la célebroit le premier Mai, jour auquel les principaux de la ville se rendoient à Ostie, où ils prenoient toutes fortes de divertissemens. Comme les folemnités où le plaisir domine, sont celles qu'on a le plus de peine à abolir, celle-ci dura long-temps, même sous les Empereurs Chrétiens. Nous avons vu qu'il y avoir des Fêtes propres à certains états, comme les Caprotines pour les Servantes, & d'autres pour les Valets; en voici encore du même genre. Les Marchands en avoient une, qu'ils célebroient au mois de Mai, en l'honneur de Mercure, le Dieu du Commerce. (1) Faft. (2) Faft. liv. 3. Les Matrales étoient la Fête des Matrones, en l'honneur de la Déesse Matuta, à laquelle on offroit des libations ruftiques, cuites dans des pots de terre : ce sont ces libations qu'Ovide (1) nomme Flava liba. Mais comme la grandeur veut se foutenir partout, même jusqu'au pied des Autels, les Dames liv. 6. Romaines qui excluoient toutes les Esclaves de cette Fête, en faisoient venir une seule qu'elles soufflettoient largement. Ces Matrones avoient encore une autre Fête nommée Matronalia, qu'elles célebroient en l'honneur du Dieu Mars, le premier du mois qui porte le nom de ce Dieu. Ovide (2) rapporte cinq raisons de l'institution de cette Fête. La premiere, en memoire de la paix faite entre les Sabins & les Romains, à laquelle les Sabines, femmes de ces derniers, eurent tant de part. La seconde, afin que Mars rendît ces Dames Romaines aussi heureuses, que Romulus son fils. La troisiéme, afin que la fécondité que le mois de Mars procure à la terre, leur fût accordée. La quatriéme, parce que c'étoit à pareil jour qu'on avoit dedié au mont Esquilin un Temple à Lucine, la Déesse des accouchemens. La cinquiéme, qui revient à la même, parce que Mars étoit fils de Junon, laquelle préside aux mariages. Les Paftres & les Bergers avoient aussi leur Fête ; c'étoit celle des Palilies, dediée à Palès leur Déesse. Ce jour - là le peuple avoit soin de se purifier avec des parfums, mêlés de sang de cheval, de cendres d'un veau qu'on faisoit brûler au (3) Les Vefmoment qu'on l'avoit tiré du ventre de sa mere (3), & de ti- tales avoient ges de féves. Les Bergers, dès le matin du jour de la Fête, seules le droit purifioient aussi leurs bercails & leurs troupeaux, avec de de brûler ce l'eau & du fouphre, & faifoient brûler l'herbe nommée Sabine, dont la fumée se repandoit dans tout le bercail. Après cela, ils sacrifioient à la Déesse, du lait, du vin cuit, & du millet; puis suivoit le festin. Le soir ils faifoient brûler de la paille ou du foin, & fautoient pardessus: Ovide décrit fort au long toute cette folemnité. Ces ceremonies étoient accompagnées d'instrumens, tels que des flûtes, des cymbales & des tambours, qui jouoient toute la journée. Enfin les jeunes gens & les Ecoliers avoient aussi leur Fê te, nommée Quinquatries, mot dont on peut voir l'étymologie dans Varron & dans Festus. Ce jour-là les Ecoliers faisoient des presens à leurs Maîtres : cette Fête tomboit le 14, avant les Kalendes d'Avril. Terminons cette Liste par quelques autres Fêtes moins ce lebres, sur lesquelles nous dirons peu de choses. Les Meditrinalles, étoient les jours qu'on goûtoit le vin nouveau. Les Romains avoient une Déesse Meditrinale, & c'étoit en fon honneur que la Fête étoit instituée.. Les Opalies, étoient la fête d'Ops, la même que Cybele. Anciennement on la célebroit le même jour que les Saturnales, mais Cefar, dans la reformation du Kalendrier, la remit à un autre temps. Les Quirinales, étoient la fête de Romulus, furnommé Quirinus. Elle étoit nommée la fête des fous, parce que ce jour-là ceux qui avoient oublié de célebrer les Fornacales, dont nous avons