cause que les fix autres avoient été brûlés par celle qui les lui presentoit. Avant que de finir cet article je crois qu'il est à propos d'inserer ici quelques-unes des prédictions des Sibylles : on jugera par-là, quel cas on doit faire du Recueil qui les contient: jeme servirai de la traduction Latine. Voici comme parle du Déluge celle de Perse, qui se dit fille de Noé: Siquidem cum dilueretur Ejus ego nurus , ejus item de sanguine nata. O avi sexti stirps prima, ó gaudia magna! mortis Effugi, jastata meo cum conjuge multùm , &c. Mais comme cette Sibylle n'est pas bien sûre de ce qu'elle dit d'elle-même, ou plûtôt comme le fourbe qui la fait parler s'est oublié lui-même en cet endroit, elle assure dans un autre endroit , qu'elle avoit essuié l'avanture des filles de Lot; & dans un autre encore, elle se dit Chrétienne: Nos igitur fancta Christi de stirpe creati comme si veritablement il y avoit eu des Chrétiens du temps de Noé ou de Lot. Celle qu'on appelloit la Libyenne parle de la naissance miraculeuse de Jelus-Christ,& de ses miracles en ces termes : Virgo hunc fancta dabit terris , gremioque fovebit. Ille quidem morbis pressos Sanabit , & omnes. Hoc opus ; Ne croiroit-on pas entendre parler Isaïe & les Evangelistes? hoc memori femper qui corde reponet fine contactu maris, &c. Quod fuerim Phæbo grata , ferens pretium. E cælo veniens mortales induit artus, On trouve parmi les prédictions de la Sibylle Erythrée, des vers Acrostiches, qui commencent chacun par des lettres qui forment ces mors , Jesus Christus, Dei Filius, Salvator. (1) De Civ. Ñoici ce qu'en dit faint Augustin (1), « La Sibylle Erythrée a prophétité d'une maniere bien claire touchant Jesus-Christ : j'en avois déja vû une traduction, mais elle étoit très - infidele, lorsque Flavianus, Proconsul, homme très-sçavant, me montra l'original grec , où étoit cette prédiction en » vers Acrostiches, dont chacun commençoit par une des » Lettres qui composent ces quatre mots Ino85 Xpisós, iš La Sibylle de Samos , après avoir parlé de Dieu d'une maniere également sublime & orthodoxe, dit qu'il n'y a que lui qui merite d'être honoré. Principium, finem, media omnia novit: ab ipsa Dci. l. 18. ao vios, o tipo Illum igitur folum existentem colite opificem mundi , Qui folus è sæculo, & in fæculum fuit , est que futurus. Celle de Cumes en Ionie, parle de la Resurrection de JesusChrist, de la fin du monde & du feu qui doit le consumer; puis elle prédit la destruction de l'Empire d'Alexandre , sur les ruines duquel devoit être formée la puissance des Romains. L'Hellespontine annonce fous Jesus - Christ un siécle aulli heureux que le siécle d'or tant chanté par les Poëtes, & parle de l'Eclipse qui devoit arriver à sa mort. La Phrygienne prédit l'Annonciation, & la naissance de Jesus-Christ, conçu miraculeusement dans le sein d'une Vierge, fa Mort , sa Passion & fa Resurrection; & comme si elle avoit copié les Evangelistes, elle annonce qu'il fera voir ses pieds & les mains à ses Apôtres: Tum Dominus linquet manes , lucemque reviset, Oftendet, &c. A ces prédi&tions si claires & fi nettes, elle en joint d'autres sur les Idolâtres, qu'elle menace de la colere de Dieu, s'ils n'abandonnent le culte des Idoles. Elle voit le Jugement dernier , & Jesus-Christ sur un Trône, qui vient juger tous les hommes. Elle n'oublie pas même les lignes qui doivent préceder ce dernier jour , ni la trompette qui se fera entendre aux quatre coins du monde. Enfin, celle de Tibur, ou Tivoli , parle aussi de la naissance de Jesus-Christ à Bethléem ; mais si celle de Cumes n'a prédit aux Romains que des prosperités, celle-ci menace Rome des plus grands malheurs ; & après avoir fait un portrait odieux de cette Ville , elle annonce la ruine prochaine. Nunc Deus æternus disperdet teque tuosque ; Nec super ulla tui in terra monumenta manebunt. L'Auteur de cette Collection , au lieu d'inserer tant de prédictions, que Dieu ne revela jamais à des filles Payennes, Tome I. Y Y. auroit bien mieux caché ses fourberies, s'il y avoit mis plu- de quelle maniere on les appliquoit aux évenemens. a Philippe, (1) Ia Ach. dit cet Auteur (1), ayant voulu donner bataille à Flaminius, évacueroit toutes les places qu'il occupoit dans la Grece; qu’un vain nom, puisqu'au fond il devint l'esclave des Ro» mains. Ainsi l'on vit arriver ce que la Sibylle , sans doute inspirée d'en haut, avoit prédit long-temps auparavant, » que l'Empire de Macedoine après être parvenu à un » haut point de gloire sous Philippe fils d’Amyntas , tomo beroit en décadence & en ruine sous un autre Philip» pe; car l'Oracle qu'elle rendit étoit conçu en ces termes : Macedoniens , qui vous vantez d'obeir à des Rois ilus des an- des peuples fortis de l'Occident & de l'Orient , vous perdra sans Macedoine fut renversé, étoient au couchant de l'Europe, Mysiens qui étoient à l'Orient. pas difficile de juger sur cet exemple, & sur plusieurs Les Sibylles avoient prédit encore plusieurs autres renversemens d’Empires , des tremblemens de terre, & d'autres , que les Payens croyoient être arrivés conformement à leurs prédictions, comme je l'ai déja dit. Apparemment qu'elles avoient parlé en particulier de ce grand tremblement de terre qui" ébranla l'Ille de Rhodes jusques dans malheurs, que ز ses fondemens , puisque l’Auteur que je viens de citer dit à ARTICLE V. qu'on doit penser de la longue vie qu'on leur attribuoit. être revelé aux hommes : il rapporte tous les passages de l'Ecriture Sainte, où il en est fait mention , & recherche avec soin dans quel sens on peut dire que le Demon peut le connoître & le reveler. Je n'ai pas dessein de le suivre dans des discussions qui me meneroient trop loin. Il faudroit avant toutes choses, prouver que les Sibylles ont fait de veritables prédictions , & établir qui les leur avoit revelées ; & l'un & l'autre de ces deux articles souffre de grandes difficultés. Rappellons ce que nous avons dit des Oracles, & appliquons-le aux Sibylles. Les Oracles étoient quelquefois rendus de vive voix, comme ceux de la Pythie de Delphes ; la Sibylle de Cumes en Italie, rendoit quelquefois les siens de la même maniere, puisqu'Helenus dit à Enée, en lui conseillant de la consulter quand il seroit arrivé en Italie, de la prier de ne point écrire ses prédictions sur des feuilles d'arbres, comme elle faisoit ordinairement ; mais de les lui apprendre d'une autre maniere ; ce qu’Enée execute à la lettre , lorsqu'il ya la consulter: Foliis tantüm ne carmina manda , (2) Æn. L. 6 La Pythie après avoir demeuré quelque temps sur le Trepied, entroit en fureur, & dans le transport qui l'agitoit elle rendoit ses Oracles ; la Sibylle étoit faisie de la même fureur , lorfquelle débitoit ses prédictions. Sed pectus anhelum ; |