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qui fert à la fabrication des médailles. Le cabinet, en forme de galerie, des poinçons & des carrés, appelé improprement le cabinet des médailles, qui eft d'une belle menuiferie, orné de glaces & de bronzes, avec les portraits de la famille royale depuis Henri IV, lui plut extrêmement. Il confidéra longtems les poinçons & les carrés, & en loua beaucoup le travail. Une chofe qui le furprit fort, ce fut de trouver dans un médaillier quarante médailles d'argent & autant de bronze, femblables à la médaille d'or que M. le duc d'Antin venoit de lui offrir de la part du Roi, & de les voir en même tems diftribuer à fa fuite, & à toutes les perfonnes qui étoient préfentes.

Les tableaux & les curiofités qui décorent l'appartement de M. de Launay parurent auffi faire plaifir au Czar. Enfin il fortit de ce lieu fi content qu'il y revint la veille de fon départ, mais fans aucune fuite. Il voulut revoir les mêmes chofes qu'on lui avoit montrées la première fois, & fon admiration ne fut pas moindre. M. de Launay lui présenta une médaille du Roi. Ce prince la reçut avec une tendre fatisfaction, qu'il marqua en mettant cette médaille fur fa poitrine, & en fe fervant d'expreffions qui fignifioient qu'il la porteroit toute fa vie par amour pour Sa Majesté.

ARTICLE XXII.

La monnoie des médailles eft fort ancienne & tient lieu de celle qui étoit autrefois dans le palais du Roi. Ce n'étoit pas feulement dans les villes, & particulièrement dans celles où les rois de France faifoient leur demeure, que fe fabriquoit la monnoie; on trouve beaucoup de pièces frappées, fous la première & la feconde race, dans des endroits qui paroiffent avoir été des maifons de campagne où ces princes, qui aimoient la chaffe, paffoient une partie de l'année. Ces lieux étoient appelés Villa Regia, Publica Dominica, ou fimplement Ville; quelquefois curtes regiæ, fifci, Vici Regis, & très fouvent Palatie, d'où l'on conjecture qu'il falloit qu'il y eût une monnoie à la fuite de la cour, d'autant plus qu'on lit fur un denier d'argent de Dagobert, & fur plufieurs des rois de la feconde race: Moneta Palatina; ce qui eft une preuve qu'outre la monnoie de la ville, il y en avoit une dans le palais du Roi (1). Charlemagne veut

La première

(1) Boizard, Traité des monnoies (D.). édition du Traité des monnoies, de leurs circonstances & dépendances eft de 1692; les éditions de 1711, 1714 & 1723 renferment les Traités d'alliage d'Hindret de Beaulieu, inspecteur général des monnoies de France.

même, dans fes capitulaires, qu'il n'y ait de monnoie que dans fon palais : Volumus ut in nullo alio loco Moneta fit, nifi in Palatio noftro. Charles le Chauve, en marquant les lieux où l'on fabriquoit la monnoie, nomme premièrement fon palais (1). Cet ufage s'eft confervé dans la troifième race, comme il paroît par des deniers d'argent frappés fous Philippe Ier, Louis VI & Louis VII, à Étampes, à ChâteauLandon & à Pontoife, où il y avoit des maifons royales.

Henri II ordonna (2), par édit du mois de juillet 1553, qu'il feroit fabriqué des teftons au moulin dans fon palais à Paris (3), ce qui fut exécuté au mois de mars fuivant; & cette nouvelle fabrique (4) fut établie au bout du jardin des étuves dans l'île du palais; mais cette manière ayant été fupprimée par

(1) Le Blanc (D.). — Traité historique des monnoies de France depuis le commencement de la monarchie jusqu'à préfent, 1690, in-4o.

(2) Boizard (D.). — Cette date, empruntée fans doute à une fimple indication de l'invention du balancier donnée par Leblanc, n'est pas exacte : c'est le 5 mars 1551 (1552) que les cry & figure de la nouvelle monnoie furent rendus publics. Voyez plus loin, au chapitre des jetons, la mention de deux rares plaquettes relatives à cette refonte.

(3) Jufqu'à ce tems-là on avoit fabriqué la monnoie au marteau (D.).

(4) Le Blanc (D.).

Henri III (1), elle demeura affectée seulement aux médailles & aux jetons; & ce roi défendit par édit du mois de septembre 1585 « de

ne fe fervir de la fabrication au moulin "que pour toutes fortes de médailles antiques & modernes, pièces de plaifir & jetons, fans qu'il pût être fabriqué avec les engins "au moulin aucunes espèces d'or, d'argent, "ou de billon ayant cours. » Cet édit peut être regardé comme le premier titre de la monnoie des médailles & prouve qu'elle eft la même qui fut établie par Henri II pour la fabrication des espèces au moulin, d'où il fuit que la monnoie des médailles représente la monnoie qui étoit anciennement dans le palais du Roi (2). En 1639, elle fut transférée aux galeries du Louvre par Louis XIII, qui l'appelle dans fa déclaration du 30 de mars 1640

la monnoie du moulin établie au château du Louvre ", & il fut mis fur la porte de ce lieu un marbre noir, fur lequel étoit écrit en lettres d'or: Monnoie du Roi pour la fabrique des médailles, jetons & pièces de plaifir, d'or, d'argent, de bronze & de cuivre. Il y étoit encore en 1696, mais, comme il étoit caffé, on lui fubftitua celui qu'on y voit à préfent avec

(1) Elle fut rétablie par Louis XIII par édit du mois de décembre 1639, confirmé par déclaration du 30 mars 1640 (D.).

(2) Boizard (D.).

cette fimple inscription: Monnoie des médailles. . Louis XIII donna la conduite de ce lieu à M. Warin (1), directeur général des monnoies de France, le plus habile graveur de fon fiècle. M. Ballin (2) en a été le fecond directeur c'eft ce fameux orfèvre du Roi qui a fait tant d'honneur à fa profeffion, & qui s'eft immortalifé par des chefs-d'œuvre d'orfèvrerie où l'élégance du deffin, le goût de la compofition & la beauté de l'exécution paroiffent dans un même degré, & furtout par ces fuperbes pièces qui décoroient fi richement la magnifique galerie de Versailles, les plus grands ouvrages qu'on ait peut-être jamais vus : mérite rare qui l'a fait mettre au rang des hommes illuftres de fon fiècle.

Après M. Ballin, l'abbé Bizot, connu par fa belle Hiftoire métallique de Hollande (3), eut

(1) Sur un artiste tel que Jean Warin, il suffit fans doute de renvoyer aux divers documens publiés dans les Archives de l'art françois, complétés par les recherches de Jal, le livre de M. Ed. Fétis fur les Artistes belges à Pétranger, & un curieux travail de M. Louis Courajod : Jean Warin, fes œuvres de fculpture & le bufte de Louis XIII du musée du Louvre (H. Champion, 1881, in-8°).

(2) Claude I, né en 1615, mort le 22 janvier 1678. De Launay eft un des fignataires de l'acte de décès retrouvé par Jal.

(3) 1687, in-4°. L'abbé Pierre Bizot, chanoine de Saint-Sauveur d'Hériffon, mourut en 1695, & fa collection fut vendue la même année. Jal a cité (art. Médailles) la lettre par laquelle Pontchartrain ordonnoit à un autre

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