les infidéles. Il engagea Henri roi de Caftille à faire la guerre aux Maures, & accorda de grandes indulgences à ceux qui porteroient les armes fous les ordres de ce prince,ou qui contribueroient de leurs aumônes aux frais de cette guerre. Le fouverain pontife avoit tant de confiance dans les armes des François, qu'il avoit coûtume de dire, que fi le fecours de la France ne lui manquoit pas, il fe flattoit de détruire entierement les fectes de Mahomet & des autres infidéles. Mais l'univerfité de Paris & le clergé de Roüen,fans fe laiffer furprendre par fes louanges, interjetterent appel au futur concile, de la bulle de ce pape, par laquelle il avoit impofé des décimes fur les eccléfiaftiques de France, pour fecourir ceux qui fe croifoient contre les infidéles.Callixte fut faché de cet appel,&chargea le carOderic. Raynald. dinal Alain de fe rendre au plûtôt à Paris, pour engager l'univerfité à le revoquer; ce qui lui fut d'au

ad an. 1456. n. 56.

P. 1395.

tant plus facile, que le roi très-chrétien & le refte de AN. 1456 l'églife Gallicane avoient déja confenti à cette impofition: eu égard au danger auquel la religion étoit collect. concil. expofée. Les oppofitions qu'on fit en Allemagne à Labbai. tom. 138 cette même bulle, furent beaucoup plus confiderables. Les Allemands fe plaignoient des violences avec lefquelles on exigeoit d'eux ces décimes, & du peu d'attention qu'on apportoit à l'observance du concordat fait avec la nation. Le pape en écrivit à l'empereur Frederic, & tâcha de juftifier fa conduite. Sa lettre est du trente-uniéme d'Août. Æneas Sylvius in 338. qui n'étoit pas moins porté que le faint pere en faveur de la guerre contre les Turcs, fit voir auffi qu'on n'avoit aucune raifon d'accufer le fouverain pontife de ne pas obferver les articles du concordat fait avec les Allemands.

Eneas Sylvius epift.

XI. Broüilleries entre le pape & Al

gon.

Pour réuffir dans cette guerre, Callixte devoit se ménager avec les princes chrétiens. Auffi les avoit-il prévenu,& il n'avoit prefque rien à craindre que du phone roi d'Arracôté d'Alphonfe avec qui il étoit en querelle, parce qu'il lui avoit refufé les vicariats de Benevent & de Terracine, & à Ferdinand fils naturel de ce prince, l'inveftiture du roïaume de Sicile. Alphonfe fouffroit ces refus avec tant d'impatience, qu'il ne fe contenta pas de reprocher au pape par fon ambassadeur, la baffeffe de fon extraction, les obligations qu'il lui avoit,& fa grande ambition pour élever ses neveux; il follicita encore Henri roi de Caftille à ne lui point obeïr, comme il avoit autrefois follicité les princes chrétiens conte les papes Martin V. & Eugene IV. Callixte ne répondit à tous ces reproches,que par des bienfaits; & pour faire connoître à Alphonfe qu'il

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