parlé, étoient obligés pour expier leur faute, de facrifier à Quirinus. Le Regifuge avoit été institué pour conserver le souvenir.de l'expulfion de Tarquin; & ce jour-là le Roi des Sacrificateurs (1)QQ.Rom. prenoit la fuite dès que le Sacrifice étoit offert. Plutarque (1) donne une autre origine à cette fête; mais Ovide (2) & Feftus (2) Faft. 2. sont en cela plus croyables que lui. 62. Comme la crainte des maux à venir avoit beaucoup de part dans le culte religieux des Payens, ils avoient établi des fêtes pour en être preservés: celle qu'on appelloit Robıgalia, du Dieu Robigus, qu'on croyoit garantir les bleds de la rouille, étoit de ce nombre. On la célébroit sur la fin d'Avril, & on offroit à cette Divinité une brebis & un chien, avec du vin & de l'encens. Le Septimontium étoit une fête établie à Rome lorsqu'on mit une septiéme montagne dans son enceinte. Cette fêté pendant laquelle on offroit sept sacrifices en differens lieux, tomboit au mois de Decembre; & les Empereurs faisoient ce jourlà des liberalités au peuple. Les Terminales étoient ainsi nommées selon Varron (1) parce (i Del.Lat. qu'elles se célebroient au dernier jour de Fevrier, qui termi- liv. s. noit l'année Romaine; ou plutôt, comme le pretend Denys d'Halicarnasse (2) parce qu'elles étoient inftituées par Numa en l'honneur du Dieu Terme, lorsque ce Prince établit qu'on mettroit des bornes aux champs, afin que chacun reconnût l'étenduë du sien. Cette fête étoit totalement champêtre, & il n'étoit pas permis d'y rien offrir, qui eût été animé, de peur d'ensanglanter les bornes, auprès desquelles on prefentoit des fruits au Dieu qui y présidoit, & on lui faifoit des libations de lait & de vin. Il faut cependant que dans la fuite du temps, on ait fait quelque changement là-dessus, puisque nous apprenons de Plutarque (3) que les Paysans s'assembloient (3)QQ.Rom ce jour-là auprès des bornes, & y immoloient une truye ou is. un agneau. Quoi qu'il en soit, il n'y avoit rien de plus facré parmi les Romains, que les bornes des champs; & ceux qui avoient l'audace de les changer, étoient devoués aux Furies, & il étoit permis de les tuer. (2) Liva z Les Tubilustres étoient une fête du mois d'Avril, instituée pour purifier les Trompettes: on facrifioit pour cela un agneau femelle. On faisoit aussi la même purification aux Vulcanales, fête célebrée le 10. avant les Kal. de Mai en l'honneur de Vulcain, le Dieu du feu; & c'est pour cela qu'on jettoit au jour de cette fête des animaux dans le feu. 7 Vertumne, Pomone, & un grand nombre d'autres Dieux ou demi-Dieux, avoient aussi leurs fêtes, sur lesquelles, com-me il n'y a rien de particulier à apprendre, je renvoye à Ovide, & à Rosin qui a donné un Kalendrier Romain avec tou-tes ses Fêtes & feries (4).. (4) Ant. Finissons cette Liste par les Vinales, qu'on célebroit deux Rom. liv. 14fois l'année, le 9. avant les Kalendes de Mai, & le 13. avant Pag. 239. celles de Septembre. Les premieres, établies felon Pline (5) (5) Liv.18 pour goûter le vin, n'avoient aucun rapport à la conservation ch.19 des vignes; les secondes étoient pour obtenir un temps favorable à la vendange. Telles étoient les Fêtes des Romains, marquées dans leur Kalendrier ; & si on en célebroit quelquefois d'extraordinaires, comme les jours destinés aux Supplications publiques, c'étoit le Magistrat qui les indiquoit dans des cas extraordinaires. CHAPITRE XIV. Des fupplications publiques, des Lectisternes, des Evocations & des Devouemens. L Es Supplications publiques se faisoient ou dans les occasions pressantes;comme, dans le temps de peste,ou de quelque maladie populaire; ou après quelque victoire inesperée; lorsque celui qui venoit d'être élu