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famedis; & à chaque féance le Roi lui donne quarante jetons d'argent qui font distribués aux académiciens préfens. Ces jetons ont d'un côté le portrait du roi régnant, ayant présentement pour légende Louis XV, Roy de France & de Navarre, de l'autre la devise de l'Académie, & ces mots (qui en font la fuite autour de la couronne de laurier): Protecteur de l'Académie Françoife, avec le millésime dans l'exergue. Elle donne tous les deux ans, le jour de Saint Louis, un prix d'éloquence & un prix de poéfie dont les sujets se publient pour l'ordinaire au commencement de l'année (1). Ces prix ont été fondés par M. de Balzac & par M. de Clermont-Tonnerre, évêque & comte de Noyon, pair de France (2). Le premier, qui mourut en 1654, avoit laissé deux mille livres pour donner tous les deux ans un prix à celui que l'Académie jugeroit avoir compofé le meilleur difcours fur certaines matières pieufes par lui marquées. Divers obftacles avoient empêché cette difpofition d'être exécutée jufques en 1671; en

(1) Le premier volume de cette collection eft intitulé Recueil de quelques pièces de profe & de vers proposez de la part de l'Académie françoise en 1671. Paris, Le Petit, 1671, in-12, 378 pages. Pour la fuite de ces diverses féries, on peut confulter la remarquable bibliographie spéciale donnée en 1877 par M. René Kerviler dans le Polybiblion & tirée à part.

(2) Avertiffement de l'Académie françoise de 1671 (D.). L

forte que ce fonds, qu'on avoit fait valoir, s'étant augmenté, l'Académie fixa le prix de profe à environ trois cents livres. Elle agréa en même tems le zèle de trois académiciens (1), qui, fans fe laiffer connoître, convinrent de faire jufqu'au dernier furvivant les frais d'un femblable prix pour celui qui, au jugement de la Compagnie, fe trouveroit avoir fait la meilleure pièce de poésie françoife jufqu'à cent vers au plus, fur l'une des grandes actions de Sa Majesté. Après la mort du dernier de ces trois académiciens, l'Académie fit cette dépense jusqu'en 1699, qu'elle confentit que M. l'évêque de Noyon plaçât trois mille livres fur l'Hôtel de ville de Paris pour fonder à perpétuité le prix de poéfie (2). Le prix de profe étoit autrefois un Crucifix, un Saint Louis ou quelque autre ouvrage de dévotion, & celui de vers, un lis d'or au pied duquel étoit la devise de l'Académie, ce qui ne dura que quelques années, après lefquelles l'Académie fe détermina à donner deux médailles d'or; on voit fur l'une Saint Louis avec les ornemens royaux, tenant de la main droite une cou

(1) Pelliffon, Conrart & de Bezons.

(2) En 1753, le prix Clermont-Tonnerre fut fondu avec celui de Sandron, fecrétaire du Roi, & représenta dès lors une rente de 500 livres affectée au lauréat couronné tous les deux ans.

ronne d'épines, & fur l'autre le portrait de Louis XIV en bufte, armé, avec un manteau, un mufle de lion fur l'épaule, & fur le devant de la cuiraffe le portrait de la Reine; pour légende: Ludovicus Magnus Rex chriftianiffimus; la devife de l'Académie fait leur revers, ayant dans l'exergue l'Académie Franfoife, avec cette différence qu'avant le milléfime autour de la couronne de laurier, on lit à la première : Prix d'éloquence, & à la feconde Prix de poéfie.

La diftribution des prix de l'Académie fe fit pour la première fois en 1671. Le sujet de celui de profe fut de la Louange & de la Gloire; le fujet de celui de vers l'une des grandes actions du Roi. Le premier fut remporté par Mlle de Scudéry (1), cette illuftre

(1) Titon du Tillet, dans fes Effais fur les honneurs & fur les monumens accordés aux illuftres favans pendant la fuite des fiècles (Paris, J.-B. Coignard, 1734, in-12), nous fait connoître une particularité relative à cette distinction: Mlle de Scudéry, ayant remporté en l'année 1671 le prix de l'éloquence à l'Académie françoise, un homme inconnu donna à fa porte un petit paquet rond de la groffeur d'une montre qui lui étoit adreffé & qu'il dit être venu par le courrier de Provence : elle l'ouvrit & y trouva une boîte fort jolie qui contenoit une ode à fa louange, attachée avec des rubans de diverfes couleurs à une petite guirlande de lauriers d'or émaillés de verd. Mlle de Scudéry ignora quelque tems d'où lui venoit cette ingénieufe galanterie & y répondit cependant par une jolie pièce de vers; enfuite elle apprit avec plaisir

fille que les grâces de fon efprit ont fait furnommer la Sapho de fon fiècle, & l'autre par M. de La Monnoye, qui choifit l'Abolition du duel. Il eft connu par plufieurs autres pièces de vers fort eftimées & eft un des quarante de l'Académie.

ARTICLE XIII.

On rapporte l'origine de l'Académie des inscriptions & belles-lettres à l'année mil fix cent foixante & trois. Elle est née, pour ainfi dire, dans le fein de l'Académie françoise (1), le Roi y ayant choifi alors un petit nombre de favans les plus verfés dans la connoiffance de l'hiftoire & de l'antiquité pour travailler aux inscriptions, aux devifes, aux médailles,

que cette ode étoit de l'illuftre Mlle de La Vigne. " (Page 444.)

(1) Lettre patente pour l'établiffement des Académies des infcriptions & des sciences (D.). — Sur les origines & les attributions de la « Petite Académie ", comme on l'appeloit tout d'abord, il faut lire une importante lettre de Jean Chapelain à Colbert, publiée pour la première fois par M. Taschereau dans la Revue rétrospective (2° série, tome I, p. 84), puis par M. P. Clément (Lettres, inftructions & mémoires de Colbert, V, 587), & enfin par M. Ph. Tamizey de Larroque dans la grande édition des Lettres de Chapelain, faifant partie de la collection des documens inédits (tome II, p. 272).

& pour répandre fur tous les monumens de ce genre le goût & la noble fimplicité qui en font le prix. Le deffein d'un fi bel établiffement est dû à M. Colbert (1). Ce ministre, qui penfoit à perpétuer la mémoire des actions du Roi, croyoit que rien n'y étoit plus propre que les médailles. Cette perfuafion le faifoit être affidu aux conférences, & l'Académie commença dès ces premiers tems l'Hiftoire métallique de Louis XIV. M. de Louvois fuivit à cet égard les vues de M. Colbert; il rendit même les affemblées plus fréquentes & obtint de Sa Majefté qu'elles fe tiendroient au Louvre. Après la mort de ce miniftre, le Roi remit le foin des Académies à M. de Pontchartrain, fecrétaire d'État & depuis chancelier de France, époque intéreffante pour les lettres & pour les fciences, M. l'abbé Bignon ayant été associé en quelque forte par fon illuftre oncle à cette honorable inspection. Auffi l'on peut dire que les académiciens des infcriptions & des fciences fe renouvelèrent alors. M. l'abbé Bignon animant les travaux, la réputation de ces favantes fociétés augmenta au point qu'elles méritèrent que le Roi voulût en affurer l'établiffement par des règlemens qui déterminaffent l'objet, l'ordre & la forme de leurs exercices. Ces

(1) Préface de l'Hifloire métallique de Louis XIV (D.).

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