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ARTICLE XXVIII.

Antoine Benoît (1), de Joigni en Bourgogne (2), étoit peintre de portraits. Il en fit deux pour fa réception à l'Académie (3). Il avoit un talent particulier pour faire des portraits en cire qu'il mouloit ordinairement fur le naturel; comme il avoit eu par ce moyen tous ceux des grands feigneurs, l'affemblage qu'il en fit a été longtems une des curiofités de Paris, annoncée fous le nom de

(1) L'attention a été attirée de nos jours fur Antoine Benoît par divers chercheurs, & tous les vifiteurs du château de Versailles ont remarqué le médaillon de Louis XIV placé près du lit royal. M. Eud. Soulié, qui l'a ainfi remis en lumière, a publié une brochure de 12 pages fur ce monument fi précieux (Versailles, 1856, in-8°). Déjà, dans un article de l'Illustration (22 mai 1852), Éd. Fournier avoit cité quelques paffages contemporains où étoient rappelés le nom & le talent de Benoît. M. E. Bellier de La Chavignerie (Moniteur des arts du 11 octobre 1862) & M. Staniflas Joffier (Bulletin de la Société des fciences hiftoriques de l'Tonne, 1862, 1er trimestre) ont donné divers documens d'état civil concernant Antoine Benoît, mais ils ont, comme Jal, ignoré fon fecond mariage.

(2) Son acte de baptême eft du 24 janvier 1632.

(3) Ceux de Louis-Gabriel Blanchard & de Jacques Buirette. Le fecond est conservé à l'École des beaux-arts, qui, faute de place, fans doute, renferme dans une falle obfcure, & d'ailleurs interdite au public, tant de précieux débris de l'ancienne Académie royale.

Cercle royal, d'où l'on le furnomma Benoît du Cercle (1). Flatté de ce fuccès, il joignit au cercle de la cour ceux des cours étrangères, & même celui de la Porte, qu'il n'avoit jamais vue; on y trouva néanmoins quelques têtes de génie qui ne convenoient pas mal. Les figures étoient en pied, habillées affez richement, felon la manière de chaque pays, parce que les perfonnes de qualité fe piquoient de lui faire présent de leurs plus beaux habits. M. Benoît s'enrichit à faire voir fes cercles aux foires. Sur les fins il les montroit chez lui gratis, mais personne n'y alloit.

Il fe remaria à quatre-vingt-quatre ans, quoiqu'il eût beaucoup d'enfans de fa première femme (2). Il mourut le 8 d'avril, âgé de quatre-vingt-fix ans, & eft enterré à SaintSulpice.

ARTICLE XXIX.

Anfelme Flamen, fculpteur & profeffeur de l'Académie, étoit de Saint-Omer (3). Il

(1) Il habitoit rue des Saints-Pères, vis-à-vis de la rue Taranne.

(2) Jal avoit retrouvé les actes de baptême de fix d'entre eux & n'étoit pas fûr d'avoir dénombré toute sa postérité.

(3) Il y étoit né le 2 janvier 1647.

avoit d'abord travaillé chez M. de Marfi (1), habile fculpteur, & il alla enfuite à Rome penfionnaire du Roi. A fon retour, M. de Marfi le trouva fi capable qu'il l'associa avec lui pour le groupe de Borée & d'Orythie qui est préfentement dans le jardin des Tuileries (2). Il fit pour fon morceau de réception à l'Académie un baf-relief qui représente faint Jérôme (3). Il a fait plufieurs figures de marbre pour Versailles & Marly qui font partie copiées d'après l'antique & partie de génie, comme la Diane qui tient des filets (4), très

(1) Dubois veut défigner Gafpard Marfy, né à Cambrai en 1624, mort à Paris le 10 décembre 1681. Son frère, Balthazar, né auffi à Cambrai en 1628, mourut à Paris le 26 mai 1674.