General, demandoit au Senat sa confirmation, & en même-temps la Supplication pour se rendre les Dieux favorables; & pour d'autres sujets encore. Ces Supplications étoient des jours solemnels, où il n'étoit pas permis de plaider pour quelque sujet que ce fût, & on les célebroit par des Sacrifices, des prieres, & des festins publics. Quelquefois le Senat bornoit à un jour la durée de cette fête, quelquefois on y en employoit plusieurs, & l'Histoire nous apprend qu'il y en a eu qui ont duré jusqu'à cinquante jours. On ne dit rien des Supplications particulieres, qui n'étoient autre chose que les prieres que chacun faisoit aux Dieux, ou pour obtenir la santé, une bonne récolte, &c. ou pour les remercier des biens qu'on en avoit reçus. Une seule formule des prieres des Payens, suffira pour en donner quelque idée : en (1) Gruter voici une, conservée dans une Inscription (1) que Camilla Amata fait à la Fiévre pour son fils malade. Divinæ Febri, Sanctæ Febri, magnæ Febri, Camilla Amata pro filio malè affecto P. Camilla Amata offre ses prieres pour son fils malade à la divine Fiévre, à la fainte Fiévre, à la grande Fiévre. 97.1. Letisternium Il y avoit une autre espece de Supplication publique, qu'on nommoit le Lectisterne (2). Cette ceremonie consistoit en un (2) Macrob. festin que l'on preparoit & que l'on donnoit dans un Tem Sat. 3. ple; & parce que selon la coutume de ces temps-là, on dreffoit des lits autour des tables, & que l'on plaçoit fur ces lits les statues des Dieux en l'honneur desquels la fête se célebroit, de même que les hommes s'y couchoient dans leurs repas, on l'appella Lectisterne (a). Les Epulons dont j'ai parlé dans l'article des Prêtres, présidoient à cette ceremonie, & en étoient les ordonnateurs. Valere Maxime (1) fait mention d'un (1) Liv. 2. Lectisterne célebré en l'honneur de Jupiter. Ce Dieu, c'est- ch. 1. à-dire, sa Statue, y étoit couchée sur un lit, pendant que celles de Junon & de Mercure étoient fur des sieges : Nam Jovis epulo ipfe in Lectulum, Juno & Mercurius in fellas ad cænam invitantur. (2) Liv. 5. Tite-Live, Ciceron, Lampridius & d'autres encore, parlent souvent de cette ceremonie, & le premier de ces Auteurs en rapporte l'institution à l'an de Rome 354. (2), à l'occasion de la peste qui ravageoit cette ville. Ce Lectisterne du- ch. 15. ra huit jours, & fut célebré en l'honneur d'Apollon, de Latone, de Diane, d'Hercule, de Mercure & de Neptune. Valere Maxime, à la verité, fait mention d'un autre plus ancien, puisque selon lui, il fut célebré sous le Consulat de Brutus, & de Valerius Poplicola, mais apparemment qu'il fut moins fo lemnel, ou que Tite-Live ne l'a pas connu. : (3) Od. r Jusqu'au temps de Cafaubon on avoit crû que le Lectisterne étoit d'institution Romaine, & qu'il n'étoit pas connu hors de l'Italie; mais ce sçavant Critique, examinant un endroit du Scholiafte de Pindare (3) & trouvant qu'il y étoit parlé de ces oreillers qu'on mettoit sous les statues des Dieux, en a des Olymp. conclu avec raison que le Lectisterne étoit en usage dans la Grece. Les Auteurs font venus au secours de cette découverte, & c'est une verité qui n'est plus aujourd'hui conteftée. En effet, Paufanias parle en plusieurs endroits de ces fortes de couffins, & rapporte dans son voyage d'Arcadie, qu'on en mettoit fous les statues de la Paix; & dans celui de la Phocide, il parle de ceux fur lesquels on plaçoit celles d'Esculape. Valere Maxime (4) en dit autant des statues d'Harmodius, & d'Ariftogiton. « Les slatues de ces deux Heros, dit-il, qui ch. 10. • avoient tant travaillé à délivrer Athenes de la tyrannie qui (a) Ce mot est composé de ceux de lit, lectus, & de sternere, dreffer, preparer. (4) Liv. 2. |