(2) Il y eft encore. Le catalogue de la fculpture moderne du Louvre (1856) dit par erreur, à propos de la réduction en bronze de ce groupe, que Gafpard Marfy fut aidé dans cette compofition par le fculpteur Duquesnoy. Le rédacteur de ce catalogue, M. Barbet de Jouy, avoit été certainement trompé par la reffemblance du nom de Flamen (qu'on écrivoit d'ordinaire au dix-feptième siècle Flamand) avec celui de François Flamand, dit le Quesnoy. (3) Son fort est inconnu.

(4) Cette figure étoit placée fur un piédestal rocaille au milieu d'un bassin de plomb. “Un arbre artistement taillé, dit Dezallier d'Argenville, lui fert de parafol & l'eau fort de deffous la plinthe pour former une nappe." (Voyage pittoresque des environs de Paris, édition de 1762, p. 156.) Vendue le 21 vendémiaire an V (12 octobre 1796) par un citoyen Audrianne à Alex. Lenoir, cette ftatue fut transportée par lui à la Malmaison pour la dé

belle figure qui eft à Marly. Il y en a auffi aux Invalides plufieurs qui font fort estimées (1). Il aimoit fi peu à parler qu'il forçoit les grands difcoureurs à être laconiques avec lui.

Il mourut le 15 de mai, âgé de foixante & dix ans, ayant laiffé un fils, auffi fculpteur & de l'Académie (2).

ARTICLE XXX.

Bon de Boullongne, l'aîné, peintre & ancien profeffeur de l'Académie, étoit né en 1649 (3). Ayant appris à deffiner de fon

coration du parc de l'impératrice Joféphine. En 1884, M. L. Courajod, à qui je dois ces particularités, l'a fait conduire à Verfailles, où elle a été placée dans le bofquet de la Reine. Au cours de ces diverfes pérégrinations, la Diane a eu la main droite brifée. Voyez le Bulletin de la Société des Antiquaires de France, 1877, p. 117, & le Journal d'Alex. Lenoir, publié par M. L. Courajod (tome I, 1878, nos 769 & 1062).

(1) Les anciens guides de Paris ne fignalent qu'un basrelief placé au-deffus de la porte de la chapelle SaintGrégoire & repréfentant un ange tenant la fainte Ampoule.

(2) Né à Paris le 13 feptembre 1630, Anfelme II Flamen y mourut le 9 juillet 1730. Le Louvre poffède de lui une jolie ftatuette de Plutus, qu'il préfenta pour fa réception à l'Académie le 9 feptembre 1708.

(3) Le 22 février, fur la paroiffe Saint-Gervais.

père, Louis de Boullongne, peintre & profeffeur de l'Académie, il fut envoyé à Rome penfionnaire de l'Académie de France. Après y avoir étudié cinq années, il passa en Lombardie, toujours penfionnaire du Roi, & y refta environ un an. Comme il avoit un beau génie & qu'il aimoit fon art, il voulut fe former le goût fur les plus grands maîtres, ce qui fit que, durant fon féjour en Italie, il s'attacha fort à copier le Corrège, les Carrache & Raphaël. De retour en France, il tarda peu à être de l'Académie; fon tableau de réception, qui repréfente le Combat d'Hercule avec les centaures, eft très beau (1). M. Le Brun le fit travailler au grand escalier de Versailles. Il fit après un Mai pour l'église de Notre-Dame dont le fujet eft la Pifcine, & ce tableau augmenta encore fa réputation (2). Il fut depuis toujours employé dans les travaux du Roi, ce qui ne l'empêcha pas de faire quelques morceaux particuliers, comme le beau plafond de la quatrième chambre des enquêtes, de même que le tableau du Mariage de la Vierge (3),

(1) Au Louvre.

(2) Offert par François de Villers & Laurent Pillard, gardes de l'orfèvrerie, en 1678, & gravé par Jean Langlois. Aujourd'hui dans les réferves du Louvre, ainfi que le Magnificat de Jouvenet. Voyez p. 189.

(3) Bon Boullongne avoit peint pour la même église la Préfentation au Temple.

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